II. L'AFFIRMATION DANS LA LOI DE LA DUALITÉ DES PRESTATIONS D'INCAPACITÉ PERMANENTE S'ACCOMPAGNE, CETTE FOIS, DE GARANTIES SUR LA REVALORISATION DE L'INDEMNISATION

Face au risque de judiciarisation des AT-MP induit par le revirement de jurisprudence de la Cour de cassation, l'article 24 garantit que les prestations d'incapacité permanente AT-MP présentent un caractère dual, c'est-à-dire qu'elles couvrent à la fois le déficit professionnel et le déficit fonctionnel permanent - défini comme la perte de potentiel physique et intellectuel résultant de l'accident. Il transpose, en cela, une partie de l'accord national interprofessionnel (ANI) unanime du 15 mai 2023.

Pour ce faire, il réforme les modalités de calcul de l'indemnité en capital et de la rente viagère versées par la branche afin d'ajouter au montant versé actuellement, qui devient la part professionnelle, une part fonctionnelle nouvellement créée. La commission propose de faire dépendre cette dernière de l'âge de la victime, aussi bien pour la rente que pour l'indemnité en capital. Une revalorisation conséquente des prestations, à hauteur de 500 millions d'euros à terme, est à attendre pour tous les nouveaux bénéficiaires : cet effort, deux fois supérieur à celui projeté par l'article 39 du PLFSS pour 2024, doit être salué. Les victimes d'incapacité lourde pourront, en outre, convertir une partie de leur rente en capital afin de réaliser les investissements nécessaires à l'adaptation de leur environnement de vie, une évolution bienvenue.

Cet article, fruit de plus d'un an de travaux avec l'ingénierie des pouvoirs publics, transcrit fidèlement la volonté des partenaires sociaux et rejoint de nombreuses préconisations du récent rapport de la Mecss. Il importe toutefois de répondre aux enjeux spécifiques auxquels sont confrontées les victimes de faute inexcusable de l'employeur (FIE), ignorés par le texte transmis. Le déficit fonctionnel permanent étant désormais intégré à la rente, il ne peut en effet, par un jeu de vases communicants, plus faire l'objet d'une indemnisation intégrale en capital sur décision du juge dans le cadre d'une procédure en FIE. Cela se traduit par une revalorisation de l'indemnisation de long terme de ces victimes au prix d'une limitation de leur réparation de court terme. Afin de tempérer cet effet, la commission propose, en accord avec les partenaires sociaux et conformément aux préconisations du rapport précité, de prévoir que toutes les victimes de FIE puissent percevoir, si elles le souhaitent, une partie de leur indemnisation en capital. La commission a également adopté un amendement permettant de mieux associer les représentants des victimes à la construction des textes d'application de la présente réforme.

Attachée à la gestion paritaire de la branche AT-MP, la commission exhorte enfin le Gouvernement à retranscrire sans délai le reste du contenu de l'ANI. Plus de dix-huit mois après sa signature, les mesures ambitieuses préconisées par les partenaires sociaux en matière d'aide humaine et de prévention ne sauraient être mises de côté plus longtemps.

Partager cette page