B. LES PERSPECTIVES D'ÉVOLUTION
Le contrat de plan adopté en octobre 1994 fixe les orientations stratégiques de la Poste, ses missions, ainsi que les règles des relations financières entre l'État et l'exploitant pour la période 1995-1997.
Le contrat de plan 1995-1997 entre l'État et La Poste
Adopté le 14 octobre 1994 par le Conseil d'administration de La Poste, le contrat de plan fixe les relations entre l'État et La Poste pour les années 1995-1997.
Il définit les missions et orientations stratégiques de La Poste :
•
l'obligation d'équilibrer
les comptes (en 1993, La Poste a enregistré un déficit de 1,2
milliard de francs ; en 1994, l'exercice s'est terminé par un
bénéfice net de 195 millions de francs)
• l'alignement de l'augmentation des tarifs des produits
sous monopole sur l'évolution des prix à la consommation,
• une amélioration substantielle de la
qualité du service (par exemple en 1997, 80 % du courrier
métropolitain devra être remis à son destinataire en "J+l"
et le taux de satisfaction du public pour l'accueil dans les bureaux de poste
devra augmenter de 6 %),
• une politique d'investissements chiffrée
à 9 milliards de francs sur la période,
• la poursuite de la réforme de la classification
des fonctions des agents,
• la conclusion de partenariats avec les
collectivités locales dans le cadre de la mission d'aménagement
du territoire de la Poste,
ï la possibilité d'organiser un véritable service de messagerie rapide,
ï le renforcement des activités financières avec notamment une augmentation de la collecte et un développement dans le secteur des produits d'assurance.
Les relations financières entre l'État et La Poste sont également précisées (au delà des dispositions prévues par la loi du 2 juillet 1990) :
•
l'État s'engage à
verser chaque année
1,9 milliard de francs au titre de l'aide au
transport de la presse ;
en échange La Poste devra
dégager un gain annuel de productivité de 1,5 % dans la
distribution des journaux ;
• le taux de rémunération des fonds des
livrets A et B remis à la Caisse des dépôts et
consignations est
maintenu à 1,5
% ;
•
les avoirs des comptes
chèques postaux, qui sont mis à la disposition du Trésor,
voient leur rémunération passer de 5,5 % actuellement à un
taux égal à celui des bons du Trésor à
treize semaines, diminué d'une commission de 0,4 % avec un plancher de
4,75 % et un plafond de 6,5 %.
1. La participation de la Poste à l'aménagement du territoire
Le contrat de plan a réaffirmé l'une des dimensions essentielles des activités de la Poste, sa présence sur le territoire et notamment dans le monde rural. ;
Le Président de la Poste a annoncé le 21 juin 1995 qu'aucune fermeture de bureau de poste n'interviendrait en zone rurale jusqu'à la fin du contrat de plan, soit jusqu'en 1997.
Votre rapporteur s'était déjà félicité de cette décision l'année dernière. Il rappelle en effet que le Sénat a souvent souligné l'indispensable maintien de la présence postale en milieu rural, comme il a également récemment insisté sur le rôle de la Poste dans le cadre de la politique de la ville.
Sur les 17.000 points de vente actuels de la Poste, un peu plus de 10.000 sont implantés en milieu rural (communes de moins de 2.000 habitants). On notera que plus de 75 % de l'activité de ces bureaux de poste est liée aux services financiers.
Ce rôle particulier de la Poste constitue un handicap pour l'exploitant. Il justifie notamment l'abattement dont il bénéficie de 85 % sur les bases d'imposition de la taxe professionnelle. Le coût de cet abattement est chiffré à 1,2 milliard de francs.
Or, la Poste évalue à 3 milliards de francs le surcoût résultant de sa présence postale en milieu rural.
Pour clarifier cette situation, le Parlement devrait prochainement disposer d'un rapport. En effet, l'article 21 de la loi du 2 juillet 1990 a prévu qu'un rapport sur les contraintes de desserte de l'ensemble du territoire et de participation à l'aménagement du territoire qui s'imposent à la Poste serait remis au Parlement avant le 31 décembre 1996.
2. Le poids des charges de pensions
Conformément à l'article 30 de la loi du 2 juillet 1990, l'État est responsable du versement des pensions des agents fonctionnaires de la Poste.
En contrepartie, la Poste doit verser annuellement au Trésor public le montant de la retenue effectuée sur le traitement des agents au titre des pensions, ainsi qu'une contribution complémentaire permettant d'assurer la prise en charge intégrale du montant des dépenses de pensions.
En outre, la Poste apporte une contribution au financement de la compensation et de la surcompensation pour les retraités appartenant à d'autres régimes du secteur public.
Le tableau ci-après retrace l'ensemble de ces charges depuis 1991 et donne une estimation de ces mêmes charges pour l'année 2000.
(en millions de francs
1991 |
1992 |
1993 |
1994 |
1995 |
1996 |
2000 |
|
Remboursement à l'État des charges de pensions |
|||||||
9.759 |
10.307 |
11.293 |
11.274 |
12.581 |
13.032 |
15.189 |
|
dont :
|
2.029 |
2.105 |
2.196 |
2.228 |
2.329 |
2.393 |
2.450 |
|
7.730 |
8.202 |
9.097 |
9.046 |
10.252 |
10.639 |
12.739 |
Compensation et surcompensation |
1.856 |
2.187 |
2.821 |
1.433 |
2.118 |
2.422 |
2.422 |
Total des charges de pensions |
11.615 |
12.494 |
14.114 |
12.707 |
14.699 |
15.454 |
17.611 |
L'analyse de ce tableau montre la nécessaire et forte progression de la contribution complémentaire de la Poste pour permettre l'équilibre du régime.
Actuellement, la contribution versée à l'État par la Poste augmente de 1,5 point par an, ce qui absorbe complètement les marges de manoeuvre que la Poste peut obtenir par des gains de productivité.
Aussi, apparaît-il souhaitable qu'une réforme de ce système de prise en charge par la Poste des dépenses de retraite de ses agents soit mise à l'étude.
Cela semble d'autant plus nécessaire qu'une plus grande ouverture à la concurrence des activités de la Poste est prévisible.
3. La libéralisation des services postaux
Après la publication du Livre vert postal en 1992, le Conseil des ministres européens a, dans une résolution du 7 février 1994, identifié les objectifs d'une politique communautaire dans ce domaine et invité la Commission à préparer les mesures pour la réalisation de ces objectifs. La Commission a présenté, le 26 juillet 1995, une proposition de directive du Parlement européen et du Conseil concernant des règles communes pour le développement des services postaux communautaires et l'amélioration de la qualité du service et un projet de communication sur l'application des règles de la concurrence au secteur postal et notamment sur l'évaluation de certaines aides d'État relatives aux services postaux.
La poursuite des négociations au cours du premier semestre 1996 a permis le rapprochement des points de vue sur la majeure partie des points de la directive. Cependant, la persistance de désaccords sur le périmètre des services qui pourront être réservés afin de garantir la viabilité du service universel, et sur le calendrier de révision de la directive n'ont pas permis l'adoption d'une position commune lors du Conseil des ministres du 27 juin 1996.
Le gouvernement français a particulièrement veillé à ce que la directive définisse un service universel de qualité "harmonisé vers le haut", correspondant au service public postal en France, et dont la viabilité financière pourra être garantie par un périmètre de services réservés suffisant. À cet égard, le gouvernement a approuvé les critères, proposés par la Commission, de poids et de prix (350 grammes et cinq fois le tarif de base) s'appliquant aux envois de correspondance, pour délimiter les services réservés.
En revanche, le gouvernement français s'est fermement opposé à l'établissement d'un calendrier de libéralisation pour le courrier transfrontalier entrant et le publipostage.
Votre rapporteur rappelle que, dès l'automne 1995, le Sénat s'est inquiété des dispositions contenues dans la proposition de directive et qu'il a adopté une résolution très ferme sur le sujet. L'Assemblée nationale a, de son côté, adopté les mêmes positions.
C'est pourquoi votre rapporteur se félicite de la fermeté du gouvernement français dans les dernières négociations. Le Président de la République lui-même est intervenu au début du mois d'octobre pour rappeler l'opposition de la France au projet de directive sur une libéralisation complète des services postaux.