N° 415
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 1996-1997
Rattaché pour ordre au procès-verbal de la séance du 26
juin 1997
Enregistré à la Présidence du Sénat le 12 septembre
1997
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des Lois constitutionnelles, de législation, du suffrage universel, du Règlement et d'administration générale (1) sur le projet de loi organique relatif à l'exercice par les citoyens de l'Union européenne résidant en France , autres que les ressortissants français, du droit de vote et d' éligibilité aux élections municipales et portant transposition de la directive 94/80/CE du 19 décembre 1994,
Par M. Pierre FAUCHON,
Sénateur.
(1) Cette commission est composée de :
MM.
Jacques Larché,
président
;
René-Georges Laurin, Germain Authié, Pierre Fauchon, Charles
Jolibois, Robert Pagès,
vice-présidents
; Michel Rufin,
Jacques Mahéas, Jean-Jacques Hyest, Paul Masson,
secrétaires
; Guy Allouche, Jean-Paul Amoudry, Robert
Badinter, José Balarello, François Blaizot, André Bohl,
Christian Bonnet, Philippe de Bourgoing, Charles Ceccaldi-Raynaud, Michel
Charzat, Raymond Courrière, Jean-Patrick Courtois, Charles de Cuttoli,
Luc Dejoie, Jean-Paul Delevoye, Christian Demuynck, Michel Dreyfus-Schmidt,
Michel Duffour, Patrice Gélard, Jean-Marie Girault, Paul Girod, Daniel
Hoeffel, Lucien Lanier, Guy Lèguevaques, Daniel Millaud
,
Georges
Othily, Jean-Claude Peyronnet, Louis-Ferdinand de Rocca Serra, Jean-Pierre
Schosteck, Alex Türk, Maurice Ulrich, Robert-Paul Vigouroux.
Voir le numéro
:
Sénat
:
381
(1996-1997).
Elections et référendums.
LES CONCLUSIONS DE LA COMMISSION DES LOIS
Réunie le vendredi 12 septembre 1997, sous la
présidence de M. Jacques Larché, Président, votre
commission des Lois a examiné, sur le rapport de M. Pierre Fauchon,
le projet de loi organique n° 381 (1996-1997) relatif à l'exercice
par les citoyens de l'Union européenne résidant en France, autres
que les ressortissants français, du droit de vote et
d'éligibilité aux élections municipales et portant
transposition de la directive 94/80/CE du 19 décembre 1994.
Ce projet de loi organique présenté par l'actuel Premier ministre
reprend exactement celui présenté en août 1995, qui n'avait
pas été inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée
nationale.
Ce texte a pour objet de permettre la mise en oeuvre de l'article 8 B
paragraphe I du Traité de Maastricht, qui stipule :
"
Tout citoyen de l'Union résidant dans un Etat membre dont il
n'est pas ressortissant a le droit de vote et d'éligibilité aux
élections municipales dans l'Etat membre où il réside,
dans les mêmes conditions que les ressortissants de cet Etat. Ce droit
sera exercé sous réserve des modalités à
arrêter, avant le 31 décembre 1994, par le conseil, statuant
à l'unanimité sur proposition de la commission et après
consultation du Parlement européen ; ces modalités peuvent
prévoir des dispositions dérogatoires lorsque des
problèmes spécifiques à un Etat membre le
justifient
".
Pour pouvoir ratifier cette stipulation du Traité, la France a introduit
dans sa Constitution, lors de la révision constitutionnelle du 25 juin
1992, un article 88-3 issu, pour l'essentiel, de la rédaction
proposée à l'époque par le Sénat :
"
Sous réserve de réciprocité et selon les
modalités prévues par le Traité sur l'Union
européenne signé le 7 février 1992, le droit de vote et
d'éligibilité aux élections municipales peut être
accordé aux seuls citoyens de l'Union résidant en France. Ces
citoyens ne peuvent exercer les fonctions de maire ou d'adjoint ni participer
à la désignation des électeurs sénatoriaux et
à l'élection des sénateurs. Une loi organique votée
dans les mêmes termes par les deux assemblées détermine les
conditions d'application du présent article
".
Comme le stipulait le Traité, le Conseil a adopté à
l'unanimité une directive le 19 décembre 1994
"
fixant les modalités d'exercice du droit de vote et
d'éligibilité aux élections municipales pour les citoyens
de l'Union résidant dans un Etat membre dont ils n'ont pas la
nationalité
".
Le projet de loi organique assure la transposition de cette directive
de
manière à permettre l'exercice effectif du droit de vote et
d'éligibilité aux municipales par les ressortissants
communautaires résidant en France.
Bien entendu,
ces droits ne seront ouverts qu'aux seuls ressortissants
communautaires et non aux étrangers ressortissants d'un pays ne faisant
pas partie de l'Union européenne.
En raison de l'incidence directe des élections municipales sur
l'élection des sénateurs, le Constituant a décidé
en 1992 que l'ensemble de la loi organique devrait être voté dans
les mêmes termes par les deux assemblées. Cette loi organique ne
pourrait donc pas, le cas échéant, être adoptée par
la procédure dite " du dernier mot à l'Assemblée
nationale ".
·
Les dispositions essentielles du projet de loi organique
1.
L'ouverture du droit de vote aux municipales, dans les mêmes
conditions que les nationaux, aux ressortissants communautaires résidant
en France, pourvu qu'ils s'inscrivent sur une liste électorale
complémentaire, analogue à celle créée en 1994 pour
les élections européennes.
2.
L'ouverture du droit d'éligibilité comme conseiller
municipal, les conseillers municipaux étrangers ne pouvant pas
être maire ou adjoint, ni en exercer les fonctions, même
temporairement (par délégation, par exemple).
3.
Les conseillers municipaux étrangers ne pourront ni être
membres du collège électoral des sénateurs, ni participer
à l'élection des délégués de la commune
à ce collège.
·
Les principales modifications adoptées par la commission des
Lois du Sénat
1.
Comme elle l'avait fait pour la loi du 5 février 1994, la
commission des Lois propose de préciser dans la loi organique que le
ressortissant communautaire ne sera considéré comme
résidant en France que s'il y a son domicile réel ou si sa
résidence y présente un caractère continu, ce qui
évite le vote des ressortissants qui n'auraient en France qu'une simple
résidence secondaire.
2.
Pour assurer le respect de la clause de réciprocité
prévue par l'article 88-3 de la Constitution, le droit de vote et
d'éligibilité ne serait ouvert qu'aux ressortissants
communautaires dont l'Etat d'origine accorde un droit équivalent aux
Français résidant sur son territoire, selon sa législation
nationale propre (la Belgique et la Grèce n'ayant pas encore
transposé la directive).
3.
La commission a supprimé les dispositions tendant à
interdire le " double vote " (en France et dans l'Etat
d'origine)
notamment parce que les autres Etats n'ont pas imposé une telle
interdiction aux Français qui y résident.
4.
En revanche
,
le " double mandat " serait
interdit :
le ressortissant cumulant un mandat de conseiller municipal en France et dans
son Etat d'origine devra opter pour l'un ou l'autre et, à défaut,
sera déclaré démissionnaire d'office du conseil municipal
français.
5.
La commission a supprimé l'article 9 (dissolution de plein
droit d'un conseil municipal ne comportant pas au moins deux conseillers
français), estimant que cette situation, au demeurant très peu
probable, pourra être réglée par les dispositions actuelles
(dissolution par décret en raison d'un dysfonctionnement
irrémédiable du conseil municipal).
6.
A la suite des observations de M. Maurice Ulrich et de M. Lucien
Lanier, la commission a prévu que les ressortissants communautaires
élus membres du Conseil de Paris ne pourront pas siéger à
ce Conseil lorsqu'il se réunit comme conseil général. En
effet, le Conseil de Paris est à la fois le conseil municipal de la
commune de Paris et le conseil général du département de
Paris.
7.
La loi organique ne serait pas rendue applicable aux TOM qui, selon
le traité de Rome, ont un statut de territoires associés mais ne
sont pas soumis à l'ensemble des dispositions du Traité de Rome.