DEUXIÈME PARTIE
LE COMPTE DE CONCOURS FINANCIERS
« AVANCES À L'AUDIOVISUEL PUBLIC » : UNE ANNÉE DE TRANSITION, UNE ABSENCE D'AMBITION

Le compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » retrace l'intégralité des crédits destinés aux organismes de l'audiovisuel public . Il comprend donc :

- en recettes , une fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée ;

- en dépenses , le montant des avances accordées aux organismes de l'audiovisuel public.

Six programmes, correspondant aux différentes sociétés de l'audiovisuel public (841 - France Télévisions, 842 - ARTE France, 843 - Radio France, 844 - France Médias Monde, 845 - l'Institut national de l'audiovisuel (INA) et 846 - TV5 Monde), composent les dépenses du compte de concours financiers.

I. UN NOUVEAU MODE DE FINANCEMENT QUI NE PRÉSENTE PAS TOUTES LES GARANTIES

A. L'AFFECTATION D'UNE FRACTION DU PRODUIT DE LA TAXE SUR LA VALEUR AJOUTÉE AU FINANCEMENT DE L'AUDIOVISUEL PUBLIC NE PEUT ÊTRE QU'UNE SOLUTION TRANSITOIRE

L'article 6 de la loi n° 2022-1157 du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 supprime, dès 2022, la contribution à l'audiovisuel public (CAP) et la remplace par une fraction du produit de la taxe sur la valeur ajoutée. Acquittée par près de 23 millions de foyers et 80 000 entreprises, le montant de la CAP (138 euros en métropole et 88 euros en outre-mer), en principe indexé sur l'inflation, était gelé depuis 2018. Prélèvement peu dynamique - le nombre de foyers l'acquittant se réduisant chaque année - et ne reflétant plus les nouveaux usages en matière de consommation audiovisuelle, la CAP était appelée à être profondément modifiée afin de tenir compte de la suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales en 2023, sur laquelle elle était adossée.

L'absence de vision claire sur l'audiovisuel public au cours du précédent quinquennat, les risques d'effets de seuil ou d'effets de transferts liés à la mise en place d'un nouveau prélèvement , comme la question prégnante depuis la sortie de la crise sanitaire de la préservation du pouvoir d'achat ont conduit à l'adoption d'un dispositif qui pose autant de questions d'un côté qu'il n'en règle par ailleurs. Il convient de rappeler à ce stade que le Gouvernement envisageait initialement une budgétisation des crédits affectés à l'audiovisuel public qui paraissait à tout le moins plus lisible et plus conforme à la loi organique relative aux lois de finances du 1 er août 2001 (LOLF) 24 ( * ) .

1. Une maquette budgétaire qui ne respecte pas la LOLF

La budgétisation qu'avait proposée le Gouvernement dans le cadre du premier projet de loi de finances rectificative pour 2022 devait aboutir à la clôture du compte de concours financiers le 31 décembre 2022. Cette suppression permettait de lever le doute sur la compatibilité de son utilisation à LOLF.

La Cour des comptes avait, en effet, relevé, dans sa note d'exécution budgétaire publiée en mai 2016 25 ( * ) , que le compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » ne respectait pas, dans sa forme actuelle, les principes afférents aux comptes spéciaux, tels que prévus par l'article 24 de la LOLF.

Aux termes de celui-ci, les comptes de concours financiers doivent, en effet, retracer les prêts et avances consentis par l'État. Un compte distinct doit être ouvert pour chaque débiteur ou catégorie de débiteurs. Les opérations doivent se solder, en cours d'année, par le versement d'intérêts qui auraient vocation à alimenter le budget général en tant que recettes non fiscales ou en fin d'année, par le remboursement du principal venant en recette du compte de concours financiers. Ces comptes sont, par ailleurs, dotés de crédits limitatifs 26 ( * ) .

Les dépenses du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » ne constituent pas, cependant, des avances à proprement dit mais plutôt des dotations . Le compte n'est, en outre, pas équilibré par les remboursements des sociétés mais par une part du produit de la taxe sur la valeur ajoutée.

2. Un financement par la TVA qui n'a pas vocation à perdurer au-delà de 2024

À l'initiative du Sénat, l'article 6 de la loi du 16 août 2022 de finances rectificative pour 2022 prévoit que l'affectation d'une fraction du produit de TVA au financement de l'audiovisuel public devra prendre fin au 31 décembre 2024.

Il s'agit, de la sorte, de respecter la nouvelle rédaction de l'article 2 de la loi organique relative aux lois de finances telle qu'issue de la loi organique n° 2021-1836 du 28 décembre 2021 relative à la modernisation de la gestion des finances publique (article 3). Celle-ci prévoit en effet, à compter de la loi de finances pour 2025, que pour un tiers (hors organismes de sécurité sociale ou collectivités territoriales) bénéficiant déjà d'une affectation de taxe, celle-ci ne peut être maintenue que si elle est en lien avec les missions de service public qui lui sont confiées. Or le lien entre consommation et audiovisuel public apparaît difficile à étayer.

Il y a d'ailleurs déjà lieu de s'interroger sur le fait que jusqu`en 2025, les sociétés de l'audiovisuel public soient, en quelque sorte, placées au même niveau que les collectivités territoriales et les organismes de sécurité sociale, également récipiendaires d'une fraction du produit de la TVA.


* 24 Loi organique n° 2001-692 du 1 er août 2001 relative aux lois de finances.

* 25 Cour des comptes, note d'analyse de l'exécution budgétaire 2015 du compte de concours financiers Avances à l'audiovisuel public, mai 2016.

* 26 Sauf s'il s'agit de comptes ouverts au profit des États étrangers et des banques centrales liées à la France par un accord monétaire international, qui sont dotés de crédits évaluatifs

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