II. POUR LA CRÉATION D'UN REGISTRE NATIONAL DES CANCERS

A. LA PROPOSITION DE LOI CRÉE UN REGISTRE NATIONAL DES CANCERS

La proposition de loi déposée par Mme Sonia de La Provôté et plusieurs de ses collègues ajoute aux missions de l'Inca la « mise en oeuvre d'un registre national des cancers », lequel centraliserait les données relatives aux cancers sur l'ensemble du territoire national afin d'améliorer la prévention, le dépistage, le diagnostic et la prise en charge thérapeutique des malades du cancer, mais aussi de constituer un outil de suivi et d'alerte épidémiologique ainsi qu'une base de données aux fins de recherche. Ses buts seraient notamment de diminuer la morbidité, la mortalité, l'incidence et la prévalence des cancers, et d'améliorer la survie des malades.

Une telle proposition prolonge un certain nombre de demandes récentes émanant du monde associatif tout autant que de scientifiques et de responsables administratifs. Le rapport de 2017 de Bernard Bégaud, Dominique Polton et Franck von Lennep engageait à constituer des registres nationaux en cancérologie pour certaines molécules, afin de donner tout leur potentiel aux données en vie réelle. En 2020, l'Igas relevait, en évaluant le troisième plan cancer, que « des données à une échelle géographique plus fine sont nécessaires ». En 2021, le Haut Conseil de la santé publique plaidait pour une meilleure homogénéisation des données et la création d'un dispositif national de détection des signaux faibles. L'Académie de médecine, enfin, a appelé plus clairement en 2021 à la création d'un registre national des cancers accompagné d'un mécanisme de déclaration obligatoire de la maladie, afin d'accélérer les remontées d'information nécessaires à l'exercice d'une mission de surveillance sanitaire élargie.

Un tel registre national rapprocherait en outre la France des pratiques de ses voisins européens, comme l'Allemagne, où la remontée d'informations exhaustives à l'échelle nationale est un objectif fixé par le législateur depuis dix ans.

Les registres des cancers en Allemagne
(extraits du rapport du Haut Conseil de la santé publique de 2021)

Dès 1995, l'Allemagne a légiféré sur l'obligation pour les 16 États fédérés de mettre en place des registres épidémiologiques des cancers afin de bénéficier d'un registre national. Puis, le besoin croissant d'informations fiables sur la qualité des soins a conduit à adopter une loi en 2013 visant à établir des registres cliniques des cancers dans l'ensemble des états fédérés pour disposer d'une base au niveau national. Cet objectif a été fixé à 2017. Pour ce faire, de nombreux Länder transforment et développent leurs registres épidémiologiques pour qu'ils intègrent également des données cliniques. Ces registres dorénavant qualifiés comme clinico-épidémiologiques doivent être exhaustifs et contiennent des données importantes du diagnostic à l'issue de la maladie en passant par les traitements et les récidives.

Deux entités séparées ont été mises en place pour assurer une protection élevée des données des registres et une analyse régulière de celles-ci. Ainsi, un « centre de confiance » accepte les avis et garde les données personnelles du patient alors qu'un « centre d'analyses » réceptionne les données épidémiologiques et cliniques pour analyse. Un processus d'anonymisation s'opère lors du transfert des données d'un centre à l'autre.

Le budget alloué à la mise en place des registres cliniques des cancers est de 7,2 millions d'euros et est financé par la Ligue allemande contre le cancer (DKH). Les frais courants des registres s'élèvent eux à 140 euros par cas et sont pris en charge à 90 % par les caisses d'assurance maladie et à 10 % par les Länder.

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