Rapport général n° 77 (1995-1996) de M. Jean CLUZEL , fait au nom de la commission des finances, déposé le 5 décembre 1995

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N° 77

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 1995-1996

Annexe au procès verbal de la séance du 21 novembre 1995.

RAPPORT GÉNÉRAL

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 1996. ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,

Par M. Alain LAMBERT.

Sénateur.

Rapporteur général.

TOME III

LES MOYENS DES SERVICES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES

(Deuxième partie de la loi de finances)

ANNEXE N° 31 PRESSE

Rapporteur spécial : M. Jean CLUZEL

Voir les numéros :

Assemblée nationale (10 ème législ.) 2222, 2270 à 2275 et T.A.413.

Sénat : 76 (1995-1996).

Lois de finances.

( 1 ) Cette commission est composée de MM. Christian Poncelet. Président : Jean Cluzel, Henri Collard, Roland du Luart, Jean-Pierre Masseret. Vice-présidents ; Mme Marie-Claude Beaudeau, MM. Emmanuel Hamel, René Régnault, François Trucy. Secrétaires ; Alain Lambert; rapporteur général ; MM. Philippe Adnot, Denis Badré, René Ballayer, Bernard Barbier, Jacques Baudot, Claude Belot, Mme Maryse Bergé-Lavigne, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Guy Cabanel, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Yvon Collin, Jacques Delong, Yann Gaillard, Hubert Haenel, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, Philippe Marini, Marc Massion, Michel Mercier, Gérard Miquel, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Oudin, Alain Richard, Maurice Schumann, Michel Sergent, Henri Torre, René Trégouët.

INTRODUCTION

Malgré quinze ans d'efforts de modernisation, la presse française se porte mal.

La presse quotidienne nationale est particulièrement touchée. Le bon accueil fait à la nouvelle édition du Monde, l e lancement réussi d'un nouveau quotidien, Infomatin, qui connaît déjà une nouvelle formule, celles de La Croix ou des Echos, ne doivent pas faire oublier les difficultés connues par Libération, et l'ombre menaçante qui plane sur France Soir. La presse magazine, et la presse quotidienne régionale, sont, en revanche, en meilleure situation.

On s'interroge de nouveau sur la fragilité du lectorat, et plus particulièrement sur celui des quotidiens. Leur diffusion reste modeste malgré la richesse de l'actualité et les initiatives des rédactions pour attirer et conserver des lecteurs de moins en moins fidèles.

Et pourtant, les années quatre-vingt furent caractérisées par la modernisation de ces entreprises dont les comptes avaient été profondément dégradés, leurs outils industriels ayant vieilli, parce qu'elles n'avaient pas suffisamment bénéficié des innovations technologiques apportées par l'informatique et l'évolution des télécommunications.

Servie par une bonne conjoncture, une nouvelle logique entrepreneuriale du secteur de la presse a rencontré un réel succès : les comptes se sont améliorés, l'outil industriel s'est rénové, l'informatique s'imposant, la fabrication s'est lentement rationalisée, la distribution également, plus récemment, mais plus rapidement. Les choses paraissaient donc, au milieu de la décennie, devoir s'améliorer.

Mais le choc de la récession publicitaire au début des années quatre-vingt dix a frappé un secteur en convalescence, alors que sa mutation n'était pas achevée, et que sa fragilité financière demeurait. En raison de la dérive des coûts, les économies de charge n'ont pas épargné les rédactions elles-mêmes.

C'est que l'obsession de la survie marque profondément la gestion des quotidiens, créant un véritable cycle vicieux. Les lecteurs se désintéressent de façon croissante de journaux qui ne les entretiennent pas suffisamment du monde qui change, de leur vie qui se transforme, de leurs préoccupations de l'instant, mais de plus en plus de la télévision, dans un rapport malsain de fascination-répulsion. L'hémorragie du lectorat renforce le désengagement des annonceurs dans la presse, au profit d'autres média et de la télévision en particulier -la presse étant passée sous la barre des 50 % des recettes publicitaires des grands média-, ce qui induit une baisse des recettes publicitaires, laquelle, à son tour, accroît l'emprise du management sur les rédactions, au nom de la restauration d'un profit à court terme.

Dans cette conjoncture maussade, la hausse dramatique du prix du papier a réduit à néant les efforts entrepris pour reconstituer les marges érodées par la crise. Les perspectives du marché publicitaire restent sombres. Le projet de révision de la directive « Télévision sans Frontières », s'il était adopté, risquerait de fragiliser davantage la position commerciale de la presse sur ce marché. Au demeurant, on peut s'interroger sur la pertinence, à moyen terme, de l'interdiction nationale faite à tel ou tel secteur de faire de la publicité à la télévision en raison de la proche invasion des chaînes satellitaires...

La presse entre maintenant dans l'une des périodes les plus difficiles de son histoire. L'émergence de nouveaux média créée les conditions d'une transformation en profondeur du métier de journaliste, et du produit « presse ». Les nouveaux produits multimédia vont, en effet, permettre la diffusion à faible coût par tout détenteur d'une information ; de plus, ils offriront un accès direct à la source de l'information, le prix d'accès des services électroniques pouvant devenir inférieur au prix d'un quotidien. Toutefois, le marché de l'édition électronique devrait se développer d'abord dans la dimension régionale et locale.

Dans ce contexte de crise et de mutation, le précédent Gouvernement avait lancé un audit, concernant l'ensemble des aides à la presse, destiné à réviser certaines d'entre elles, afin d'aboutir à des équilibres plus dynamiques. Le retournement de conjoncture a toutefois rendu caduque toute velléité de remise en cause de quelque élément que ce soit de ces dispositifs d'aide. Votre rapporteur spécial, qui avait suggéré que le Parlement, et plus particulièrement ses rapporteurs spéciaux des crédits des aides à la presse, soient associés à cet audit, a constaté -avec regret- qu'une fois encore, le Parlement avait été tenu à l'écart de cette réflexion.

Néanmoins, pour donner une vision complète de cette procédure d'audit, la première partie du présent rapport résume les analyses des quatre rapports sur les aides à la presse, rendus publics le 25 janvier 1995. De cette démarche est résulté un nouveau plan d'aides à la presse, annoncé le 5 mai 1995. Ce plan a été repris par le Gouvernement.

Dans le contexte budgétaire actuel, on doit saluer l'effort particulier du projet de loi de finances pour 1996 en faveur de ce secteur.

Il faut également souligner que le principe de continuité républicaine a été, en la matière, respecté. Toutefois, les quatre questions, que votre rapporteur avait posées dans son rapport de l'an dernier, n'ont toujours pas obtenu de réponse, les nouvelles aides à la presse n'ayant en rien modifié l'équilibre profond du secteur, ainsi que les effets pervers induits :

- le système d'aides est-il durablement et structurellement compatible avec l'indépendance totale de la presse à l'égard de tout Gouvernement, quel qu'il soit ?

- le système d'aides est-il vraiment efficace, compte tenu du saupoudrage des crédits qui atteignent parfois seulement quelques centaines de milliers de francs ?

- doit-on privilégier « l'aide au secteur de la presse » ou « l'aide au lecteur » ?

- les aides à la presse pourront-elles encore longtemps être distinguées des aides à l'audiovisuel en raison du développement du multimédia ?

Tant que ces interrogations demeureront, on ne pourra parler réellement de réforme des aides à la presse. Mais tant que la crise durera, une telle réforme sera-t-elle possible ?

PREMIÈRE PARTIE : PRÉSENTATION DES QUATRE RAPPORTS DEMANDÉS EN JUILLET 1994 PAR LE GOUVERNEMENT SUR LE RÉGIME ÉCONOMIQUE DE LA PRESSE

Le 12 juillet 1994, à la demande de M. Édouard BALLADUR, alors Premier Ministre, M. Alain CARIGNON, Ministre de la Communication, constituait quatre groupes de travail consacrés au régime économique de la presse. Ces groupes étaient chargés de faire des propositions au Gouvernement :

1. le financement et la fiscalité des entreprises de presse ;

2. l'exploitation des entreprises ;

3. la place de la presse écrite dans la société ;

4. l'évolution de la presse écrite face au défi des nouvelles technologies multimédia.

Au sein de chaque groupe de travail, les travaux ont été conduits par des personnalités reconnues pour leur expérience professionnelle et leur compétence. Elles ont bénéficié du concours de rapporteurs choisis parmi les hauts fonctionnaires et les grands corps de l'État, n'exerçant pas de responsabilités directes dans la gestion des politiques publiques d'aide à la presse.

Le 25 janvier 1995, les quatre rapports étaient remis aux pouvoirs publics.

I. LE RAPPORT SUR LA PLACE DE LA PRESSE ÉCRITE DANS LA SOCIÉTÉ

A. UNE CRISE SECTORIELLE, MALGRÉ DE FOR TES AIDES DE L'ÉTAT

Le rapport du groupe de travail n° 3, présidé par M. Xavier ÉLIE, président-directeur général du journal Le Progrès, et dont M. André LE GALL, Conseiller-maître à la Cour des Comptes, était le rapporteur, part d'un double constat.

ï Les statistiques disponibles ne permettent pas de conclure qu'il existe une « crise de la presse ». En effet, que l'on considère l'évolution de la diffusion ou celle du chiffre d'affaires, seule la situation de la presse quotidienne nationale justifie que l'on parle de « crise ». Pour la presse quotidienne régionale et locale, le terme de stagnation paraît mieux adapté si l'on tient compte, sur une longue période (1939-1993), du décalage entre l'évolution du tirage et l'augmentation de la population. En tout état de cause, elle a beaucoup mieux résisté que la presse quotidienne nationale. Quant à la presse spécialisée grand public, elle connaît une progression de ses tirages et de ses ventes.

ï La diffusion et le chiffre d'affaires des quotidiens d'information générale et politique régressent, malgré l'aide de l'État à la presse, -qui représente une charge budgétaire de 4,5 milliards de francs, soit près de 12 % du chiffre d'affaires total du secteur économique de la presse-, laquelle avait essentiellement pour finalité, au nom du pluralisme, de conforter ce type de presse.

Les causes de cette situation sont connues, qu'il s'agisse de la présence massive de média concurrents, ou du prix trop élevé des journaux (sur la base 100 en 1970, l'indice des prix était de 420 en 1985 et celui des journaux de 835, soit une progression deux fois plus rapide que la moyenne des prix, en quinze ans). Contrairement à ses concurrents étrangers, la presse française n'a pas encore terminé sa mutation technologique industrielle et sociale, les investissements effectués par les entreprises étant financés par recours à différentes formes de crédit, faute pour celles-ci de disposer de fonds propres suffisants. De plus, il faut rechercher dans l'évolution française du mode de vie l'apparente désaffection pour la lecture des journaux. Non seulement le lecteur doit accepter d'y consacrer du temps, mais encore il doit recevoir son quotidien en tout début de journée, ce qui supposerait que le portage à domicile avant sept heures du matin se développe en France. Or, la distribution représente pour la presse quotidienne nationale, un prélèvement de 40 % sur le produit de la vente des journaux sans, pour autant, assurer la diffusion à une heure matinale. Enfin, le rapport cite, parmi les facteurs du recul de la lecture des journaux, le développement de l'illettrisme.

Le constat -sévère- ainsi dressé « n'incite pas à penser que la solution des problèmes puisse se trouver dans l'augmentation des concours existants non plus que dans l'invention de quelque concours nouveau bénéficiant indistinctement à l'ensemble de la presse ». Le rapport estime en outre que « / 'aide manque son objet et bénéficie à des catégories de publications qui ne sont pas celles que le législateur a eu en vue lorsqu' 'il a institué les dispositions tarifaires et postales destinées à favoriser la libre communication des pensées entre les citoyens de la République ». Le rapporteur cite, en exemple, la presse du sang, du sexe et du scandale.

Les aides à la presse -tarifs postaux privilégiés, détaxations fiscales, allocations de fonds publics- sont justifiées par le rôle politique, social et intellectuel joué par l'écrit comme mode de transmission et de réception du savoir, dans un univers où l'audiovisuel est devenu prédominant.

Après avoir rappelé que la presse quotidienne nationale exerçait une responsabilité démocratique, le rapport relève qu'au cours de la dernière décennie, « des prises de contrôle d'organes de presse sont intervenues de la part d'entreprises industrielles et commerciales, étrangères à la profession », ce qui expose la presse au risque que quotidiens et magazines ne deviennent « les accessoires médiatiques de groupes dont les activités et les ambitions majeures demeurent tout à fait étrangères à la presse ». Cette évolution pourrait, à terme, remettre en question la justification des concours publics à la presse : « si un périodique voit son contenu défini non en termes d'idées mais en fonction des caractéristiques propres de certaines tranches du lectorat identifiées comme autant de cibles marketing, en quoi conserve-t-il un caractère d'intérêt général ? ».

En fonction de ce constat, le rapport se prononce sur le maintien de l'aide de l'État en faveur du recentrage de ces aides.

B. LE MAINTIEN ET LE RECENTRAGE DES AIDES DE L'ÉTAT

1. Le maintien de l'aide de l'État est nécessaire

Les arguments ne manquent pas qui pourraient justifier un désengagement de l'État : moindre importance de la presse écrite par rapport à l'audiovisuel, banalisation des entreprises de presse éditant des quotidiens nationaux, de plus en plus filiales de groupes industriels ou financiers ; prospérité d'organes de presse aujourd'hui bénéficiaires d'aides publiques ; concentration de difficultés majeures dans le secteur des publications pour lesquelles les aides ont été conçues ; difficultés structurelles liées aux lourdeurs des coûts de fabrication et de distribution dont l'État n'aurait normalement pas à compenser le surcoût.

Selon le rapport, le moment ne serait cependant pas venu pour l'État de remettre en cause le principe de l'aide à la presse, d'autant que celui-ci n'est pas menacé par les prescriptions du droit communautaire.

La Commission européenne a, en effet, admis que les publications éditées au sein des États membres n'étaient pas en concurrence entre elles et qu'en conséquence, l'interdiction des aides publiques édictées par l'article 92 du Traité de Rome ne leur était pas applicable.

Le désengagement brutal de l'État aurait, en outre, des conséquences particulièrement dommageables sur l'ensemble du secteur.


• Sur le plan financier, l'équilibre de nombreuses entreprises serait menacé du fait de l'accroissement de leurs charges.


• Sur le fond, un tel désengagement serait ressenti comme un abandon à 1 égard du média reconnu depuis deux siècles comme indispensable à la formation de 1 opinion publique, et qui, aujourd'hui, constitue l'accès le plus populaire, -et souvent le seul- à l'écrit, alors même que, par la redevance, le contribuable apporte également son concours au secteur public de l'audiovisuel.

2. La réforme des aides de l'État est également nécessaire

Si aucune novation majeure ne semble s'imposer en ce qui concerne la structure du système des aides, il est, en revanche, proposé d'en réduire le champ d'application.

L'examen par le rapport du dispositif d'aides existantes ne conduit pas à recommander sa refonte, même si les aides en vigueur ont subi, par rapport à leurs objectifs initiaux, de nombreuses altérations.

Ainsi l'article 39 bis du Code Général des Impôts avait, en 1945, pour objet de permettre pendant une période limitée le renouvellement du matériel au lendemain de la guerre. L'allégement des charges téléphoniques des correspondants de presse ne répond plus à sa finalité première dictée par le coût élevé en 1951 des communications téléphoniques. Enfin, la presse quotidienne intervient désormais pour moins de 30 % dans le transport de presse à la charge de La Poste et pour moins de 3 % pour le transport par la SNCF, alors même que les aides massives privilégient ces modes de transport et de distribution.

De plus, chaque aide pose problème :

- l'allégement des charges téléphoniques donne lieu à une évaluation des dépenses qui n'en permet pas la vérification certaine ;

- l'aide au transport ferroviaire entraîne des distorsions de concurrence entre transporteurs ;

- il n'est pas sûr que la pérennité du concours apporté à la presse par La Poste -supporté par les autres usagers et évalué à 2 milliards de francs- puisse être assurée compte tenu de l'ouverture croissante à la concurrence de cette entreprise ;

- le taux réduit de TVA de 2,1 % pourrait être remis en cause par la mise en oeuvre de l'harmonisation fiscale européenne ;

- enfin l'article 39 bis a contribué dans certains cas à des « surinvestissements », les ressources qu'il a procurées ayant pu être affectées « à des opérations financières ou des acquisitions ou installations somptuaires étrangères à sa finalité ».

Trois mesures pourraient toutefois préciser le dispositif d'aides à la presse :

1) Accorder la possibilité de prêts bonifiés au profit de la presse.

Une telle mesure apparaît au rapporteur contradictoire avec l'évolution des pratiques bancaires qui s'est faite dans le sens de la banalisation et ne semble pas toujours la mieux adaptée aux problèmes du secteur de la presse qui trouvent souvent leur origine dans le surinvestissement et les charges qui en résultent. Toutefois, la bonification d'intérêt pourrait être utilisée comme un instrument susceptible d'alléger les charges financières, dans le cadre d'une restructuration de la dette des entreprises, ou pour des objets très précisément délimités.

2) Répondre par des aides spécifiques ciblées aux difficultés propres à certains titres qui ne peuvent bénéficier du soutien de leurs propriétaires ou de leurs actionnaires.

Ceci suppose, en revanche, la prise en considération de la situation financière des entreprises éditrices, et non la seule appréciation de la situation de la publication éditée. Il ne pourrait dans cette hypothèse s'agir que de concours exceptionnels qui, au surplus, devraient être assortis de conditions précises et d'objectifs concrets en termes de résultats.

3) Développer la diffusion de la presse à l'école

Il s'agit, pour le président du groupe de travail, d'une mesure fondamentale tant pour la formation du futur citoyen que pour le recrutement du futur lecteur. Cet avis n'est cependant pas partagé par le rapporteur, qui y voit une mesure coûteuse (de 1 à 3 milliards de francs pour l'Éducation nationale) susceptible d'affecter le caractère de neutralité politique de l'école, et de « cannibaliser » une fraction des ventes.

En outre, le champ d'application des aides à la presse devrait être resserré pour leur donner toute leur finalité.

Les modifications successives apportées aux textes régissant le régime économique de la presse -notamment l'application de la notion d'intérêt général à la « récréation » du public- et les assimilations jurisprudentielles effectuées par la Commission paritaire des publications et des agences de presse (CPPAP) ont étendu le régime postal et fiscal le plus favorable à l'ensemble de la presse sans que le caractère d'intérêt général joue un rôle déterminant dans l'attribution d'un numéro par la commission.

Ce glissement sémantique, et les avantages qui ont accompagnés cette évolution, ont bénéficié ainsi aux services Minitel à caractère pornographique. En effet, la condition fixée par FRANCE TÉLÉCOM pour accéder au kiosque télématique est l'attribution d'un numéro par la commission- « alors que ces échanges ne contribuent pas, c'est le moins que l'on puisse dire, à la « libre communication des pensées ».

Dès lors, à un moment où les contraintes budgétaires ajoutées à l'aggravation des distorsions de concurrence menacent le régime de la presse, les auteurs du rapport propose une réforme fixant des conditions nécessaires à l'admission, par la CPPAP, au bénéfice du régime économique de la presse. La CPPAP devrait être conduite à porter une appréciation effective et non formelle sur la teneur éditoriale des titres pour déterminer si telle ou telle publication « a un caractère d'intérêt général quant à la diffusion de la pensée et concourt effectivement à l'instruction, l'éducation et l'information du public ».

En outre, seraient explicitement exclues « les publications ne présentant pas d'intérêt réel pour la diffusion de la pensée, notamment les publications ayant pour objet principal la publication d'information à sensation, à scandale ou relatives au crime et publications dites de charmes ».

En effet, actuellement la CPPAP n'invoque l'absence d'intérêt général, quant à la diffusion de la pensée, qu'à l'encontre de quelques rares catégories de publications : par exemple, celles qui émanent d'une entreprise ou d'un constructeur, et celles qui présentent un caractère pornographique.

Inspiré par la même logique, le rapport préconise que le papier occupé par la publicité se voit appliquer le tarif des imprimés ordinaires.

3. La réforme de l'instance de régulation de l'accès au régime économique de la presse et l'extension de ses attributions

La Commission paritaire des publications et des agences de presse (CPPAP) émet des avis, qui ne lient l'État que s'ils sont de rejet, quant à l'admission des publications au régime des préférences tarifaires et exonérations fiscales résultant des dispositions du Code général des Impôt et du Code des Postes et Télécommunications.

Le paritarisme de la CPPAP est invoqué par les professionnels comme une garantie de la liberté de la presse. Il explique également la tendance progressive à l'élargissement du champ d'application de l'aide.

Le groupe de travail propose, non de supprimer la commission, mais d'en modifier la composition.

Actuellement, elle comporte, sous la présidence d'un Conseiller d'État, 10 représentants des entreprises de presse et 10 représentants de l'État.

Le groupe a préconisé de la réduire à 9 membres et de passer d'une composition paritaire État-Presse (1 ( * )) a une composition tripartite comprenant 3 magistrats (un conseiller d'État président, un conseiller à la Cour des Comptes, un conseiller à la Cour de Cassation), 3 personnalités appartenant au milieu de la presse dont un journaliste, les 3 autres membres étant le Secrétaire général du Gouvernement, le Directeur du Budget et une personnalité qualifiée.

Aux yeux du rapporteur, cette composition garantirait mieux l'indépendance de la commission, non seulement par rapport à l'État, mais également par rapport aux autres intérêts engagés (annonceurs, actionnaires industriels).

La commission serait compétente à titre principal, pour donner un avis sur l'admission au régime économique favorable de la presse. Il lui incomberait également de confirmer ou d'annuler au regard de nouveaux critères - précisés par le Rapport - les numéros accordés antérieurement. En outre, l'égalité de traitement entre les titres suppose que le certificat d'inscription soit délivré pour une durée déterminée. La suppression des distorsions de concurrence et des inégalités de traitement dans le temps devrait appeler le réexamen systématique et périodique de la situation des publications au regard des critères de l'aide.

Enfin, la compétence de la commission serait étendue à deux nouveaux domaines :

- elle publierait chaque année un rapport établissant le bilan de son activité qui comporterait également des indications sur l'état du secteur de la presse écrite et l'évolution des structures, notamment en ce qui concerne les dispositions de la loi du 1er août 1986 relatives à la concentration ;

- elle présenterait des avis dépassant le cadre du régime économique de la presse pour s'exprimer, le cas échéant, sur des questions relevant par exemple de la déontologie. Son indépendance lui permettrait, en effet, de porter une appréciation sur certaines pratiques qui lui paraîtraient devoir être examinées.

4. Les propositions spécifiques du président du groupe de travail

Aux propositions du rapporteur, le président du groupe de travail, M. ÉLIE a ajouté ses propres recommandations.

Les entreprises de presse devraient tirer les conséquences des évolutions technologiques et des moeurs et proposer des journaux plus attrayants dont le contenu corresponde réellement aux attentes et aux besoins du public, des journaux portés au domicile ou sur le lieu de travail et dont le prix soit accessible aux revenus modestes.

L'État devrait veiller à ce que les conditions de concurrence entre les entreprises de presse écrite et les entreprises audiovisuelles ne soient pas faussées par son action et par la dérégulation. Ainsi, et alors que l'aide de l'État à la presse est évaluée à plus de 6 milliards de francs, le prélèvement de la redevance entraîne un transfert de 10 milliards de francs en faveur de l'audiovisuel. Un transfert équivalent devrait bénéficier à la presse.

Un soutien accru de l'État à la presse pourrait prendre plusieurs formes :


Promouvoir la presse écrite dans la vie nationale :

- en introduisant la pratique systématique de la lecture de la presse écrite à l'école ;

- en abonnant systématiquement les demandeurs d'emploi à un quotidien national ou régional ;

- en privilégiant la presse écrite dans le cadre de la communication du Gouvernement et des institutions.


Peser favorablement sur l'économie des entreprises de presse :

- en favorisant la modernisation des entreprises de presse par un renforcement des fonds propres, au moyen de procédés fiscaux du type SOFICA, et par un renforcement des fonds de roulement grâce à des procédures de type SOFARIS, assorties d'une garantie à 100 % ;

- en abaissant les prix de revient, grâce notamment au financement sur fonds publics, pendant 5 ans, de plans sociaux ;

- en favorisant le portage à domicile, par des incitations financières et fiscales, et par l'allégement des charges pesant sur ce type d'activité.


Soutenir le rayonnement de la presse écrite :

- en renforçant la présence des entreprises françaises dans les pays étrangers (aide à la diffusion, prise de participation, formation des journalistes...) ;

- en créant des chaires et des enseignements sur la presse écrite et les média dans les universités et les grandes écoles ;

- en favorisant la réflexion éthique des journalistes et des responsables des entreprises de presse écrite.

II. LE RAPPORT SUR L'EXPLOITATION DES ENTREPRISES DE PRESSE

Le groupe de travail n° 2, présidé par M. Bernard VILLENEUVE, directeur délégué de Desfossés International, dont le rapporteur était M. Michel BOYON, Conseiller d'État, a fondé ses analyses sur le fait que les entreprises de presse présentent de nombreux éléments atypiques, dans la conception, la fabrication et jusqu'à la distribution de leurs produits.

En regard de cet atypisme, le régime économique et social de la presse paraît à bien des égards très statique, ne favorisant guère les adaptations rendues nécessaires par les évolutions des technologies et par les nouvelles exigences des lecteurs.

Le rapport analyse les différents postes de charges ainsi que les recettes d'exploitation des entreprises de presse et préconise, dans le prolongement des aides actuelles, des mesures permettant d'améliorer la situation financière des titres.

Un développement important a été consacré au portage de la presse.

A. LA COLLECTE DE L'INFORMATION

1. Les agences de presse

Les tarifs de l'AFP sont appelés à croître plus rapidement que le niveau général des prix -de l'ordre de 1 % en sus de l'inflation. L'évolution des tarifs applicables serait calquée sur celle de l'État. Le groupe de travail recommande, en outre, de définir les relations entre l'État et l'AFP dans une convention pluriannuelle permettant à l'ensemble des clients d'apprécier les perspectives d'évolution de leurs charges.

De plus, les autres agences de presse, qui réalisent au total un chiffre d'affaires de 2 milliards de francs dont la moitié à l'exportation, souhaitent bénéficier des dispositions de l'article 39 bis et que l'allégement des charges téléphoniques soit étendu à toutes les communications extérieures nécessaires à leur activité rédactionnelle, quels que soient les modes techniques de transmissions utilisés.

2. Les correspondants de presse

En étendant le bénéfice de l'exonération de la taxe professionnelle aux correspondants locaux de la presse régionale ou départementale, la loi de finances rectificative pour 1994 a, d'ores et déjà, répondu à une préoccupation de la profession.

Le groupe de travail préconise une réflexion sur l'éventualité d'un allégement des charges liées à la constitution et à la gestion d'un réseau de correspondants de presse hors de France.

3. Les reporters photographes indépendants

Le rapport recommandait l'intervention du législateur pour prolonger de six mois les dispositions de l'article 22 de la loi du 27 janvier 1993. La loi portant diverses dispositions d'ordre social n°95-116 du 4 février 1995 a répondu au voeu du rapport en précisant les rapports entre les reporters photographes et les agences de presse.

4. L'accès aux données publiques

Le groupe de travail demande la bonne application par l'administration et les entreprises du service public de la circulaire du Premier Ministre, du 14 février 1994, qui régit la matière.

B. LA FABRICATION ET LE TRANSPORT DE LA PRESSE


• En premier lieu, et afin d'atténuer les effets de la hausse du papier imposée depuis 1994 par le cartel des fabricants Scandinaves, le rapport préconise :

- de proposer aux autorités de l'Union européenne l'ouverture de quotas d'importation à droit nul pour le papier magazine, ainsi que l'élargissement des quotas pour le papier journal ;

- de définir des critères plus sélectifs que par le passé si une aide exceptionnelle était décidée par l'État ;

- d'accorder une attention particulière à l'approvisionnement et au prix du papier dans les DOM-TOM.

Par ailleurs, le rapport recommande :

- de mettre en oeuvre un programme spécifique de formation aidé par l'État permettant une meilleure polyvalence des personnes. Le bénéfice de l'article 39 bis devrait, en outre, être étendu aux investissements immatériels (logiciels).

- d'étendre l'allégement des charges téléphoniques aux quotidiens ne paraissant que cinq jours par semaine, ainsi qu'aux liaisons hauts débits.

- dans le domaine de l'impression de la presse parisienne, d'assurer l'équilibre de la Caisse presse de salaire garanti (CAPSAG).

- de prévoir en faveur de l'imprimerie de labeur, qui fabrique les périodiques, le bénéfice de prêts à taux bonifiés afin que cette industrie puisse poursuivre son programme de modernisation et de restructuration et le bénéfice de l'article 39 bis ;

- d'aider la modernisation du routage par l'allocation de prêts bonifiés.


• S'agissant du transport et de la distribution de la Presse par La Poste, les recommandations du Rapport concernent la seule « presse-éditeur », dont l'activité principale est d'éditer des journaux et des publications.

Après avoir rappelé le cadre légal et réglementaire dans lequel s'inscrivent les contrats entre la Presse et La Poste, le cadre tarifaire issu de l'Accord Laurent de mars 1980 et les dysfonctionnements reconnus de la distribution postale, le rapport souligne la nécessité de préciser le cadre conventionnel des relations entre les entreprises presse et La Poste.

Enfin, l'abaissement des coûts de distribution devrait être poursuivi. A cet effet, le rapport recommande :

ï la poursuite du concours financier de l'État au plan de restructuration des NMPP avec l'alignement des taux globaux de participation de la société au financement des conventions de préretraite consentis au Syndicat de la presse parisienne et l'application d'une faible pénalité aux titres donnant lieu à une proportion excessive d'exemplaires invendus.

ï la réaffectation de l'aide à l'allégement des frais de transport par la SNCF vers les titres pour lesquels les contraintes de transport sont les plus fortes, à savoir les quotidiens. Ainsi, l'aide pourrait transiter par les sociétés de groupage et de distribution assurant une diffusion nationale ou, s'agissant des quotidiens régionaux et départementaux, directement par les entreprises éditrices.

C. LES RESSOURCES DES ENTREPRISES DE PRESSE

1. En matière de publicité

Le rapport souligne tout d'abord que l'extension de la loi du 29 janvier 1993 au « hors média » est toujours attendue par la presse quotidienne régionale. Il constate ensuite que la presse magazine souffre des dispositions de la loi Évin, du 10 janvier 1991, dont l'assouplissement est souhaité.

Le groupe de travail propose qu'une part du produit de la fiscalité sur le tabac et les alcools soient affectés à un organisme tripartite -État, presse, organismes de lutte contre l'alcoolisme et le tabagisme- pour le financement de campagnes nationales de prévention confiées aux quotidiens et aux publications de presse.

Le rapport recommande en outre :

- le maintien de l'aide aux quotidiens nationaux à faibles ressources publicitaires dont les modalités d'attribution devraient cependant être simplifiées ;

- le maintien de l'interdiction de la publicité télévisée en faveur de la distribution ;

- que les entreprises de presse soient invitées à conclure des accords avec des câblo-opérateurs en vue de la réalisation de campagnes publicitaires communes.

2. En matière de vente

En ce domaine, le groupe de travail préconise des mesures tant pour la vente au numéro que pour la vente par abonnement.


• pour la vente au numéro, le rapport suggère :

- le relèvement prévu de la rémunération du réseau qualifié des diffuseurs devrait s'accompagner de mesures complémentaires ;

- l'exonération de la taxe professionnelle en faveur des dépositaires et des diffuseurs ;

- l'extension à leur profit de l'abattement de 20 % pratiqué sur les cotisations d'assurance-vieillesse perçues par les salariés d'entreprises de presse ;

- la construction par les pouvoirs publics d'au moins un kiosque lors des opérations d'aménagement urbain d'une certaine importance.


• pour la vente par abonnement, le rapport propose :

- La Poste devrait être invitée à mettre son réseau à la disposition des éditeurs qui souhaiteraient utiliser les bureaux de poste pour collecter de nouveaux abonnements ;

- l'accès à la lecture des jeunes, très sollicités par les média audiovisuels pourrait être favorisé par la multiplication des « lieux de presse », par la sensibilisation à la lecture de la presse dans les programmes scolaires, et par des manifestations nationales ;

- la possibilité de déduire de l'impôt sur le revenu une partie du prix de 1'abonnement devrait être étudiée ;

- les investissements ayant pour objet la gestion des abonnements et le traitement informatique des adresses pour améliorer la qualité de la distribution postale et les techniques de ciblage mériteraient d'être aidés ;

- le caractère libératoire des dépenses effectuées dans le cadre de la participation des employeurs à la formation continue devrait être assoupli pour les abonnements à des publications spécialisées.

III. LE RAPPORT CONSACRÉ À LA FISCALITÉ ET AU FINANCEMENT DE LA PRESSE ÉCRITE.

Le rapport du groupe de travail n° 1, présidé par M. Bernard PORTE, président du directoire du groupe Bayard Presse et dont M. Christian PHELUIRE, contrôleur d'État a été rapporteur, esquisse en préalable un « état des lieux » qui prend la mesure de la situation financière des entreprises de presse, des évolutions qu'elles subissent au regard du pluralisme et le rôle assumé par les aides publiques de caractère fiscal et financier.

Il propose ensuite un ensemble de dispositions qui, par rapport au système actuel des aides- automatique, récurrent et sans contreparties- tracent la voie nouvelle d'une politique d'accompagnement financier des entreprises de presse dans leur évolution.

A. L'ÉTAT DES LIEUX

1. Les tendances les plus importantes


• La situation économique de la presse offre une situation contrastée.

Les différents rapports et études font ressortir comme une constante l'inquiétude marquée devant la situation des quotidiens et en premier lieu des quotidiens nationaux. Ils reflètent, en effet, si on les compare sur une vingtaine d'années, une dégradation de la situation. Alors que le rapport Vedel estimait la rentabilité satisfaisante en 1974-1975, et la situation financière saine, l'étude Arthur Andersen, en 1989, portait un diagnostic plus réservé du fait d'une rentabilité inférieure à la moyenne de l'industrie, tandis que le BIPE observait, en 1993, une baisse des capacités d'autofinancement et, avec le développement la crise générale, une rentabilité insuffisante.

Le groupe de travail constate que la situation économique et financière des entreprises de presse reste néanmoins mal connue, ce qui devrait conduire les différents services concernés (SJTI, INSEE, BIPE...) à poursuivre leur coopération afin de présenter un tableau de bord permettant de suivre l'évolution des indicateurs les plus significatifs.


Les indicateurs de rentabilité et de structure financière apparaissent préoccupants particulièrement pour les quotidiens nationaux.

Depuis 1990, le chiffre d'affaires enregistre les conséquences du retournement du marché publicitaire. Les quotidiens nationaux, notamment, qui ont cumulé baisse des recettes publicitaires et érosion du lectorat, ont été les plus touchés par la crise avec une baisse de 10 % de leur chiffre d'affaires sur les deux premières années de la récession alors que la presse magazine a maintenu ses recettes nominales jusqu'en 1993.

La rentabilité du secteur, d'un niveau déjà médiocre, a subi une érosion sensible, et la capacité d'autofinancement, très satisfaisante au milieu des années 70, chute fortement à partir de 1989.

L'insuffisance des capitaux permanents touche l'ensemble de la presse, sauf les publications professionnelles ; la plupart disposent d'un fonds de roulement négatif, à l'inverse de ce qu'observait le rapport Vedel en 1975. Cet indice rend compte de la fragilité des entreprises de presse.

Demeurées longtemps à un niveau très bas, les charges financières se sont alourdies par le recours au crédit court terme entre 1989 et 1991, notamment pour les quotidiens, même si le secteur n'est pas beaucoup plus endetté que l'ensemble de l'industrie.

Les comportements des entreprises de presse s'écartent parfois d'une rationalité purement économique. Des facteurs spécifiques à l'organisation sociale de la presse écrite, tels que les rapports entre les éditeurs et le syndicat du livre et les objectifs d'indépendance et d'autonomie éditoriale, apportent des correctifs parfois importants au principe selon lequel le pouvoir de décision s'exerce à stricte proportion des apports de capitaux. Ces comportements influencent les décisions économiques tout en expliquant une certaine méfiance au regard de l'endettement long, une tendance au surinvestissement, un retard en matière de rééquipement.

Les entreprises éditrices souffrent d'une anticipation parfois insuffisante du changement. Ainsi, le déclin du lectorat traduit une difficulté de la presse française à sentir suffisamment vite la diversification et le renouvellement des attentes du public. De même, la création des grands sites d'impression s'est faite en méconnaissance de 1'évolution à moyen terme. La crise publicitaire est venue frapper des titres devenus de plus en plus dépendants de ce type de ressources.

La sortie de crise résultant du redressement vraisemblable des recettes publicitaires sera peut-être différée en raison de la hausse du prix du papier de 1 ordre de 20 % au minimum en 1995, ce qui représentera 1,9 % de la valeur ajoutée des quotidiens et 1,9 % de celle des magazines grand public.

2. La relative faiblesse économique des groupes de presse français explique les incertitudes sur le devenir du pluralisme et de l'indépendance de ce secteur.

La plupart des groupes nationaux sont d'une taille et parfois d'une solidité sensiblement inférieure à celle des groupes européens de communication. Cependant, dans le même temps, les tendances à la concentration justifient des inquiétudes sur le maintien du pluralisme.

Le pluralisme s'est affaibli au sein de la presse quotidienne en raison de la baisse du nombre de titres, du déclin du lectorat et du recul des publications indépendantes.

De 1983 à 1992, l'ensemble de la presse éditeur a connu une croissance nette de 158 titres grâce au dynamisme de la presse magazine spécialisée. Néanmoins, la presse d'information politique et générale a perdu 55 titres, parmi lesquels 17 quotidiens. En outre, nombre de titres de la presse d'information sont entrés dans des groupes financiers.

L'évolution dualiste de l'économie de la presse se confirme ainsi : à une presse magazine spécialisée dynamique s'opposent les difficultés de la presse politique et générale.

Les groupes de presse français restent d'une puissance économique relativement limitée.

Hormis « Havas » et « Matra-Hachette », la concentration s'est organisée autour de groupes dont l'activité est spécifiquement centrée sur la presse. Seulement six de ces groupes ont un chiffre d'affaires supérieur à 1,5 milliard de francs, la concentration n'excluant pas la fragilité financière (comme le démontre la situation de la « Socpresse »).

La relative faiblesse économique de la presse française constitue l'une des raisons qui ont limité sa capacité d'initiative comme le montre l'exemple du groupe « Hersant » et de « Matra-Hachette » se retirant successivement de la chaîne de télévision appelée La Cinq. Les éditeurs n'ont pu s'imposer comme partenaires dans les restructurations intervenues dans des secteurs stratégiques pour eux (industrie papetière, impression - « CIPP » ou « Groupe Jean Dider ») ou dans leur propre domaine, laissant la place à des groupes étrangers ou à des groupes directement liés à l'industrie.

Des incertitudes majeures pèsent sur l'évolution de la presse d'information politique et générale.

Nombre d'entreprises de presse locale ou régionale sont à la veille d'une transmission de patrimoine. La déstabilisation financière du principal conglomérat de quotidiens peut, à terme rapproché, remettre sur le marché trois titres nationaux et plus d'une dizaine de sociétés ou de groupes gérant des publications régionales ou locales. Enfin, les réformes statutaires rendent indécis l'avenir de plusieurs titres nationaux.

Dans le cadre du développement multimédia la presse ne pourra toujours se défendre des différentes formes d'intégration verticale.

Même si ce sont de grands groupes industriels qui constituent les opérateurs dominants du secteur audiovisuel privé, et non des groupes de presse, ceux-ci disposent néanmoins d'atouts, et, par exemple, l'importance de leur fonds documentaire.

La création de Matra-Hachette Multimédia, les alliances nouées par Havas avec France TÉLÉCOM, Ted Turner ou Sony Software, l'action de la Générale Occidentale en matière de programmes ou le développement international de Bayard Presse montrent cependant les potentialités de développement externe dont disposent ces groupes.

3. L'aide fiscale est un facteur structurel de l'économie de la presse

Estimée à 2 milliards de francs, l'aide fiscale représentait, en 1991, 3,7% du chiffre d'affaires (elle pouvait même atteindre jusqu'à 12 % de la valeur ajoutée), soit l'équivalent de la capacité d'autofinancement du secteur.

Cette prestation fiscale représente le tiers au total des aides indirectes à la presse écrite et huit fois les aides budgétaires directes.

La presse se voit, en effet, reconnaître un régime d'exception conjuguant :

- une exonération, celle de la taxe professionnelle,

- un taux de faveur en matière de TVA -celui appliqué aux biens de première nécessité-

- et enfin un mécanisme différé d'impôt, le dispositif de l'article 39 bis du CGI.

L'incidence de ces aides fiscales sur les finances publiques est controversée.

ï La moins-value que représente pour les collectivités locales l'exonération de la taxe professionnelle -dont le principe remonte à 1844- est estimée à 900 millions de francs, mais il s'agit d'une estimation brute ne prenant en compte ni le versement de la taxe d'habitation, ni l'incidence de l'exonération sur le bénéfice imposable.

ï En matière de TVA, la prestation fiscale, évaluée à 1 milliard de francs, s'apprécie comparativement au taux réduit alors que - la Cour des Comptes l'a fait remarquer - on aurait pu se référer au taux normal, ce qui aurait conduit à une évaluation beaucoup plus importante de l'aide. Le choix retenu est cependant conforme aux pratiques constatées à l'étranger.


• L'arbitrage fiscal constitué par l'article 39 bis devrait être mesuré non par le niveau brut des provisions passées au titre de l'exercice mais déduction faite des réintégrations opérées au cours de cette même année. Le montant de la dépense fiscale -250 millions apparaît donc surévalué.

De même, les effets économiques sur le comportement des entreprises ne correspondent pas nécessairement aux objectifs de l'aide fiscale.

Le taux préférentiel de TVA n'a pas eu, semble-t-il, les effets anti-inflationnistes par lesquels aurait pu se manifester la finalité « d'aide aux lecteurs » d'une telle mesure. En effet, de 1982 à 1992, les prix des périodiques ont cru nettement plus vite que le niveau général des prix. En fait, l'économie de la presse s'inscrit toujours dans le même « cercle vicieux » où fléchissement du lectorat et hausse des prix se sont mutuellement entretenus.

De même, les extensions successives de l'application de la TVA au taux de 2,1 % n'ont pas entraîné de détente durable sur l'évolution des prix.

Il est donc probable que la décrue de la fiscalité indirecte depuis 15 ans a moins profité aux lecteurs qu'elle n'a servi à limiter la tendance à la dégradation des comptes d'exploitation des entreprises de presse.

Le dispositif du 39 bis n'est pas non plus exempt de critiques. Inégalitaire par principe, puisqu'il ne peut être ouvert qu'à des entreprises bénéficiaires, il ne crée aucune obligation réelle d'investissement, de sorte que les entreprises ont la possibilité de ne l'utiliser que pour améliorer leur résultat financier. Enfin, il n'incite pas toujours au meilleur mode de financement.

En revanche, l'article 39 bis permet d'améliorer les ratios de financement, ainsi que le fonds de roulement et la trésorerie de l'entreprise.

Parfois séculaires, les avantages fiscaux en faveur de la presse apparaissent à celle-ci comme des avantages acquis qu'il semble aux auteurs du rapport difficile de remettre en cause.

B. LES PROPOSITIONS DU RAPPORT

1. La philosophie : un accompagnement financier plutôt que des aides sans contrepartie.

Le rapport souligne que l'attribution des aides s'est, pour l'essentiel, organisée selon des procédures de caractère automatique et permanent, qui donnent au système des aides publiques une grande inertie.

Ces considérations ont donc conduit le groupe de travail à proposer de nouvelles aides :

- le soutien spécifique par la voie budgétaire à la mise en oeuvre de plans sociaux propres à la presse parisienne ou à la distribution nationale de la Presse ;

- un soutien à des projets de développement identifiés, au travers de procédures de caractère bancaire et financier.

Bien que la renaissance du Groupement pour l'Équipement et la Modernisation des Entreprises de Presse (GEMEP), créé en 1956 et mis en sommeil dix ans après, soit réclamée par la profession, les auteurs du rapport constatent qu'un tel dispositif n'a pu, en son temps, réunir les conditions de sa viabilité que d'une manière très temporaire. En effet, il n'a jamais réussi à mobiliser par lui-même des ressources susceptibles d'assurer son indépendance, ni à se transformer en véritable organisme professionnel de garantie.

- La constitution du régime de prêts bonifiés est également réclamée.

Or, depuis 1991, de telles procédures ne sont plus en vigueur et sont strictement limitées aux régimes spéciaux créés en faveur de l'agriculture ou de l'artisanat. L'administration financière exprime la plus extrême réserve devant l'hypothèse de tout autre dispositif à vocation sectorielle. Pourtant, cette revendication de la profession est la marque d'une inquiétude en raison du coût de l'endettement moyen et long et, d'une manière plus générale, de l'accès au crédit.

- Enfin, si les pouvoirs publics ont privilégié le recours à la technique de la garantie -par l'intermédiaire de la SOFARIS cette voie s'est avérée décevante puisqu'un seul dossier a aboutie en 1994.

2. Les recommandations pour la réforme du régime fiscal d'aide à la presse.

Sans remettre en cause le niveau global des concours publics ou l'éligibilité de l'ensemble des éditeurs, un réexamen de l'ensemble des aides devrait être entrepris pour améliorer leur efficacité et leur équité.

Cette approche conduit le rapport à formuler trois catégories de propositions :

a) Refonder l'aide publique sur sa finalité démocratique, c'est-à-dire la défense du pluralisme.

Ainsi, les fonds spécifiques aux quotidiens à faibles ressources publicitaires ou même le fonds d'aide exceptionnelle à la presse introduit une distinction entre publications qui mériterait peut-être d'être étendue.

En poursuivant ce raisonnement, il serait également envisageable d'exclure de l'ensemble des aides les publications spontanément bénéficiaires, ou disposant d'appuis financiers solides, et de les réserver à ceux qui en ont vraiment besoin, ou du moins de les moduler en leur faveur. Cette thèse implique de rebâtir radicalement le système actuel. Ainsi, le critère le plus pertinent reste celui qui tend à diriger une part accrue de l'aide « vers les publications d'information politique et générale ».

b) Réajuster les moyens de l'aide fiscale ou financière dans un souci de plus grande efficacité économique et, à ce titre, engager la négociation en vue d'un moratoire européen des taux de TVA de la presse écrite.

Une tentative d'alignement de la France sur un taux 0 de TVA pour la presse semble au groupe de travail aussi illusoire que périlleux. Cependant une alliance large avec d'autres pays européens pourrait permettre de prolonger au-delà du 31 décembre 1996 la situation acquise (2,1%).

Cette réforme pourrait être complétée par d'autres adaptations :

- ramener le taux applicable aux opérations de messageries ou de routage avant expédition postale à 2,1 % dans le cas où les entreprises choisissent de les filialiser ;

- ramener le taux d'imposition des produits de l'édition télématique à 5,5 % ;

- calculer les taux des commissions du réseau de distribution de la presse à partir d'une assiette nette de taxes.

- aménager l'article 39 bis et lui appliquer des modalités plus strictes et mieux adaptées économiquement.

Des critères plus stricts en ce qui concerne les bénéficiaires et les quotités provisionnelles devraient être adoptés :

- en faisant prévaloir le critère du contenu éditorial, en limitant pour les quotidiens et les hebdomadaires, comme c'est le cas pour les mensuels et les publications d'une autre périodicité, le bénéfice de ce régime aux publications d'information politique et générale ;

- en limitant l'effet d'accroissement des inégalités économiques en établissant pour les quantités provisionnables un barème dégressif en fonction du niveau de bénéfices réalisés par le titre éligible ; en excluant les immeubles des actifs éligibles pour l'emploi des provisions ;

- en soumettant la réintégration des provisions non-investies à des pénalités de retard.

Des critères plus souples pour l'emploi des provisions sont également proposés :

- recouvrir le droit à financer sur les provisions réglementées, les participations prises dans des filiales dont l'activité recouvre soit l'impression, soit le routage, le portage et les messageries ;

- admettre au titre de l'article du 39 bis du CGI, les dépenses de matériels, logiciels et autres investissements nécessaires à la constitution et à la transmission de banques de données numériques ;

- exclure des pénalités de retard la non réintégration des provisions dès lors que pendant la période de provisionnement, l'entreprise a connu une accélération des dépenses non-amortissables dans les domaines suivants : recherche éditoriale, charges liées à l'informatisation rédactionnelle ou à la numérisation des données.

c) Envisager la mise en oeuvre d'incitations fiscales temporaires Pour favoriser le redressement de la rentabilité.

En parallèle et de manière alternative au dispositif de l'article 39 bis, des incitations exceptionnelles à l'effort de modernisation pourraient être mises en oeuvre pour :

- accompagner l'effort d'investissement corporel de titres non-bénéficiaires, donc exclus du bénéfice de l'article 39 bis du CGI ;

- inciter à des initiatives de développement éditorial situées hors du champ des immobilisations et donc de l'article 39 bis du CGI.

Deux techniques fiscales pourraient répondre à ces deux objectifs :

- un régime d'amortissements exceptionnels ou accélérés pour les titres éligibles mais qui n'auraient pu constituer préalablement des provisions au titre du 39 bis, ou qui n'y feraient pas recours pour l'investissement concerné ;

- une forme adaptée de crédit d'impôt paraît de nature à soutenir des actions relevant de dépenses non-amortissables. Ceci concernerait essentiellement l'innovation éditoriale et la numérisation des fonds documentaires et d'archives. Il faudrait cependant en limiter l'usage aux cas de forte accélération de l'investissement par rapport à leur rythme ordinaire, dans le cadre d'un programme soumis à l'agrément préalable de l'administration fiscale.

d) Mieux utiliser les procédures financières de droit commun en faveur des PMI/PME

Les institutions financières devraient mieux faire admettre par les entreprises de presse l'intérêt pour elles d'une combinaison entre les taux de faveur consentis aux PME (type CODEVI) et les procédures de co-garantie du type SOFARIS.

Pour ce faire, il suffirait que soit affirmée formellement l'éligibilité de ces entreprises à la procédure CODEVI en supprimant le plafond de 500 millions de francs de chiffre d'affaires actuellement requis.

En ce qui concerne les procédures de co-garantie, les banques et la SOFARIS devraient mieux accueillir les entreprises de presse ; les éditeurs devraient être autorisés à déposer directement leur dossier de demande de garantie. Enfin, la commission pour gestion des garanties presse pourrait être perçue, temporairement, sur la trésorerie du fonds mis en place en janvier 1994.

e) Créer un mécanisme spécifique de soutien en fonds propres pour répondre à des situations de sous-capitalisation.

Des ressources publiques pourraient, certes, être mobilisées en faveur d'un mécanisme de soutien au développement.

Le rapport cite les possibilités du produit surabondant de la taxe spéciale sur la publicité télévisée, la création d'un prélèvement spécifique sur les provisions constituées au titre du 39 bis, la suppression éventuelle d'une aide directe, une taxation spécifique sur le hors-média (affichage, presse gratuite, messageries télématiques conviviales). En revanche, il exclut la transposition au domaine de la presse du « compte de soutien aux industries du cinéma » (COSIP), son utilisation ne répondant pas correctement à des nécessités de financement diversifiées.

La constitution de sociétés de financement des entreprises de presse (« SOFIPRESSE »), sur le modèle des « SOFICA », semblerait répondre aux besoins de la profession tout en garantissant l'indépendance des entreprises. Celles-ci seraient autorisées annuellement à collecter des ressources d'épargne durable auprès des particuliers et des entreprises, assorties d'importants avantages fiscaux. Des règles strictes devraient être édictées : dispersion suffisante du capital, détermination de priorités quantifiées en faveur de titres indépendants ou de la Presse d'Information Politique et Générale.

Le soutien fourni par les « SOFIPRESSE » ne se limiterait pas à des opérations spécifiques mais concernerait l'ensemble de l'économie de titres durables (transmission, restructuration financière, programme d'équipement ou de modernisation, initiative éditoriale...).

Leur mode d'intervention s'apparenterait donc à celui d'opérations de « capital investissement » ou de « capital-risque », assorties d'un apport en fonds propres qui ne confère qu'une position minoritaire et ponctuelle (5 à 10 ans) : la « sortie » de l'investisseur s'opérant par remboursement prioritaire de ses apports sur les résultats nets de l'entreprise.

Dans un secteur à faible rentabilité moyenne, il serait enfin utile qu'un tel système puisse disposer d'un fonds commun de garantie, permettant une répartition mutuelle des risques. Ce fonds devrait avoir un pouvoir propre d'évaluation des dossiers.

Au total, si ce système a inévitablement un coût, l'effet économique de la dépense pourrait être positif pour le secteur.

Enfin, l'évolution récente montre qu'il convient de soutenir un éventuel engagement des éditeurs dans la restructuration des industries du papier et de l'impression.

Outre la possibilité d'une utilisation de l'article 39 bis du CGI à des prises de participation minoritaire dans les secteurs en aval de la presse, pourrait être étudiée une avance financière remboursable, permettant aux éditeurs désireux de lutter contre la « cartellisation » de la production du papier et de l'impression, de mettre en place des actionnariats détenant des positions minoritaires dans ces filières.

IV. LE RAPPORT SUR L'ÉVOLUTION DE LA PRESSE ECRITE DANS LA PERSPECTIVE DES NOUVELLES TECHNOLOGIES MULTIMÉDIA

Le quatrième groupe de travail présidé par M. Jean-Marc DETAILLEUR, président des éditions LAMY et dont M. Henri PIGEAT, Président de l'International Institute of Communication, a été rapporteur n'a pas eu, à la différence des autres groupes de réflexion, pour objet d'étudier la réforme des situations existantes mais les conditions dans lesquelles la presse écrite pourra développer une activité multimédia.

L'objet de l'analyse est donc très prospectif.

A. UNE PRESSE QUI DISPOSE DE CERTAINS ATOUTS FACE A LA RÉVOLUTION DU MULTIMÉDIA

En préambule, les auteurs rappellent que « le développement du traitement électronique du texte et de l'image fait qu'aujourd'hui un grand nombre de journaux produisent déjà leurs informations par les moyens électroniques. Une numérisation spécifique pour les applications multimédia n 'est donc pas nécessaire dans la mesure où une partie de cette opération coûteuse est déjà intégrée dans le processus de fabrication du journal lui-même ». Cependant, les auteurs notent que « le processus constitue évidemment pour les entreprises de presse une opération coûteuse préalable à tout développement multimédia sérieux ».

Les « services multimédia » susceptibles d'être d'ores et déjà proposés par la presse sont les suivants :

Ø Les services d'informations générales et spécialisées, présents sur le minitel, peuvent être utilisés afin de compléter et prolonger la publication en offrant une accessibilité permanente, en utilisant des informations non publiées et en prévoyant des services transactionnels. De même, la fonction d'archivage et de banque de données historiques répond à un besoin général et pourrait opportunément être expérimentée, parfois en rassemblant des publications à intérêts complémentaires.

Ø Les bases de données et services iconographiques répondraient à une attente à la fois des professionnels (média, entreprises, services publics) et du grand public. La presse, jugent les rapporteurs, pourrait en ce domaine apporter ses fonds et son savoir-faire.

Ø Les services d'informations à destination des mobiles traiteront d'ici à la fin du siècle, près du quart des communications téléphoniques tant pour l'usage public que privé.

Ce mode de communication, assorti des applications du système DAB, présente un excellent potentiel pour une diffusion souple et économique de données écrites ou d'images vers des récepteurs mobiles. La presse pourrait ainsi participer avec profit à des expérimentations en ce domaine.

Les auteurs jugent que le réseau Numéris est la transition naturelle pour la télématique professionnelle entre le Minitel et les autoroutes de l'information, qui ne couvriront que progressivement le territoire.

L'intégration du texte, du son, des images fixes en couleur et des données, permet de proposer des services pré-multimédia qui évolueront naturellement vers les services multimédia avec l'ajout de l'image animée. Cependant, le rapport souligne que l'évolution tarifaire à la baisse (du réseau Numéris) devra être poursuivie si l'on veut éviter que le coût des réseaux dissuade de créer des services multimédia, notamment pour le grand public.

De plus, le rapport juge que les garanties de neutralité des réseaux devraient être renforcées.

B. DES ADAPTATIONS PONCTUELLES A LA RÉVOLUTION DU MULTIMÉDIA

Le groupe de travail reste prudent en présentant ses propositions. Il estime que légiférer a priori « comporterait de nombreux risques d'erreur voire de blocage » et que les adaptations doivent s'effectuer progressivement.

1. Favoriser l'accès de la presse au marché multimédia

Trois mesures sont proposées pour atteindre cet objectif :

Ø La participation de la presse aux expérimentations lancées par le Gouvernement doit être encouragée.

La création d'une « cellule de suivi » au sein du SJTI est préconisée, afin de donner la meilleure information aux éditeurs de presse sur ces expérimentations. De plus, des places devraient être garanties à la presse sur ces plates-formes, afin de compenser le risque d'inégalité de moyens techniques et financiers entre les concurrents.

Ø La création pour la presse d'un « cercle multi professionnel d'observation du multimédia et la réalisation d'études d'accompagnement ».

Ø L'encouragement et le soutien des investissements dans le multimédia constituent un chapitre important de cette partie du rapport.

Sont avancées des mesures « financières spécifiques et temporaires », destinées à aider la presse, qui souffre d'une « insuffisance chronique de fonds Propres ». Cependant, les formes d'incitation susceptibles d'être mises en oeuvre ne doivent pas occulter ni empêcher la sanction du marché, ni supprimer la sélection que celui-ci doit légitimement exercer.

Les opérations dont le financement est à encourager sont les suivantes :

- numérisation des fonds d'informations écrites et iconographiques ;

- acquisition d'équipements ;

- développement, assemblage ou adaptation de logiciels ;

- recherches marketing ;

- - investissements de lancement commercial.

2. L'encadrement juridique des activités multimédia de la presse

Les entreprises et activités multimédia relèvent du régime de liberté applicable à la presse écrite et, depuis 1986, aux services télématiques. Elles ne sont donc soumises à aucun contrôle administratif préalable et ne sont tenues qu'à une obligation de déclaration.

Pour respecter la transparence, imposée aux entreprises de communication audiovisuelle et aux services télématiques, le rapport propose, -en soulignant la difficulté d'appliquer ces règles sur le service lui-même, une procédure d'affichage de numéro d'identification facilitant la référence à un registre spécifique comportant toutes les indications nécessaires. Celui-ci pourrait être accessible par voie télématique et sur papier, à l'image, par exemple, du registre du commerce.

Dans le domaine du pluralisme et de la concentration, le rapport s'interroge sur l'opportunité de conserver un dispositif anti-concentration monomédia et plurimédia sur les futurs réseaux car le cadre national risquerait de se révéler trop étroit. Dans l'hypothèse où une réglementation de ce type serait conservée, l'opportunité d'un observatoire européen, voire mondial, des concentrations devrait être étudiée. Le rapport estime impossible d'appréhender ce problème sous l'unique angle des sociétés de communication, en raison de la pluridisciplinarité des entreprises qui entreront sur le marché du multimédia.

En revanche, la multiplication des intermédiaires (dans le multimédia) impliquera une claire délimitation des responsabilités et sans doute l'obligation de les préciser par voie contractuelle, ce qui reviendra à prévoir dans les contrats des clauses obligatoires. Après dix ans de pratiques télématiques, plusieurs clarifications s'imposent, notamment sur le pouvoir conventionnel de sanction qui peut se traduire par la suspension ou la résiliation du contrat. Il est difficile d'imaginer le maintien de ce pouvoir régalien dès lors que l'opérateur ne sera ni public, ni unique.

Les rapporteurs soulignent également que les responsabilités respectives des divers acteurs des services multimédia gagneront à être clarifiées, y compris celle de l'usager qui, dans un système interactif, n'est plus passif, mais devient acteur. Concernant « la preuve de la faute », les services multimédia exigeront aussi une grande précision des principes et conditions du stockage des informations et des transactions qui devront être conciliés avec les principes de liberté et de confidentialité.

Le rapport soulève également le problème de l'instance de contrôle estimant, qu'à terme, les instances existantes devront logiquement être rapprochées, voire fusionnées.

Toutefois, en l'état actuel des techniques et du marché, le groupe de travail propose de maintenir, à court terme, des instances séparées en les rationalisant et en veillant à établir des correspondances entre elles. De plus, l'autorité et l'indépendance matérielle du CTA (Comité de la télématique anonyme) devraient être rapidement renforcées en raison de l'arrivée prochaine des services multimédia. Sa composition et ses conditions de fonctionnement pourraient être mieux équilibrées.

Le rapport consacre un chapitre à la publicité et au parrainage, jugeant notamment que la plupart des règles générales relatives au contenu de la publicité doivent pouvoir s'appliquer directement dans les services multimédia, tout en notant qu'il sera progressivement nécessaire de renforcer certaines obligations et d'en assouplir d'autres.

Pour les petites annonces, la promulgation d'un véritable régime juridique est souhaitée, prenant en compte leur diversité tout en aménageant des distinctions selon leur nature. Ce régime devrait, notamment, veiller à la transparence des annonces pour empêcher la diffusion de messages frauduleux ou mensongers ou encore pour protéger le consommateur en évitant les abus de position dominante de l'annonceur, en vérifiant la validité de l'offre et en offrant une capacité de rétractation.

3. Le problème des droits d'auteur et des droits voisins

Face à ce dossier très complexe, le rapport demeure prudent.

Les difficultés tiennent pour l'essentiel à la confrontation de l'univers de l'informatique avec les activités culturelles traditionnelles d'une part, et, d'autre part, à l'exploitation mondiale des oeuvres, favorisée par la numérisation. Des évolutions seront donc nécessaires, mais elles ne paraissent pas pouvoir être définies sans une pratique plus avancée des services multimédia. La sagesse recommande donc d'éviter l'établissement a priori de règles théoriques nouvelles et d'appliquer le droit actuel en l'adaptant progressivement en fonction des leçons de l'expérience.

Le rapport note cependant que la multiplication des acteurs et l'interactivité risquent de modifier la position de l'auteur.

Il peut être difficile de délimiter la part respective de l'inventeur du logiciel, du créateur ou de l'utilisateur qui peut créer sa propre oeuvre à partir des éléments fournis. De plus, le regroupement sur un même support d'oeuvres d'origines différentes conduira à l'application d'un système mixte utilisant les règles du droit d'auteur et des droits voisins. Enfin, pour les rapporteurs, la facilité de copie et de manipulation d'oeuvres appelle une réflexion sur les moyens de protection nécessaires.

Le rapport rappelle à ce propos, qu'un projet de directive communautaire est en cours d'élaboration, sur la protection des bases de données, visant deux objectifs : le choix ou la disposition des données qu'il appartiendrait aux législations nationales de protéger par le droit d'auteur ; et le contenu de la base de données qui, s'il ne correspond pas déjà à des oeuvres protégées par le droit d'auteur ou un droit voisin, devrait faire l'objet d'un droit spécifique permettant au créateur d'en interdire l'extraction et la réutilisation déloyale.

4. L'accès aux données publiques

Le rapport aborde ensuite le problème de la commercialisation par les administrations des données publiques.

La Fédération nationale de la presse française avait présenté, en novembre 1992, aux pouvoirs publics un mémorandum revendiquant la gratuité de l'information pour les prestations que l'administration effectue dans le cadre de sa mission de service public. A ce propos, elle estime que la circulaire du Premier ministre du 14 février 1994 n'a pas fait taire toutes les préventions, ce texte s'appliquant aux administrations, à l'exception des établissements publics industriels et commerciaux et son objet étant limité à la diffusion de ces données et non au droit d'accès à celle-ci.

Pour le rapporteur, la circulaire a « incomplètement » répondu à des questions qui ne peuvent pas être analysées seulement à la lumière du droit public, mais aussi à celles des règles de la concurrence, tant en droit interne qu'en droit communautaire puisqu'une directive européenne est en préparation sur ce sujet.

La circulaire n'a pas mis fin à des situations existantes et fortement contestées notamment en ce qui concerne le prix de certaines données publiques. Ainsi, l'ouverture rapide d'une concertation spécifique sur ce sujet n'est pas seulement souhaitable pour dissiper les conflits et malentendus présents, c'est aussi l'une des conditions nécessaires pour encourager la multiplication des initiatives commerciales en ce domaine et favoriser le développement des marchés du multimédia.

5. Les propositions fiscales

Le groupe de travail propose :

Que l'article 39 bis du CGI puisse s'appliquer aux réalisations multimédia y compris lorsque celles-ci sont réalisées dans une filiale contrôlée majoritairement par une entreprise de presse ;

- l'ouverture, aux opérations multimédia, de l'un des fonds de garantie de la SOFARIS, auquel la presse a accès depuis mars 1993 ;

- l'ouverture, également, d'un « guichet » spécifique à la presse, à l'image de l'IFIC (Institut de financement des industries du cinéma) pour la production audiovisuelle ;

- l'application à la presse de la procédure du crédit d'impôt-recherche afin de favoriser la recherche-développement dans les PME-PMI ;

- le bénéfice des aides régionalisées au développement technologique des entreprises ;

- l'alignement de la TVA des produits et services multimédia d'information sur celle de l'édition, à savoir 5,5 %.

SECONDE PARTIE : LES AIDES DE L'ÉTAT A LA PRESSE DANS LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1996


• Pour 1996, les aides directes et indirectes à la presse peuvent être estimées à 2,766 milliards de francs.

Cette aide se décompose de la manière suivante :


Aides directes de l'État : 267,8 millions de francs

Il s'agit d'aides budgétaires, spécifiques à certaines catégories de presse, ou générales. Elles sont imputées sur les crédits des Services Généraux du Premier ministre.

Le projet de loi de finances pour 1996 se traduit par une hausse de 1,3 % par rapport à 1995, grâce à un effort certain pour créer de nouvelles aides générales à la diffusion de la presse (aide au portage, fonds d'aide à la diffusion de la presse hebdomadaire régionale) et à la modernisation de la presse (fonds d'aide à l'investissement dans le multimédia), aide non budgétaire d'un montant de 20 millions de francs. On note, en revanche, une diminution de la contribution de l'État aux réductions de tarifs SNCF concernant le transport de la presse.

De leur côté, les aides indirectes atteignent dix fois le montant des aides directes.


• aides indirectes de l'État : 2.478 millions de francs

Ces aides, en croissance de 4,6 % dans le projet de loi de finances pour 1996, sont constituées :

- d'une subvention à l'Agence France-Presse, grâce à des abonnements souscrits par les administrations,

- et de l'aide de l'État au transport de la presse, imputée sur les crédits du ministère des Technologies de l'information et de la Poste, dont le montant est de 1,9 milliard de francs, ce qui représente 69,6 % des aides directes ou indirectes de l'État.


• Les aides publiques peuvent être chiffrées, pour leur part, à un montant de 4.832,4 millions de francs pour l'année 1994.

Elles sont, de loin, les plus importantes et ne peuvent qu'être estimées. Elles résultent :

ï . de la dépense fiscale à la charge de l'État que représente un taux super-réduit de TVA, à 2,1 %, soit 1 080 millions de francs, et un régime spécial de provisions pour investissement, soit 230 millions de francs ;

ï de la dépense fiscale à la charge des collectivités locales au titre de l'exonération de taxe professionnelle, d'un montant de 1 009 millions de francs,

ï des aides indirectes à la charge des entreprises publiques pour favoriser la diffusion de la presse.

En effet, l'État ne prend pas en charge l'intégralité de la dépense afférente. Le coût du transport postal supporté par La Poste représente 2 431 millions de francs, et le coût des réductions de tarif accordées à la presse mais supportées par la SNCF, faute du versement par l'État des sommes dues, pour les années 1991-1994, et qui est estimé par votre rapporteur à 82,4 millions de francs.

En résumé, l'État supporte le quart de l'ensemble de ces aides publiques, les collectivités locales un autre quart et La Poste, la moitié.

Les aides publiques étant globalement stables, on peut chiffrer le total des aides directes et indirectes de l'État, des collectivités locales et des entreprises publiques à la presse à 7,5 milliards de francs pour 1996.

Les aides à la presse du projet de loi de finances pour 1996

(en millions de francs)

Les aides publiques à la presse en 1995

(en millions de francs)

(1) Dettes de l'État non réglée pour les années 1991-1994

(2) Estimation du manque à gagner par la SNCF

(e) Estimation

I. LA PRESSE FRANÇAISE EN 1994

A. L'ÉVOLUTION DE LA DIFFUSION ET DU LECTORAT EN 1994

1. Un déclin global dans le monde

Les auteurs de l'étude de la Fédération internationale des éditeurs de journaux « Les tendances mondiales de la presse » estiment que la presse quotidienne a connu, en 1994, une chute de sa diffusion dans la majorité des pays les plus développés.

Le déclin de la diffusion a été de 1,87 % dans l'Union européenne, de 1,33 % aux États-Unis et de 0,17% au Japon ; toutefois, cette baisse est beaucoup plus substantielle si on la considère sur une période plus longue : en Europe, baisse de 6,80 % depuis 1986 ; aux États-Unis, baisse de 5,56 % depuis 1986 ; enfin, au Japon, baisse de 0,83 % depuis 1990.

Selon l'étude, cette diminution globale de 1,87 % de la diffusion dans les pays de l'Union européenne en 1994, ou de 3,8 % dans les pays de l'A.E.L.E. En 1995, la diffusion est en recul dans dix pays, stable dans deux autres, et en hausse dans cinq autres. Parmi les pays où la diffusion est en baisse, on relève la France (- 1,55 %).

En 1994, l'Inde a devancé la Grande-Bretagne et pris la quatrième place mondiale en terme de diffusion totale, avec 21,7 millions d'exemplaires vendus chaque jour. Le Japon est toujours en tête, avec 71,9 millions d'exemplaires, suivi des États-Unis (59 millions) et de l'Allemagne, qui vient en troisième position (25,7 millions). La diffusion en Russie, estimée à 96 millions d'exemplaires en 1988 et à 76 millions en 1990, s'est effondrée, avec 8 millions d'exemplaire seulement en 1993, dernière année pour laquelle on dispose de chiffres.

Les Français demeurent, sur l'échiquier mondial, des lecteurs très modérés de quotidiens d'opinion.

La Norvège reste le leader mondial, avec 610 journaux vendus pour 1 000 habitants ; suivie de la Suisse prend la seconde place avec 592 journaux pour mille : le Japon est troisième, avec 575 journaux, la Suède quatrième (472), et la Finlande cinquième (471). A la 15 ème place, on trouve les États-Unis, avec 226 journaux vendus pour 1 000 habitants ; la France arrive en 24 ème position avec 156 journaux pour mille ; l'Italie se classe 28 ème avec 113 journaux, mais c'est l'un des rares pays où le taux de pénétration a effectivement augmenté l'an dernier, et c'est l'un des deux seuls pays (l'autre étant l'Espagne) où il est supérieur à celui de 1986.

En Europe, notre rang est également très modeste :

Nombre de quotidiens vendus pour 1 000 habitants.

Nd : non disponible

* : Allemagne de l'Ouest

Source : FIEJ

Dans l'Union européenne, le premier quotidien français, Ouest-France, occupe toutefois la 4 ème place, mais loin derrière les trois Premiers :

2. Une diffusion en baisse générale

Source : SJTIC


• Le tirage total des différentes catégories de presse est en hausse apparente, en 1994, avec 8,35 milliards d'exemplaires annuels contre 8,17 milliards en 1993, soit une hausse de 2,1
% qui a fait suite à une baisse du tirage en 1993 de 1,2 % par rapport à 1992.

Sur une longue période, le tirage total apparaît nettement à la hausse, puisque 8 milliards d'exemplaires étaient recensés en 1982.

Toutefois, lorsque l'on exclut la presse d'annonces gratuites, on constate une quasi stabilité depuis 12 ans, avec un tirage de 6,49 milliards d'exemplaires en 1982 et 6,48 milliards en 1994, en hausse de 1,2% par rapport à 1993 (6,40 milliards).


• Les chiffres de la diffusion confirment cette analyse. En 1994, 7,15 milliards d'exemplaires ont été diffusés, contre 7,01 milliards en 1993, soit + 2,1 % ; et 6,95 milliards en 1982. Cependant, la diffusion de la presse payée (hors journaux gratuits d'annonces), en hausse légère, de 1 %, en 1994(5,28 milliards) par rapport à 1993 (5,23 milliards) est également en baisse sur le long terme, puisque 5,44 milliards d'exemplaires payés avaient été distribués en 1982.

La presse en 1994

(en milliards d'exemplaires)

1. Tirage

2. Diffusion


• Les chiffres provisoires pour 1994 offrent un bilan contrasté.

La presse nationale d'information générale et politique augmente, pour la première fois depuis 1989, son tirage de 3 % et sa diffusion de 0,5 %. Celle-ci s'est élevée, en 1994, à 780 millions d'exemplaires annuels -contre 930 millions en 1982.

La presse locale d'information générale et politique est quasiment stable (+ 0,1 %) en tirage et augmente légèrement sa diffusion (+ 0,4 %), avec 2,27 milliards d'exemplaires.

La presse spécialisée grand public progresse en tirage (+2,1 %) comme en diffusion (+ 2 %), avec 1,94 milliard d'exemplaires, tandis que la presse spécialisée technique et professionnelle diminue ses tirages (- 1,8 %) mais augmente sa diffusion (+ 1 %) à 300 millions d'exemplaires.

Enfin, la presse gratuite d'annonces renoue avec sa forte croissance en tirage et en diffusion (+ 5,4 %) pour atteindre 1,87 milliard d'exemplaires.


L'audience de la presse quotidienne s'est améliorée en 1994.

Selon l'enquête EUROPQN-IPSOS (2 ( * )) , et contrairement à une idée reçue, l'audience de la presse quotidienne est presque aussi importante que celle de la télévision. La presse quotidienne régionale a plus de 20 millions de fidèles et la presse nationale 8 millions de lecteurs réguliers. L'audience des journaux télévisés de TF1 est d'environ 9 millions de téléspectateurs et celle de France 2 d'environ 5 millions de téléspectateurs.

En 1994, 94,9 % des Français et des résidents en France de plus de quinze ans en ont été lecteurs. Un quotidien a été lu par 54,1 % d'entre eux, soit 24.832.000 individus, au moins trois fois par semaine -39,9 % tous les jours-, et 78 % dans les derniers huit jours.

Le lecteur moyen consacre 30 minutes par jour à son quotidien (26,6 % plus de 40 minutes) et trois lecteurs sur quatre ont pris leur journal en main avant 14 heures (15,8 % avant 8 heures, 41,2% avant 10 heures, 60,4 % avant midi). Quant au nombre moyen de « prises en main » sur l'ensemble de la journée, il est en progression : 2,1 fois en 1994 contre 2 fois l'année précédente.

Une forte majorité du lectorat de la presse quotidienne nationale se situe en région parisienne, qui compte, sur la base France entière (45.930.000 individus), 18 % de lecteurs réguliers (au moins trois fois par semaine).

Par ailleurs, 73,2 % des personnes interrogées on déclaré avoir pris en main un quotidien national dans les douze derniers mois. Son lecteur-type est un homme (60,6 %) âgé de 35 à 59 ans (41,7 %, contre 37,3 % pour les 15-34 ans), qui est actif (58,9 % dont 31,4 % de CSP +) et possède un niveau d'instruction très supérieur a moyenne (37,2 % de ses lecteurs ont suivi des études supérieures contre 23,2 % pour la France entière).

Tous les quotidiens nationaux ont enregistré, en 1994, une progression du nombre de leurs lecteurs. Le Figaro, avec 1.668.000 lecteurs numéro moyen -LNM (3 ( * )) enregistre un gain de 8 %, tandis que France-Soir passe de 930.000 lecteurs (LNM) en 1993 à 977.000 l'an dernier. La progression la plus forte a été réalisée par La Croix (+ 23 % de lecteurs LNM, tandis qu'InfoMatin fait une entrée fracassante avec 590.000 lecteurs (LNM) pour sa première année d'existence.

Le lectorat des quotidiens en 1994

Source : IPSOS

(1) La lecture d'un numéro moyen porte sur le nombre de numéros lus parmi les cinq ou six numéros parus

* chiffres : région parisienne + Oise

La presse quotidienne régionale est, pour sa part, lue presque autant par les femmes (49,1 %) que par les hommes (50,9%). 28,7% de son lectorat a moins de 34 ans, mais 30,3 % a plus de 60 ans. Elle a autant de lecteurs (30 %) dans les villes de Plus de 100.000 habitants que dans les agglomérations rurales.

Sa pénétration varie toutefois du simple au double d'une région à l'autre.

Si 68,4% des Bretons lisent un journal régional, grâce aux 768.000 exemplaires de Ouest-France et à la solide implantation du Télégramme de Brest, ils ne sont que 37,9 % en Basse-Normandie. Dans le trio de tête, la rivalité du Provençal et de Nice Matin permet à 66,7 % des Corses de lire régulièrement un journal, de même que l'importance du portage permet à l'Alsace et au Dernière Nouvelles d'Alsace de réaliser un taux de pénétration de presque 65%. Viennent ensuite la Lorraine (62,1%), l'Auvergne (60,7 %). Dans le peloton de queue, après la Basse-Normandie, viennent la Picardie (37,9 %), Rhône-Alpes (40,1 %) et le Nord-Pas-de-Calais (42,9 %).

La presse française est-elle trop chère ?

Depuis 1990, l'indice des prix à la consommation de la presse (quotidiens et magazines) a, selon l'INSEE, progressé plus fortement que l'indice moyen des prix à la consommation. Cependant, la croissance annuelle du prix des journaux et revues a régulièrement diminué depuis 1991 et a même été inférieur à l'inflation en 1994 (+ 1,7%) pour les quotidiens (+ 1,2%), tandis que l'indice du prix des magazines diminuait de 0,3 %.

L'indice des prix à la consommation de la presse par rapport à l'indice général selon l'INSEE

Indice des prix à la consommation, (moyenne annuelle)

Base 100 en 1990

1990 1991 1992 1993 1994

Indice général (*) 100,0 103,2 105,7 107,9 109,7

Journaux - quotidiens 100,0 105,6 110,7 113,4 114,7

Revues - magazines 100,0 104,1 107,1 108,3 108,0

(*) Indice d'ensemble (y compris tabac).

Indice des prix à la consommation

Base 100 années In-1)

1990 1991 1992 1993 1994

Indice général /// 103.2 102.4 102,1 101,7

Journaux - quotidiens /// 105,6 104,8 102.4 101,2

Revues - magazines /// 104,1 102,9 101,1 199,7

Par rapport aux autres pays européens, la presse française apparaît plus chère.

Prix de vente du quotidien ayant le plus fort tirage dans chaque pays (1) en 1994

(en dollars)

Source : FIEJ

(1) ce qui inclut souvent la presse dite "populaire "(Bild en Allemagne, Sun en Grande-Bretagne)

Moyenne du prix des dix quotidiens les plus diffusés de chaque pays en 1994

B. L'ÉVOLUTION DU CHIFFRE D'AFFAIRES DE LA PRESSE

1. La sortie de crise en 1995 ?

Le chiffre d'affaires de la presse aurait progressé de 2% en 1994 pour atteindre 56,72 milliards de francs, selon l'enquête rapide réalisée par le SJTI au deuxième trimestre 1995.

Ce résultat est dû à une augmentation des recettes de publicité (plus 2,7 %) qui atteignent 22,58 milliards de francs, mais, également, des recettes de ventes qui sont de 34,14 milliards de francs (plus 1,5 %). Cette dernière progression correspond, d'après l'étude, à un élargissement de 1 % de la diffusion (hors gratuits d'annonces). Un indice significatif, puisque les ventes avaient tendance à baisser ou à stagner depuis une dizaine d'années.

Dans le domaine de la publicité après trois années très difficiles (1991, 1992, et 1993) qui s'étaient traduites, pour la publicité commerciale et les petites annonces, par des reculs successifs (moins 7,5 %, moins 4,7 %, moins 8,3 %), on assiste donc, comme dans les autres média, à un retournement du marché, même si l'on ne retrouve pas encore le niveau de 1990 (27 milliards de recettes publicitaires pour la presse).

On relève cependant des différences sensibles : les recettes provenant de la publicité commerciale et des petites annonces progressent de 5,6 % dans les quotidiens nationaux, 6 % dans les quotidiens régionaux, 7,8 % dans les magazines d'information, 9% dans la presse féminine, 12,1 % dans la presse sportive, mais elles reculent de 3,5 % dans la presse télévisée.

Les chiffres clés de la presse en France

(en milliards de francs)

Source : SJTIC

Cette amélioration concerne surtout la presse locale d'information générale et politique (qui regroupe les titres régionaux et départementaux) dont le chiffre d'affaires a progressé de près de 3 % à 15,2 milliards de francs et la presse nationale d'information générale et politique (les quotidiens parisiens et les "newsmagazines") qui ont bénéficié d'une croissance de 2,2 % à 9,8 milliards de francs. En revanche, l'activité de la presse spécialisée grand public (21.6 milliards de chiffre d'affaires) et de la Presse technique et professionnelle (6,1 milliards) n'a connu qu'un léger frémissement à + 1,4 %.

2. Un fragile répit pour la presse ?

a) La fin de la croissance à deux chiffres du marché publicitaire

Durant 1980, la presse, dans son ensemble, a connu deux périodes nettement différentes, la première, de 1982 jusqu'en 1991, où son chiffre d'affaires a enregistré une forte croissance à deux chiffres et, la seconde, depuis 1991 où baisse et stagnation ont alterné.

Ce sont les recettes publicitaires qui ont déterminé cette évolution : avant 1991, le marché publicitaire, dopé par l'arrivée des télévisions commerciales, était en très forte progression. La presse, premier des grands média, a certes perdu des parts de marché, essentiellement au profit de la télévision, mais a bénéficié largement de cette croissance. Les recettes correspondantes, petites annonces comprises, ont un peu plus que doublé entre 1982 et 1990 passant de 13 à 27 milliards de francs, avec pour certaines années des augmentations de + 17%. Au cours de cette période de forte croissance, le poids des recettes publicitaires dans le chiffre d'affaires de la presse s'est mécaniquement accru pour atteindre 47 % en 1990.

L'année 1991 (plus précisément la mi-90) a marqué le début de la crise du marché publicitaire. La presse a été le plus touché de tous les média : ses recettes Publicitaires ont diminué de près de 20 % en trois ans alors que cette ressource était essentielle pour l'équilibre financier du secteur.

Certaines catégories de presse plus dépendantes que d'autres du marché publicitaire, comme la presse spécialisée technique et professionnelle (dépendante à 61 %) ou la presse d'information générale et politique nationale et locale, ont plus souffert de la crise que la presse spécialisée grand public (dépendante à 29 %), par exemple.

Dans le même temps, la progression des recettes de ventes n'a pas compensé le manque à gagner consécutif à la baisse des recettes publicitaires pendant les années de crise du marché publicitaire.

La reprise des recettes de publicité était attendue à la suite du redressement du marché publicitaire constaté durant l'année 1994. Après trois années de forte baisse, due au recul important de la publicité commerciale, mais aussi à celui des petites annonces, particulièrement touchées par la crise économique, des recettes de publicité connaissent enfin une évolution positive.

La progression observée en 1994 est encore modeste : + 2,7 %.

Elle est, selon les sources disponibles actuellement, inférieure à celle de la télévision et de la plupart des autres grands média.

Mais la situation s'est sensiblement améliorée pour les deux composants de ces recettes : la publicité commerciale (75 % de l'ensemble des recettes de publicité) qui connaissait encore un net recul, en 1994, est en progression de + 3,6 %, alors que, pour les petites annonces, le résultat bien qu'encore négatif : - 1,2 %, se rapproche de la stabilité.

La progression des recettes de ventes se poursuit, en 1994, à un rythme voisin de l'année précédente (+2,1 %). Dans le même temps, l'augmentation des prix a été pour la première fois particulièrement modérée : quelques dixièmes seulement, (calculée par agrégation des indices de prix de l'INSEE relatifs aux journaux et aux magazines), soit beaucoup moins que les années antérieures. Cette année, les ventes à prix constants ont donc augmenté.

b) L'inexorable déclin de la presse au sein des dépenses publicitaires


Les investissements publicitaires ont atteint 126,8 milliards de francs en 1994 (+ 2,5 % par rapport à 1993) ( 4 ( * ) ) .

Les recettes publicitaires des grands média, estimées à 48,6 milliards de francs, retrouvent leur niveau de 1992 : elles augmentent de 5 % par rapport à 1993, après une diminution de 5 % cette année là.

Les parts de marché restent assez stables en 1994, par rapport aux années antérieures. Celles de l'affichage et du cinéma sont similaires aux années précédentes (respectivement 11,8% et 0,6%). Après une forte amélioration en 1993 (sa part de marché est passée de 6,9 % à 7,6 %), la radio se maintient au même niveau en 1994. La presse, en revanche, même si elle occupe toujours la première place, voit sa part de marché continuer à se détériorer au profit de celle de la télévision : l'année 1994 confirme le passage de la presse sous la barre des 50 % de part de marché, puisqu'elle passe de 48,5% en 1993 à 48,1 % en 1994 (pour 51,1 % en 1992). La télévision renforce progressivement sa présence sur le marché publicitaire, ses parts de marché passant de 31,2 % à 31,9 % entre 1993 et 1994 (pour 29,4 % en 1992).

Source : Le marché publicitaire français, IREP.

Le déclin de la part de marché de la presse au sein du marché Publicitaire est une évolution générale en Europe.


• Les recettes publicitaires de la presse ont atteint en 199423,4 milliards de francs en hausse de 4,2
% après une forte baisse de 10 %en 1993. Pour l'ensemble du marché, une croissance de 5 % est attendue en 1995.


• La croissance des investissements publicitaires se vérifie pour toutes les catégories de presse, excepté, toutefois, pour la presse spécialisée ou ils baissent de 1,5 %, s'établissant à 3,7 milliards. Cette diminution est moins importante qu'en 1993, où elle atteignait - 15,8 % ; mais elle vient s'y ajouter La part des revues spécialisées dans le total des investissements presse est d'environ 16 %.

. En revanche, les magazines, après avoir subi une baisse de leurs ressources publicitaires de 14% en 1993, bénéficient de la plus forte progression, avec 6 % d'investissements supplémentaires en 1994. Cette catégorie de presse est celle ou les investissements publicitaires sont les plus importants : ils s'élèvent à 7,5 milliards de francs en 1994, soit 32% des investissements publicitaires effectués dans la presse.

ï La presse magazine est suivie par les quotidiens régionaux, dont les ressources publicitaires s'accroissent de 5,8 % en 1994. Ils atteignent 4,8 milliards de francs, retrouvant ainsi leur niveau de 1992 et représentent 21 % des investissements publicitaires dans la presse.

ï La presse gratuite, dont les ressources publicitaires avaient moins baissé en 1993 que celles des autres catégories de presse (- 0,3 %), bénéficie d'une progression de 4 % en 1994. Elle retrouve ainsi son niveau de 1991, avec 4,9 milliards de francs. Sa part dans le total des investissements publicitaires en presse écrite est de 21 %.

ï Enfin, les quotidiens nationaux connaissent une progression plus modérée de leurs ressources publicitaires, qui atteignent près de 2,3 milliards de francs, soit une hausse de 3 % en 1994. Cette catégorie de presse avait été tout particulièrement touchée en 1991 et en 1992 par la chute des investissements publicitaires. En 1993, la baisse était plus modérée mais atteignait quand même + 13 %. La part des quotidiens nationaux dans les investissements publicitaires de presse est de 9,7 %.

Répartition des recettes publicitaires entre les différentes catégories de presse en 1994

L'impact de la Loi Évin du 10 juin 1991 réglementant la publicité pour le tabac et l'alcool

Les investissements publicitaires plurimédia pour les boissons alcoolisées ont représenté 1,16 milliard en 1992, dont un tiers pour la presse écrite. Pour le tabac, ces investissements s'élevaient à 263,8 millions en 1992, dont 255,3 millions pour la presse et 8,4 millions pour l'affichage.

En 1993, date d'application effective de la loi Évin, la publicité en faveur du tabac a représenté respectivement 4,2 millions de francs, elle s'est élevée a 3,3 millions de francs en 1994.

La publicité pour l'alcool, qui demeure autorisée dans la presse pour adultes, s'est maintenue à un niveau assez stable : 420,4 millions de francs en 1912. 394,2 millions en 1993 et 440,4 millions en 1994.Le manque à gagner résultant pour la presse écrite de l'application de la loi Évin représenterait 240 millions de francs par an selon la Secodip. Son incidence est plus particulièrement sensible pour la presse magazine, car le tabac représentait, en 1991, 74 % de ses recettes publicitaires (y compris les produits dérivés).

Par ailleurs, il importe de signaler que, selon le comité national contre le tabagisme, les publicités en faveur du tabac en infraction avec la loi auraient connu une recrudescence en 1994 et plus particulièrement dans les hebdomadaires (45,5 % des insertions) et les mensuels (40.4 %).

II. LES AIDES INDIRECTES A LA PRESSE

En 1994, l'aide indirecte de l'État à la presse a été constituée :

- d'une contribution du budget au transport postal, pour un montant de 1,9 milliard de francs,

- d'un régime fiscal préférentiel représentant une dépense fiscale de 2,4 milliards de francs environ,

- d'abonnements des administrations à l'Agence France-Presse, pour un montant de 578 millions de francs.

A. LE TRANSPORT POSTAL

L'aide au transport postal de la presse représente les deux tiers de l'aide publique à la presse.

1. Le régime actuel du transport de la presse par la Poste

La Poste aura transporté en 1995, 2 084 millions d'exemplaires, dont :

- 1 853 millions pour la presse éditeur ;

- 170 millions pour la presse associative ;

- 61 millions pour les publications administratives.

Il faut noter que cette quantité est stable depuis 1990.

Le tarif préférentiel pour le transport postal de la presse constitue un manque à gagner pour la Poste. Afin de compenser ce coût, le contrat de Plan entre l'État et la Poste du 14 octobre 1994 prévoit que la contribution annuelle de l'État est fixée à 1,9 milliard de francs pour la période 1995-1997.

Cette somme fait l'objet du chapitre 41-10, article 20, du budget du ministère des Technologies de l'Information et de la Poste.

Le coût du transport de la presse a ainsi évolué :

Source : SJTIC. Chiffres provisoires pour 1994 et prévisionnels pour 1995.

(1)Le coût complet du transport de la presse comprend :

- Les charges de structures qui représentent les coûts :

. de structure de l'échelon opérationnel (bureaux de poste, centres de tri),

. de structure de l'échelon national, régional et départemental,

. les amortissements,

. les charges financières.

- Les charges variables constituées par les coûts de fonctionnement des établissements opérationnels (en majorité charges de personnel).

2. Le serpent de mer de la nouvelle grille tarifaire

a) Les relations État-Presse Poste devront faire l'objet d'une nouvelle convention pour la période 1996-2000

Les rapports entre la presse et la Poste résultent, jusqu'au 31 décembre 1995 de l'accord Laurent signé en mars 1980, et plusieurs fois prorogé qui prévoyait, sur une dizaine d'années, un rééquilibrage tarifaire tendant, à terme, à faire assurer par l'État, la Poste et la presse, pour le tiers, les coûts afférents au transport et à la distribution de la presse.

Le protocole tripartite (Presse-Poste-État) du 23 mars 1992, qui régissait les relations entre la presse et la Poste jusqu'à la fin du premier contrat de plan, a repris ce principe d'un taux de couverture par les éditeurs de 33,33 %. Ainsi fut complété le dispositif issu de l'accord Laurent, d'une part, en préconisant la concertation entre La Poste et la presse et, d'autre part, en précisant les devoirs et les exigences de chacune des parties en matière de qualité de service (délai d'acheminement et de distribution pour la Poste, conditions de dépôt pour les éditeurs).

Le bilan de cet accord ne doit pas être sous-estimé. En effet, la presse qui, en 1979, ne couvrait que 13 % du coût global de son transport postal, en assurait 31,3 % en 1994 alors même que celui-ci a fortement progressé en quinze ans. En outre le cadre institutionnel -commission tripartite État/presse/Poste a favorisé l'amorce d'un dialogue entre industriels. Il a permis la concertation entre la presse et la Poste sur leurs investissements respectifs, dans la préparation des tâches et le routage pour les uns, dans l'organisation du réseau pour les autres.

Des négociations sont en cours pour réduire le déficit de la Poste, du fait du transport de la presse, pour réformer la structure des tarifs et pour assurer une qualité de service incontestable et égale.


• Dans la mesure où La Poste, entreprise publique, est tenue de respecter l'équilibre de ses comptes, la charge qu'elle assume au titre du transport et de la distribution postale doit être progressivement réduite.

Toutefois la diminution du déficit lié à l'activité presse ne peut résulter uniquement des efforts de productivité entrepris par la Poste, mais suppose, dans une perspective à moyen terme une revalorisation de la part prise en charge par les éditeurs, dans le cadre d'un système tarifaire dont « la visibilité et la clarté » seront garanties conformément aux dispositions du contrat de plan.


La grille tarifaire, qui avait normalement pour objet de répartir équitablement entre les différentes publications le tiers des charges de distribution, conformément aux accords Laurent, est de plus en plus déséquilibrée.

Essentiellement fondée sur des critères de poids et les différents niveaux de préparation effectuée par les éditeurs, elle organise une péréquation qui a atteint son point critique, des titres tarifés au plus bas de plus en plus nombreux pesant sur des titres assurant une longue couverture des coûts de moins en moins nombreux. Ainsi, le taux de couverture par la presse de 33,33 % en moyenne des coûts postaux recouvre des réalités extrêmement diverses allant de 12 % pour les tranches les plus basses jusqu'à 70 % et même 100 % pour les plus élevées.

Il en résulte que :

- les publications s'inscrivant dans les tranches de poids supérieures à 200 grammes, en majorité des titres de la presse magazine, subventionnent les publications les plus légères ;

- le tarif étant le même quel que soit le lieu de dépôt, la presse locale subventionne la presse nationale ;

- le tarif étant identique quelle que soit l'urgence, la presse quotidienne et hebdomadaire est subventionnée par la presse de périodicité plus espacée ;

- ces écarts sont mécaniquement amplifiés chaque année, dans la mesure où les augmentations de tarifs sont appliquées en pourcentage. Aussi, les différences de prix entre les tranches les plus basses et les tranches les plus hautes de la grille varient de 1 à 27.


La délimitation du service obligatoire et la qualité de service font l'objet de dispositions précises dans le contrat de plan

D'une manière générale, la qualité de service du transport et de la distribution de la presse se situe à un niveau déjà élevé puisque 92,43 % des quotidiens nationaux sont distribués le jour même de leur parution, et que les représentants des éditeurs cherchent, aujourd'hui, à engager La Poste sur une mesure des heures de distribution en ce qui concerne le service urgent.

Toutefois, la distribution par la Poste de la presse avant douze heures -délai limite au delà duquel un lecteur de la presse quotidienne a plus tendance à s'informer auprès de la télévision ou de la radio que de lire un journal- n'a atteint, en 1994, que 83,6 % des envois. Cela signifie que 16,4 % des envois est distribués après douze heures, ce qui est trop tard.

Ce taux est de :

- 83,43 % pour la province, hors Paris et la région parisienne,

- 88,26 % à Paris,

- 64,66 % seulement pour les zones urbaines.

De même, à Paris et dans les zones urbaines ou suburbaines, nombre d'actifs quittent leur domicile très tôt le matin. Or, le taux de distribution de la presse quotidienne avant neuf heures demeure très faible et atteint :

- 49,5 % des envois à Paris,

- 17,15 % en zone urbaine,

- 13,58 % en zone suburbaine,

- 10,51 % pour la France entière, toutes zones confondues.

Si la presse ne se lit plus dans les transports en commun le matin, il faut sans doute trouver dans ces chiffres l'une des explications. La Poste doit viser le « zéro défaut » et distribuer la presse quotidienne le jour même, voire le plus tôt possible le matin, surtout pour la presse quotidienne régionale, qui se « périme » rapidement.

b) Qui subventionne qui ?

Une nouvelle grille tarifaire est discutée depuis 1986. La négociation, abandonnée en 1990, a été reprise grâce à l'introduction de la comptabilité analytique à la Poste en 1992. Elle doit absolument aboutir d'ici le 1er janvier 1996.

Il est nécessaire au préalable que la Poste rende publique la méthode d'élaboration du chiffrage de ses coûts pour le transport de la presse. Encore faudrait-il que ce coût soit connu de la société elle-même -et qu'il soit identifiable-. Il n'est certes pas évident de chiffrer le coût de la distribution d'un journal qui est porté aux usagers en même temps que le courrier ordinaire. La Poste ne justifie cependant pas les chiffres avancés et recourt à un mode de calcul ne permettant pas d'apprécier clairement la combinaison des paramètres mis en oeuvre et la portée de chacun d'entre eux sur la tarification. Le montant de la participation de l'État et des diffuseurs au transport postal de la presse, qui concourent pour un tiers chacun, est en définitive fixé de manière unilatérale par la Poste pour un coût qui reste in fine inconnu.

Une nouvelle approche de la structure des tarifs est donc indispensable et doit aboutir à un tarif de référence fondé sur des critères (poids, urgence, périodicité) et un volet commercial permettant la prise en compte des efforts de préparation réalisés par les éditeurs et les routeurs. Les intérêts des différentes catégories de presse divergent sur ce point :

- la presse quotidienne nationale n'a qu'un unique point d'entrée dans le circuit postal et une forte préparation des exemplaires,

- la presse quotidienne régionale a pour souci principal un acheminement avant midi, et se caractérise également par une forte préparation,

- la presse hebdomadaire nationale est, en revanche, fournie « en vrac » à la Poste, etc....

Les journaux les plus pénalisés par la nouvelle grille tarifaire pourraient être aidés par le reste de la profession qui mutualiserait ainsi ce coût.

Cette nouvelle approche inscrirait les relations Presse/Poste dans une logique de relations entre des clients et des fournisseurs comme le prévoit le contrat de plan.

Dans cette perspective, la Presse et La Poste mènent depuis plusieurs mois des négociations techniques pour intégrer un ensemble de critères souhaités par la presse : le poids, le degré de préparation des envois, le niveau d'urgence et le point d'entrée. La prise en compte de ces critères servira de base aux travaux de la table ronde qui devrait être réunie avant fin 1995.

La table ronde pourrait cependant permettre de réfléchir aux moyens de mettre en oeuvre une mesure incontestable de la qualité, opposable aux tiers, qui serait effectuée par un organisme indépendant de La Poste et des éditeurs de presse.

B LE RÉGIME FISCAL PRÉFÉRENTIEL DE LA PRESSE

La dépense fiscale en faveur de la presse a atteint, en 1994, 2,38 milliards de francs, dont :

1140 millions de francs pour le taux super réduit de TVA,

230 millions de francs pour le régime spécial de provision sur investissement,

1009 millions de francs pour l'exonération de la taxe Professionnelle.

Cette dernière aide fiscale, à la charge des collectivités locales, représente 40 % du total.

1. Le taux super réduit de TVA

Toutes les publications inscrites à la commission paritaire sont soumises au taux réduit de TVA de 2,1 % (article 298 septies du CGI).

Les publications non inscrites à la commission paritaire supportent le taux normal de TVA, fixé depuis le 1er août 1995, à 20,6 %.

Les publications pornographiques ou faisant appel à la violence sont soumises au taux majoré de 25 %.

La dépense fiscale a été de 1 080 millions de francs en 1994, contre 980 millions de francs en 1993 et pourrait atteindre 1 140 millions de francs en 1995.

Le taux réduit de TVA peut-il être maintenu ?

Depuis le 1er janvier 1989, l'ensemble des publications de presse qui remplissent les conditions prévues par les articles 72 et 73 de l'annexe III du CGI et sont inscrites sur les registres de la commission paritaire des publications et agences de presse sont soumises au taux réduit de TVA de 2,1 %. Si la revendication de l'assujettissement de l'ensemble de la presse écrite à la TVA au taux zéro ne peut être satisfaite, en revanche, le maintien du taux de 2,1 % pourrait être obtenu.

La sixième directive européenne (n° 77-388 du 17 mai 1977) a prohibé dans son principe la TVA au taux zéro qui n'avait pu être maintenue dans certains pays que dans la mesure où son application préexistait au 31 décembre 1975. La directive 92/77/CEE du 19 octobre 1992, relative au rapprochement des taux de TVA, permet le maintien des taux super réduits, c'est-à-dire inférieurs au taux réduit minimal de 5 %, dès lors qu'ils existaient avant le 1er janvier 1991 et ce jusqu'à la fin de la période transitoire, fixée théoriquement au 1er janvier 1997. En revanche, les taux super réduits ne peuvent être abaissés pendant cette période. Ainsi, la France peut maintenir le taux de 2,1 % applicable notamment à la presse pendant toute la durée de la période provisoire. Par ailleurs, seuls la Grande-Bretagne, et en partie la Belgique (quotidiens et hebdomadaires d'information générale), le Danemark (publications au moins mensuelles) et la Finlande assujettissent leur presse au taux zéro ; tous les autres pays ont un taux supérieur à celui appliqué en France.

La législation européenne en matière de TVA reste cependant susceptible d'évolution :

- en premier lieu la directive 92/77/CEE du 19 octobre 1992 qui modifie l'article 12, paragraphe 4 de la directive 77/388/CEE précise que le conseil des ministres, sur la base d'un rapport de la commission, réexamine tous les deux ans à partir de 1994, le champ d'application des taux réduits, c'est-à-dire la liste des biens et prestations de service susceptibles d'y être assujettis.

- en second lieu, cette même directive introduit également à l'article 12 un nouveau paragraphe 3a qui prévoit que, sur la base du rapport sur le fonctionnement du régime transitoire et des propositions sur le régime définitif présenté par la commission, le conseil des ministres statue à l'unanimité, avant le 31 décembre 1995, sur le niveau du taux minimal qui sera appliqué après le 31 décembre 1996 en matière de taux normal.

Si l'assujettissement de la presse française au taux zéro n'est pas envisageable, tant parce qu'elle serait en contradiction avec les termes de la sixième directive européenne du 17 mai 1977, qu'en raison de son coût pour les finances publiques, estimé à 700 millions de francs, le plan de réforme des aides à la presse, arrêté le 5 mai 1995 par le ministre du budget et de la communication et confirmé par le Gouvernement actuel, prévoit de négocier, dans le cadre de l'Union européenne, un moratoire européen des taux de TVA de la presse écrite, permettant à la France de maintenir le taux de 2,10 %, lors de la mise en oeuvre du régime définitif. Il s'agirait, en fait, d'utiliser la procédure ouverte à l'article 12-paragraphe 3a pour continuer de faire bénéficier la presse d'un taux super réduit, en faisant valoir que les journaux et périodiques sont des produits essentiellement nationaux, voire régionaux sur lesquels les barrières linguistiques pèsent davantage que les barrières commerciales.

2. L'exonération de taxe professionnelle

Aux termes de l'article 1458 du code général des impôts, les éditeurs de feuilles périodiques et, sous certaines conditions, les agences de presse ainsi que, depuis le 1er janvier 1995, les correspondants locaux de presse régionale ou départementale sont exonérés de taxe professionnelle. Corrélativement, ces entreprises sont, en vertu du 2° de l'article 1407 du code précité, imposables à la taxe d'habitation pour tous les locaux meublés qu'elles occupent, à l'exception des locaux ouverts au public et de ceux servant exclusivement à la fabrication et au dépôt.

En sept ans, de 1978 à 1994, cette charge a doublé.

Le coût de l'exonération, supporté par les collectivités locales qui participent ainsi, aux côtés de l'État, à l'effort commun en faveur de la presse, s'élevait à 927 millions de francs pour 1993. Il a progressé de 8,88 % en 1994 pour atteindre 1 009 millions de francs. Il ne tient pas compte de la taxe d'habitation acquittée par les entreprises de presse sur leurs locaux exonérés de taxe professionnelle.

3. Le régime spécial de provisions pour investissement

Le régime dérogatoire des provisions pour entreprises de presse Prévu à l'article 39 bis du code général des impôts a été institué en faveur de la presse écrite d'opinion par la loi n° 53-79 du 7 février 1953, afin de Préserver son indépendance et de lui donner les moyens de s'adapter a l'évolution technologique. Ce régime a fait depuis son origine l'objet de reconductions successives.

Actuellement, il est applicable jusqu'au 31 décembre 1996.

L'article 39 bis du code général des impôts permet aux entreprises de presse qui exploitent soit un journal, soit une revue mensuelle ou bimensuelle consacrée pour une large part à l'information politique de constituer en franchise d'impôt par Prélèvement sur leurs résultats imposables, une provision exclusivement affectée a l'acquisition de matériels et constructions strictement nécessaires a l'exploitation du Journal ou de la revue, ou de déduire de ces résultats les dépenses exposées en vue du même objet.

La moins-value de recette fiscale pour le budget général résultant de l'application de cette disposition peut être évaluée pour 1995 à 230 millions de francs. Elle serait légèrement inférieure en 1996.

a) Les entreprises bénéficiaires

Le dispositif de l'article 9 bis du code général des impôts concerne les entreprises qui exploitent :

- un journal quotidien ou hebdomadaire ; sont assimilées aux quotidiens, les publications à diffusion départementale ou régionale, consacrées principalement à l'information politique et générale paraissant au moins une fois par semaine et dont le prix de vente n'excède pas de 75 % celui de la majorité des quotidiens (C.G.I., art.39 bis-1 bis B) ;

- une revue mensuelle ou bimensuelle consacrée pour une large part à l'information politique.

Les revues pornographiques, perverses ou de violence sont exclues par détermination de la loi.

Les entreprises exploitant des revues scientifiques, culturelles, techniques, sportives qui n'ont aucun lien avec l'actualité, ainsi que les agences de presse, ne sont pas concernées par ce dispositif.

b) Les déductions susceptibles d'être opérées en application de l'article 39 bis

(1) La déduction directe des dépenses d'acquisition d'éléments d'actifs

Par dérogation aux règles de droit commun, l'article 39 bis autorise les entreprises qui bénéficient de ces dispositions à déduire dans certaines limites des résultats imposables d'un exercice donné les dépenses exposées au cours dudit exercice en vue de l'acquisition d'éléments d'actifs strictement nécessaires à l'exploitation de la publication éligible.

(2) La constitution d'une provision spéciale en franchise d'impôt

Les entreprises sont autorisées pour déterminer l'assiette de l'impôt sur le revenu ou de l'impôt sur les sociétés, -alternativement-, à constituer, au moyen des bénéfices de leurs exercices, des provisions destinées à leur permettre de faire face au financement ultérieur de leurs dépenses d'acquisition d'éléments d'actifs.

(a) Constitution de la provision

Pour être admises en déduction des bases de l'impôt sur le revenu ou sur les sociétés, les provisions spéciales doivent avoir été effectivement pratiquées en comptabilité. Le montant de ces provisions est, en outre, soumis aux mêmes limitations que dans le cadre des déductions directes des dépenses d'investissement.

(b) Condition d'utilisation de la provision

Les provisions spéciales que les entreprises sont autorisées à constituer en franchise d'impôt doivent être utilisées à l'acquisition d'éléments strictement nécessaires à l'exploitation de la publication éligible avant la fin de la cinquième année suivant celle au cours de laquelle elles ont été constituées. L'utilisation de chaque dotation doit donc être suivie isolément.

(3) Le sort de la provision

(a) La provision a été utilisée conformément à son objet

La provision est affectée à l'amortissement des éléments d'actif acquis par prélèvement sur son montant. La base de calcul de l'amortissement résiduel de ces éléments est égale à la différence entre le prix de revient effectif et le montant des sommes prélevées sur la provision en vue de financer leur acquisition.

(b) La provision n'a pas été utilisée ou a été détournée de son objet

La provision est, à défaut d'emploi conforme à son objet dans le délai imparti, rapportée aux bénéfices soumis à l'impôt sur le revenu ou sur les sociétés au titre de l'année d'expiration de ce délai. En cas d'utilisation partielle, il est admis que seule la fraction non employée soit rapporté aux bénéfices. Si avant l'expiration du délai de cinq ans, la provision était détournée de son objet, elle serait rapportée aux bénéfices imposables de l'exercice au cours duquel elle aurait été ainsi utilisée.

c) Les limites du dispositif

Les bénéfices susceptibles d'être affectés au financement d'éléments d'actifs immobilisés strictement nécessaires à l'exploitation d'un journal de ces éléments sont soumis à une double limite :


• D'une part, la déduction directe des investissements ou celle de la provision est autorisée dans la limite de :

- 30 % du bénéfice (5)5 ( * ) pour la généralité des publications ;

- 60 % du bénéfice pour les quotidiens et les publications qui leur sont assimilées (publications à diffusion départementale ou régionale consacrées principalement à l'information politique et générale, paraissant au moins une fois par semaine et dont le prix de vente n'excède pas de 75 % celui de la majorité des quotidiens).


• D'autre part, les sommes déduites des bénéfices ne peuvent être utilisées que pour financer une fraction du prix de revient des investissements éligibles fixée à :

- 40 % pour la généralité des publications ;

- 80 % pour les quotidiens et les publications qui leur sont assimilées, telles que ci-avant définies.

Par ailleurs, seule l'acquisition de matériels et de constructions peut constituer un emploi valable des sommes déduites, directement ou sous forme de provisions, des bénéfices imposables en application de l'article 39 bis. Les acquisitions de terrains et de participations réalisées après le 1er janvier 1980 ne sont plus admises (loi de finances pour 1980, article 80).

Le prix d'acquisition des éléments affectés exclusivement aux besoins de l'exploitation d'un journal peut être déduit ou considéré comme un emploi valable de la provision. Si un élément d'actif acquis par une entreprise est affecté pour partie à des travaux autres que ceux se rattachant à l'activité du journal, son prix de revient ne peut être déduit directement ou constituer un emploi valable des provisions spéciales qu'en proportion de l'utilisation effective de cet élément pour les besoins du journal.

C. LES AIDES DE L'ÉTAT AUX NMPP

En juillet 1993, un plan de réforme des NMPP a été présenté avec pour objectif de réduire en 4 ans le coût de distribution au profit des éditeurs, afin de dégager, de 1994 à 1997, 737 millions de francs de diminution de charges, soit le quart des charges de la société de messagerie, grâce à la modernisation des NMPP et à la restructuration du réseau des dépositaires.

Dans cette optique, la convention du 2 mai 1994 entre l'État et le Conseil de gérance des NMPP, représenté par son président, a pour finalité de vérifier qu'à l'issue du plan quadriennal, et au travers de la redistribution annuelle des économies réalisées par les NMPP, le coût de distribution moyen aura effectivement diminué d'au moins trois points pour les éditeurs, et la rémunération des diffuseurs aura été réévaluée d'une somme dont le montant représente un point de commission.

Le volet social de la réforme des NMPP

Par un protocole d'accord signé le 27 décembre 1993, les pouvoirs publics ont décidé d'accorder leur participation financière au plan social prévoyant 700 départs échelonnés de 1994 à 1997, assorti d'une convention FNE dérogatoire à la règle commune et concernant 374 ouvriers. L'État contribuera pour 136,4 millions de francs et les NMPP pour 80 millions de francs au financement de l'allocation spéciale (départ à 55 ans) ; au titre de l'indemnité de licenciement, les NMPP verseront 220 millions de francs supplémentaires.

En contrepartie du soutien de l'État, le protocole d'accord du 27 décembre 1993 prévoit, outre le contrôle de la mise en oeuvre du plan social confie a des magistrats de la Cour des comptes, un contrôle concernant la réalisation des objectifs du plan de modernisation. Ainsi, aux termes de l'article 4 de ce texte, il est stipule que la « détermination et l'évaluation des objectifs annuels portant sur les économies de gestion consécutives à la réalisation du plan et le contrôle de leur répartition effective au profit des éditeurs adhérents des coopératives associées des NMPP, ainsi que des diffuseurs de presse, sont organisés par le Commissaire du Conseil supérieur des messageries de presse, dans le cadre d'un accord passé à cet effet avec le Conseil de gérance des NMPP »


Les objectifs d'exécution du plan de modernisation ont été dépassés en 1995

Les économies globales ont atteint 226 millions de francs, au lieu des 170 millions de francs initialement prévus, soit un dépassement d'un tiers de l'objectif. A ce rythme la % des économies inscrites au plan seront réalisées des la fin de 1995, et non fin 1996, comme prévu.

Les réductions d'effectifs (3 099 personnes au 31.12.94 contre 3479 au 01.1.94) ont permis de faire baisser les charges de personnel de 1 479 millions de francs à 1 341 millions de francs.

L'accélération de la restructuration du réseau des dépositaires dont le nombre est passée de 974, à la fin du premier trimestre 1994, à 583 au 30 juin 1995. Il est à noter qu'à l'inverse, le nombre des dépôts équipés « Presse 2000 » est passé de 134 a 219 pendant la même période, l'objectif affiché étant la modernisation au terme de la restructuration, fin 1997, des 350 dépôts restant.

Conformément aux termes de la convention entre l'État et les NMPP, les économies réalisées seront redistribuées aux éditeurs et aux diffuseurs. Sur la réduction de 4 points prévue dans le plan du 1er juillet 1993, 3 ont d'ores et déjà été réalises au 1 er juillet 1995.

Globalement les éditeurs ont bénéficié d'une diminution de 0,75 % en moyenne, du coût de distribution, soit plus de 113 millions de francs, au l er octobre 1994, et 1,50% au l er juillet 1995, soit une réduction supplémentaire de 206,5 millions de francs.

De même, l'amélioration de la rémunération, dont les critères ont été fixés par un accord entre les NMPP et l'UNDP du 30.9.94, des 12 103 diffuseurs bénéficiaires de la mesure a atteint 0,25% de commission au 1er octobre 1994 et 0,50% au 1er juillet 1995, calculés par rapport aux ventes au prix fort, ce qui représente respectivement une redistribution de 38 millions de francs en 1994 et 76 millions de francs en 1995.

La modernisation du réseau des diffuseurs s'est poursuivie et près de 500 lieux de vente ont été réaménagés permettant souvent une augmentation sensible des ventes.


La réforme des « invendus »

La mise en place, dans 256 dépôts représentant 86 % des ventes, d'un système de transparence comptable permettant aux NMPP de s'assurer, à tout moment et titre par titre, que le crédit fait au dépositaire correspond exactement à la somme des crédits que le dépositaire fait à ses diffuseurs, a permis d'améliorer considérablement la connaissance des invendus, dont le taux (13 %) se rapproche désormais de la moyenne européenne.

Cette réforme a toutefois suscité des critiques. Elles frappent, en effet, lourdement la presse vendue à prix modique dont les taux d'invendus sont très faibles, comme Télé Z.


Le renforcement du réseau de distribution en banlieue parisienne

Une action de prospection lancée en mai 1995 a permis de recenser 518 nouveaux commerces désireux de vendre la presse quotidienne, dont 333 ont commercialisé la presse (35% de stations service, 34% de cafés tabac, 14% de supérettes).

D. LES ABONNEMENTS À L'AGENCE FRANCE PRESSE

Le chapitre 34-95, abonnements souscrits par les administrations au service d'informations générales de l'AFP, des crédits des services généraux du Premier ministre, est doté de 578,17 millions de francs, en hausse de 11,35 millions de francs par rapport à 1995.

Sur un chiffre d'affaires de 1 154,72 millions de francs en 1995, ces abonnements représentaient 48,45 % des produits d'exploitation de l'agence. Ce pourcentage devrait baisser à 46,91 % en 1995. La barre des 50 % a été franchie en 1991. En 1985, les abonnements de l'État représentaient 55 % des recettes de l'AFP.

III LES AIDES DIRECTES DE L'ÉTAT A LA PRESSE

A. LES FONDS D'AIDE AUX QUOTIDIENS À FAIBLES RESSOURCES PUBLICITAIRE

Ces deux fonds, qui étaient dotés de 18,4 millions de francs en 1995 seront dotés de 27,3 millions de francs en 1996.

Deux décrets, du 12 mars 1986 pour les quotidiens nationaux d'information politique et générale à faibles ressources publicitaires et du 28 juillet 1989 pour les quotidiens régionaux, départementaux et locaux d'information politique et générale à faibles ressources de petites annonces fixent un certain nombre de critères d'accès pour bénéficier de ces aides.

Notamment, les journaux doivent :

Ø être imprimés sur papier journal pour 90 % au moins de leur surface ;> paraître au moins cinq fois par semaine ;

Ø pour les quotidiens nationaux : avoir un prix de vente en pourcentage compris entre + 30 % et - 10 % du prix de vente moyen pondéré des quotidiens nationaux d'information politique et générale ;

Ø pour les quotidiens de province : avoir un prix de vente pour l'édition locale la plus diffusée compris entre 90 % et 130 % du prix de vente moyen des quotidiens régionaux, départementaux ou locaux d'information politique et générale ;

Ø pour les quotidiens nationaux : avoir un tirage moyen n'ayant pas excédé 250.000 exemplaires et une diffusion n'ayant pas excédé 150.000 exemplaires ;

Ø pour les quotidiens de province : avoir un tirage moyen n'ayant pas excédé 70.000 exemplaires et une diffusion moyenne n'ayant pas excédé 60.000 exemplaires ;

Ø pour les quotidiens nationaux : avoir des recettes de publicité représentant moins de 25 % des recettes totales ;

Ø pour les quotidiens de province : avoir des recettes de petites annonces représentant moins de 5 % des recettes publicitaires totales.

En outre, l'aide ne peut bénéficier à un quotidien de province dont la diffusion dans sa région ou son département est la plus forte des quotidiens régionaux, départementaux ou locaux ; ni, pour cette même catégorie, aux entreprises de presse éditant également des publications non vendues au public.

1. Le fonds d'aide aux quotidiens nationaux d'information politique et générale à faibles ressources publicitaires

a) Un dispositif datant de 1982

Dans le prolongement des travaux de la table ronde « Parlement-Presse-Administration », décidée le 19 novembre 1980 par le Premier ministre en vue d'examiner le régime des aides fiscales accordées aux entreprises de presse et un projet de création d'aide spécifique aux journaux à faibles ressources publicitaires, le Gouvernement a institué, par décret n° 82-282 du 26 mars 1982, pour les années 1982 et 1983, une aide exceptionnelle aux quotidiens nationaux d'information générale et politique à faible ressources publicitaires.

Le décret du 26 mars 1982 a été prorogé par le décret n° 84-371 du 16 mai 1984 pour l'année 1984 et par le décret n°85-569 du 29 mai 1985 pour l'année 1985.

Le décret n° 86-616 du 12 mars 1986 instituant une aide aux quotidiens nationaux d'information politique et générale à faibles ressources publicitaires a pérennisé cette aide à compter du 1er janvier 1986.

b) Modalités de répartition

La subvention d'exploitation est réservée aux quotidiens de langue française d'information politique et générale à diffusion nationale, paraissant 5 jours au moins par semaine, imprimés sur papier journal et dont le tirage et la diffusion payante sont respectivement inférieurs, en moyenne, à 250 000 et 150 000 exemplaires. Leur prix de vente doit être compris dans une fourchette de + 30 % et - 10 % du prix de vente moyen pondéré des quotidiens nationaux d'information politique et générale. Enfin, leurs recettes publicitaires ne peuvent excéder 25 % de leurs recettes totales. Ces conditions sont vérifiées sur les données de l'année précédant celle de l'attribution de l'aide.

La répartition du montant global de l'aide est définie selon les principes suivants :

- proportionnellement au nombre d'exemplaires vendus,

- dans la limite d'un plafond de subvention par exemplaire vendu égal à 6 % du prix moyen pondéré des quotidiens nationaux d'information générale et politique,

- en affectant le montant unitaire de l'aide d'une dégressivité en fonction de l'importance des recettes publicitaires du quotidien bénéficiaire, si elles représentent plus de 15 % des recettes totales du journal.

L'aide est répartie annuellement par décision du ministre chargé de la communication.

La dotation inscrite dans la loi de finances initiale pour 1994 s'élevait à 12,97 millions de francs, soit une diminution de 6,38 % du montant initial de la loi de finances pour 1993, réajustement inférieur, toutefois, à celui, général, recommandé par la lettre de cadrage du Premier ministre en date du 19 mai 1993 pour les crédits d'intervention.

Trois quotidiens ont bénéficié de l'aide au titre de l'année 1994 : La Croix, L'Humanité et Présent.

Les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 1995 sont inchangés à 12,97 millions de francs, ce qui correspond à la reconduction des montants votés en 1994. L'évolution de ces crédits n'a donc pas été affectée par les dispositions générales de cadrage qui ont présidé à l'élaboration du Projet soumis au Parlement.

Les trois mêmes quotidiens ont bénéficié de l'aide au titre de l'année 1995.

En 1995, la répartition a été faite sur la base d'une subvention de 0,2588288 F par exemplaire effectivement vendu au cours de l'année 1994, le prix moyen pondéré des quotidiens nationaux d'information politique et générale s'élevant à 5,74 F. Enfin, l'aide à l'exemplaire représente 4,5 % du prix moyen pondéré des quotidiens nationaux d'information politique et générale.

Récapitulatif du fonds d'aide (depuis 1989 seulement)

(en millions de francs)

* LFI 92 = 13,4 millions de francs et LFR 92 = 3,0 millions de francs

** LFI 93 = 13,8 millions de francs et LFR 93 = 5,8 millions de francs

n.b : les dotations pour 1995 ne sont pas encore versées.

Il n'est pas prévu, pour le moment, d'étendre ce dispositif à d'autres types de publications, les quotidiens régionaux et départementaux bénéficiant déjà du décret n° 89-528 du 28 juillet 1989.

Par contre, et conformément au plan de réforme des aides à la presse, le projet de loi de finances pour 1996 prévoit l'augmentation de 50 % de la dotation de cet article, portée à 19,335 millions de francs. Cette augmentation pourrait s'accompagner éventuellement d'une modification des conditions d'accès liées au prix.

2. Le fonds d'aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux d'information politique et générale à faibles ressources de petites annonces

a) Origine

Conformément aux conclusions du groupe de travail presse-administration mis en place en 1987-1988, a été élaboré un décret instituant une aide aux quotidiens régionaux, départementaux et locaux d'information politique et générale à faibles ressources de petites annonces.

b) Modalités de répartition

Aux termes du décret n° 89-528 du 28 juillet 1989, l'aide est réservée aux quotidiens de langue française d'information politique et générale à diffusion régionale, départementale ou locale :

- paraissant cinq jours au moins par semaine et imprimés sur papier journal,

- dont le tirage et la diffusion payante sont respectivement inférieurs, en moyenne, à 70 000 et 60 000 exemplaires,

- dont l'édition locale la plus diffusée est vendue à un prix compris entre 90% et 130% du prix de vente moyen des quotidiens régionaux, départementaux ou locaux d'information politique et générale,

- dont les recettes de petites annonces n'excèdent pas 5 % de leurs recettes publicitaires totales,

- qui, dans la région ou le département où ils sont diffusés, n'ont pas la diffusion la plus forte des quotidiens régionaux, départementaux ou locaux et, par conséquent, ne sont pas en position dominante.

Sont exclues du bénéfice de cette aide les entreprises de presse qui ne satisfont pas aux conditions définies à l'article 30, 1er alinéa du décret n° 55-486 du 30 avril 1955, relatif à diverses dispositions d'ordre financier, ou qui éditent également des publications gratuites ; une période transitoire d'un an était prévue pour cette dernière exclusion qui n'a pris effet que le 1er janvier 1990.

La répartition du montant global annuel de l'aide est définie proportionnellement au nombre d'exemplaires vendus et dans la limite d'un plafond de subvention par exemplaire vendu égal à 6 % du prix de vente moyen des quotidiens régionaux, départementaux ou locaux d'information politique et générale. L'aide est repartie annuellement par décision du ministre chargé de la communication.

La dotation inscrite dans la loi de finances initiale pour 1994 s'élevait à 5,4 millions de francs, soit une diminution de 6,53 % du montant initial de la loi de finances pour 1993, réajustement inférieur, toutefois, à celui, général, recommandé par la lettre de cadrage du Premier ministre en date du 19 mai 1993 pour les crédits d'intervention. Les neuf quotidiens bénéficiaires du fonds, en 1993, ont également perçu une subvention en 1994.

Les crédits inscrits dans le projet de loi de finances pour 1995 ont reconduit les montants votés en 1994. Le plan de réforme des aides à la presse proposait un doublement des crédits du fonds d'aide aux quotidiens de province.

Le projet de loi de finances pour 1996 procède à une augmentation de près de 50 % de sa dotation, qui est portée à 8 millions de francs.

Évolution des crédits du fonds d'aide aux quotidiens de province : évolution du montant global de l'aide et évolution du taux unitaire de subvention

(pour 1995, les dotations sont en cours de calcul)

Récapitulatif depuis l'origine du fonds d'aide (1989)

* LFI 1993= 5 756 800 F et LFR 1993 = 4 200 000 F

n e = dépôt d'une demande effectué mais quotidien inéligible

n.b : le calcul des dotations 1995 est en cours.

3. Ces fonds sont financés par une taxe sur la publicité télévisée

a) Historique

Conformément aux recommandations de la table ronde Parlement-Presse-Administration (novembre 1980 juin 1981), une taxe sur la publicité télévisée a été créée par la loi de finances pour 1982, afin de financer l'aide aux quotidiens nationaux d'information politique et générale à faibles ressources publicitaires. Reconduite parallèlement aux prorogations du décret instituant l'aide, cette taxe a été pérennisée par la loi de finances pour 1986 (article 564 nonies du code général des impôts).

Cette taxe fiscale indirecte est inscrite au budget général (État A) et son Produit n'est pas affecté, en vertu du principe de non affectation des ressources applicables au budget général de l'État.

La taxe sur la publicité télévisée est « due par les personnes qui assurent la régie des messages de publicité reçus en France sur les écrans de télévision ». Sont imposables les messages publicitaires diffusés à partir d'un émetteur implante sur le territoire français et reçus en France sur les écrans de télévision, à l'exception des messages diffusés pour le compte d'oeuvres reconnues d'utilité publique à l'occasion de grandes campagnes nationales. Les redevables de la taxe sont les personnes qui assurent la régie des messages de publicité et qui peuvent être soit des sociétés de programme ou des organismes diffusant la publicité sur des écrans de télévision, soit des régisseurs mandatés par ces chaînes ou organismes.

Les tarifs de la taxe sont fixés en fonction du prix hors taxes des messages publicitaires :

- 10 F par message dont le prix est au plus égal à 1 000 F,

- 30 F par message dont le prix est supérieur à 1 000 F et au plus égal à 10 000 F

- 220 F par message dont le prix est supérieur à 10 000 F et au plus égal à 60 000 F,

- 420 F par message dont le prix est supérieur à 60 000 F.

Le montant total effectivement recouvré au titre de cette taxe s'élève à 59 millions de francs pour l'année 1993. Il atteint les 60 millions de francs en 1994.

b) Évolution récente

Un décret du 30 décembre 1994 est venu modifier les plafonds du tarif d'imposition de la taxe parafiscale alimentant le fonds de soutien à l'expression radiophonique.

Ce décret n'aurait pas dû avoir une quelconque incidence sur le régime de la taxe sur la publicité télévisée. En fait, l'augmentation de la taxe parafiscale a été compensée par une baisse des tarifs de la taxe sur la publicité télévisée. Lors de l'examen du projet de loi de finances rectificative pour 1994 le Parlement a adopté la modification de l'article 302 du CGI qui fixe les tarifs du barème d'imposition de la taxe sur la publicité télévisée. En conséquence, le produit de cette taxe fiscale, à marché publicitaire constant, passerait de 75 millions de francs à 50 millions de francs en 1995.

Les nouveaux tarifs de la taxe spéciale sur la publicité télévisée (au 01/01/1995) sont fixés en fonction du prix hors taxes des messages publicitaires :

- 10 F par message dont le prix est au plus égal à 1 000 F,

- 25 F par message dont le prix est supérieur à 1 000 F et au plus égal à 10 000 F,

- 135 F par message dont le prix est supérieur à 10 000 F et au plus égal à 60 000 F,

- 225 F par message dont le prix est supérieur à 60 000 F.

Votre rapporteur avait, dans son précédent rapport, regretté la divergence progressive entre le rendement croissant de cette taxe et le montant de l'aide accordée aux quotidiens en faveur desquels elle avait été instituée -bien qu'il ne s'agisse pas d'une taxe parafiscale affectée.

Il se félicite en conséquence de l'augmentation significative du montant de l'aide qui devrait désormais représenter plus de 50 % du produit de la taxe.

B. LE FONDS D'AIDE A L'EXPANSION DE LA PRESSE FRANÇAISE À L'ÉTRANGER

1. Des crédits stables

Le chapitre 43-03, article 10, Fonds d'aide à l'expansion de la presse française à l'étranger, des crédits des Services généraux du Premier ministre, est doté dans le projet de loi de finances pour 1996 de 36,97 millions de francs, en reconduction par rapport à la loi de finances initiale pour 1995.

Le fonctionnement du Fonds (arrêté du 25 février 1991)

Le coût des différentes actions de promotion prévues est établi d'une manière détaillée, par pays, dans le dossier de demande d'aide qui est soumis par chaque éditeur ou Par les organismes collectifs d'exportation comme les N.M.P.P. et Unipresse, chaque année pour l'année suivante.

Après avis technique de la commission d'exportation du Conseil supérieur des messageries de presse, puis proposition chiffrée de la commission mixte pour la diffusion de la presse française dans le monde, le ministre arrête le montant de l'aide allouée à chaque éditeur qui en est informé en même temps que des actions de son plan de promotion spécialement retenues.

Le paiement a lieu lorsque les bénéficiaires de l'aide ont justifié par la production de factures que les dépenses faisant l'objet de la subvention ont bien été réalisées. Toutefois des avances sont effectuées sur le montant du crédit attribué aux N.M.P.P. et à Unipresse.

Tous les types de publications françaises, inscrites à la commission paritaire des publications et agences de presse, et justifiant d'une part d'un marché à l'étranger, d'autre part d'un plan de promotion sérieux, peuvent prétendre à une aide du fonds.

Dans son précédent rapport, votre rapporteur avait dénoncé la composition de la commission, qui faisait la part trop belle aux représentants de l'administration. Il ne peut donc que se réjouir de constater que la composition de la commission ait été modifiée dans le but de permettre le développement de l'exportation par abonnement et d'assurer une meilleure coordination des intervenants publics. Elle comprend désormais un spécialiste de la vente par abonnement ainsi que des représentants du ministre de l'industrie, des postes et TÉLÉCOMmunicat.ons et du commerce extérieur et du ministre de la recherche.

2. Un impact limité

En 1994, les ventes de presse française, représentant 2 000 titres exportés dans 104 pays, ont atteint, selon les NMPP, toutes zones confondues, 228 millions d'exemplaires, totalisant un chiffre d'affaires de 1809 millions de francs, en légère hausse par rapport à 1993 (+ 1,2 %).Près de 64 % des ventes sont réalisées au sein de l'Union européenne : 54,5 % du chiffre d'affaires est effectué en Europe francophone (Belgique, Luxembourg et Suisse) et 9,3 % dans l'Union européenne (hormis les trois pays précités).

Le dynamisme de la presse française à l'exportation est donc réel, puisque les ventes globales de titres français à l'étranger étaient de 158,6 millions en 1990 et de 167,8 millions en 1992. En quatre ans (1990-1994), la progression est de 43,75 %.

Entre 1992 et 1993, les ventes à l'étranger, tous pays confondus, des titres aidés par le Fonds sont restées sensiblement les mêmes, passant de, 70,9 millions d'exemplaires à 70,7 millions, soit une légère baisse de 0,36 %. Hors Communauté européenne, elles se sont améliorées de 2,9 %, passant de 22,4 millions d'exemplaires à 23,1 millions.

Les ventes réalisées dans les pays accessibles à l'aide du Fonds sont inférieures à celles qui sont effectuées dans la Communauté européenne et en Suisse. Elles représentent 33 % des exportations totales. Deux exceptions sont notables, toutefois : la presse d'Afrique et du tiers monde et la presse religieuse, plus vendues dans les pays du Fonds que dans les pays où l'exportation n'est pas subventionnée.

Si l'on ne tient compte que du chiffre d'affaires transitant par les NMPP, les ventes vers les pays du Fonds représentent, en 1994, que 380 millions de francs, sur un chiffre d'affaires total export de 1,8 milliard de francs, soit le cinquième. Il faut cependant noter qu'ils comprennent 55 % du coût de transport global et 12,5 % du coût de transport supporté par les NMPP sur l'activité exportatrice.

Parmi les pays aidés par le fonds, l'Afrique, l'Amérique du Nord et le Maghreb constituent les trois zones où se trouve réalisée la plus forte part du chiffre d'affaires à l'exportation. Après les trois pays d'Europe francophone (Belgique, Luxembourg et Suisse), le Maroc est le premier importateur de presse française, suivi par le Canada.

L'aide apportée par le fonds permet avant tout de maintenir autant que possible la présence de la presse française là où les intérêts commerciaux strictement entendus des éditeurs ne les conduiraient pas en période de récession. En outre, dans la mesure où l'aide est de plus en plus réorientée vers des marchés difficiles ou éloignés comme ceux du Vietnam, du Cambodge, de l'Inde ou de la Malaisie, mais aussi ceux d'Europe de l'Est, qui, compte tenu des faibles quantités transportées, présentent le tarif au kilomètre le plus élevé, il en résulte une aide très élevée à l'exemplaire vendu.

C. LE REMBOURSEMENT A LA SNCF DES RÉDUCTIONS DE TARIF ACCORDÉES À LA PRESSE

Le chapitre 41-01, article 10, Réduction de tarif SNCF pour le transport de presse, des crédits des Services généraux du Premier ministre, est doté de 140,42 millions de francs, soit une baisse de 21,22 % par rapport à 1995 (178,25 millions de francs).

Depuis 1948, en effet, la presse bénéficie pour l'acheminement des publications et le retour des invendus d'une réduction de 50 % sur les tarifs de la SNCF. La convention du 30 décembre 1988 entre l'État et la SNCF a supprimé l'aide au retour des invendus.

En réalité, le coût du transport par la SNCF n'est pas intégralement pris en charge par l'État, qui a laissé à l'entreprise une charge croissante de ce coût.

Le coût du transport de la presse par la SNCF

(en millions de francs)

Au total, et après un règlement partiel en 1992, l'État devrait verser a la SNCF pour les années 1991, 1992 et 1993 seulement, un montant de 39,8 millions de francs auquel s'ajoute le solde dû pour 1994 qui n'a pas toujours été réglé, d'un montant de 42,6 millions de francs, soit une dette totale de 82,4 millions de francs.

Par ailleurs, la SNCF estime que le transport de la presse coûtera, en 1996, 200 millions de francs, et non 140 millions de francs, somme inscrite au le projet de loi de finances, soit un manque à gagner pour l'entreprise de 60 millions de francs.

D. LES ALLÉGEMENTS DE CHARGES DE TÉLÉCOMMUNICATION

Le chapitre 41-02, article 10, Communications téléphoniques des correspondants de presse, des crédits des Services généraux du Premier ministre, est doté de 30,67 millions de francs, soit une stricte reconduction des crédits votés en 1995.

1. Une aide aménagée

En application des articles R 15 et suivants du code des Postes et Télécommunications, bénéficient d'une réduction de 50 % du montant hors taxes des communications demandées par leurs correspondants locaux et du tarif des liaisons louées de presse les quotidiens nationaux et régionaux d'information politique et générale, les hebdomadaires régionaux d'information politique et générale (depuis le décret n°93-531 du 26 mars 1993) et les agences de presse télégraphiques.


Modalités d'application

Le taux de réduction de tarif est de 50 % sur les dépenses téléphoniques et sur les liaisons louées. En ce qui concerne ces dernières, la réduction est appliquée sur la totalité du montant du tarif de location. De même, en ce qui concerne les dépenses téléphoniques, la réduction est appliquée sur la totalité du montant des communications des correspondants individuels.

En revanche, le taux de réduction de tarif s'applique à 60 % des communications des bureaux régionaux, s'ils ne sont pas équipés de liaisons louées. Un abattement forfaitaire préalable de 40 %, à raison de 30 % pour exclure les communications locales et 10 % pour exclure les communications non rédactionnelles, qui ne rentrent pas dans le champ d'application de l'aide, a été décidé en 1976 par la commission mixte. En effet, il n'est pas possible d'individualiser, sur les factures de FRANCE TÉLÉCOM, les communications locales et non rédactionnelles.

Pour les bureaux régionaux équipés de liaisons louées, l'abattement forfaitaire est porté à 75 %.


Les extensions et aménagements de l'aide

Les quotidiens et les publications qui leur sont assimilées peuvent obtenir, depuis le décret 77-1221 du 8 novembre 1977, un allégement de 40 % de leurs frais de transmission par fac-similé.

Par ailleurs, pour tenir compte de la spécificité des hebdomadaires régionaux, des aménagements ont du être apportés aux textes. Si les communications provenant du siège sont exclues du bénéfice du remboursement pour les quotidiens et les agences de presse (seules sont prises en compte celles provenant des bureaux vers le siège), il s'est avéré difficile de se conformer à l'interprétation stricte des articles R 15 et suivant du code des PTT en ce qui concerne les hebdomadaires : ceux-ci n'ayant pas toujours de bureaux détachés, les communications proviennent souvent du siège vers le lieu d'impression, véritable centre rédactionnel, ce qui excluait un grand nombre de communications du bénéfice de l'allégement. La commission mixte pour allégement des charges téléphoniques est revenue sur cette interprétation le 24 novembre 1993.

L'alternative est désormais la suivante :

- soit le journal dispose de bureaux détachés et seuls les communications de ces bureaux vers le siège donne lieu à la réduction ;

- soit le journal ne dispose pas de bureaux détachés, auquel cas les communications transmises du siège administratif vers le lieu d'assemblage et de fabrication -véritable centre rédactionnel où l'information est traitée par l'équipe de journalistes- peuvent donner lieu à remboursement.

En outre, les communications des correspondants qui arrivent au lieu de fabrication du journal, bénéficient également de l'allégement des charges téléphoniques dès lors que conformément à l'article R 15 des PTT, elles y font l'objet d'un traitement rédactionnel par une équipe de journalistes.

Enfin, l'aide s'est peu à peu étendue à d'autres moyens de transmission pour adapter les textes à l'évolution des techniques : au numéro vert, à la carte Pastel, à la transmission de documents écrits ou photographiques par le réseau NUMERIS et au

2. Une aide différée

Le règlement des réductions de tarif pour les communications téléphoniques correspondant aux dépenses effectuées du 1er janvier au 31 décembre de l'année en cours est, pour une part, effectué au cours de l'année et, pour une autre part, différé sur le budget de l'année suivante.

Ainsi, à la fin juin 1995, le crédit de 30,676 millions de francs affecté à allégement des charges téléphoniques pour l'exercice 1995 a été utilisé à hauteur de 58,6 % (17,57 millions de francs). Il a permis de rembourser, outre les dépenses des deux premiers bimestres 1995, des dépenses relatives aux quatrième, cinquième et sixième bimestres 1994.

A l'heure actuelle, seule les deux premiers bimestres de l'année 1995 ont été remboursés. Les crédits se répartissent comme suit :

Allégements de charges de télécommunications

Janvier à avril 1995 (en milliers de francs)

IV. LES NOUVELLES AIDES A LA PRESSE PROPOSÉES PAR LE PROJET DE LOI DE FINANCES POUR 1996

A UN PLAN D'AIDE QUI S INSCRIT DANS LA CONTINUITÉ

Au terme d'une large concertation avec la profession, le ministre du Budget en charge de la Communication a, le 5 mai 1995, rendu publiques les mesures arrêtées en faveur de la presse ayant « pour objet de favoriser la distribution de la presse, la défense du pluralisme et l'allégement des coûts d'exploitation ».

Le plan d'aide à la presse annonce le 5 mai 1995


• 1 ÈRE MESURE : abaissement des charges sociales des porteurs

Pour l'ensemble des quotidiens et publications assimilées : abaissement à 4 % du taux es charges sociales des porteurs et vendeurs colporteurs de presse.

Cette mesure devrait faire l'objet d'un arrêté du ministère des Affaires sociales, modifiant le précédent arrêté portant fixation de l'assiette forfaitaire des cotisations dues pour les vendeurs colporteurs de presse, et les porteurs de presse quotidienne en date du 7 janvier


• 2 ÈME MESURE : exonération des charges sociales des porteurs pour les quotidiens nationaux

Afin de faciliter le démarrage du portage pour les quotidiens nationaux, ceux-ci Pourraient compenser totalement le coût des charges sociales, pendant une durée de 5 ans.

Cette mesure prendrait la forme d'une compensation par dotation budgétaire à ces entreprises, pour la part comprise entre 4 % et 0 %.


• 3 ÈME MESURE : contribution à la modernisation des entreprises de messageries de presse

L'État prend l'engagement d'apporter une contribution financière à la modernisation des messageries de presse dans la limite de 140 millions de francs, sous réserve que les quatre conditions suivantes soient préalablement réunies :

1/ Une véritable modernisation institutionnelle des NMPP ;

2/ L'accélération du plan de modernisation actuel, dont les objectifs, et notamment la réduction de la marge de rémunération des NMPP à 10 % devraient être réalisées en 3 ans au lieu de 4 ans ;

3/ La mise en place d'un nouveau plan de modernisation qui devrait permettre de voir la commission des messageries s'établir au plus à 8 % ;

4/ La présentation de mesures précises, justifiant cette contribution et permettant des économies pérennes.


• 4 ÈME MESURE : abattement sur la taxe professionnelle des diffuseurs de presse

Il s'agit d'un dispositif d'abattement sur la base de la taxe professionnelle, qui conduira à une exonération de 2.000 F par an, en moyenne, par diffuseur.

Cette mesure devrait exonérer de la taxe professionnelle 50% des diffuseurs qui quittent aujourd'hui une taxe professionnelle de ce montant.


• 5 ÈME MESURE : moratoire du taux de TVA à 2,1 %

L'objectif est d'engager la négociation afin d'obtenir un moratoire européen des taux de TVA de la presse écrite permettant à la France de maintenir le taux de 2,1 % lors de a mise en oeuvre du régime définitif. Cette question devrait être négociée au niveau de 1'Union européenne dans les mois à venir.


• 6 ÈME MESURE : prorogation du cadre des plans sociaux des quotidiens
régionaux

Il s'agit d'ouvrir aux quotidiens régionaux des conditions stables de départ dans l'impression, dans les conditions d'âge dérogatoires actuellement en vigueur. Cette possibilité est aujourd'hui ouverte jusqu'au 31 décembre 1995. Ce cadre sera prorogé, dans les mêmes conditions, jusqu'au 31 décembre 1997.


• 7 ÈME MESURE :
doublement des deux fonds d'aide aux quotidiens à faibles ressources publicitaires

Cette mesure s'accompagnera d'une modification des critères d'accès concernant notamment les prix de vente afin qu'un prix de vente bas ne puisse pénaliser un titre.

Les deux fonds d'aide devant doubler pour atteindre 36 millions de francs. Les critères d'accès à ces fonds seraient modifiés par décret.


• 8 ÈME MESURE
: propositions visant à préciser le champ d'application des aides à la presse

Ø réexamen de l'ensemble des publications actuellement inscrites auprès de la Commission paritaire des publications et agences de presse (CPPAP) ;

Ø limitation par décret de la durée de validité de ces certificats d'inscription à 5 ans,

Ø limitation par décret du mandat des membres de la CPPAP à 3 ans renouvelables.


• 9 ÈME MESURE :
mise en place d'un fonds budgétaire permettant d'alléger de trois points les prêts consentis par le réseau bancaire

L'objet de ce fonds sera limité aux investissements dans les services et les nouvelles technologies multimédia. Ce fonds aura donc pour vocation essentielle d'aider la presse à « préparer son avenir ».

Sa dotation annuelle sera de 20 millions de francs pour une période de 5 ans.

Le fonds permettra de financer une bonification d'intérêt, calculée sur les cinq premières années de financement par emprunt et équivalente à 3 points du coût financier lié à l'emprunt contracté pour un projet. Elle sera versée dès l'acceptation du dossier par une commission chargée d'apprécier la conformité du projet à l'objet de ce fonds.

Seront éligibles toutes les publications inscrites à la Commission paritaire des publications et agences de presse.


• 10 ÈME MESURE : création d'un fonds d'aide de 5
millions de francs à la diffusion de la presse hebdomadaire régionale d'information générale et politique

A côté du doublement des deux fonds d'aide aux quotidiens à faibles ressources publicitaires, sera créé pour la presse hebdomadaire régionale un fonds de répartition doté de 5 millions de francs, en vue d'aider à la diffusion (vente au numéro) de la presse hebdomadaire régionale d'information politique et générale.

La dotation pour ce fonds d'aide pourrait être inscrite dans la loi de finances pour 1996. Les critères d'accès à ce fonds feraient par ailleurs l'objet d'un décret.

Les mesures présentées le 5 mai 1995 ne comportent pas de modification de l'article 39 bis du Code général des impôts, alors que les rapports des groupes de travail, constitués à la demande de M. BALLADUR, avaient insisté sur la nécessité d'une telle réforme, en fixant notamment des critères plus stricts pour l'éligibilité à cette mesure.

Elles s'organisent autour de trois axes :

- les aides à la distribution, par l'allégement des charges sociales liées au portage des quotidiens, et l'exonération totale de ces charges pour la presse quotidienne nationale, l'instauration d'un abattement sur la taxe professionnelle pour les diffuseurs de presse, une contribution financière à la modernisation des entreprises de messageries de presse -qui ne donne pas lieu à l'inscription de crédits budgétaires- ;

- les aides concourant au pluralisme, par l'abondement des deux fonds d'aide aux quotidiens à faibles ressources publicitaires,

- les aides tendant à alléger les coûts d'exploitation, par la prorogation des plans sociaux des quotidiens régionaux et la création d'un fonds permettant l'allégement de la charge financière des emprunts liés à l'investissement des entreprises de presse dans le multimédia.

En outre, ces aides s'accompagnent du réexamen de l'ensemble des titres des inscrits sur les registres de la commission paritaire des publications et agences de presse. Le certificat d'inscription délivré par cette commission est dorénavant limité à cinq ans. Le mandat des membres de la commission est imité à trois ans renouvelables.

Dans l'ensemble, les mesures donnent satisfaction à la presse q uotidienne à faibles ressources publicitaires, qui voient l'aide budgétaire en leur faveur doubler, et privilégient, au titre des mesures nouvelles, la presse hebdomadaire régionale.

Au terme des arbitrages budgétaires, le ministre de la Culture a obtenu que l'ensemble des mesures présentées par le précédent Gouvernement soit inscrit dans le projet de loi de finances pour 1996.

Les mesures nouvelles représentent 52,4 millions de francs, répartis entre :

- contribution au plan social de la presse parisienne (25 millions de francs) ;

- fonds d'aide à l'investissement dans le multimédia (20 millions de francs) ;

- fonds d'aide à la diffusion de la presse hebdomadaire régionale (5 millions de francs) ;

- aide au portage (2,4 millions de francs).

Les fonds d'aides aux quotidiens à faible ressources publicitaires, Nationaux et régionaux, augmentent de 50 %, soit une progression de 9 millions de francs.

Par ailleurs, la dépense fiscale représentée par les mesures fiscales en faveur des entreprises de presse (abaissement de charges sociales, allégements fiscaux) est évaluée à 82 millions de francs.

Au total, l'effort supplémentaire du budget en faveur de la presse, pour 1996, doit être chiffré à 143,4 millions de francs.

B. LES AIDES A LA DIFFUSION

1. Les aides à caractère social

Le chapitre 46-04 -ce chapitre créé par la loi de finances rectificative pour 1995 qui l'avait doté de 5,5 millions de francs pour l'article 10 et de 1,2 millions de francs pour l'article 20- comporte deux articles destinés à aider certaines opérations à caractère social concernant la presse :

- un article 10, Plan social de la presse parisienne, doté de 25 millions de francs,

Aux termes de l'accord du 6 décembre 1993, applicable aux 872 ouvriers et cadres techniques, les Pouvoirs publics ont consenti des mesures dérogatoires très significatives (départs en congé de conversion à 50 ans, entrée en préretraite dès 55 ans).

En contrepartie, les entreprises bénéficiaires se sont engagées à un blocage total des entrées dans les professions concernées des ouvriers et des cadres techniques du Livre.

L'année 1994 a vu la mise en place du cadre conventionnel du plan de restructuration.

Au 30 juin 1995, au terme de la deuxième phase du plan, 203 ouvriers et cadres techniques ont quitté leurs fonctions et bénéficient d'une convention AS/FNE et 176 autres sont entrés en congés de conversion.

Le ministère de la Communication s'étant engagé à assurer le financement des congés de conversion au-delà du 10 è mois, un crédit de 5,5 millions de francs a été ouvert en loi de finances rectificative pour 1995 sur le nouveau chapitre 46-04, article 10, intitulé « contribution au plan social de la presse parisienne ».

Une mesure nouvelle de 25 millions de francs a été inscrite dans le projet de loi de finances pour 1996, afin d'assurer le financement en 1996 de la contribution de l'État au plan social de la presse parisienne.

- un article 20, Aide au portage, doté de 2,4 millions de francs, vise à compenser totalement pendant cinq ans le coût des charges sociales liées au portage des quotidiens nationaux.

2. L'abattement de taxe professionnelle pour les diffuseurs

L'article 59 du présent projet de loi de finances institue un abattement de taxe professionnelle au profit des diffuseurs de presse.

Cet article fait l'objet d'un commentaire circonstancié dans le tome III du rapport général.

La dépense fiscale de cette mesure -à la charge des collectivités locales- peut être chiffrée à 60 millions de francs.

Lors de l'examen de la loi de finances rectificative pour 1995, le rapporteur général, M. Alain Lambert, et votre rapporteur avaient souhaité voir cette disposition appliquée dès le mois de juillet. Cependant, le dispositif adopté par le Sénat, et qui avait été rendu facultatif pour ne pas léser les finances des collectivités locales, n'avait pas été retenu par la commission mixte paritaire. Votre rapporteur se réjouit donc de constater que le Gouvernement s'est rendu aux arguments du Sénat, s'agissant du caractère facultatif de cette mesure pour les collectivités locales.

Cependant, lors de sa séance du 15 novembre 1995, l'Assemblée nationale a, sur la proposition du rapporteur général de la commission des finances et de M. Carrez, supprimé cet article, pour deux raisons :

- la crainte de discriminations entre collectivités locales,

- l'absence de compensation pour les communes.

C LES NOUVEAUX FONDS

Deux nouveaux fonds sont créés

1. Le Fonds d'aide à la diffusion de la presse hebdomadaire régionale d'information générale et politique

La création d'un fonds d'aide à la presse hebdomadaire régionale, doté de 5 millions de francs (chapitre 43-03, article 50), relève du souci des pouvoirs publics de soutenir la presse d'information politique et générale.

Ce fonds fonctionnera sur la base d'une répartition des crédits entre les différents bénéficiaires, selon des modalités et des critères d'accès qui ne sont pas encore déterminés.

2. Le Fonds d'aide à l'investissement dans le multimédia

Le plan d'aide à la presse mis en oeuvre par le Gouvernement, prévoit la mise en place d'un fonds spécifique, doté de 20 millions de francs, destiné à alléger de 3 % la charge des emprunts contractés par la presse auprès du réseau bancaire, en vue de réaliser des investissements dans les services et les nouvelles technologies multimédia.

Le financement de cette mesure pourrait provenir d'un transfert de 20 millions de francs, non utilisés à ce jour par la SOFARIS. Cette aide nouvelle ne se traduit donc pas par l'inscription d'une mesure nouvelle en projet de loi de finances pour 1996. La gestion de cette aide serait confiée à un établissement financier qui disposera à cet effet de crédits redéployés.

Donneraient lieu à un allégement les projets spécifiques de développement multimédia au titre des investissements matériels (équipements dans le cadre de la numérisation partielle ou totale du processus de traitement de l'information, achats de matériel logiciel et autres investissements nécessaires à la constitution et à la transmission de banques de données numériques), et des investissements immatériels (recours au conseil, recours à des travaux d'analyse, d'essais, de contrôle ou d'assistance technique, recrutement de cadres, dépenses de recherche et développement, de recherche appliquée et de lancement industriel et commercial).

D. UNE AIDE SPÉCIFIQUE DOIT-ELLE ÊTRE INSTITUÉE EN RAISON DE LA HAUSSE DU PRIX DU PAPIER ?

L'économie du secteur papetier s'est brutalement modifiée en 1994, provoquant des hausses de prix successives et très importantes qui ont conduit à une augmentation de 40 à 45 % du prix du papier journal en France au cours des huit premiers mois de 1995 ; les cours internationaux du papier étant passés, en moins d'un an, de 390 à 925 dollars.

L'industrie papetière, après la crise de 1990-1993, connaît un renversement de tendance. Au niveau mondial, la consommation de papiers et cartons a fait un bond de 9 % en 1994. En France, toutefois, la hausse de la consommation ne touche pas le papier journal, qui baisse de 2,5 %.

Ces hausses ramènent, certes, les prix à leur niveau de 1989, mais cette situation est plus difficile à supporter pour la presse dans la mesure où elle n'a pas encore récupéré la totalité des recettes publicitaires dont elle disposait alors.


• Pour permettre aux entreprises éditrices de passer le cap d'une hausse conjoncturelle du prix du papier au moment où la légère reprise des ressources publicitaires laisserait espérer une sortie de la crise, certains souhaitent l'octroi d'une aide exceptionnelle de l'État.

Des dispositions analogues ont déjà été adoptées dans le passé, en diverses circonstances pour des montants très variables (15 millions de francs en 1972, 60 en 1975, 5 en 1989, 6 en 1993).

Compte tenu de la part occupée par les achats de papier dans les coûts de production, une aide exceptionnelle atténuerait, certes, le risque de disparition de certains titres et éviterait à d'autres une hausse de prix de vente déjà élevés, mais une analyse complète de ce problème ne justifie pas cette aide exceptionnelle.

La mise en place d'une aide exceptionnelle à l'achat de papier ne semble pas pouvoir être envisagée dans les conditions actuelles du marché. Par son effet compensateur, elle constituerait, en effet, une subvention indirecte aux fournisseurs internationaux. De plus, elle ne Pourrait revêtir qu'un caractère provisoire, alors même que rien ne laisse prévoir, à l'heure actuelle, une baisse du prix du papier journal dans un secteur aux cycles relativement connus.

En outre, la France consommant environ 750 000 tonnes de papier Journal par an, il serait probablement nécessaire, pour ne pas encourir le risque d'un saupoudrage sans réelle portée, de définir des critères d'attribution plus sélectifs que lors des expériences passées.

C'est pourquoi le Gouvernement a préféré apporter, dans une situation difficile, un soutien à l'équilibre d'exploitation des entreprises de presse.

Le prix du papier dans l'économie de la presse

Constituant une part élevée du coût de la fabrication des quotidiens et des publications, les achats de papier ont une influence déterminante sur l'équilibre économique des entreprises de presse.

Celles-ci, après avoir perdu 5 milliards de francs de recettes publicitaires en 1992-1993, pourraient se voir ponctionner d'un milliard de francs en raison de la hausse du prix du papier.

1. Des opérateurs français fragiles

La consommation française ne représente que 2 % de la consommation mondiale de papier de presse. Le premier producteur français de papier occupe le 76 ème rang mondial, et ne fabrique pas de papier pour la presse. L'Allemagne et le Royaume-Uni consomment trois fois plus de papier destiné aux journaux que la France, qui n'est que le 20 ème consommateur mondial, et l'Allemagne deux fois plus de papier destiné aux magazines.

Les éditeurs français sont donc défavorisés au regard des grands groupes de presse étrangers qui, en raison de leurs dimensions, peuvent obtenir de meilleures conditions d'acquisition : seuls la Société française des papiers de presse, coopérative d'achat alliée à la Compagnie française des papiers de presse, le groupe Hachette et le groupe Hersant atteignent la quantité annuelle de 150 000 à 200 000 tonnes qui représente le minimum estimé nécessaire pour intervenir sur le marché international. De plus, les imprimeries françaises de presse disposent d'équipements non standardisés exigeant une grande diversité des papiers utilisés, ce qui ne permet pas une optimisation des approvisionnements.

2. Une industrie mondiale très concentrée

L'industrie du papier de presse s'est très fortement concentrée ces dernières années pour faire face aux lourds investissements qui lui sont imposés. Une vingtaine de producteurs internationaux se partagent l'essentiel du marché. Le chiffre d'affaires du premier producteur européen de papier -qui atteint 50 milliards de francs- équivaut au chiffre d'affaires de l'ensemble de la presse française.

Les groupes finlandais, norvégiens et suédois, qui possèdent de surcroît un avantage technologique par rapport à leurs concurrents, détiennent plus de 70 % du marché européen.

Après de multiples soubresauts, il n'existe plus aujourd'hui de producteurs français d'importance significative. La plupart des usines situées sur le territoire national dépendent de groupes étrangers. Le marché du papier est en France largement dominé par les investisseurs étrangers : 90 % des capacités de production de papier de presse sont contrôlées par des entreprises étrangères.


• Par ailleurs, et compte tenu de l'économie spécifique des importations de papier, il a été envisagé de demander l'augmentation du quota de papier importé à droits nuls, qui est de 650 000 tonnes dont 600 000 réservées au papier canadien. Or, en l'état actuel des choses, cette solution ne paraît pas pertinente.

En effet, le Canada s'est récemment détourné de l'Europe pour orienter ses ventes vers les pays d'Asie, dont la consommation est en très forte croissance. Il est probable que ce mouvement se prolongera en 1996. De plus, au 15 juin 1995, l'utilisation du quota d'importation à droits nuls s'élevait à 46,6 % pour la totalité et à 45,5 % pour le seul contingent canadien. Il n'est donc pas certain que ces quotas soient épuisés avant la fin de l'année.


En outre, une enquête sur les pratiques anticoncurrentielles dans ce secteur a été ouverte.

Depuis longtemps, les grands producteurs internationaux ont cherché à réguler de concert les fluctuations des cours. Grâce à une répartition des zones d'influence à travers le monde, les fabricants Scandinaves ont cherché à appliquer en Europe une politique tarifaire commune. Celle-ci n'a pu être rigoureusement respectée en période de basse conjoncture, ce qui a entraîné une diminution sensible du prix de la pâte à papier de 1990 à 1993 (plus de 40 %).

Mais les producteurs se prévalent aujourd'hui de la reprise économique mondiale, qui entraîne un fort accroissement de la demande de papier sous ses différentes formes (presse, carton, emballage, etc.), estimée à 4% pour prétendre que les capacités de fabrication seraient à la limite de la saturation. Ils profitent également de la situation du marché pour reconstituer les zones d'influence territoriale : les acheteurs français, qui avaient pu bénéficier d'une certaine compétition entre producteurs nord-américains et producteurs Scandinaves, tombent de nouveau sous la dépendance de ces derniers.

La Commission européenne a lancé, le 26 avril 1995, une enquête sur l'augmentation récente du prix du papier journal, soupçonnant une entente entre les producteurs européens.

Quarante entreprises, qui représentent pratiquement l'ensemble de la profession dans l'Union européenne, ont été visitées par les inspecteurs mandatés par la commission, dans sept pays : Royaume-Uni, Finlande, Suède, France, Autriche, Italie, Allemagne.

La Commission européenne a indiqué qu'un phénomène similaire d'augmentation du prix du papier journal avait été constaté aux États-Unis, mais que, pour l'instant, elle n'avait pas encore pris contact avec les autorités chargées de vérifier la concurrence dans ce pays.

Les papetiers européens avaient déjà été « épingles » en juillet 1994 par la Commission européenne, qui leur avait infligé des amendes pour constitution d'un cartel dans le secteur du carton.


• A moyen terme, il serait plus efficace que le Gouvernement obtienne l'accélération du démantèlement des droits de douane sur le papier mondial
-dont le papier canadien, lesquels, en vertu des accords de Marrakech, doivent être abaissés progressivement, jusqu'à disparaître en 2002.

Les importations de papier en provenance des pays extérieurs à l'Union européenne sont aujourd'hui frappées d'un droit de douane s'élevant à 9 % pour la totalité des achats destinés aux magazines, ainsi que pour les achats réalisés au-delà de faibles contingents s'agissant des journaux.

Les accords conclus dans le cadre du GATT prévoient de réduire les droits de douane de 9% en 9 ans. La profession juge cette mesure insuffisante et réclame la suppression totale des droits de douane par les autorités communautaires.

Réunie le mercredi 25 octobre 1995 sous la présidence de M. Christian PONCELET, président, la commission des Finances a procédé à l'examen des crédits d'aide à la presse pour 1996, sur le rapport de M. Jean CLUZEL, rapporteur spécial.

Elle a décidé de proposer au Sénat l'adoption des crédits d'aide à la presse pour 1996.

* (1) Le paritarisme originel de la première commission, créée par le décret du 23 juillet 1931, était strictement professionnel puisqu'elle était composée à parts égales de représentants des fabricants de papier et des représentants des utilisateurs.

* (2) Réalisée auprès d'un échantillon de 21.208 personnes en deux vagues, au printemps et à l'automne 1994, pour la deuxième année. La marge d'erreur importante rend toute comparaison avec l'enquête de 1993 difficile.

* (3) « Lecteurs numéro moyen » - LNM : le nombre moyen de lecteurs par numéro est établi en tenant compte du nombre de numéros lus par rapport à la norme de numéros parus au cours des sept derniers jours.

* (4) Source : IREP qui procède à une évaluation de l'offre en additionnant les recettes de prestations obtenues à partir de entreprises extérieures. L'enquête annuelle de l'ODA sur les dépenses de communication des entreprises, qui constitue une évaluation de la demande, évalue les recettes publicitaires pour 1994 à 141 milliards de francs, dont 52 pour les média et 89 milliards de francs pour le hors média.

* (5) En pratique, le bénéfice à considérer est le bénéfice fiscal qui aurait été taxable au taux de droit commun en l'absence d'application de l'article 39 bis du code général des impôts.

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