III. AUDITION DES ORGANISATIONS PROFESSIONNELLES REPRÉSENTATIVES DES EMPLOYEURS
M. Alain Milon , président . - Nous recevons maintenant les représentants des organisations professionnelles d'employeurs représentatives au niveau national et interprofessionnel.
Je remercie de leur présence :
- pour le Medef : M. Alexandre Saubot, vice-président en charge du pôle social, accompagné de M. Adrien Teurkia, directeur des relations sociales et Mme Ophélie Dujarric, directrice des affaires publiques ;
- pour la CPME : M. Jean-Michel Pottier, vice-président en charge des affaires sociales et de la formation, accompagné de M. Jean-Eudes du Mesnil, secrétaire général, Mme Sandrine Bourgogne, secrétaire générale adjointe et Mme Sabrina Benmouhoub, chargée de mission ;
- pour l'Union professionnelle artisanale : M. Alain Griset, président, accompagné de M. Pierre Burban, secrétaire général et Mme Thérèse Note.
Comme nous venons de le faire avec les organisations syndicales, il nous paraît important de recueillir votre avis sur les objectifs de ce projet de loi d'habilitation et les principaux domaines dans lesquels il ouvre la voie à une évolution de la législation du travail. Mais nous attendons également un éclairage sur les propositions plus précises formulées par le Gouvernement dans le cadre de la concertation en cours.
M. Alexandre Saubot, vice-président du Medef, en charge du pôle social . - Le monde patronal est très attaché au dialogue social et nous formulons deux souhaits principaux sur ces ordonnances : qu'elles traitent d'un maximum de sujets dans leur diversité, au plus proche du terrain, pour répondre aux objectifs de développement des entreprises, ainsi qu'aux inquiétudes des salariés et de nos concitoyens; qu'elles rendent effectivement le dialogue social accessible à toutes les entreprises, quelle que soient leur taille et leur situation. C'est pourquoi nous sommes attachés à ce que la loi d'habilitation soit précise, mais également suffisamment ouverte dans son champ, pour ne pas empêcher des réformes sur lesquelles nous serions d'accord. Il faut aussi que tous les sujets puissent être traités ensemble, car l'entreprise forme une collectivité non divisible - elle doit pouvoir négocier sur tous les curseurs, l'emploi, l'investissement, l'organisation du travail, la formation, à partir de sa situation particulière.
Le dialogue social doit être reconnu dans toutes les entreprises. Aujourd'hui, 95 % des entreprises représentant 55 % des salariés n'ont pas de présence syndicale, notre idée n'est pas du tout de contourner les organisations syndicales, mais de s'assurer que toutes les entreprises puissent se saisir de cette liberté de négocier - nous sommes ouverts à toutes les propositions sur le droit à la négociation, toutes les idées sont sur la table.
Enfin, s'agissant de la troisième thématique, à savoir la sécurisation des ruptures, il faut rappeler que la préoccupation constante du chef d'entreprise, c'est la pérennité de l'entreprise et son développement. Le chef d'entreprise considère l'éventuelle rupture du contrat de travail, les outils de flexibilité, le contrat de chantier, les conditions de recours au CDD comme des outils de pérennité de l'entreprise. Et une entreprise qui se développe est d'abord une entreprise qui prend des risques : plus le coût du risque est élevé, moins il est encouragé, moins la croissance et l'emploi sont au rendez-vous. N'ayons donc pas une lecture exagérément critique des intentions de l'entreprise, le chef d'entreprise vise d'abord la pérennité de l'activité : la rénovation des outils mis à sa disposition servira le pays tout entier.
M. Jean-Michel Pottier, vice-président de la CPME, en charge des affaires sociales et de la formation . - Le chef de PME que je suis dit qu'il y a urgence à agir, dans un monde complexe et insécure - et que cette urgence justifie les ordonnances. Voyez le délai de recours : il est de trois semaines en Allemagne et de deux ans en France, des procédures font courir un risque qui peut être mortel pour les TPE-PME lorsque leurs responsables ne maîtrisent pas des questions de droit ou parfois simplement formelles. Et ce que l'on constate, c'est que des chefs d'entreprises tétanisés regardent à trois fois avant d'embaucher, alors qu'il ont de l'activité devant eux - et qu'ils recherchent des alternatives à l'embauche, parce qu'elle leur paraît trop risquée. Nous avons donc besoin de stabilité du code du travail et d'une plus grande visibilité des règles, c'est un gage pour le retour de la confiance et donc le développement des entreprises.
Il faut que la rupture du contrat ne soit pas un drame, pour chacun des deux côtés, ce qui nous demande de trouver un nouveau mode opératoire.
Nous avons aujourd'hui l'occasion unique de réécrire le code du travail en considérant la situation des TPE-PME; ce constat a été maintes fois établi : le code du travail a été composé avec les grandes entreprises en ligne de mire, alors que notre pays n'en compte que 5400 aujourd'hui. Il faut donc prendre en compte le dialogue social qui se déroule dans les PME. Il est effectif mais qui passe sous les radars. C'est du reste ce que vous aviez courageusement proposé dans votre rédaction de la « loi travail », que le 49-3 a ensuite malheureusement défigurée.
Sur le contenu de cette habilitation, ensuite. L'article premier vise à accorder un droit effectif à la négociation d'entreprise quelle que soit sa taille, c'est-à-dire la possibilité de négocier dans l'entreprise dépourvue d'IRP : nous approuvons cette nouvelle façon de penser et d'être au service du dialogue social. Deuxième objectif de cet article : conforter la branche professionnelle dans son rôle de régulateur économique, contre les distorsions de concurrence. Un amendement nous inquiète, qui raccourcirait à 18 mois, au lieu de 36, le délai pour la restructuration des branches : le processus est en cours, nous progressons, attention à ne pas casser cette dynamique au motif que la Direction générale du travail fait arbitrairement coïncider branche professionnelle et convention collective !
L'article 2 accompagne la fusion des IRP, c'est utile et nous sommes favorables à ce que les compétences des représentants du personnel soient pleinement reconnues.
Les commissions paritaires régionales interprofessionnelles (CPRI), enfin, seraient départementalisées : est-ce judicieux, alors qu'elles sont tout juste installées ? Ne vaudrait-il pas mieux leur donner les moyens de fonctionner ?
M. Alain Griset, président de l'Union des entreprises de proximité . - Le chiffre est connu : 95 % des entreprises françaises ont moins de vingt salariés, il faut les prendre en compte - ou bien leurs responsables continueront à être certains de ne pas bien appliquer les textes en vigueur. Une loi inapplicable crée de l'insécurité et bloque le développement des entreprises et, si les grandes entreprises ont évidemment toute leur place, il ne faut pas confondre leur situation avec celle des PME, des artisans et des professions libérales. Ensuite, il nous semble évident que l'accord de branche reste prioritaire : un accord d'entreprise n'aurait aucun sens s'il devait être négocié par quatre ou cinq salariés qui n'en n'auraient pas les compétences, c'est bien pourquoi l'accord de branche sécurise un cadre; cependant, il faut aussi rendre des dérogations possibles pour les entreprises, en fonction de leur situation et à condition de compensations pour les salariés.
Nous savons que seules 15 à 20 % des entreprises respectent l'obligation du délégué du personnel entre 11 et 20 salariés ; cette obligation étant inapplicable, est-il sain de la conserver ? Nous proposons de relever le seuil à 20 salariés.
Troisième élément important : le plafonnement des indemnités devant les prudhommes. Nous connaissons tous des exemples d'entreprises condamnées à verser des indemnités importantes pour de simples raisons de forme plutôt que de fond, ce qui met en danger l'avenir même de l'entreprise, des autres emplois; en plafonnant, vous rendrez service à l'emploi, aux territoires tout entiers.
Quant aux IRP, il n'y en a guère chez les artisans et les professions libérales, ce qui ne nous empêche pas de pratiquer le dialogue social dans nos entreprises, en particulier entre compagnons.
Il faut donc que cette réforme débouche sur l'adoption de règles spécifiques aux petites entreprises, ou bien elle n'aura servi à rien.
M. Alain Milon , président . - Vous vous concertez avec le Gouvernement sur des sujets bien précis et, d'un autre côté mais simultanément, nous allons adopter une loi d'habilitation : trouvez-vous que c'est de bonne méthode ?
M. Jean-Michel Pottier. - La concertation lancée par le Gouvernement est nouvelle et intéressante dans sa méthode, les positions des uns et des autres ont évolué au cours des rendez-vous successifs. Nous travaillons certes sur des hypothèses, ce qui complique un peu les choses - et le résultat ne sera connu qu'en fin de parcours, car « c'est à la fin de la foire qu'on compte les bouses ». La concertation thématique est approfondie, nous y parlons librement et, en douze années d'expérience, je peux dire que nous parlons avec les experts plutôt qu'avec des technocrates, nous allons au fond des sujets, autant que possible.
M. Alexandre Saubot. - Il y a urgence, l'expérience montre que le processus parlementaire rend difficile d'aller vite, l'idée d'un nouvel ensemble de règles pour septembre nous parait intéressante.
M. Alain Milon , président . - Reste que les ordonnances sont un processus républicain plutôt que démocratique. Nous allons habiliter le Gouvernement à prendre des ordonnances, en lui fixant des orientations, mais vous nous dites que certaines des mesures vous donnent satisfaction : est-ce à dire que vous connaissez déjà le contenu des ordonnances ?
M. Alain Griset . - Chacune de nos organisations est reçue séparément, pour six réunions thématiques, cela nous permet d'aller très loin dans l'analyse et les propositions, sans limites fixées a priori : c'est de bonne méthode. Nous n'avons pas connaissance précise des ordonnances elles-mêmes, mais nous souhaitons que l'habilitation ne ferme pas les possibilités ouvertes par la concertation.
M. Yves Daudigny . - Quel lien faites-vous entre la réforme du code du travail et l'amélioration de l'emploi dans notre pays ? Sur quels éléments vous fondez-vous pour établir ce lien ? Pensez-vous, ensuite, que la flexibilité telle qu'on la connaît en Europe du nord, soit transposable dans notre pays ? Quid, ensuite, de l'incidence des changements des règles du licenciement économique sur le transfert d'activité vers d'autres pays ?
M. Philippe Mouiller . - L'enjeu de la fusion des IRP vous paraît-il le même selon la taille des entreprises ? N'y a-t-il pas une fenêtre, ensuite, pour réformer le reclassement en cas de licenciement économique ? La notion de droit à l'erreur peut-elle être intégrée à la réflexion sur les prudhommes ?
M. Jean-Louis Tourenne . - Vous dites que la position du Sénat a été courageuse sur la loi travail, est-ce à dire que ceux qui n'étaient pas d'accord avec cette position majoritaire, ont manqué de courage ? Le plafonnement des indemnités prud'homales devait aider à la prévisibilité pour les entreprises, mais on nous dit que le juge pourrait déroger : n'est-ce pas ouvrir la brèche à ce que la dérogation ne devienne la règle et que l'imprévisibilité ne perdure ? N'est-il pas contradictoire, ensuite, de dire qu'il faut renforcer les syndicats mais organiser le dialogue social pour les cas où les syndicats sont absents ? Vous nous dites, enfin, préférer une loi d'habilitation assez large, pour laisser la négociation ouverte ; mais cela reviendrait à donner une sorte de blanc-seing au Gouvernement - ce que je me refuse à faire, comme parlementaire.
M. Dominique Watrin . - La dernière note de conjoncture de l'INSEE nous apprend que les chefs d'entreprises placent l'incertitude économique au premier rang des freins à l'embauche, loin devant la rigidité du code du travail, qui ne vient qu'en quatrième position. Vos perspectives d'activité ne sont-elles pas contrariées par les évolutions salariales et les coupes sombres dans les investissements publics ?
M. Georges Labazée . - Quels sont les secteurs les plus concernés par la réduction du nombre de branches ? Y a-t-il consensus sur les révisions en cours ? Le compte pénibilité est en passe d'être transféré à la branche accident du travail et maladies professionnelles : comment les cotisations seront-elles transférées ?
M. Jean-Marc Gabouty . - Le champ de la loi d'habilitation vous paraît-il suffisamment étendu ? Souhaitez-vous le voir étendu à d'autres domaines - et lesquels ? Estimez-vous que la simplification est assez affirmée ? Je pense en particulier à certaines commissions et instances du dialogue social : quand les taux de participation tombent à 5 %, on est en droit de se demander quelle est la représentativité de certaines d'entre elles... Enfin, pensez-vous que ces ordonnances gagneraient à être ratifiées, ou bien qu'elles devraient rester de valeur réglementaire ?
Mme Catherine Procaccia . - Avez-vous un bilan de la DUP élargie et regroupée ? Pensez-vous, ensuite, que la ratification des ordonnances puisse aller dans le sens que vous souhaitez, de simplification du code du travail pour les TPE-PME et pour que la forme ne puisse plus l'emporter sur le fond devant les prudhommes ?
M. Michel Forissier . - Quelle est la place de la loi dans le processus en cours ? Vous dites discuter avec le Gouvernement, mais dans les faits, vous n'êtes pas dans une négociation, vous êtes seulement auditionné par le Gouvernement, qui prépare des ordonnances. C'est pourquoi je crois que la loi doit définir précisément l'habilitation, et non l'élargir comme vous le souhaitez, car les ordonnances vont changer le code du travail sans qu'il y ait eu négociation sociale : cela me pose un problème, d'autant que, même sans ratification, les changements seront applicables. La démocratie n'a pas véritablement sa place ici, vous êtes tributaire d'un couperet qui va tomber. Quant à l'urgence qui nécessiterait de ne pas passer par le Parlement, je n'en suis pas convaincu - pour la simple raison que cela fait déjà maintes années que nous travaillons sur le sujet.
M. Jean-Marie Morisset . - Le CDI de projet créera-t-il de l'emploi ? Quelles garanties offrira-t-il ? Quel seuil pour la fusion des IRP ? Enfin, sur la simplification du compte pénibilité, quelles assurances avez-vous obtenu ?
M. Alexandre Saubot. - Il ne faut pas se tromper de diagnostic : l'emploi résulte de la confiance des acteurs économiques, la réforme du code du travail y participe quand elle rend l'application des règles plus prévisible et moins chronophage - chaque fois qu'on allonge le code du travail, on le rend plus complexe, on oblige les entreprises à mettre plus de moyens juridiques en place, ce qui fait mécaniquement moins de moyens pour la production ou le commercial. La création d'emploi ne se décrète pas, la réforme du droit du travail améliore l'environnement des entreprises, parmi d'autres éléments - en particulier pour les petites entreprises.
S'agissant du périmètre d'appréciation des difficultés, l'objectif est d'être au plus proche du territoire : l'échelon national n'est peut-être pas toujours le plus pertinent, mais c'est déjà un pas dans la bonne direction, pour éviter des effets négatifs sur les implantations. Le critère des difficultés économiques a été reconnu chez nos voisins, sans provoquer d'exode - et nous ne demandons rien d'autre que l'application des mêmes règles que nos voisins.
La fusion des IRP n'est pas liée à la taille des entreprises, la réforme vise à limiter la dispersion : mieux vaut un lieu unique du débat, quitte à ce qu'on organise des réunions thématiques en tant que de besoin - alors qu'actuellement, l'entreprise est découpée par thèmes, avec des redondances dans le travail, voire des divergences entre instances différentes.
Les difficultés de reclassement sont évidentes, tant nos règles sont absurdes. Tous les licenciés économiques devraient être accompagnés dans leur reclassement, à l'échelle du bassin d'emplois, quelle que soit la taille de leur entreprise : c'est une question d'équité.
Le CDI de chantier est une faculté ouverte par la branche, pas un chèque en blanc - et c'est un progrès par comparaison à la situation actuelle où les entreprises signent des CDD bien plus courts que la durée d'un chantier.
Le compte pénibilité est transféré avec son financement, les entreprises continueront à s'en charger ; la réforme ne vise qu'à rapprocher la prévention et la réparation.
La DUP élargie a été réservée aux entreprises de moins de deux cents salariés ou celles qui augmentent leurs moyens consacrés au dialogue social : on comprend que les entreprises ne se soient pas précipitées. Quant aux négociations à partir de trois cents salariés, je crois qu'il n'y a pas eu plus d'une vingtaine d'accords.
Sur l'habilitation, nous sommes avertis de la jurisprudence constitutionnelle sur la compétence législative : nous ne souhaitons pas un champ vague, mais large, qui ouvre le plus grand nombre de domaines.
M. Jean-Michel Pottier. - Le ministère a publié deux bilans sur la concertation en cours, ils sont assez détaillés. En parlant de courage du Sénat lors de la loi « Travail », mon propos n'est pas politique, je veux seulement à souligner qu'il faut du courage pour adopter cette réforme attendue depuis longtemps par les PME.
Faut-il reconnaître un droit à l'erreur devant les prudhommes ? C'est très important de faire prévaloir le fond sur la forme, parce que les licenciements sans cause réelle et sérieuse du fait d'erreurs de forme sont traités comme des licenciements abusifs, avec des conséquences parfois très décalées de la situation constatée, c'est anxiogène pour les entreprises. Quant au plafonnement des indemnités, il avait été introduit par la loi « Macron », sans provoquer alors de grandes réactions...
La restructuration des branches professionnelles est en cours, la commission paritaire s'est réunie hier. On compte aujourd'hui 246 identifiants des conventions collectives (IDCC), notion utilisée par la direction du travail, 43 concernent des territoires particuliers, donc la restructuration porte sur 200 IDCC : le délai de trois ans est raisonnable, ne le changez pas - attention aux effets néfastes sur les conditions de concurrence.
Sur la pénibilité, l'évolution qui nous a été annoncée par le Premier ministre rejoint notre objectif. Il s'agit de sortir du champ de l'entreprise l'appréciation de l'exposition aux risques, car il était impossible de traiter certains critères- un rapport de l'inspection générale du travail avait d'ailleurs conclu à l'inapplicabilité pour les entreprises publiques. Le financement, mutualisé, restera à la seule charge de l'employeur. Je me félicite que le Premier ministre ait retenu notre appellation de « compte professionnel de prévention ».
La question de la représentation dans les réseaux de franchises doit effectivement être simplifiée : la situation actuelle est parfois ubuesque.
Le CDI de projet ne va pas assez loin de notre point de vue ; nous proposions un CDI de croissance, qui inclurait les facteurs économiques de réussite du projet. Les branches se saisiront de ce nouvel outil.
M. Alain Griset. - Quels liens entre la réforme du code du travail et l'emploi ? Des chefs d'entreprise qui ont de l'activité renoncent à embaucher parce qu'ils y voient un risque trop grand pour leur entreprise : c'est cela, notre réalité. Ce qui n'enlève rien aux difficultés de faire coïncider l'offre et la demande d'emploi, chacun sait les difficultés que l'on rencontre pour recruter sur certaines compétences.
Le contrat de chantier existe dans le bâtiment, il ne pose pas de problème particulier : son extension est positive.
Le droit à l'erreur, devant les prudhommes, représente un premier pas intéressant, mais nous comptons sur vous pour aller plus loin. Aujourd'hui, l'entreprise est coupable par principe : un simple retard de paiement d'une cotisation vaut sanction immédiate, alors qu'on gagnerait à davantage accompagner les entreprises, en premier lieu les PME. Le droit doit être le même pour tous, mais la méthode peut varier, il faut passer d'une gestion par la sanction, à une régulation par l'accompagnement, passer de l'entreprise coupable à l'entreprise utile.
S'agissant de la pénibilité, nous ne contestons pas l'objectif mais une mise en oeuvre impossible ; en outre, pourquoi la pénibilité n'est-elle pas reconnue pour le chef d'entreprise ?
Mme Catherine Procaccia . - Absolument !
M. Alain Griset. - Nous sommes donc favorables à tout ce qui réduit « l'impôt papier », c'est-à-dire le temps passé à des démarches et au détriment du travail de production lui-même.
Quant au dépassement du formalisme, c'est une ligne d'espoir, une révolution à conduire. Autant il faut sanctionner l'entrepreneur voyou, autant il est injuste de sanctionner l'employeur de bonne foi.
Il faudrait pouvoir examiner, également, des éléments de la vie quotidienne qui sont très pénalisants. Par exemple, quand un salarié se blesse lors d'une activité sportive qu'il suit en dehors de son travail et qu'il en résulte une inaptitude, c'est à l'employeur de payer le licenciement, alors qu'il n'y est pour rien ; la négociation a certes pointé ce type de problème, mais sans y apporter de solution.
Quant aux instances de dialogue social, je crois qu'il nous faut adapter les méthodes et les outils aux réalités de l'entreprise.
Mme Catherine Génisson . - Ne craignez-vous pas que la fusion des IRP se traduise par une professionnalisation de ceux qui participent à la nouvelle instance - donc par leur déconnexion au travail de l'entreprise en lui-même ? On le voit dans certaines situations syndicales, où les permanents sont moins opérationnels que les salariés...
M. Alexandre Saubot. - On a besoin d'interlocuteurs légitimes, représentatifs, formés, compétents, disponibles - autant de facteurs positifs pour un dialogue social pertinent. Cela demande un point d'équilibre et l'avantage, avec l'accord en cours, c'est qu'il ne sera plus possible de cumuler la présence dans plusieurs instances : la participation à une seule instance contribuera à l'ancrage dans l'entreprise.
M. Alain Milon , président . - Merci pour ces précisions.
Ce point de l'ordre du jour a fait l'objet d'une captation vidéo qui est disponible en ligne sur le site du Sénat.