EXAMEN EN COMMISSION

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Réunie le mercredi 6 mars 2019 sous la présidence de M. Alain Milon, président, la commission des affaires sociales procède à l'examen, en deuxième mecture,, selon la procédure de législation en commission (articles 47 ter à 47 quinquies du Règlement), du rapport de M. Olivier Henno sur la proposition de loi n° 184 (2018-2019) visant à favoriser la reconnaissance des proches aidants.

M. Alain Milon , président . - Ainsi qu'en a décidé la Conférence des présidents, et avec l'accord de tous les groupes, nous examinons la proposition de loi, modifiée par l'Assemblée nationale, visant à favoriser la reconnaissance des proches aidants selon la procédure de législation en commission prévue aux articles 47 ter et suivants du règlement du Sénat. Le droit d'amendement s'exerce donc uniquement en commission.

Notre réunion, qui est retransmise sur le site du Sénat, se tient en présence de Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État auprès de la ministre des solidarités et de la santé.

M. Olivier Henno , rapporteur . - Je veux d'abord saluer Mme Jocelyne Guidez, auteur de cette proposition de loi. Nous connaissons la constance de son engagement pour la reconnaissance des proches aidants et la passion qui l'anime sur ce thème comme sur d'autres.

La navette parlementaire a été riche en péripéties. Le 25 octobre 2018, le Sénat adoptait à l'unanimité un texte ambitieux et innovant qui, sur un sujet qui n'avait jusqu'alors été abordé que par petites touches. Si nous ne découvrions pas les proches aidants, nous leur consacrions enfin un débat parlementaire.

Les proches aidants, nous en connaissons tous et nous le sommes parfois nous-mêmes. Considérer qu'ils sont un prolongement logique de la solidarité familiale, c'est oublier ce qu'ils apportent à la société et cet apport justifie de faire jouer la solidarité nationale à leur égard.

Aussi notre collègue avait-elle, à l'article premier, comblé une lacune de la loi relative à la liberté de choisir son avenir professionnel, en inscrivant la conciliation de la vie personnelle et de la vie professionnelle de l'aidant dans le champ des négociations collectives d'entreprise. À l'article 2, elle avait proposé que le congé de proche aidant, instauré par la loi portant adaptation de la société au vieillissement, soit indemnisé. Cette disposition, au coeur du texte initial, ne visait pas seulement à donner à l'aidant des moyens financiers mais aussi à le reconnaître comme relais de la solidarité nationale. Les articles 3 et 4 prévoyaient une harmonisation du régime de retraite des aidants sur celui des personnes ayant temporairement ou définitivement interrompu toute activité professionnelle pour soutenir un proche en fin de vie. L'article 5 étendait aux fonctionnaires la possibilité du relayage ouverte par la loi pour un État au service d'une société de confiance. Enfin, l'article 6 étoffait le dispositif d'information de l'aidant et établissait, par divers moyens, plus solidement le duo aidant/aidé aux yeux de ses interlocuteurs administratifs ou de santé.

Notre débat en séance n'avait pas tant porté sur le fond que sur le calendrier. Selon le Gouvernement, mieux valait traiter le sujet ultérieurement, dans d'autres textes, après la conclusion des grandes concertations nationales sur la prise en charge de la dépendance et sur l'avenir de notre système de retraite.

Le 6 décembre 2018, des députés, au cours de la discussion générale, ont exprimé leur incompréhension devant ce refus de légiférer sur un sujet sociétal de première importance pour des raisons essentiellement calendaires. La motion de renvoi en commission que le groupe majoritaire a déposée n'a pas été adoptée, à l'égalité des suffrages exprimés. J'y vois le signe que le Parlement, quand l'urgence et l'importance du sujet le justifient, sait s'affranchir de toute contingence et prend la pleine mesure de sa mission. La discussion du texte a bien eu lieu mais, comme l'on devait s'y attendre, la plupart des articles ont été supprimés. Revient donc devant nous une proposition de loi largement amputée, réduite aux articles premier et 5, adoptés conformes.

Dans ces circonstances, fallait-il renvoyer aux députés un texte à la hauteur de nos ambitions ? Il est à peu près certain qu'alors, il n'aurait jamais été inscrit à l'ordre du jour de l'Assemblée nationale. Nous avons préféré engager avec le Gouvernement un travail partenarial, dont je salue la qualité. Nous avons convenu que les articles 2, 3 et 4, les plus emblématiques du texte, étaient partagés dans leur principe mais n'étaient pas compatibles avec le rendu des travaux des grandes concertations nationales en cours. L'engagement de madame la ministre, réitéré à l'Assemblée nationale, de donner ultérieurement corps à nos propositions, sous une forme plus appropriée, nous a finalement convaincus d'accepter leur suppression.

Cependant, notre assemblée, qui s'est montrée pionnière sur ce sujet, ne pouvait se satisfaire d'un résultat aussi limité. C'est pourquoi, après avoir dialogué avec le Gouvernement, je vous proposerai deux amendements afin d'obtenir une amélioration rapide et effective de la vie des aidants. Le premier consiste à rationaliser le financement des actions spécifiques aux aidants, actuellement compliqué par une dualité des intervenants - la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie et la conférence départementale des financeurs. Avec le second amendement, l'aidant verra son nom inscrit au dossier médical partagé de la personne aidée ; il sera ainsi mieux identifié par les professionnels de santé.

Par ce texte ainsi modifié, que l'Assemblée nationale, à n'en pas douter, approuvera, nous réaffirmerons l'importance et la qualité de l'initiative parlementaire en ces temps de contestation.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État . - Le Gouvernement et le Parlement poursuivent le même objectif : répondre aux besoins des aidants, dont le nombre est estimé de 4 à 11 millions selon les enquêtes, qui ne comptent pas ni leur temps ni leur peine pour soulager des proches âgés, handicapés ou malades. Chacun peut devenir un jour aidant ou l'a déjà été, nous en connaissons tous autour de nous.

Nul ne peut éluder que ce texte, qui fait l'objet d'une deuxième lecture, a été modifié par l'Assemblée nationale. Les députés ont voté conformes les articles premier et 5. En revanche, ils n'ont pas retenu l'article 6, qui relève davantage du règlement que de la loi, non plus que les articles 3 et 4 sur la retraite et le régime d'assurance vieillesse afin de laisser les concertations engagées porter leurs fruits. L'article 2, sur l'indemnisation du congé du proche aidant, a suscité le plus de débats. Si l'on peut s'accorder sur son principe, son financement doit être discuté dans la perspective plus globale de celui de la dépendance. Lors de la réunion du Parlement en Congrès à Versailles, le président de la République a annoncé une loi sur la perte d'autonomie. Pour préparer ce texte, il a confié à Dominique Libault le soin d'organiser une concertation autour du grand âge, dont les travaux ont démarré en octobre et s'achèveront prochainement.

Néanmoins, il ne faut pas nécessairement suspendre tous les efforts dans l'attente de cette loi sur l'autonomie ; nous en sommes d'accord, il importe que les aidants bénéficient rapidement de mesures concrètes. Vous avez choisi d'enrichir la proposition de loi de deux mesures qui pourraient faire consensus avec les députés, elles rejoignent d'ailleurs des propositions formulées dans le cadre de la concertation. Il est souhaitable que cette proposition de loi, enrichie de deux nouvelles dispositions, puisse être examinée par l'Assemblée nationale dans des délais raisonnables.

La solidarité n'est pas un principe abstrait, le Gouvernement veillera à ce qu'elle soit une réalité concrète et quotidienne.

Mme Jocelyne Guidez , auteure de la proposition de loi . - Alors que le bicamérisme, et singulièrement le Sénat, est remis en question, ce texte, avec d'autres, témoigne du travail de la Haute Assemblée, de sa pugnacité, de son engagement et de sa capacité à convaincre. J'y travaille depuis presque un an.

La navette a apporté son lot de joies, de peines, de déceptions. La satisfaction de voir le Sénat entier mobilisé pour les proches aidants a laissé place à l'amertume lorsque l'Assemblée nationale a adopté un texte diminué, au terme d'une étonnante séance publique. Enrichi par les deux amendements de notre rapporteur, il apportera suffisamment d'avancées pour que les aidants ne se sentent pas déconsidérés. J'avais d'ailleurs envisagé de déposer ces amendements lors de l'examen de la proposition de loi sur les cancers pédiatriques. Avant même le dépôt de la proposition de loi, j'avais tendu la main au Gouvernement pour lui présenter les mesures qui viendraient en discussion. Lors de ma présentation dans l'hémicycle, j'avais indiqué que les auteurs de ce texte étaient prêts à revoir son périmètre. En seconde lecture, c'est le Gouvernement qui a tendu la main, soucieux de trouver un terrain d'entente au profit de proches aidants. Cet équilibre sera atteint lorsque nous aurons adopté les amendements de notre rapporteur.

Madame la ministre, vos débuts n'ont pas été faciles. Pour votre première séance au banc des ministres, vous avez fait face à un Sénat totalement opposé au Gouvernement. Vous avez pourtant pris dès ce moment, des engagements de principe. La ministre des solidarités et de la santé s'est également engagée publiquement à indemniser le congé de proche aidant. Quant aux deux articles sur les retraites, nous sommes désormais trop proches de l'examen du projet de loi qui traitera globalement du sujet.

Madame la ministre, si vous soutenez ce texte à l'Assemblée nationale, comme vous soutenez les amendements de notre rapporteur aujourd'hui, nous pourrions aboutir avant l'été. Ce serait satisfaisant pour le bicamérisme et, surtout, pour les proches aidants.

M. Alain Milon , président . - La trajectoire de cette proposition de loi est assez surprenante, je salue la ténacité de son auteur. Peut-être suis-je sans doute particulièrement naïf mais, pour siéger au Sénat depuis quinze ans, je croyais que le Parlement était là pour faire des propositions, et non pour entériner le résultat de concertations.

Mme Nadine Grelet-Certenais . - Merci à Mme Guidez et M. Henno pour leur travail sur cette question primordiale des proches aidants. L'entêtement de la majorité gouvernementale à vider ce texte de sa substance est effectivement étonnant. Certes, une concertation est en cours mais ses premiers échos confirment le diagnostic et les solutions avancés par nos collègues : reconnaître les proches aidants, indemniser leur congé. Il serait urgent d'attendre... Pourquoi, quand le Parlement apporte au Gouvernement une solution clé en main qui répond à un réel besoin exprimé par les Français ? Par cohérence, nous proposerons de rétablir le texte du Sénat.

M. Philippe Mouiller . - Je félicite l'auteure du texte et son rapporteur même si, ce matin, on est dans une grande conciliation pour faire en sorte qu'un texte sorte tout de même du Parlement. Résultat : un compromis a minima, et un calendrier bien différent de celui des familles et des parents. Tout est renvoyé au débat - dont vous êtes certes des spécialistes ! Il faut sortir par le haut, avec des résultats concrets. Bien sûr, vous avez déjà pris des mesures en faveur de l'inclusion, mais tout repose sur l'accompagnement et le suivi des familles. Bref, nous aboutissons à une totale incohérence de calendrier, puisque des mesures sont déjà mises en place sur les territoires alors que le statut des aidants n'est pas redéfini. C'est un peu déconcertant, et regrettable. En tous cas, nous serons très pointilleux dans le suivi de l'ensemble des engagements pris, car il y a urgence.

Mme Laurence Cohen . - Nos réunions se succèdent et se ressemblent. Pour le Gouvernement, soit nous sommes totalement d'accord avec lui, comme l'Assemblée nationale, et alors tout va bien ; soit il n'accepte pas les propositions que nous faisons, et nous devons vider les textes de leur sens.

Sur une question extrêmement douloureuse et qui mobilise nos concitoyens, Mme Guidez et le rapporteur ont travaillé pendant plus d'un an, en intégrant aussi les apports de la proposition de loi du député Pierre Dharréville, et ont abouti à un vote unanime au Sénat. Et voilà que le Gouvernement nous dit : « Circulez, il n'y a rien à voir » ! Il nous explique qu'il va déposer un projet de loi sur ce sujet, qu'il n'a pas besoin du travail du Parlement, notamment du Sénat.

Aussi le groupe CRCE est-il dubitatif. Presque tous les articles ont été supprimés : pourquoi voter ce texte ? Nous ne sommes certes pas opposés au peu qu'il en reste : ce serait un pas en avant, mais un pas de fourmi... Bref, entre le vote pour ou l'abstention, notre coeur balance.

Prenons garde à ne pas scier la branche sur laquelle nous sommes assis ! Sinon, après tout, pourquoi ne pas réduire le nombre de parlementaires ? Voire supprimer le Sénat ? Sur la forme, nous sommes face à une atteinte à la démocratie extrêmement grave. Sur le fond, les grands discours de la secrétaire d'État n'engagent que ceux qui croient, ce qui nous laisse très dubitatifs.

Vous parlez de concertation, mais avec qui ? Les partenaires sociaux ? Quand on voit comment vous les considérez... Pendant ce temps, les proches aidants sont en souffrance et ont besoin de mesures beaucoup plus importantes que les petits pas que vous proposez. Je félicite Mme Guidez pour son optimisme et son ouverture d'esprit. Pour ma part, je suis beaucoup plus critique et déplore qu'il ne reste plus rien de la proposition de loi.

M. Daniel Chasseing . - J'avais déposé un amendement rétablissant l'article 2, qui porte sur la reconnaissance du proche aidant, notamment par le congé. Je félicite Mme Guidez et M. Henno pour ce texte précis et pragmatique. J'espère que les engagements pris par la ministre seront honorés dans le projet de loi sur la dépendance et dans la loi sur les retraites. Et je soutiendrai les amendements du rapporteur, pour simplifier l'action des aidants, et notamment leur inscription au dossier médical partagé (DMP). Pour qu'un vote conforme à l'Assemblée nationale soit possible, je retirerai mon amendement.

M. Olivier Henno , rapporteur . - Si je n'avais pas été rapporteur, je serais sans doute intervenu comme vous venez de le faire, pour rappeler la place du Parlement et souligner la trajectoire quelque peu chaotique de la proposition de loi. Dans un monde idéal, dans une République où le Parlement aurait un rôle plus important, on aurait pu imaginer que ce texte soit voté conforme dès la première lecture à l'Assemblée nationale, ou du moins qu'il nous soit renvoyé plus complet que les deux articles qui subsistent. D'ailleurs, nous ne sommes pas passés loin - à une voix près ! - d'une motion de renvoi...

Nos débats sur la place du Parlement et du Sénat ne sont pas nouveaux : ils sont inhérents à la V e République, même s'ils se sont renforcés ces derniers temps. Il faut tout de même être pragmatique. C'est le sens de mes amendements, qui visent à ce que les proches aidants bénéficient rapidement de dispositions législatives, sans avoir pour autant à passer par un vote conforme. Nous devons avancer sur cette question complexe, qui pose des problèmes humains - mais j'ai bien pris note de vos interventions.

EXAMEN DES ARTICLES

Article 2 (supprimé)

Mme Nadine Grelet-Certenais . - Notre amendement COM-5 , comme l'amendement COM-2 de M. Chasseing, rétablit l'article 2 tel qu'il avait été adopté à l'unanimité par notre assemblée en première lecture, l'assouplissement du bénéfice de l'indemnité de proche aidant étant très attendu par les personnes concernées. Cet article ouvrait en outre la possibilité d'un renouvellement non plafonné du congé de proche aidant ; reposant sur le principe de solidarité.

La mission flash de l'Assemblée nationale a montré que l'absence d'indemnisation est un obstacle rédhibitoire au recours à ce congé. La concertation en cours pose le même diagnostic. Ce texte est l'occasion de répondre au plus vite au désarroi et à l'épuisement des personnes concernées.

La reconnaissance du soutien apporté par le proche aidant est un enjeu sociétal majeur. C'est une aide qui ne se substitue pas à l'aide professionnelle et institutionnelle, mais vient la compléter. Quel signal le Gouvernement va-t-il envoyer à nos concitoyens et aux associations ? L'unanimité a été obtenue sur cette proposition de loi transpartisane. Cela pose la question de la considération que le Gouvernement porte aux travaux parlementaires sur cette question.

M. Olivier Henno , rapporteur . - Je suis d'accord avec une large part de vos propos, mais ne peux émettre un avis favorable en raison du chevauchement avec la concertation en cours sur la réforme de la dépendance. Le Gouvernement s'est engagé dans la voie de l'indemnisation du congé de proche aidant. C'est un progrès notable - dans lequel le Sénat a eu tout son rôle. Il me paraît donc souhaitable de maintenir la suppression de l'article 2 : retrait, ou avis défavorable.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État . - Même avis qu'en première lecture. Le Gouvernement s'est engagé à indemniser le congé de proche aidant par la solidarité nationale. Il s'agit de propositions débattues dans le cadre de la concertation grand âge et autonomie. Et cette mesure forte doit faire l'objet de réflexions techniques pour en définir précisément les paramètres et les modalités de financement. Elle trouvera sa place dans le projet de loi sur le grand âge et l'autonomie, qui sera déposé dans quelques mois, ou dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale. Avis défavorable, donc. Vous aurez l'occasion de débattre du projet de loi.

L'amendement COM-2 est retiré. L'amendement COM-5 n'est pas adopté.

L'article 2 demeure supprimé.

Article 2 bis (supprimé)

Mme Nadine Grelet-Certenais . - Notre amendement COM-6 rétablit cet article, relatif à la prévention de la désinsertion professionnelle. Il s'agit de faire bénéficier les salariés concernés d'actions de formation spécifiques, de leur permettre d'être maintenu à un poste qui leur correspond, de changer de métier ou de profession ou de bénéficier d'une promotion sociale ou professionnelle. La réponse la plus efficace - s'adapter au nouvel état de santé de l'aidant - empêche sa mise à l'écart et prévient l'exclusion professionnelle.

M. Olivier Henno , rapporteur . - Pour les mêmes raisons, retrait ou avis défavorable.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État . - J'avais déjà émis un avis défavorable au Sénat, puis à l'Assemblée, car la question de la désinsertion professionnelle dépasse largement le problème des aidants : il serait regrettable de diluer les mesures fortes d'un texte qui s'adresse prioritairement à eux. Je suis sensible à la question de la désinsertion professionnelle, qui est une partie importante de la stratégie de lutte contre la pauvreté. Avis défavorable, donc.

L'amendement COM-6 n'est pas adopté.

L'article 2 bis demeure supprimé.

Article 3 (supprimé)

Mme Nadine Grelet-Certenais . - Notre amendement COM-7 rétablit cet article qui, en matière de calcul des droits à pension, étend à tous les proches aidants le dispositif existant pour les seuls proches aidants d'une personne en situation de handicap. En effet, l'aide apportée par la personne a un effet négatif sur sa vie sociale et professionnelle. Et les aidants sont en majorité des femmes.

L'amendement COM-7, repoussé par le rapporteur et le Gouvernement, n'est pas adopté.

L'article 3 demeure supprimé.

Article 4 (supprimé)

Mme Nadine Grelet-Certenais . - De même, avec l'amendement COM-8 , conformément au vote unanime du Sénat en première lecture, nous rétablissons le droit à l'affiliation obligatoire à l'assurance vieillesse du régime général pour tous les proches aidants. L'article 4 harmonisait les conditions d'ouverture de l'affiliation obligatoire à l'assurance vieillesse de tous les proches aidants sur celle des salariés bénéficiant du congé de proche aidant. L'objectif est d'élargir cette affiliation au-delà des aidants du cercle familial.

L'amendement COM-8, repoussé par le rapporteur et le Gouvernement, n'est pas adopté.

L'article 4 demeure supprimé.

Article 5 bis (supprimé)

M. Olivier Henno , rapporteur . - Mon amendement COM-3 , identique à l'amendement COM-9 rectifié bis, intègre le soutien aux actions d'accompagnement des proches aidants des personnes âgées en perte d'autonomie, du programme coordonné de financement des conférences des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées, dans le champ de la section 5 du budget de la Caisse nationale de solidarité pour l'autonomie (CNSA), consacré au financement des dépenses en faveur des personnes handicapées et des personnes âgées dépendantes.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État . - Cet amendement réintroduit l'article 5 en le réécrivant. Il prévoit que la conférence des financeurs de la prévention de la perte d'autonomie des personnes âgées affecte à des actions d'accompagnement des proches aidants une partie des recettes qui lui sont allouées par la CNSA. Ces actions peuvent déjà être financées dans le cadre du programme d'action de la conférence des financeurs. Toutefois, elles ne peuvent pas l'être par le concours CNSA.

Votre proposition répond à une demande de la conférence des financeurs, qui souhaite un élargissement du périmètre d'affectation des concours CNSA. Du reste, l'atelier « aidants » de la concertation sur le grand âge et autonomie tend à faire de la conférence des financeurs un véritable acteur local, au plus près des besoins des proches aidants, et non plus uniquement des personnes dépendantes. Les travaux menés ont donc confirmé l'intérêt de cet amendement : avis favorable.

Mme Élisabeth Doineau . - J'ai été étonnée par cette proposition car, dans beaucoup de nos départements, nous finançons déjà ainsi, par la conférence des financeurs, un certain nombre d'actions pour les aidants. J'entends bien qu'il s'agit d'ouvrir les financements de la CNSA. Mais, pour les aidants, cela n'apportera pas grand-chose.

M. René-Paul Savary . - Je suis moi aussi très étonné : actuellement les présidents de département réunissent l'ensemble des financeurs pour définir le programme de financement des actions en faveur des personnes âgées, dont le soutien aux aidants. Ce que vous approuvez, madame la ministre, existe déjà ! En outre, s'agissant d'un fonds fermé, tout élargissement du périmètre se traduira par une diminution sur d'autres postes. Autrement dit, c'est de la poudre aux yeux. Je suis stupéfait que l'on invente dans la loi ce qui fonctionne déjà sur le terrain.

M. Olivier Henno , rapporteur . - Ce n'est pas la première fois que la loi entérine ce qui se pratique. Les auditions ont montré que tous les départements n'appliquent pas le système que vous décrivez, et les représentants des aidants nous ont demandé d'intégrer dans le texte cette mesure, afin de la généraliser. Une telle harmonisation sera une avancée.

Les amendements COM-3 et COM-9 rectifié bis sont adoptés.

L'article 5 bis est rétabli dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 6

M. Olivier Henno , rapporteur . - En octobre dernier, Mme Doineau avait déjà évoqué la question du DMP. Mon amendement COM-4 vise à inclure l'identification du proche aidant dans le dossier, avec toutes les garanties de protection et de confidentialité pour l'aidant et l'aidé.

Mme Nadine Grelet-Certenais . - Mon amendement COM-10 est différent : il vise à intégrer sur la carte vitale des informations sur le proche aidant ou la personne de confiance. Nous prévoyons également un guide pour le proche aidant et un site internet destiné à sa bonne information, car il méconnaît trop souvent ses droits et les ressources disponibles.

M. Olivier Henno , rapporteur . - La solution du DMP est satisfaisante : je demande le retrait de cet amendement, à défaut de quoi j'y serai défavorable.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État . - Avis défavorable à l'amendement COM-10 : il rétablit l'article 6 dans sa rédaction initiale, sur lequel j'avais exprimé mes réserves en première lecture, la carte vitale n'étant pas le bon support.

Je suis en revanche favorable à l'amendement COM-10 qui contribue à faire du DMP, comme l'a rappelé Mme Buzyn, « un outil au service de nos concitoyens, emblématique du virage numérique et de la stratégie de transformation du système de santé ».

L'amendement COM-10 est adopté.

L'amendement COM-4 devient sans objet.

L'article 6 est rétabli dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Article 7 (supprimé)

Mme Nadine Grelet-Certenais . - Le COM-11 est un amendement de cohérence avec les amendements que j'ai défendus : il rétablit le gage de la proposition de loi.

M. Olivier Henno , rapporteur . - Par cohérence, retrait ou défavorable.

Mme Christelle Dubos, secrétaire d'État . - Même avis.

L'amendement COM-11n'est pas adopté.

L'article 7 demeure supprimé.

Mme Laurence Cohen . - Nous venons d'assister à une parodie de discussion parlementaire. Le Gouvernement accepte ce qui ne change rien et refuse les dispositions positives. « Circulez, le Gouvernement veille », nous dit-il en substance. Il y a eu des rencontres entre le ministère et le Sénat afin de dégager un accord majoritaire, des amendements du rapporteur sont donc acceptés : mais ils sont de la roupie de sansonnet au regard de l'attente exprimée par les aidants ! Il est bon de mener la concertation avec les partenaires sociaux, ce ne sont pas les communistes qui la critiqueront ; mais je vous enjoins, madame la ministre, d'accorder plus de considération au Parlement et au Sénat. Nous menons des auditions, travaillons et disposons d'une expertise, d'une « technicité », pour reprendre votre terme, qui n'a rien à envier à celle de vos services.

M. Jean-Noël Cardoux . - Nous allons voter un texte quasiment vidé de sa substance. Lorsque j'étais président de la commission des affaires sociales du conseil général du Loiret, il y a fort longtemps, nous discutions déjà des problèmes rencontrés par les aidants !

La commission est unanime face à l'attitude peu compréhensible du Gouvernement. Je suggère par conséquent que notre président publie au nom de la commission un communiqué pour commenter la façon dont les choses se sont déroulées. Il y a un parallèle à faire entre l'efficacité du travail parlementaire et l'inefficacité de ce grand débat, dont on ignore totalement comment il se conclura et sur quoi il débouchera.

Mme Élisabeth Doineau . - Jocelyne Guidez nous avait fait une promesse, inspirée par une situation familiale qu'elle avait vécue. Elle a beaucoup travaillé. Sa promesse aboutit à un texte qui provoque en moi beaucoup d'amertume. Je comprends le désespoir des gens, qui sont souvent dans la rue actuellement : ils se disent que la classe politique n'a pas été capable d'enrichir la proposition de loi qu'ils attendaient. Ils nous traitent de lointains pédants.

Mme Nadine Grelet-Certenais . - C'est effectivement une grande déception de voir ce texte vidé d'articles importants. Nous espérons que les promesses seront tenues. DMP, soutien par la conférence des financeurs : cela ne suffit pas et j'approuve donc l'idée d'un communiqué. Il y va de la considération portée au travail parlementaire. Nous gardons espoir cependant et voterons la proposition de loi.

M. Jean-Marie Vanlerenberghe . - Je partage ces propos. Mme la ministre était il y a peu encore parlementaire, elle doit comprendre notre frustration. J'attendais autre chose de ce Gouvernement. Pourquoi ce besoin constant des gouvernements de récupérer à leur profit les travaux des parlementaires ? Nous vivons tout de même sous une Constitution parlementaire ! Il y a ici autant de compétences que dans votre cabinet, madame la ministre, et sans doute beaucoup plus d'expérience.

Mme Patricia Schillinger . - Arrêtons avec ce discours...

M. Jean-Marie Vanlerenberghe . - Faudra-t-il revêtir un gilet jaune pour se faire entendre ?

Je salue l'initiative de Jocelyne Guidez, dont les raisons ont été rappelées par Élisabeth Doineau. Il faut avancer. Je me réjouis du travail qui est fait sur la dépendance actuellement. Il faudra en débattre : le plus tôt sera le mieux. Il faudra également trouver des financements : cela sera plus compliqué... Considérant le verre à moitié plein, je voterai tout de même la proposition de loi.

Mme Catherine Deroche . - Nous avons voté le texte sur la santé visuelle des personnes âgées, qui en dépit d'un titre ronflant se bornait à autoriser les opticiens à se rendre dans les Ehpad pour faire de la réfraction : c'était un tout petit progrès, mais c'était au moins cela. Nous avons estimé insuffisant le texte sur les cancers pédiatriques mais l'avons voté conforme, afin d'engranger de petites avancées. Nous allons procéder ainsi une fois encore. Mais pourquoi n'y a-t-il jamais de la part des députés d'effort réciproque ? Parce qu'ils ne votent pas : ils obéissent au Gouvernement. C'est ainsi que notre travail ne reçoit jamais d'écho. C'est injuste et antidémocratique.

M. Jean-Louis Tourenne . - J'approuve les grandes déclarations guerrières qui ont été prononcées ce matin sur le mépris à l'égard du Parlement, sur la nécessité pour notre Haute Assemblée de décider souverainement. Ensuite sont venues les propositions pour rétablir les articles supprimés, je les approuvais encore. Hélas, ceux qui s'indignaient se sont alignés... Par cette attitude, nous signons notre arrêt de mort. Nous faisons ce que veut l'Assemblée nationale et nous démontrons par ces complaisances incessantes qu'il n'est pas forcément utile de conserver une seconde assemblée...

Nous devrions nous montrer plus sourcilleux dans la protection de notre souveraineté. Le Sénat doit exprimer ses particularités, sa conscience et sa connaissance du terrain, sans quoi son avenir ne sera pas rose.

M. Alain Milon , président . - Avant de penser à supprimer le Sénat, pensons à la raison pour laquelle il a été créé, au lendemain de la Terreur...

Mme Jocelyne Guidez . - S'il cherche à récupérer cette proposition de loi, que le Gouvernement le sache : il ne l'aura pas, car elle appartient aux aidants. Le Gouvernement va-t-il mettre en place une rémunération pour le congé du proche aidant ? Il ne pourra s'en glorifier, la mesure ne lui appartient pas, le Sénat l'a déjà votée à l'unanimité.

Et comment la financera-t-il ? Par la sécurité sociale ? Comment parviendra-t-il à cela ? S'il est amené à reprendre dans quelques mois notre proposition, ne ferait-il pas mieux de l'accepter aujourd'hui ?

Quoi qu'il en soit, les articles qui demeurent sont importants ; c'est un petit pas qui est franchi, et nous avons l'habitude d'avancer à petits pas. Merci à ceux qui vont voter ce texte. Si nous choisissions d'inclure d'autres éléments, il ne serait pas adopté à l'Assemblée nationale. Avançons donc à petits pas...

M. Olivier Henno , rapporteur . - Nous opérons un arbitrage et choisissons la lucidité. Rétablir notre texte serait utile, pour l'affichage. Mais au-delà ?

Je sais que le Gouvernement a le souci des proches aidants. Sa position ne signifie pas qu'il ne veut rien faire. Mais il semble surtout préoccupé de pouvoir afficher une antériorité dans les mesures décidées en faveur des aidants. C'est le désagréable sentiment que j'ai eu dans mes échanges avec le ministère. C'est tellement dérisoire... Nous sommes au service du peuple !

Ne nous laissons pas envahir par l'amertume, qui rend malade : il vaut mieux nous projeter dans l'avenir. Mais freiner un progrès parce que le Sénat, le Parlement sont en avance, et songer avant tout au bénéfice politique, c'est dérisoire. Cette obsession moderne de la communication, plus forte que les causes défendues, est dommageable. Néanmoins, nous avons entendu les promesses du Gouvernement et suivrons leur application de façon sourcilleuse.

M. Alain Milon , président . - C'est le premier texte qu'avait à traiter Mme la ministre. Elle n'avait pas une position facile, puisque la proposition de loi, fruit de trop bonnes idées, ne plaisait pas au Gouvernement. J'espère que celui-ci aura plus de considération pour nous la prochaine fois.

Je rappelle que le vote en séance publique interviendra le 13 mars prochain.

La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.

Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat .

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