III. LA SUPPRESSION DE DISPOSITIFS D'EXONÉRATIONS DE CHARGES EN FAVEUR DU TRANSPORT MARITIME EST LA PRINCIPALE RAISON DE LA BAISSE SUBSTANTIELLE DES CRÉDITS DU PROGRAMME 205

En finançant des allègements de cotisations sociales patronales des entreprises d'armement maritime françaises, l'action 03 « Innovation et flotte de commerce » a pour vocation de promouvoir la compétitivité du secteur du transport maritime français.

En 2025, les crédits inscrits sur cette action accusent une baisse significative de plus de 23 % (24,6 millions d'euros). Le montant de dépenses prévisionnelles sur cette action s'établit ainsi à 80,7 millions d'euros, c'est-à-dire peu ou prou le niveau de crédit qui prévalait avant la crise et l'instauration de dispositifs d'aides exceptionnelles en soutien du secteur.

Cette baisse substantielle de crédits s'explique :

- d'une part par l'extinction du dispositif exceptionnel et temporaire de soutien aux entreprises d'armement maritime (SEAM), créé en réponse à la crise sanitaire et prorogé jusqu'à la fin de l'année 2024 ;

- d'autre part par un ciblage plus prononcé64(*) de certains dispositifs d'exonérations de charges patronales qui avaient été instaurées par la loi n° 2016-816 du 20 juin 2016 pour l'économie bleue.

Les mesures visant à davantage cibler certains dispositifs d'exonérations de charges qui avaient été instaurés par la loi pour l'économie bleue de 2016, inspirées des conclusions d'un rapport de la Cour des comptes sur l'Établissement national des invalides de la Marine (Enim)65(*), sont proposées par l'article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025. Le Gouvernement entend ainsi restreindre le bénéfice du dispositif d'exonération aux seuls navires de transport de passagers, dans la mesure où il constitue le secteur le plus intensif en emplois moins qualifiés.

Les conséquences de cette évolution, motivée par les contraintes très fortes qui pèsent sur nos finances publiques, devront être surveillées dans les années à venir pour s'assurer qu'elles ne se traduisent pas par un affaiblissement du pavillon français qui viendrait remettre en cause les avancées réalisées depuis 10 ans en la matière, en partie grâce à ces mesures d'exonérations de charges patronales.

En effet, alors qu'il y a une décennie encore le pavillon français déclinait chaque année un peu plus et ne se composait plus que de 140 navires, ils sont aujourd'hui environ 400 et son principalement armés par des PME. La fin de ces exonérations de charges pourrait se traduire par des changements de pavillons, une opération très simple qui ne prend pas plus de 24 heures, mais également par la disparition de certaines entreprises qui seraient remplacées par des sociétés étrangères.

Le risque principal semble concerner les entreprises de services, notamment en matière de pose de câbles sous-marins ou encore d'intervention sur les parcs éoliens en mer, un marché sur lequel par exemple les opérateurs néerlandais sont d'ores et déjà très présents. La part de marché représentée par des entreprises françaises dans ces filières pourrait décliner.

Des emplois basés en France pourraient être menacés et, à terme, c'est l'ambition de développement soutenue de l'emploi maritime portée par le Fontenoy qui pourrait devoir être remise en question.

Évolution des crédits de paiements de l'action 03 (2017-2025)

(en millions d'euros)

Source : commission des finances du Sénat d'après les documents budgétaires

Les crédits portés par l'action 03 en 2025 doivent ainsi servir à financer :

- une contribution, estimée à 5,9 millions d'euros en 2025, à la Compagnie générale maritime et financière (CGMF) pour financer les charges spécifiques de retraite et d'accident du travail des personnels sédentaires de l'ancienne Compagnie générale maritime (CGM) ;

- les compensations, estimées à 60 millions d'euros en 2025, à l'Établissement national des invalides de la marine (ENIM), l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) et à l'UNEDIC de l'exonération des cotisations sociales patronales maladie, vieillesse, famille et relatives à l'assurance chômage pour les entreprises employant des gens de mer affiliés à l'ENIM, sur des navires de commerce battant pavillon français, ou communautaire, ou de l'Espace économique européen, affectés à des activités de transport maritime, et soumis à concurrence internationale66(*) ;

Les crédits de l'action 03 servent également à financer le dispositif de soutien aux entreprises d'armement maritime (SEAM)67(*) qui a pris le relais, depuis le 1er janvier 2022 et jusqu'à la fin de l'année 2024, de l'aide exceptionnelle aux entreprises de ferries mis en oeuvre en 202168(*). Ce dispositif ne sera pas reconduit en 2025. Cependant, 13,8 millions d'euros des crédits du programme devraient être consacrés en 2025 à couvrir les charges résultant de ce dispositif au titre du second semestre 2024.


* 64 Prévu par l'article 7 du projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2025.

* 65 L'Établissement national des invalides de la Marine (Énim), exercices 2016-2021, Cour des comptes, septembre 2023.

* 66 Dispositif prévu à l'article L5553-11 du code des transports.

* 67 Annoncé par le Président de la République le 14 septembre 2021 lors des Assises de l'économie de la mer, le dispositif a été mis en place par le décret n° 2022-660 du 25 avril 2022 modifiant le décret n° 2021-603 du 14 mai 2021 instituant une aide aux employeurs de marins embarqués sur certains navires à passagers effectuant des trajets internationaux.

* 68 Par le décret n° 2021-603 du 14 mai 2021 instituant une aide aux employeurs de marins embarqués sur certains navires à passagers effectuant des trajets internationaux.

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