Article 12

Ressources de Réseau ferré national

Commentaire : le présent article énumère les différentes sources de financement de Réseau ferré national

Au cours de ses premières années d'existence, Réseau ferré national sera très étroitement dépendant des subventions de l'Etat. Cependant, son objectif doit être de vivre des recettes procurées par son domaine ; à l'instar des sociétés d'autoroutes qui cherchent à équilibrer leur budget sans recourir à des subventions. Cette ambition n'est réalisable qu'à long terme pour RFN et doit tenir compte de ses missions de service public qui exigeront toujours une aide à la collectivité. Mais il n'y a pas de fatalité du déficit des infrastructures.

Le présent article distingue deux types de ressources : les ressources propres, les ressources d'emprunt.

I - LES RESSOURCES PROPRES DE RFN

Le présent article permet d'esquisser la partie recettes du futur compte de résultat de RFN, et d'envisager une aide en capital de la collectivité pour les investissements.

Quatre types de ressources propres sont distinguées : les redevances de réseau, les autres produits tirés de ses biens, les concours de l'Etat, les autres concours, dont ceux des collectivités locales.

A - LES REDEVANCES D'UTILISATION DU RÉSEAU

Les redevances d'utilisation du réseau ferré national doivent être la principale ressource d'exploitation de RFN. Il s'agit des péages qui doivent être acquittés par les utilisateurs du réseau.

Dans un premier temps, RFN aura un client unique : la SNCF, détenteur du monopole du transport ferroviaire en France sur le réseau ferré national.

Cependant les articles 5 et 6 du décret 95-666 du 9 mai 1995 consacrent un droit de transit et un droit d'accès pour les transports combinés internationaux de marchandises, conférés aux compagnies ferroviaires des Etats membres de l'Union européenne.

Le présent article prévoit plusieurs redevances, car les tarifs seront modulés en fonction de la nature des lignes concernées, de leur fréquentation et des types de convoi les utilisant.

Le mode de calcul de ces redevances est évidemment capital. Le montant du péage de la SNCF ne doit pas être trop élevé. Mais, il convient également de ne pas brader l'utilisation du réseau ferré national vis-à-vis des compagnies étrangères.

Le sixième alinéa du présent article énumère quatre paramètres généraux ne permettant guère de se faire une idée du mode de calcul effectif, lequel est renvoyé à un décret au Conseil d'Etat pour ses règles de détermination. Or, ces règles sont déjà énoncées par le décret 95-666 du 9 mai 1995 (article 24), qui renvoie à un arrêté pour la définition des modalités de calcul et de paiement.

Ces paramètres sont les suivants :

- le coût de l'infrastructure,

- la situation du marché des transports et des caractéristiques de l'offre et de la demande,

- les impératifs de l'utilisation optimale du réseau ferré national,

- l'harmonisation des conditions de concurrence intermodale.

Les trois derniers paramètres sont directement repris du 1. de l'article 24 du décret précité ; lequel prévoit de tenir compte par ailleurs d'une tarification au sillon (2. et 3. du même article), en fonction des besoins des entreprises étrangères.

Le premier paramètre est nouveau : il s'agit de tenir compte dans le péage des coûts de construction et d'entretien de l'infrastructure.

Aucun de ces paramètres n'est réellement proche de ceux qui sont définis par la directive 91-440 qui, dans son article 8, en énonce cinq autres :

- le kilométrage,

- la composition du train,

- la vitesse,

- la charge de l'essieu,

- le niveau ou la période de l'utilisation de l'infrastructure.

Le même article 8 dispose que cette tarification ne peut créer de discrimination entre les entreprises.

A l'instar des péages autoroutiers, le mode de calcul retenu devra être un calibrage permettant d'obtenir un équilibre entre plusieurs contraintes.

Ces contraintes sont de deux ordres : il est nécessaire que le péage permette de couvrir le coût de construction, d'entretien et l'amortissement des emprunts contractés dans ce but ; le péage doit également se situer à un niveau d'équilibre entre l'offre faite par RFN et la demande de la SNCF en fonction de la demande de transport qui lui est adressée et de ses possibilités financières.

A cet égard, on ne voit pas très bien pourquoi il serait imposé à RFN de tenir compte de l'harmonisation des conditions de concurrence intermodale, alors que ce n'est le cas ni pour les sociétés d'autoroutes, ni pour les aéroports.

Actuellement, le péage acquitté par le compte du transporteur de la SNCF au compte d'infrastructure s'élève à 5,6 milliards de francs, dont 5,2 milliards à la charge directe de la SNCF.

Pour 1996 et 1997, il devrait être limité à 5,85 et 6 milliards de francs.

B. LES AUTRES PRODUITS

Les autres produits perçus par RFN peuvent être de deux natures :

•  les produits accessoires à l'utilisation de l'infrastructure, tels que les publicités commerciales (notamment sur les quais),

•  les produits des bâtiments et terrains non affectés à l'infrastructure ferroviaire (notamment les locations).

L'ensemble peut avoisiner 1 milliard de francs.

C. LES CONCOURS DE L'ETAT

Les concours de l'Etat perçus par RFN seront de deux sortes : des concours d'exploitation et des concours en capital.

S'agissant des concours d'exploitation, RFN percevra la contribution aux charges d'infrastructure actuellement versée à la SNCF. Cette contribution est d'ailleurs la seule des six prévues par l'article 28 du cahier des charges de la SNCF [32] qui sera transférée de la SNCF à RFN. En 1997, elle s'élèvera à 11,8 milliards de francs.

S'agissant des concours en capital, RFN pourra recevoir des dotations en capital, en vue de financer ses investissements et l'amortissement de sa dette. 8 milliards de francs à ce titre sont prévus pour 1997.

D. LES AUTRES CONCOURS DONT CEUX DES COLLECTIVITÉS LOCALES

RFN pourra percevoir d'autres concours. Pour l'essentiel, il ne s'agira pas de concours d'exploitation (entretien, maintenance du réseau), mais des concours d'investissement (construction de lignes, électrification), qui seront le fait de collectivités publiques.

Ainsi, la construction du TGV-Est doit faire appel notamment à une contribution du Grand-Duché du Luxembourg et de l'Union européenne. Ces contributions seront versées à RFN.

Pour l'essentiel, les autres concours viendront des collectivités locales françaises.

Il convient, sur ce point, de bien distinguer deux éléments :

•  en principe, la contribution de fonctionnement aux services régionaux de voyageurs doit rester intégralement prise en charge par l'Etat et sera versée à la SNCF via les régions ;

•  les collectivités locales pourront donc être amenées à verser des concours en capital à RFN pour des investissements d'intérêt local. Ainsi, l'électrification de la ligne Mantes-Caen-Cherbourg, qui a coûté 3,1 milliards de francs a été prise en charge pour 38 % par les collectivités locales. Ce type de contribution sera désormais versé à RFN.

D'une manière générale, les investissements ferroviaires futurs étant relativement lourds et peu rentables, il faut s'attendre à ce que les collectivités publiques y prennent une part croissante. Si tel n'était pas le cas, l'endettement de RFN deviendrait rapidement catastrophique et on se retrouverait avec le nouvel établissement devant le problème qu'on tente aujourd'hui de résoudre pour la SNCF.

II. LES RESSOURCES D'EMPRUNT DE RFN

Le septième alinéa du présent article prévoit d'accorder à RFN la possibilité d'émettre des emprunts dans le public, comme c'est le cas de la SNCF aujourd'hui, pour gérer sa dette et financer ses investissements.

RFN pourra émettre des titres de créance, c'est-à-dire des titres remboursables, ne donnant pas accès directement ou indirectement à son capital. Son statut d'EPIC de l'Etat, qui suppose une propriété de l'Etat à 100 %, lui interdirait d'émettre des titres de capital.

Les titres visés par le présent alinéa sont essentiellement les obligations (relevant de la loi n° 66-537 du 24 juillet 1966) et les billets de trésorerie (loi n° 91-716 du 26 juillet 1991 et décret n°92-137 du 13 février 1992). Mais RFN pourra, comme tout EPIC, émettre des titres participatifs (article 4 de la loi n° 85-695 du 11 juillet 1985), qui sont des titres de créance assortis d'une rémunération dépendant des performances économiques de l'émetteur et d'une clause de remboursement au gré de l'émetteur (quasi-fonds propres).

Le présent article prévoit que RFN pourra émettre ces titres dès sa création, car le droit commun des obligations (article 285 de la loi de 1966) comme des billets de trésorerie (article 2 du décret de 1992) prévoit que l'émetteur doit avoir une existence d'au moins deux ans et des comptes certifiés depuis deux ans.

RFN pourra emprunter en faisant appel public à l'épargne, ce qui l'autorisera d'emblée, sous réserve d'obtenir un visa de la Commission des opérations de bourse, à émettre des obligations cotées, à recourir à des établissements de crédit ou entreprises d'investissement pour placer ses émissions, et à recourir à la publicité ou au démarchage.

L'ensemble de ce dispositif, conjugué avec la garantie implicite indéfinie et inconditionnelle de l'Etat, du fait de son statut d'EPIC, est de nature à donner à RFN une grande capacité d'emprunt, à des conditions de taux d'intérêt très voisines de celles de la SNCF .

Il est assez probable que les agences de notation lui accorderont leur note la plus élevée, et qu'il pourra facilement lever des capitaux à des taux d'intérêt proches de ceux des émissions de l'Etat.

Décision de la commission : Votre commission vous propose d'adopter le présent article sous réserve d'un amendement tendant à ne pas obliger RFN à tenir compte des conditions de la concurrence intermodale dans la tarification, et d'un amendement de précision.

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