C LES NOUVEAUX FONDS

Deux nouveaux fonds sont créés

1. Le Fonds d'aide à la diffusion de la presse hebdomadaire régionale d'information générale et politique

La création d'un fonds d'aide à la presse hebdomadaire régionale, doté de 5 millions de francs (chapitre 43-03, article 50), relève du souci des pouvoirs publics de soutenir la presse d'information politique et générale.

Ce fonds fonctionnera sur la base d'une répartition des crédits entre les différents bénéficiaires, selon des modalités et des critères d'accès qui ne sont pas encore déterminés.

2. Le Fonds d'aide à l'investissement dans le multimédia

Le plan d'aide à la presse mis en oeuvre par le Gouvernement, prévoit la mise en place d'un fonds spécifique, doté de 20 millions de francs, destiné à alléger de 3 % la charge des emprunts contractés par la presse auprès du réseau bancaire, en vue de réaliser des investissements dans les services et les nouvelles technologies multimédia.

Le financement de cette mesure pourrait provenir d'un transfert de 20 millions de francs, non utilisés à ce jour par la SOFARIS. Cette aide nouvelle ne se traduit donc pas par l'inscription d'une mesure nouvelle en projet de loi de finances pour 1996. La gestion de cette aide serait confiée à un établissement financier qui disposera à cet effet de crédits redéployés.

Donneraient lieu à un allégement les projets spécifiques de développement multimédia au titre des investissements matériels (équipements dans le cadre de la numérisation partielle ou totale du processus de traitement de l'information, achats de matériel logiciel et autres investissements nécessaires à la constitution et à la transmission de banques de données numériques), et des investissements immatériels (recours au conseil, recours à des travaux d'analyse, d'essais, de contrôle ou d'assistance technique, recrutement de cadres, dépenses de recherche et développement, de recherche appliquée et de lancement industriel et commercial).

D. UNE AIDE SPÉCIFIQUE DOIT-ELLE ÊTRE INSTITUÉE EN RAISON DE LA HAUSSE DU PRIX DU PAPIER ?

L'économie du secteur papetier s'est brutalement modifiée en 1994, provoquant des hausses de prix successives et très importantes qui ont conduit à une augmentation de 40 à 45 % du prix du papier journal en France au cours des huit premiers mois de 1995 ; les cours internationaux du papier étant passés, en moins d'un an, de 390 à 925 dollars.

L'industrie papetière, après la crise de 1990-1993, connaît un renversement de tendance. Au niveau mondial, la consommation de papiers et cartons a fait un bond de 9 % en 1994. En France, toutefois, la hausse de la consommation ne touche pas le papier journal, qui baisse de 2,5 %.

Ces hausses ramènent, certes, les prix à leur niveau de 1989, mais cette situation est plus difficile à supporter pour la presse dans la mesure où elle n'a pas encore récupéré la totalité des recettes publicitaires dont elle disposait alors.


• Pour permettre aux entreprises éditrices de passer le cap d'une hausse conjoncturelle du prix du papier au moment où la légère reprise des ressources publicitaires laisserait espérer une sortie de la crise, certains souhaitent l'octroi d'une aide exceptionnelle de l'État.

Des dispositions analogues ont déjà été adoptées dans le passé, en diverses circonstances pour des montants très variables (15 millions de francs en 1972, 60 en 1975, 5 en 1989, 6 en 1993).

Compte tenu de la part occupée par les achats de papier dans les coûts de production, une aide exceptionnelle atténuerait, certes, le risque de disparition de certains titres et éviterait à d'autres une hausse de prix de vente déjà élevés, mais une analyse complète de ce problème ne justifie pas cette aide exceptionnelle.

La mise en place d'une aide exceptionnelle à l'achat de papier ne semble pas pouvoir être envisagée dans les conditions actuelles du marché. Par son effet compensateur, elle constituerait, en effet, une subvention indirecte aux fournisseurs internationaux. De plus, elle ne Pourrait revêtir qu'un caractère provisoire, alors même que rien ne laisse prévoir, à l'heure actuelle, une baisse du prix du papier journal dans un secteur aux cycles relativement connus.

En outre, la France consommant environ 750 000 tonnes de papier Journal par an, il serait probablement nécessaire, pour ne pas encourir le risque d'un saupoudrage sans réelle portée, de définir des critères d'attribution plus sélectifs que lors des expériences passées.

C'est pourquoi le Gouvernement a préféré apporter, dans une situation difficile, un soutien à l'équilibre d'exploitation des entreprises de presse.

Le prix du papier dans l'économie de la presse

Constituant une part élevée du coût de la fabrication des quotidiens et des publications, les achats de papier ont une influence déterminante sur l'équilibre économique des entreprises de presse.

Celles-ci, après avoir perdu 5 milliards de francs de recettes publicitaires en 1992-1993, pourraient se voir ponctionner d'un milliard de francs en raison de la hausse du prix du papier.

1. Des opérateurs français fragiles

La consommation française ne représente que 2 % de la consommation mondiale de papier de presse. Le premier producteur français de papier occupe le 76 ème rang mondial, et ne fabrique pas de papier pour la presse. L'Allemagne et le Royaume-Uni consomment trois fois plus de papier destiné aux journaux que la France, qui n'est que le 20 ème consommateur mondial, et l'Allemagne deux fois plus de papier destiné aux magazines.

Les éditeurs français sont donc défavorisés au regard des grands groupes de presse étrangers qui, en raison de leurs dimensions, peuvent obtenir de meilleures conditions d'acquisition : seuls la Société française des papiers de presse, coopérative d'achat alliée à la Compagnie française des papiers de presse, le groupe Hachette et le groupe Hersant atteignent la quantité annuelle de 150 000 à 200 000 tonnes qui représente le minimum estimé nécessaire pour intervenir sur le marché international. De plus, les imprimeries françaises de presse disposent d'équipements non standardisés exigeant une grande diversité des papiers utilisés, ce qui ne permet pas une optimisation des approvisionnements.

2. Une industrie mondiale très concentrée

L'industrie du papier de presse s'est très fortement concentrée ces dernières années pour faire face aux lourds investissements qui lui sont imposés. Une vingtaine de producteurs internationaux se partagent l'essentiel du marché. Le chiffre d'affaires du premier producteur européen de papier -qui atteint 50 milliards de francs- équivaut au chiffre d'affaires de l'ensemble de la presse française.

Les groupes finlandais, norvégiens et suédois, qui possèdent de surcroît un avantage technologique par rapport à leurs concurrents, détiennent plus de 70 % du marché européen.

Après de multiples soubresauts, il n'existe plus aujourd'hui de producteurs français d'importance significative. La plupart des usines situées sur le territoire national dépendent de groupes étrangers. Le marché du papier est en France largement dominé par les investisseurs étrangers : 90 % des capacités de production de papier de presse sont contrôlées par des entreprises étrangères.


• Par ailleurs, et compte tenu de l'économie spécifique des importations de papier, il a été envisagé de demander l'augmentation du quota de papier importé à droits nuls, qui est de 650 000 tonnes dont 600 000 réservées au papier canadien. Or, en l'état actuel des choses, cette solution ne paraît pas pertinente.

En effet, le Canada s'est récemment détourné de l'Europe pour orienter ses ventes vers les pays d'Asie, dont la consommation est en très forte croissance. Il est probable que ce mouvement se prolongera en 1996. De plus, au 15 juin 1995, l'utilisation du quota d'importation à droits nuls s'élevait à 46,6 % pour la totalité et à 45,5 % pour le seul contingent canadien. Il n'est donc pas certain que ces quotas soient épuisés avant la fin de l'année.


En outre, une enquête sur les pratiques anticoncurrentielles dans ce secteur a été ouverte.

Depuis longtemps, les grands producteurs internationaux ont cherché à réguler de concert les fluctuations des cours. Grâce à une répartition des zones d'influence à travers le monde, les fabricants Scandinaves ont cherché à appliquer en Europe une politique tarifaire commune. Celle-ci n'a pu être rigoureusement respectée en période de basse conjoncture, ce qui a entraîné une diminution sensible du prix de la pâte à papier de 1990 à 1993 (plus de 40 %).

Mais les producteurs se prévalent aujourd'hui de la reprise économique mondiale, qui entraîne un fort accroissement de la demande de papier sous ses différentes formes (presse, carton, emballage, etc.), estimée à 4% pour prétendre que les capacités de fabrication seraient à la limite de la saturation. Ils profitent également de la situation du marché pour reconstituer les zones d'influence territoriale : les acheteurs français, qui avaient pu bénéficier d'une certaine compétition entre producteurs nord-américains et producteurs Scandinaves, tombent de nouveau sous la dépendance de ces derniers.

La Commission européenne a lancé, le 26 avril 1995, une enquête sur l'augmentation récente du prix du papier journal, soupçonnant une entente entre les producteurs européens.

Quarante entreprises, qui représentent pratiquement l'ensemble de la profession dans l'Union européenne, ont été visitées par les inspecteurs mandatés par la commission, dans sept pays : Royaume-Uni, Finlande, Suède, France, Autriche, Italie, Allemagne.

La Commission européenne a indiqué qu'un phénomène similaire d'augmentation du prix du papier journal avait été constaté aux États-Unis, mais que, pour l'instant, elle n'avait pas encore pris contact avec les autorités chargées de vérifier la concurrence dans ce pays.

Les papetiers européens avaient déjà été « épingles » en juillet 1994 par la Commission européenne, qui leur avait infligé des amendes pour constitution d'un cartel dans le secteur du carton.


• A moyen terme, il serait plus efficace que le Gouvernement obtienne l'accélération du démantèlement des droits de douane sur le papier mondial
-dont le papier canadien, lesquels, en vertu des accords de Marrakech, doivent être abaissés progressivement, jusqu'à disparaître en 2002.

Les importations de papier en provenance des pays extérieurs à l'Union européenne sont aujourd'hui frappées d'un droit de douane s'élevant à 9 % pour la totalité des achats destinés aux magazines, ainsi que pour les achats réalisés au-delà de faibles contingents s'agissant des journaux.

Les accords conclus dans le cadre du GATT prévoient de réduire les droits de douane de 9% en 9 ans. La profession juge cette mesure insuffisante et réclame la suppression totale des droits de douane par les autorités communautaires.

Réunie le mercredi 25 octobre 1995 sous la présidence de M. Christian PONCELET, président, la commission des Finances a procédé à l'examen des crédits d'aide à la presse pour 1996, sur le rapport de M. Jean CLUZEL, rapporteur spécial.

Elle a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits d'aide à la presse pour 1996.

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