III. LES CONSÉQUENCES DE L'ADHÉSION DE LA FRANCE POUR LE COMPTE DE SES PAYS ET TERRITOIRES D'OUTRE-MER
Une fois que la France aura ratifié la convention de Lugano II, les collectivités d'outre-mer ayant le statut de PTOM cesseront d'appliquer la convention de Bruxelles de 1968 pour appliquer, dans leurs relations avec les Etats membres de l'Union européenne ainsi qu'avec l'Islande, la Suisse et la Norvège, les règles de la convention de Lugano II.
Selon les informations transmises par les services du ministère de l'Europe et des affaires étrangères (MEAE) 4 ( * ) , les principales différences entre les deux textes sont les suivantes :
- des précisions et présomptions ont été apportées s'agissant de la détermination du lieu d'exécution de l'obligation qui sert de base à la demande, s'agissant du critère de compétence spéciale prévu en matière contractuelle (article 5 paragraphe 1 de la convention de Lugano II) ;
- de même, le critère de compétence spéciale en matière délictuelle a été étendu de manière à retenir également le lieu où le fait dommageable est susceptible de se produire, et non uniquement celui où il s'est produit, suivant en cela l'interprétation de la Cour de Justice de l'Union européenne ;
- une règle de compétence spéciale a été prévue en matière de contrat de travail, sur le modèle de celle déjà prévue pour les contrats de consommation et d'assurance - la convention de Bruxelles ne prévoyant que des aménagements propres au contrat de travail dans les autres dispositions du texte ;
- et le mécanisme d'exequatur simplifié, sur simple requête, que prévoyait déjà la convention de Bruxelles, a été rationnalisé grâce à l'emploi de certificats et à la présentation, en annexe, des autorités concernées dans chaque Etat membre. Ainsi, la France a indiqué que les requêtes aux fins de déclaration de force exécutoire doivent être adressées au directeur du service de greffe, et non plus au juge. Elle a aussi simplifié les mécanismes de recours en cas de refus ou d'acceptation de la requête. Ces informations figurent en annexe de la convention de Lugano II et du règlement Bruxelles I.
Le régime de la reconnaissance et de l'exécution des décisions et actes authentiques en matières civile et commerciale prévu par la convention de Lugano II est identique à celui mis en place par le règlement européen Bruxelles I. Il demeure en conséquence soumis, en France, aux dispositions spécifiques du chapitre II du titre XV du titre I er du code de procédure civile (CPC), en particulier les articles 509-1 à 509-8 qui désignent, au sein de la juridiction compétente, les autorités chargées des formalités de reconnaissance et d'exécution des décisions.
L'adhésion à la convention de Lugano II pour son application aux collectivités ayant statut de PTOM suppose, pour certaines d'entre elles, de procéder à l'adoption de mesures de transposition.
Les articles 509-1 à 509-8 du CPC étant applicables de plein droit à Wallis-et-Futuna, Saint-Pierre-et-Miquelon et Saint-Barthélemy, l'adhésion à la convention de Lugano ne nécessitera pas de procéder à une quelconque adaptation du droit de ces collectivités, sauf éventuellement à une adaptation d'ordre terminologique s'agissant de la dénomination des juridictions.
S'agissant de Wallis et Futuna, l'article 1575 du code de procédure civile dispose que « le présent code est applicable aux îles Wallis et Futuna dans sa rédaction résultant du décret n° 2016-479 du 18 avril 2016 relatif au traitement des états et mémoires des frais de justice, à l'exception des dispositions des titres IV et V du livre II (...) livre » et l'article 1576, 1 procède aux adaptations terminologiques évoquées.
Pour les Terres australes et antarctiques françaises, aucune adaptation normative ne sera nécessaire. Les juridictions du ressort de la cour d'appel de Saint-Denis de La Réunion, qui sont compétentes pour mettre en oeuvre la convention de Lugano II, appliqueront les articles 509-1 à 508-8 du CPC.
En revanche, la Nouvelle-Calédonie et la Polynésie française étant compétentes en matière de procédure civile, les articles précités du CPC n'y sont pas applicables. Dès lors, une adaptation du droit de ces deux collectivités est nécessaire.
S'agissant de la Nouvelle-Calédonie, la seule disposition du CPC figurant dans le code de procédure civile de Nouvelle-Calédonie est l'article 509 en vertu duquel « les jugements rendus par les tribunaux étrangers et les actes reçus par les officiers étrangers sont exécutoires sur le territoire de la Nouvelle Calédonie de la manière et dans les cas prévus par la loi ». Il conviendrait donc que la Nouvelle-Calédonie adopte, dans son code de procédure civile, des dispositions semblables aux articles 509-1 à 509-8 pour l'application de la convention de Lugano II en Nouvelle-Calédonie ou que celui-ci opère un renvoi aux articles 509-1 et suivants du CPC. Quelle que soit l'alternative choisie, une adaptation terminologique devra être effectuée en remplaçant les termes « tribunal de grande instance » par « tribunal de première instance ».
S'agissant de la Polynésie française, la reconnaissance ou l'exéquatur d'une décision étrangère ne sont pas réglementées dans le code de procédure civile de Polynésie française. En conséquence, pour assurer la conformité de son droit, la Polynésie Française devra adopter des dispositions similaires à celles du CPC, ou réintroduire un renvoi au code de procédure civile applicable en métropole. Une adaptation terminologique sera également nécessaire afin de remplacer les termes « tribunal de grande instance » par « tribunal de première instance ».
Enfin, on rappelle que l'Assemblée de la Polynésie française, l'Assemblée territoriale de Wallis et Futuna et le Congrès de Nouvelle-Calédonie, obligatoirement consultés sur ce projet de loi préalablement à la ratification, ont rendu un avis favorable à l'exception de l'Assemblée territoriale de Wallis et Futuna qui n'a pas formulé d'avis.
* 4 Réponses du Gouvernement au questionnaire de la commission.