EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le jeudi 14 novembre 2019, sous la présidence de M. Vincent Éblé, président, la commission a examiné le rapport de M. Roger Karoutchi, rapporteur spécial, sur la mission « Médias, livres et industries culturelles » et le compte de concours financier « Avances à l'audiovisuel public » (et communication sur le contrôle budgétaire sur le financement de l'audiovisuel extérieur).
M. Roger Karoutchi , rapporteur spécial (Mission « Médias, livres et industries culturelles » et compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ») . - Mon rapport, comme l'an dernier, couvre deux sujets, fort différents.
S'agissant de la mission « Médias, livres et industries culturelles », le montant global des crédits s'élève à 580 millions d'euros en AE et à 590 millions en CP. Il y a deux ou trois ans, j'avais indiqué que l'Agence France Presse (AFP) ne s'en sortait pas financièrement, parce qu'elle devait faire face à des procédures judiciaires de requalification des emplois de ses correspondants à l'étranger. Elle a fait de gros efforts pour sa numérisation, aussi. Sa dotation, cette année, est majorée de 6 millions d'euros pour atteindre environ 140 millions d'euros. Son président dit que c'est suffisant, car il compte sur les ressources des ventes et abonnements. Pour le moment, toutefois, l'AFP n'est pas totalement concurrentielle face aux grandes agences anglo-saxonnes.
S'agissant de la presse écrite, l'aide au portage diminue. C'est normal : les volumes expédiés sont de moins en moins importants. Les aides à la presse se concentrent sur la numérisation et la modernisation, notamment à travers le Fonds stratégique pour le développement de la presse et le Fonds de soutien à l'émergence et à l'innovation dans la presse. Quels critères devraient être retenus pour les aides à la diversité de la presse ? Ceux qu'on utilise datent de plusieurs décennies... Il faudra les repenser.
L'aide au livre est plus large que cette mission, qui se concentre sur les bibliothèques, et notamment - 210 millions d'euros sur 283 - la Bibliothèque nationale de France, dont les travaux semblent avoir été repris en main et devoir s'achever - enfin ! - dans deux ans.
Nous avons voté la création d'un centre national de la musique (CNM). Le financement complémentaire apporté par l'État dans le cadre du présent projet de loi de finances est de 7,5 millions d'euros, alors qu'il s'était engagé sur 20 millions d'euros. Le Gouvernement a promis une montée en charge progressive... Compte tenu de la faiblesse des ressources du CNM et des moyens dont il dispose pour soutenir le secteur, il paraît indispensable, à moyen terme, de conserver le crédit d'impôt pour les dépenses de production phonographique (CIPP) et le crédit d'impôt pour dépenses de production de spectacles vivants (CISV). L'Assemblée nationale a précisé dans un article additionnel les conditions d'affectation de la taxe sur les spectacles de variétés versée au CNM. Aux termes de cet amendement, la taxe devrait ainsi être, jusqu'au 31 décembre 2022, spécifiquement dédiée au financement des actions aux spectacles de chansons, de variétés et de jazz. Au 1 er janvier 2023, le principe de solidarité collective de la filière tendra à s'imposer. Je vous propose de ne pas revenir sur cet article.
Abordons maintenant le cinéma. Je ne pleure pas sur les crédits du Centre national du cinéma et de l'image animée (CNC), qui se porte bien. L'harmonisation des taux de la taxe sur les services de télévision - éditeurs (TST-E) et de la taxe sur la diffusion en vidéo physique (TSV), qui vise notamment Youtube et Netflix - fait oeuvre utile en prenant en compte les nouveaux modes de diffusion d'oeuvres cinématographiques ou audiovisuelles, tout en garantissant des revenus constants pour le CNC. Celui-ci est demandeur d'une réforme de la fiscalité qui lui est affectée. Mais il n'est pas en crise, et aide beaucoup à la production cinématographique, grâce à des ressources conséquentes.
Venons-en aux concours financiers à l'audiovisuel public. Je vais tenter de rester plus modéré que l'année dernière ! La redevance, la contribution à l'audiovisuel public (CAP), devrait atteindre 3,79 milliards d'euros en 2020. Le Gouvernement a annoncé la baisse d'un euro de cette redevance. Je ne parviens toujours pas à comprendre le système. On attend un grand texte sur la réforme de l'audiovisuel public. Les premières annonces laissent un peu sceptique pour le moment, puisque le périmètre ne serait presque pas changé et que l'on ne revient pas sur les missions de service public de l'audiovisuel : on va en fait mettre en place une holding qui conservera les chaînes et leurs directeurs, mais qui sera une structure avec plusieurs directions. Je ne comprends pas en quoi cette structure permettrait de faire des économies. Je redoute qu'il s'agisse d'une structure chapeau supplémentaire aux directions qui ne fasse qu'ajouter des dépenses de fonctionnement. Je ne suis pas convaincu par la réforme, car je n'y vois pas de vision stratégique. Le souhait du ministre est de baisser progressivement les crédits, puis de voir ensuite, avec cette holding, comment réaliser des économies. Je pense qu'il eût été préférable de redéfinir l'ensemble préalablement.
Globalement, c'est France Télévisions qui, avec 60 millions d'euros de moins de dotation, doit faire l'effort maximum. Je défendrai un amendement pour réorienter une partie de sa subvention sur l'audiovisuel extérieur. Les économies demandées peuvent apparaître conséquentes. C'est toutefois un effort maximum à partir de peu d'efforts ! Simultanément, on demande à Radio France de faire un effort qui me semble plus important puisqu'elle a déjà restructuré et rationalisé ses programmes et réduit le service. Je rappelle que dans le PLF 2019, on parlait d'un financement ad hoc pour le chantier de Radio France, qui n'est toujours pas terminé. Le ministre m'a répondu il y a quelques jours que je verrais bien quand ce financement ad hoc arriverait... En attendant, Radio France doit poursuivre le chantier sur ses propres crédits.
J'ai axé cette année ma mission de contrôle sur l'audiovisuel extérieur. Le Gouvernement avait confié à Olivier Courson une mission sur l'audiovisuel extérieur pour établir une cartographie des activités, voir les pistes d'économie et le développement. On peut distinguer deux maillons, avec France Médias Monde (FMM), d'un côté, et TV5 Monde, de l'autre. Le caractère multilatéral de la gouvernance de TV5 Monde rend délicate toute appréciation. FMM, créée en 2008, rassemble une chaîne de télévision et deux radios : France 24, qui émet en quatre langues - le français, l'anglais, l'arabe et l'espagnol -, Radio France International (RFI), qui émet en français et en treize autres langues, et Monte Carlo Doualiya (MCD), une radio généraliste qui émet en langue arabe. L'agence Canal France International (CFI), est, par ailleurs, devenue, depuis le 27 juin 2017, une filiale de FMM. CFI reste financée dans le cadre de l'aide publique au développement afin de favoriser le développement des médias en Afrique, dans le monde arabe et en Asie du Sud-Est.
En revanche, je suis inquiet concernant le financement de France Médias Monde. Elle connaît pourtant un accroissement de spectateurs ou d'auditeurs considérable. France 24 a vu par exemple le nombre de ses contacts hebdomadaires progresser de 55 millions en 2016, à 79,8 millions en 2018. Par ailleurs, 46,3 millions de personnes - soit une progression de 8,4 % par rapport à 2017 - accèdent chaque semaine aux chaînes de FMM via Internet.
Les dépenses annuelles de la holding FMM représentent 268 millions d'euros. Le Gouvernement a diminué progressivement les crédits ces dernières années. FMM a réalisé beaucoup d'efforts en termes de réduction des coûts, en fermant certaines stations - notamment en Afrique orientale -, en réduisant ses programmes. L'année prochaine, la dotation s'établirait à 255,2 millions d'euros, en diminution de 1 million d'euros par rapport à l'exercice précédent.
Lorsque nous protestons contre cette baisse des crédits, le Gouvernement nous répond : « en proportion, FMM baisse moins ses crédits que France Télévisions ». La comparaison n'est pas valable : FMM ne peut y arriver. Je vous rappelle que FMM est en concurrence avec l'audiovisuel extérieur des États-Unis, de la Russie, de la Chine, de l'Allemagne et de la Grande-Bretagne. La Chine consacre 1,3 milliard d'euros à son audiovisuel extérieur, les États-Unis 720 millions d'euros, le Royaume-Uni, 380 millions et l'Allemagne 400 millions. En France, nous sommes à 255 millions. Les Européens, les États-Unis, la Russie et la Chine mettent nettement plus de crédits sur leur audiovisuel extérieur que la France. Nous sommes très en retard et nous demandons à FMM de se débrouiller pour trouver des recettes supplémentaires, dans la publicité, les budgets locaux, etc.
L'année dernière, nous avions fait voter, au Sénat, un amendement - certes peu révolutionnaire - tendant à lui octroyer des crédits supplémentaires à hauteur de deux millions d'euros, mais le Gouvernement l'a fait supprimer à l'Assemblée nationale.
Nous ne comprenons pas : le chef de l'État dit qu'il souhaite rehausser notre ambition en matière de promotion de la langue, des contenus français, en s'appuyant sur notre puissance de feu médiatique, citant même « l'institution puissante que représente FMM » et, en parallèle, on baisse les crédits d'une structure qui a fait beaucoup d'efforts. Ce n'est pas avec 1,2 million d'euros de l'AFD pour RFI que cela peut fonctionner. Par exemple, les Britanniques versent des crédits assez conséquents de l'aide au développement à leur système audiovisuel extérieur. Pourquoi refuser de le faire en France ?
Il faut faire en sorte que dans le cadre de la réforme de l'audiovisuel, il y ait une sanctuarisation des crédits de l'audiovisuel extérieur. L'idéal, si le Gouvernement l'acceptait, serait de proposer un pourcentage constant de la CAP, qui serait consacré à l'audiovisuel public extérieur. Je vous proposerai en attendant un amendement pour France Médias Monde, visant à majorer les crédits de 9,9 millions d'euros, au détriment de France Télévisions. Les crédits de FMM sont en effet inférieurs de 9,9 millions à ce que prévoyait le contrat d'objectifs et de moyens.
La course à l'audimat n'est pas conforme à la mission de service public confiée à France Télévisions. On voit France Télévisions acheter des films américains à des prix extravagants pour battre TF1 certains soirs. Je peux comprendre que cela fasse plaisir à France 2, mais s'agit-il là d'une mission de service public ? Sur ce sujet, le ministre ne souhaite pas bouger, car il ne voit pas comment s'en sortir. Mais si l'on dit que France Télévisons a une mission de service public, que l'on revoit et définit le périmètre, faudrait-il soumettre France Télévisions à l'audimat ? Le service public ne doit pas proposer exclusivement des programmes ennuyeux, que personne ne regarde. On ne doit pas pour autant le mettre constamment en concurrence avec TF1, ce qui conduit à n'avoir comme unique repère que la bataille de l'audimat. Là, ce n'est plus du service public.
France Télévisions demande à avoir des pages publicitaires supplémentaires jusqu'à 21 h 15 ; j'y suis défavorable. Sur France Télévisions, il n'y a plus de publicités après 20 h 30, mais il y a de la promotion avec des émissions parrainées jusqu'à 21 h 10. Il faut donc redéfinir le périmètre.
Pour en revenir à cet amendement de crédits, s'il est adopté, j'émettrai un vote positif sur les crédits du compte de concours financiers à l'audiovisuel public. Je rappelle que je suis favorable à l'article rattaché 76 quaterdecies sur les conditions d'affectation de la taxe sur les spectacles de variétés au Centre national de la musique et invite à voter les crédits de la mission « Médias, livres et industries culturelles ».
Mme Sylvie Vermeillet . - Quel est l'avenir de la CAP avec la suppression de la taxe d'habitation ? Ce sujet semblait séduire Gérald Darmanin qui avait envisagé de la supprimer. Comme l'ensemble des Jurassiens, je suis excédée par les programmes télévisés qui commencent à 21 h 15.
M. Victorin Lurel . - Connaît-on la date de parution du rapport que devait fournir le Gouvernement sur l'avenir de la CAP ?
Avec l'article 31 du PLF, le Gouvernement a décidé de déroger à la règle en vigueur d'indexation de la CAP sur l'inflation. Je trouve cela hypocrite, car le gain de pouvoir d'achat est insuffisant : il est de l'ordre de 0,25 centime d'euro par personne et par an pour une famille de quatre personnes.
Le Gouvernement souhaite imposer au secteur public une économie de 70 millions d'euros. Nous avions déjà consenti 36 millions d'euros l'année dernière et en 2017, soit 72 millions d'euros sur les deux dernières années. Le pire est à venir puisqu'à l'horizon, de 2022, l'audiovisuel public verra sa dotation publique baisser de 190 millions, dont 160 millions imputables sur la seule dotation de France Télévisions et 20 millions sur celle de Radio France. La totalité des 70 millions serait portée par France Télévisions selon l'amendement de notre collègue. C'est là que nous avons quelques divergences, car c'est le personnel qui va porter cet effort. France Télévisions doit faire des efforts de rationalisation et trouver un nouveau modèle économique bien entendu, mais là, c'est une véritable saignée pour France Télévisions !
Le Gouvernement engage France Télévisons dans une stratégie qui me paraît relever de l'idéologie. La suppression des deux chaînes France 4 et France Ô représente 25 millions d'euros d'économies, mais, en même temps, on crée France Info Tv, chaîne d'information en continu, à laquelle on octroie 50 millions d'euros. Je souhaiterais que le rapporteur m'éclaire sur le total des économies réalisées et sur ce qu'il adviendra des canaux libérés ? Seront-ils supprimés du bouquet TNT, vendus à d'autres chaînes ?
Par ailleurs, depuis 2002, France Télévisions a dû supprimer 1 000 ETP. Il faudra en supprimer autant d'ici à 2022, ce qui représente 20 % des effectifs en moins en dix ans. Pouvez-vous m'indiquer combien vont coûter à court et à moyens terme le plan de départs volontaires, les ruptures conventionnelles et les nombreux contentieux ?
Enfin, dans le CAS « Participations financières de l'État », l'État a décidé de participer à l'augmentation du capital de France Télévisions à hauteur de 115 millions d'euros libérés sur quatre ans pour permettre au groupe de s'adapter à la révolution numérique. Mis en perspective avec le plan social imposé à l'entreprise, j'ai du mal à croire à l'intérêt de ces 115 millions d'euros. Le rapporteur peut-il nous dire à quoi correspond véritablement cette somme ? Je ne crois pas à l'utilité de la holding, dont nous ignorons tout du périmètre.
Depuis 2009, on interdit aux chaînes de commercialiser des espaces publicitaires en soirée. L'interdiction a été étendue aux programmes jeunesse, y compris pendant les jeux Olympiques de 2024. Comment France Télévisions pourrait-il donc à l'avenir diversifier ses sources de financement ? Le groupe fera donc face à une baisse massive des dotations publiques sans capacité de développer ses propres ressources via la publicité ou la production interne de programmes, à l'inverse de la BBC. Parallèlement, France Télévisions sera toujours obligée de financer la production externe audiovisuelle et cinéma à hauteur de 480 millions d'euros par an. Toute l'entreprise réalise des économies massives sauf les sociétés de production privées qui continue de disposer d'une enveloppe garantie de la CAP. Je rappelle que le groupe France Télévisions ne possède que des droits limités lorsqu'il achète en externe des productions : passé le délai de sept jours, il n'a plus le droit de diffuser gratuitement les programmes qu'il a financés. L'oligopole des producteurs privés fait cofinancer ses productions par le secteur public et garde le bénéfice des droits de diffusion.
Quel est donc l'avis du rapporteur sur ce point ? Comment permettre à France Télévisions de reprendre le contrôle sur des programmes qu'elle finance avec de l'argent public et sur lesquels elle est aujourd'hui dépossédée de tous ses droits ?
Notre groupe devrait voter contre l'adoption de cette mission.
M. Patrice Joly . - Je partage l'avis du rapporteur sur les enjeux diplomatiques, culturels, économiques et politiques que constitue l'audiovisuel extérieur. Nous avons la chance d'avoir une histoire qui a constitué ce réseau de la francophonie.
Par ailleurs, j'ai beaucoup d'inquiétudes sur la diffusion de la presse, compte tenu de la situation du groupe Presstalis. Sur mon territoire, la Nièvre, la diffusion des quotidiens n'est assurée qu'un jour sur deux. Le numérique n'est cependant pas accessible à tous et, sur les territoires ruraux, il n'apporte qu'une réponse partielle aux besoins. pourtant, il importe de ne pas négliger cet enjeu démocratique et culturel au regard de ce que l'on observe dans les sondages et les résultats électoraux.
M. Jean-Claude Requier . - Radio France dispose de deux orchestres : l'Orchestre national de France et l'Orchestre philharmonique de Radio France dont les dépenses de fonctionnement représentent 7,4 millions d'euros. Je ne suis pas musicien, mais, ne pourrait-on pas se contenter d'un seul orchestre ?
La CAP baisse d'un euro symbolique. Comment va-t-on la prélever à l'avenir puisqu'elle ne sera plus couplée avec la taxe d'habitation ?
Je partage le point de vue du rapporteur sur les missions du service public. Par exemple, il y a peu de sports populaires diffusés sur les chaînes publiques. Comment faire pour acheter ces prestations onéreuses quand on a peu d'argent ?
Je vous rejoins également sur la publicité et les sponsors qui me semblent excessifs.
M. Marc Laménie . - Je m'intéresse particulièrement au programme 334, notamment à ses parties consacrées à la lecture et au livre ainsi qu'aux industries culturelles. Des crédits non négligeables sont fléchés vers trois opérateurs bien connus à Paris, mais peu en province : la Bibliothèque nationale de France, la Bibliothèque publique d'information (BPI) et le Centre national du livre. Les personnels de ces établissements ainsi que la culture sont concentrés sur Paris. Toutefois, je rappelle que la province a également des besoins importants.
M. Roger Karoutchi , rapporteur spécial . - Concernant l'avenir de la CAP, nous ignorons quel sera le niveau de la taxe et comment elle sera perçue avec la disparition de la taxe d'habitation. Gérald Darmanin n'a pas été suivi par le Gouvernement et le projet actuel est de l'intégrer à l'impôt sur le revenu, mais nous ne savons pas comment les choses vont se passer, notamment pour la moitié des Français qui ne paie pas cet impôt. Le Gouvernement essaie de trouver un système qui redonne environ 4 milliards d'euros. Une réflexion est engagée à Bercy. Le rapport que cite Victorin Lurel n'a toujours pas été remis.
Si elle se limite à la holding, la réforme de l'audiovisuel ne sera qu'une réforme de gouvernance qui n'abordera donc pas la publicité, le début des programmes ou la ressource. Le Gouvernement semble, pour l'heure, ne pas vouloir engager de réflexion sur le financement de l'audiovisuel avant d'avoir réformé la gouvernance. C'est peu logique. Cela signifie que nous allons avoir en mai-juin 2020 un texte sur la holding et les directions générales, mais nous ne saurons pas comment tout cela sera financé, et je doute que nous en sachions davantage à ce moment sur le prélèvement de l'audiovisuel.
Sur l'indexation de la CAP, qui était prévue sur l'inflation, la baisse d'un euro par an est inintéressante. C'est surtout symbolique et démagogique.
Concernant la baisse des crédits, j'entends régulièrement que l'on demande trop d'efforts à l'audiovisuel public. Oui et non ! Le chaînes publiques comme Radio France se sont mises d'accord il y a maintenant trois ans sur un programme sur cinq ans avec un contrat d'objectifs et de moyens qui comporte une rationalisation des services, une réduction du personnel, une révision de la grille et des programmes, etc. Radio France doit encore rationaliser, mais a fait un très gros effort. Aujourd'hui, il a d'ailleurs été annoncé que la chaîne se séparerait d'ici à 2022 à nouveau de 200 collaborateurs - 150 départs en retraite non renouvelés et 50 départs volontaires. Pour autant, les chaînes de Radio France - France Inter, France Info - sont en progression.
À France Télévisions, il y a eu des secousses en 2018 et début 2019. Les deux ministres successifs ont en effet signifié au groupe qu'il ne s'était pas pleinement engagé dans les efforts demandés depuis deux ans. En réalité, sous la présidence précédente, on avait déjà demandé à Delphine Ernotte depuis longtemps de réaliser des efforts : elle avait bloqué le système en disant que les tensions sociales étaient trop fortes et que les efforts ne pouvaient pas être aussi importants qu'à Radio France ! On ne voit pas pourquoi !
La réduction des coûts ne passe pas uniquement par la diminution des charges de personnel. Aujourd'hui, l'achat par France Télévisions de séries ou films américains représente plus de 94 millions d'euros par an. L'objectif poursuivi n'est pas le bon. En revanche, quand France Télévisions fait des efforts pour proposer des séries françaises historiques ou politiques de qualité, cela s'apparente à la mission de service public. Tous les accords signés avec les producteurs précisaient que l'aide visait à aider la production française et les PME. Il faut désormais trouver un équilibre.
France Télévisions - et ce groupe n'est pas le seul - réduit les marges des producteurs, diversifie, et a mis en place un système dit de maximum pour chaque société de production. Il y a encore cinq ans, certaines sociétés de production avaient jusqu'à 200 millions d'euros de commandes dans l'année. Pour rester à recettes constantes, il faut envisager soit une réforme du périmètre soit trouver de recettes complémentaires avec, notamment, des partenariats.
Je ne crois pas que France Télévisions soit mal traitée. Quand je vois les efforts consentis par d'autres chaînes, je constate qu'elle a encore des marges de progression. Il faudra, à un moment, redéfinir son financement. Cela sera plus difficile lorsque la CAP sera associée à l'impôt sur le revenu.
Pour répondre à Patrice Joly, le groupe Presstalis est en crise. On l'a réformé et refinancé, mais cela ne fonctionne pas. Les responsables de la Fédération nationale de la presse spécialisée que j'ai reçus il y a quelques jours ont indiqué que la grande presse nationale avait des systèmes de portage plus faciles. Des marges de progression demeurent à destination des zones rurales et de certaines zones de province.
Concernant les deux orchestres de Radio France, j'avais déjà posé la question l'an dernier. On m'a répondu : « Ce sont deux orchestres magnifiques. » L'idée de parvenir à un seul orchestre Radio France est dans toutes les têtes, mais, dans l'immédiat, Radio France nous demande de les conserver en arguant qu'ils sont excellents.
La dotation budgétaire pour les bibliothèques dans les territoires ne relève pas de la mission « Médias, livres et industries culturelles ». Le plan « Bibliothèques » lancé par le Gouvernement donne, cela étant, d'excellents résultats.
La commission a décidé de proposer au Sénat l'adoption de la mission « Médias, livres et industries culturelles », et de l'article 76 quaterdecies qui lui est rattaché.
L'amendement n° 1, présenté par le rapporteur spécial, a été adopté.
La commission a décidé de proposer au Sénat, sous réserve de l'adoption de son amendement, l'adoption du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public ».
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Réunie à nouveau le 21 novembre 2019, sous la présidence de M. Vincent Éblé, président, la commission des finances a confirmé sa décision de proposer au Sénat l'adoption sans modification des crédits de la mission « Médias, livre et industries culturelles » et de l'article 76 quaterdecies , ainsi que l'adoption des crédits du compte de concours financiers « Avances à l'audiovisuel public » tels que modifiés par son amendement.