C. L'IMMOBILIER JUDICIAIRE SE CONCENTRE SUR LE MAINTIEN EN CONDITION OPÉRATIONNELLE

La loi d'orientation et de programmation 2023-2027 a constaté que le parc judiciaire « est aujourd'hui saturé sous l'effet des augmentations successives d'effectifs depuis une dizaine d'années » : la hausse des effectifs de 10 % a dû se faire dans un parc dont la surface est stable autour de 2,1 millions de mètres carrés.

Si une circulaire de la Première ministre en date du 8 février 2023 a fixé un objectif global de réduction des surfaces de 25% dans les administrations33(*), les effets sur la saturation du parc immobilier ne peuvent être que très progressifs.

Or les crédits prévus par le projet de loi de finances pour 2025 pour l'immobilier judiciaire propriétaire sont de 268,6 millions d'euros, en diminution de 93 millions d'euros, ce qui, selon le projet annuel de performances, ne couvrira que les opérations d'ores et déjà en chantier.

Hors contrats de partenariat, les crédits sont de 149,2 millions d'euros.

Les priorités de l'immobilier judiciaire pour 2023-2027 sont :

- d'accueillir les nouveaux effectifs dans des configurations prenant en considération les nouveaux modes de travail (équipe juridictionnelle, télétravail) ainsi que les besoins nouveaux dans l'exercice de la justice, notamment la retransmission vidéo sur différentes salles d'audience pour certains procès ;

- d'améliorer la situation des juridictions sur le plan fonctionnel en accroissant les capacités d'accueil du public, notamment en salle d'audience, tout en mettant en oeuvre les orientations gouvernementales en matière de sobriété immobilière.

La direction des services judiciaires travaille à cet égard en collaboration avec le service de l'immobilier ministériel du secrétariat général et l'Agence publique pour l'immobilier de la justice (APIJ).

Les crédits prévus par le projet de loi de finances seront répartis entre le paiement des opérations en cours suivies par les départements immobiliers (mise en accessibilité, rénovation des infrastructures courant faible...), les opérations confiées aux mêmes départements immobiliers dans le cadre de la programmation 2018-2022, les opérations confiées à l'APIJ et les contrats de partenariat public-privé.

Répartition des crédits de l'immobilier propriétaire sur le programme 166

(en millions d'euros)

Source : commission des finances, à partir du projet annuel de performances

Aux crédits de l'immobilier propriétaire s'ajoutent ceux de l'immobilier occupant, d'un montant de 257,0 millions d'euros en crédits de paiement. Ces crédits correspondent à des dépenses immobilières liées à l'occupation des locaux (fluides, loyers, nettoyage, entretien, etc.) prises en charge par les cours d'appel, l'École nationale des greffes, le casier judiciaire national et la Cour de cassation.

Ces crédits sont en hausse de 3 % par rapport à ceux de la loi de finances initiale pour 2024, qui étaient de 248,8 millions d'euros, en raison de l'évolution des effectifs.

Le rapporteur spécial note une dégradation importante du respect des coûts et des délais des grands projets de l'immobilier judiciaire. La durée révisée des projets serait supérieure de 38,0 % à celle prévue à l'origine, alors que l'écart était de + 20,1 % en 2022. La dégradation est encore plus importante pour les budgets, qui seraient en dépassement de 45,3 % en 2025 contre 14,95 % en 202234(*).

Les explications invoquées sont les évolutions ou modifications des programmes immobiliers, notamment en application de la loi d'orientation et de programmation, la tension sur les prix en outre-mer en raison du manque d'entreprises dans le secteur du BTP et l'inflation des coûts des matériaux et de l'énergie.

Évolution du respect des coûts des délais des grands projets immobiliers

(en pourcentage de dépassement)

Source : commission des finances, à partir du projet annuel de performances

Des difficultés ponctuelles, comme les mesures de contamination au plomb sur le chantier du palais de justice de l'île de la Cité à Paris, peuvent aussi entraîner des retards.

Le rapporteur spécial prend acte des explications avancées, mais regrette que l'évolution très négative de ces indicateurs, tout particulièrement en prévision sur les années à venir, ne pousse pas à une réflexion sur l'amélioration du pilotage des projets, qui devrait par exemple permettre de limiter les modifications de programme en cours de réalisation des projets.

La situation est d'ailleurs très variable selon les sites. Alors que, sur les opérations de Dieppe et de Nanterre, le coût révisé est égal au coût prévisionnel, certains font l'objet d'un surcoût supérieur à 100 %, comme à Nantes (+ 103 %) et à Meaux (+ 159 %).


* 33 Nouvelle doctrine d'occupation des immeubles tertiaires de l'État, circulaire n° 6392/SG de la Première ministre, 8 février 2023.

* 34 Indicateur 1.2 « Respect des coûts et des délais des grands projets immobiliers » du programme 310 « Conduite et pilotage de la politique de la justice » de la mission « Justice ».

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