DEUXIÈME PARTIE
LES PRINCIPALES OBSERVATIONS DES
RAPPORTEURS SPÉCIAUX
La très grande majorité des dispositifs financés par la mission fait face à une diminution de crédits liée aux restrictions budgétaires.
Évolution des crédits des principaux dispositifs en faveur de l'emploi et des compétences portés par la mission « Travail et emploi »
(en millions d'euros)
2024 |
2025 |
Évolution 2025/2024 |
||||
Programme 102 |
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
Indemnisation demandeurs d'emploi |
1 725 |
1 725 |
1 796 |
1 796 |
+ 4,1 % |
+ 4,1 % |
Financement missions locales |
635 |
632 |
598 |
492 |
- 5,8 % |
- 22,2 % |
Contrats aidés |
400 |
398 |
230 |
234 |
- 42,5 % |
- 41,2 % |
dont PEC (secteur non-marchand) |
331 |
335 |
229 |
231 |
- 30,8 % |
- 31,0 % |
dont CIE (secteur marchand) |
68 |
63 |
1 |
3 |
- 98,5 % |
- 95,2 % |
Insertion par l'activité économique (IAE) |
1 500 |
1 500 |
1 523 |
1 497 |
+ 1,5 % |
- 0,2 % |
dont ateliers et chantiers d'insertion (ACI) |
1 053 |
1 053 |
1 319 |
1 036 |
+ 25,3 % |
- 1,6 % |
dont entreprises d'insertion (EI) |
277 |
277 |
344 |
266 |
+ 24,2 % |
- 4,0 % |
Dispositifs en faveur des personnes handicapées |
520 |
520 |
595 |
508 |
+ 14,4 % |
- 2,3 % |
dont entreprises adaptées (EA) |
465 |
465 |
550 |
472 |
+ 18,3 % |
+ 1,5 % |
Territoire zéro chômeur de longue durée |
69 |
69 |
81 |
81 |
+ 17,4 % |
+ 17,4 % |
Dispositifs en faveur de l'emploi des jeunes |
888 |
888 |
964 |
980 |
+ 8,6 % |
+ 10,4 % |
dont allocation "contrat d'engagement jeunes" (CEJ) |
787 |
787 |
786 |
786 |
- 0,1 % |
- 0,1 % |
dont allocation "parcours contractualisé d'accompagnement dans l'emploi et l'autonomie" (PACEA) |
101 |
101 |
44 |
44 |
- 56,4 % |
- 56,4 % |
Programme 103 |
AE |
CP |
AE |
CP |
AE |
CP |
Aides aux employeurs d'apprentis |
3 906 |
3 530 |
3 243 |
3 465 |
- 17,0 % |
- 1,8 % |
Exonérations contrats d'apprentissage |
1 696 |
1 696 |
1 310 |
1 310 |
- 22,8 % |
- 22,8 % |
Activité partielle |
225 |
225 |
155 |
155 |
- 31,1 % |
- 31,1 % |
Formation des salariés |
281 |
253 |
108 |
109 |
- 61,6 % |
- 56,9 % |
dont FNE-Formation |
273 |
245 |
100 |
101 |
- 63,4 % |
- 58,8 % |
dont Transitions collectives |
8 |
8 |
8 |
8 |
0,0 |
0,0 |
Emplois francs |
273 |
104 |
0 |
91 |
- 100,0 % |
- 12,5 % |
Exonérations diverses |
3 746 |
3 746 |
3 711 |
3 711 |
- 0,9 % |
- 0,9 % |
dont déduction forfaitaire sur les heures supplémentaires (TEPA) |
970 |
970 |
860 |
860 |
- 11,3 % |
- 11,3 % |
dont aide aux créateurs et repreneurs d'entreprises (ACRE) |
453 |
453 |
387 |
387 |
- 14,6 % |
- 14,6 % |
dont exonération particulier-employeur |
383 |
383 |
390 |
390 |
+ 1,8 % |
+ 1,8 % |
dont exonération particulier-employeur fragile (direct ou mandataire) |
967 |
967 |
1 027 |
1 027 |
+ 6,2 % |
+ 6,2 % |
dont exonération particulier-employeur fragile (prestataire) |
973 |
973 |
1 047 |
1 047 |
+ 7,6 % |
+ 7,6 % |
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
I. LA MISSION « TRAVAIL, EMPLOI ET ADMINISTRATION DES MINISTÈRES SOCIAUX » FAIT L'OBJET D'IMPORTANTES COUPES BUDGÉTAIRES
A. SI, PARMI LES OPÉRATEURS, FRANCE TRAVAIL EST MIEUX PRÉSERVÉ, D'AUTRES STRUCTURES DU SERVICE PUBLIC DE L'EMPLOI SONT FORTEMENT MISES À CONTRIBUTION
Le financement des opérateurs rattachés à la mission « Travail et emploi » sera stable en 2025. Au total, la somme des subventions pour charges de service public et des transferts inscrits sur la mission passerait de 6 903,2 millions d'euros dans la loi de finances initiale pour 2024, à 6 894,5 millions d'euros pour 2025, soit une diminution de 0,1 %.
Évolution des subventions pour charges de
service public (SCSP)
et des transferts versés aux opérateurs
(CP)
(en milliers d'euros)
Opérateur |
2024 |
2025 |
Variation 2025-2024 |
France Travail (SCSP - P102) |
1 250 447 |
1 350 447 |
+ 8,0 % |
France Travail (transferts P102 et P103) |
2 223 289 |
2 650 564 |
+ 19,2 % |
France Travail (total) |
3 473 736 |
4 001 011 |
+ 15,2 % |
EPIDE (P102) |
80 985 |
84 317 |
+ 4,1 % |
GIP plateforme inclusion (P102) |
8 780 |
8 780 |
0,0 |
Centre INFFO (P103) |
3 826 |
3 826 |
0,0 |
AFPA (P103) |
171 133 |
115 000 |
- 32,8 % |
France compétences (P103) |
2 500 000 |
2 026 046 |
- 19,0 % |
GIP Les entreprises s'engagent (P103) |
2 500 |
5 500 |
+ 120,0 % |
ANACT (P111) |
14 690 |
13 890 |
- 5,4 % |
ANACT (transferts P103) |
3 909 |
0 |
- 100,0 % |
ANACT (total) |
18 599 |
13 890 |
- 25,3 % |
Agences régionales de santé (P124-155) |
630 220 |
623 000 |
- 1,1 % |
INTEFP (P155) |
13 373 |
13 150 |
- 1,7 % |
TOTAL |
6 903 152 |
6 894 520 |
- 0,1 % |
Note : Établissement pour l'insertion dans l'emploi (EPIDE), Centre pour le développement de l'information sur la formation permanente (Centre INFFO), Agence nationale pour la formation professionnelle des adultes (AFPA), Agence nationale pour l'amélioration des conditions de travail (ANACT), Institut national du travail, de l'emploi et de la formation professionnelle (INTEFP).
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
Cette stabilité cache en réalité des évolutions en sens contraires des deux principales subventions versées par la mission aux deux principaux opérateurs qui lui sont rattachés : en effet, alors que la subvention versée à France Travail augmente (+ 15,2 %) celle de France Compétences diminue (- 19,3 %).
1. La diminution de la subvention de France Compétences résulte des économies décidées en cours de gestion en 2024
L'État verse, depuis la LFI pour 2023, une subvention pérenne en faveur de l'opérateur France Compétences (2,026 millions d'euros en PLF 2025). Cette attribution conséquente répond à une recommandation de la Cour des comptes, qui avait qualifié la situation financière de France Compétences « d'impasse financière »21(*), mais aussi des commissions des finances et des affaires sociales du Sénat.22(*)
Cette dotation a vocation à combler un important besoin de financement de France Compétences, dû à un déséquilibre structurel des ressources et des charges de l'opérateur. Jusqu'avant l'inscription de cette dotation en LFI, l'État ouvrait des dotations « exceptionnelles » en urgence pour combler le déficit de France Compétences23(*).
En 2025, cette dotation serait significativement réduite, passant de 2 500 millions d'euros dans la LFI pour 2024 à 2 026 millions d'euros dans le PLF pour 2025, soit une diminution de 474 millions d'euros (- 19,0 %). Toutefois, en comparaison avec l'exécution attendue pour 2024, la diminution de la subvention versée à France Compétences en 2025 paraît moins importante, dans la mesure où elle intègre une diminution de 312 millions d'euros décidée en cours d'exercice 2024 en raison du décret du 21 février 2024 d'annulation de crédits.
Évolution de la subvention versée à France Compétences entre 2024 et 2025
(en millions d'euros)
LFI 2024 |
Exécution attendue en 2024 |
PLF 2025 |
Évolution PLF 2025 / LFI 2024 |
Évolution PLF 2025 / exécution 2024 |
2 500 |
2 188 |
2 026 |
- 19,0 % |
- 7,4 % |
Source : commission des finances du Sénat
Par rapport à l'exécution attendue en 2024, la diminution de la dotation versée à France Compétences apparaît moins significative : elle passerait de 2 188 millions à 2 026 millions d'euros, soit une diminution de « seulement » 162 millions d'euros (- 7,4 %).
2. Alors que les moyens financiers alloués à France Travail augmentent, ses moyens humains diminueraient en 2025
Les financements versés à France Travail via la mission augmentent significativement par rapport à la LFI pour 2024 : ainsi, la subvention pour charges de service public budgétée sur le programme 102 est orientée à la hausse (1,35 milliard d'euros, soit + 100 millions d'euros par rapport à 2024), de même que les transferts en provenance des programmes 102 et 103, qui s'établissent à 2,65 milliards d'euros pour 2025.
Les crédits alloués par l'État à Pôle emploi connaitraient donc une hausse de 15,2 % entre la loi de finances initiale pour 2024 et le présent projet de loi.
Ce niveau de soutien a été qualifié de « bonne surprise » par le directeur général de France Travail lors de son audition par les rapporteurs spéciaux. En effet, avec une augmentation de 100 millions d'euros, la subvention pour charges de service public s'établit à un niveau bien supérieur à ce qui était prévu dans la lettre plafond élaborée par le précédent Premier ministre, qui prévoyait une diminution de 325 millions d'euros.
Toutefois, si les plafonds d'emploi des opérateurs rattachés à la mission « Travail et emploi » sont globalement stables par rapport à 2024, le plafond d'emploi de l'opérateur France Travail est amputé de 500 équivalents temps plein (ETP). L'engagement pris par l'opérateur dans le cadre de la loi pour le plein emploi24(*) consiste principalement à renforcer l'accompagnement des demandeurs d'emploi, avec un effort particulier en direction des publics éloignés de l'emploi comme les personnes handicapées ou les bénéficiaires du revenu de solidarité active (RSA), qui doivent tous être inscrits à France Travail au 1er janvier 2025 - seuls 40 % d'entre eux étaient accompagnés par Pôle emploi avant la réforme.
France Travail a fait valoir que la diminution de ses moyens humains de l'opérateur pourrait à terme remettre en cause l'objectif de permettre à chaque conseiller de l'opérateur d'accompagner l'ensemble des demandeurs d'emploi orientés vers lui.
S'il est vrai que la diminution de 500 EPT du plafond d'emploi de France Travail aurait pour effet d'« annuler » la hausse des effectifs amorcées par la loi de finances initiale pour 2024, qui avait permis une augmentation des moyens humains de l'opérateur à hauteur de 300 ETP, l'administration fait valoir que, France Travail étant le premier opérateur de l'État en termes d'effectifs (52 552 ETPT prévus pour 2025), une contribution à hauteur de 1 % de son plafond d'emplois ne semble pas excessive, d'autant que tous les demandeurs d'emploi qui seront inscrits à France Travail à compter de 2025 n'auront pas vocation à être accompagnés par l'opérateur.
Évolution des plafonds d'emplois des
opérateurs
entre la LFI 2024 et le PLF 2025
(en ETPT)
Opérateur |
2024 |
2025 |
Variation 2025-2024 |
France Travail (P102) |
53 052 |
52 552 |
- 500 |
dont sous plafond |
49 147 |
48 647 |
- 500 |
dont hors plafond |
3 905 |
3 905 |
0 |
EPIDE (P102) |
1 142 |
1 142 |
0 |
GIP plateforme inclusion (P102) |
35 |
35 |
0 |
Centre INFFO (P103) |
72 |
72 |
0 |
AFPA (P103) |
5 487 |
5 355 |
- 132 |
France compétences (P103) |
91 |
91 |
0 |
GIP Les entreprises s'engagent (P103) |
11 |
11 |
0 |
ANACT (P111) |
290 |
290 |
0 |
dont sous plafond |
265 |
265 |
0 |
dont hors plafond |
25 |
25 |
0 |
Agences régionales de santé (P124-155) |
8 342 |
8 273 |
- 69 |
INTEFP (P155) |
99 |
100 |
+ 1 |
dont sous plafond |
91 |
91 |
0 |
dont hors plafond |
8 |
9 |
+ 1 |
TOTAL |
68 621 |
67 921 |
- 700 |
Source : commission des finances du Sénat, d'après les documents budgétaires
3. Au sein du service public de l'emploi, les missions locales seraient également mises à contribution
En 2024, le financement des missions locales par l'État a diminué à la suite du décret du 21 février 2024 portant annulation de crédits : il s'est établi à 608 millions d'euros en AE et 595 millions d'euros en CP après l'annulation, soit une diminution de 5,8 % en CP, correspondant à la diminution des crédits « PACEA » et au contingentement des effectifs du contrat d'engagement jeunes (CEJ) à 200 000 d'entrées.
Le PLF 2025 prévoit une nouvelle diminution portant les financements de l'État à 598 millions d'euros en AE et 492 millions d'euros en CP. Les AE seraient ainsi plutôt stables par rapport à l'exécution attendue pour 2024. La diminution des CP inquiète cependant les missions locales, qui craignent de manquer de moyens pour accompagner l'ensemble des jeunes en difficulté qui le demandent. Entendu par les rapporteurs spéciaux, l'administration a indiqué que cette diminution des décaissements correspondrait à la mise à contribution des excédents de trésorerie de certaines missions locales, qui ont pu bénéficier d'un phénomène de surfinancement les années précédentes - les crédits dédiés aux missions locales sont en effet passés de 372 à 623 millions d'euros entre la LFI pour 2020 et la LFI pour 2024.
* 21 Cour des comptes, La formation professionnelle des salariés. Après la réforme de 2018, une stratégie nationale à définir et un financement à stabiliser, juin 2023.
* 22 Rapport d'information n° 741, « France Compétences face à une crise de croissance » (2021-2022) - 29 juin 2022.
* 23 MM. Emmanuel Capus et Daniel Breuiller, Rapport n° 771 (2022-2023), Annexe n° 32, 28 juin 2023.
* 24 Loi n° 2023-1196 du 18 décembre 2023 pour le plein emploi.