II. UNE NOUVELLE VAGUE DE « DÉCENTRALISATION » PARTICULIÈREMENT DECEVANTE
A. DES MESURES DE DÉCENTRALISATION EN DEÇÀ DES ATTENTES DES ÉLUS LOCAUX
La commission des lois regrette que les dispositions prévoyant de nouveaux transferts aux collectivités territoriales et à leurs groupements soient particulièrement en deçà des attentes formulées par les élus locaux . En effet, les mesures de décentralisation proposées par le Gouvernement souffrent de deux écueils majeurs : d'une part, elles sont d'une ampleur particulièrement limitée et, d'autre part, leurs modalités, peu ambitieuses, amoindrissent leur portée .
En premier lieu, la commission des lois déplore que les transferts proposés par le Sénat dans le rapport « 50 propositions pour le plein exercice des libertés locales » n'aient trouvé qu'une faible traduction dans le projet de loi , et que certaines mesures de décentralisation , bien qu'inscrites dans l'avant-projet de loi et particulièrement attendues, aient été, sans raison valable, supprimées du texte (transfert de la médecine scolaire).
En deuxième lieu, le large recours à l'expérimentation , notamment en matière de transfert de routes aux régions (article 7) et de transfert des gestionnaires de collèges et lycées aux départements et aux régions (article 41), contribue à fragiliser encore davantage la portée des mesures proposées .
Au demeurant et aussi surprenant que cela soit, le contenu précis des deux principales mesures de décentralisation que sont les transferts des routes aux départements, aux métropoles et régions volontaires (articles 6 et 7) demeure à ce jour inconnu . En l'occurrence, la liste précise des routes susceptibles d'être transférées aux collectivités territoriales et à leurs groupements n'a pas été communiquée par le Gouvernement au Parlement . Les rapporteurs ne sauraient se satisfaire de n'avoir pu disposer de ces éléments techniques, dont la dimension politique ne peut être écartée, avant d'aborder la discussion du projet de loi.
B. INSUFFLER UNE IMPULSION DÉCENTRALISATRICE AU PROJET DE LOI
Forte de ce constat, la commission s'est attachée, dans le respect des règles enserrant la recevabilité de l'initiative parlementaire, à apporter du souffle à ces dispositions en :
• s'assurant de l'opérationnalité des dispositifs prévus , en particulier en allongeant par l'adoption des amendements COM-1127 des rapporteurs, COM-1201 de Daniel Guéret, COM-878 d'Alain Richard, COM-586 de Roger Karoutchi, la durée de l'expérimentation du transfert de la compétence « voirie » aux régions et en assouplissant les modalités procédurales des transferts de routes (amendement COM-1130 des rapporteurs) ;
• approfondissant , lorsqu'elle était en mesure de le faire, les transferts inscrits dans le projet de loi . Elle a ainsi, à l'initiative des rapporteurs (amendement identique des rapporteurs COM-1117 et du rapporteur pour avis COM-1207 ), rendu possible la délégation, plutôt que d'un seul cinquième comme proposé dans le texte initial, de la totalité des fonds « économie circulaire » et « chaleur » aux régions ;
• supprimant les dispositifs qui se révélaient être à ce point en deçà des attentes des élus locaux qu'il était préférable de les rejeter purement et simplement. La commission a souhaité, en adoptant un amendement COM-1083 de suppression des rapporteurs, inviter le Gouvernement, dans la perspective de l'examen en séance publique, à proposer un véritable transfert des gestionnaires des collèges et lycées aux départements et régions ;
• garantissant les moyens attachés à l'exercice des compétences transférées . De manière à conforter la neutralité des transferts en termes financiers et humains, la commission a introduit, sur proposition des rapporteurs (amendement COM-1167 ) le principe d'un réexamen régulier des charges de fonctionnement et d'investissement associées aux transferts ;
• envisageant de nouveaux transferts de compétences aux collectivités territoriales et en attribuant de nouvelles facultés d'octroi d'aides à certaines collectivités tels que le transfert du service public de l'emploi aux régions (amendement COM-1176 des rapporteurs), le renforcement de la compétence de solidarité des départements (amendements identiques COM-737 et COM-221 de François Bonhomme et Frank Menonville créant un schéma départemental de cohésion territoriale), et la possibilité pour les départements d'octroyer des aides dans le domaine de la pêche maritime (amendement COM-225 de François Bonhomme).