N° 92
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2016-2017
Enregistré à la Présidence du Sénat le 2 novembre 2016 |
RAPPORT
FAIT
au nom de la commission des affaires étrangères, de la défense et des forces armées (1) sur le projet de loi autorisant l'approbation de l' accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Congo relatif aux services aériens , sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord relatif aux services de transport aérien entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République démocratique du Congo et sur le projet de loi autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Panama relatif aux services aériens ,
Par M. Joël GUERRIAU,
Sénateur
(1) Cette commission est composée de : M. Jean-Pierre Raffarin , président ; MM. Christian Cambon, Daniel Reiner, Jacques Gautier, Mmes Nathalie Goulet, Josette Durrieu, Michelle Demessine, MM. Xavier Pintat, Gilbert Roger, Robert Hue, Mme Leila Aïchi , vice-présidents ; M. André Trillard, Mmes Hélène Conway-Mouret, Joëlle Garriaud-Maylam, MM. Joël Guerriau, Alain Néri , secrétaires ; MM. Michel Billout, Jean-Marie Bockel, Michel Boutant, Jean-Pierre Cantegrit, Bernard Cazeau, Pierre Charon, Robert del Picchia, Jean-Paul Émorine, Philippe Esnol, Hubert Falco, Bernard Fournier, Jean-Paul Fournier, Jacques Gillot, Mme Éliane Giraud, MM. Gaëtan Gorce, Alain Gournac, Mme Sylvie Goy-Chavent, MM. Jean-Pierre Grand, Jean-Noël Guérini, Claude Haut, Mme Gisèle Jourda, M. Alain Joyandet, Mme Christiane Kammermann, M. Antoine Karam, Mme Bariza Khiari, MM. Robert Laufoaulu, Jacques Legendre, Jeanny Lorgeoux, Claude Malhuret, Jean-Pierre Masseret, Rachel Mazuir, Christian Namy, Claude Nougein, Philippe Paul, Mme Marie-Françoise Perol-Dumont, MM. Cédric Perrin, Yves Pozzo di Borgo, Henri de Raincourt, Alex Türk, Raymond Vall, Bernard Vera . |
Voir les numéros :
Sénat : |
241 , 242 , 260 (2014-2015), 93 , 94 et 95 (2016-2017) |
INTRODUCTION
Mesdames, Messieurs,
Le Sénat est saisi de trois projets de loi tendant à autoriser l'approbation de trois accords bilatéraux relatifs aux services de transport aérien :
- le projet de loi n° 241 (2014-2015) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Congo relatif aux services aériens, signé à Brazzaville le 29 novembre 2013 ;
- le projet de loi n° 242 (2014-2015) autorisant l'approbation de l'accord relatif aux services de transport aérien entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République démocratique du Congo, signé à Kinshasa le 27 novembre 2013 ;
- le projet de loi n° 260 (2014-2015) autorisant l'approbation de l'accord entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement de la République du Panama relatif aux services aériens, signé à Paris le 26 juillet 2013.
Ces accords comportent des dispositions similaires, qui sont des dispositions classiques, conformes au droit international de l'aviation civile ainsi qu'au droit européen . Votre commission a donc décidé d'examiner ces accords conjointement.
Les accords signés avec la République du Congo (ci-après : Congo) et la République démocratique du Congo (ci-après : RDC) modernisent des relations aériennes déjà établies dans le cadre d'accords anciens, datant respectivement de 1974 et 1964. L'accord avec le Panama est, en revanche, nouveau, puisque la France ne disposait préalablement d'aucun accord en matière de transports aériens avec ce pays.
Votre commission vous propose d'adopter les trois projets de lois examinés , qui donnent un cadre juridique aux liaisons aériennes entre la France d'une part, et respectivement le Congo, la RDC et le Panama, d'autre part. Elle approuve leur examen par le Sénat le 10 novembre 2016 selon la procédure d'examen simplifié , prévue à l'article 47 decies du Règlement du Sénat.
I. DES ACCORDS BILATÉRAUX CONFORMES AU DROIT INTERNATIONAL ET AU DROIT EUROPÉEN
Les trois accords examinés mettent en place un cadre juridique bilatéral conforme, d'une part, aux normes internationales régissant le secteur aérien , et, d'autre part, au droit européen , qui s'est développé en la matière depuis les arrêts de la Cour de justice des Communautés européennes de 2002, dits arrêts de « Ciel ouvert ».
L'évolution du droit de l'Union européenne, au cours des quinze dernières années, nécessite en effet une révision de l'ensemble des accords conclus dans le domaine des services aériens par les États membres . Cette révision se fait :
- soit de manière bilatérale , comme c'est le cas pour deux des trois accords présentement examinés (le troisième mettant en place un cadre juridique qui n'existait pas auparavant) ;
- soit par mandat donné à la Commission européenne, dès lors autorisée à se substituer aux États membres pour négocier des accords globaux de transport aérien.
A. UN SYSTÈME D'ACCORDS BILATÉRAUX RÉSULTANT DE L'APPLICATION DU DROIT INTERNATIONAL
Le système des accords bilatéraux , qui fixent le cadre juridique des services internationaux de transport aérien, résulte de l'application de la Convention relative à l'aviation civile internationale, dite Convention de Chicago, ouverte à la signature le 7 décembre 1944.
1. Le droit de l'OACI
En vertu de l'article 1 er de ladite Convention , chaque État dispose d'une souveraineté complète et exclusive sur l'espace aérien au-dessus de son territoire . En conséquence, l'article 6 précise qu' « aucun service aérien international régulier ne peut être exploité au-dessus ou à l'intérieur du territoire d'un État contractant, sauf permission spéciale ou toute autre autorisation dudit État conformément aux conditions de cette permission ou autorisation ».
Ce principe sous-tend le système des accords bilatéraux, qui instaurent une sécurité juridique au profit des transporteurs aériens, ainsi assurés de disposer d'un cadre stable. Ce cadre constitue un plancher et non un plafond , puisque les États peuvent toujours décider d'aller plus loin, dans le respect du droit international et du droit européen en vigueur.
La Convention de Chicago a mis en place l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale (OACI) , dont le rôle principal est d'établir le cadre réglementaire mondial de la sécurité de l'aviation civile internationale. Cette organisation, devenue une institution spécialisée des Nations unies en 1947, a aussi un rôle d'organisation économique des services aériens, qui doivent être établis sur les bases d'une saine concurrence.
En tant qu'instance mondiale de coopération entre ses États membres et la communauté aéronautique mondiale, l'OACI établit et développe des normes et des pratiques recommandées (SARP 1 ( * ) ) visant à promouvoir le développement sûr et ordonné de l'aviation civile internationale. À ce jour, l'OACI gère plus de 12 000 SARP ventilées dans les 19 Annexes à la Convention de Chicago.
Dans le cadre de sa mission principale d'élaboration des principes et techniques de la navigation aérienne mondiale, et de promotion de la planification et du développement du transport aérien, l'OACI a établi cinq « objectifs stratégiques » :
- sécurité ;
- capacité et efficacité de la navigation aérienne ;
- sûreté et facilitation ;
- développement économique du transport aérien ;
- protection de l'environnement.
Sûreté et Sécurité, quelle différence ? La sûreté se rapporte à la protection des personnes, fret, installations et matériels contre les actes malveillants, criminels ou terroristes. La sécurité, elle, relève du respect des règles d'exploitation des aéronefs et des installations par les personnels qui en ont la charge. Source : Représentation permanente de la France auprès de l'Organisation de l'Aviation Civile Internationale |
En outre, la Convention de Chicago est complétée par l'accord relatif au transit des services aériens internationaux , également adopté à Chicago le 7 décembre 1944.
L'OACI définit neuf « libertés de l'air » , dont seules les cinq premières sont officiellement reconnues aux termes d'un traité international.
Les deux premières libertés ont un caractère technique. Il s'agit du droit de survol ( 1 ère liberté ) et du droit d'escale technique ( 2 ème liberté ).
Les autres libertés comportent une dimension commerciale : droit de débarquer/embarquer des passagers en provenance/à destination de l'État dont l'aéronef a la nationalité ( 3 ème et 4 ème libertés ), droit de débarquer/embarquer dans un État tiers des passagers en provenance/à destination de tout autre État contractant ( 5 ème liberté ), droit d'assurer un service entre deux autres États en passant par l'État ( hub ) où le transporteur est enregistré ( 6 ème liberté ), droit d'assurer un service entre deux États entièrement hors de son territoire ( 7 ème liberté ), droit d'effectuer des dessertes nationales ou d'assurer un service entre deux points situés à l'intérieur d'un État étranger, ce qui correspond au droit de « cabotage » ( 8 ème et 9 ème libertés ).
Source : OACI
2. La politique française en matière d'accords de services aériens bilatéraux
Pour la France, les négociations bilatérales sont menées par la Direction générale de l'Aviation Civile (DGAC), en liaison avec le Ministère des affaires étrangères et du développement international (MAEDI), dans le cadre d'un mandat, validé par le Ministre en charge des transports.
Conformément aux lois organiques qui les concernent, la Polynésie française et la Nouvelle-Calédonie possèdent des compétences autonomes pour la négociation des services aériens de/vers leurs territoires. Ces négociations sont menées en étroite collaboration avec les services de l'État, notamment la DGAC.
D'après les informations fournies en réponse aux questions de votre rapporteur, les objectifs poursuivis par la France dans le cadre de sa politique bilatérale dans le domaine des transports aériens sont les suivants : « la politique bilatérale en matière de transport aérien consiste, en fonction du contexte prévalant pour chaque cadre économique et juridique considéré, à articuler la promotion des intérêts industriels et commerciaux du pavillon français aux exigences de connectivité directe et d'attractivité du territoire (métropole et outre-mer) ainsi qu'aux opportunités de développement des échanges touristiques et économiques ».
Les accords bilatéraux font l'objet de renégociations régulières pour permettre l'ajout de nouvelles dispositions, la révision de clauses périmées et l'extension de possibilités commerciales.
Les trois accords examinés, conclus respectivement avec le Congo, la RDC et le Panama, suivent le modèle type d'accords aériens bilatéraux élaboré par la DGAC, lui-même issu du modèle d'accords bilatéraux sur les services aériens proposé par l'OACI . Au titre de sa mission et en complémentarité avec les principes énoncés par l'Union européenne et l'OACI, la DGAC a, en effet, élaboré un modèle d'accord, utilisé dans le cadre de ses négociations, dont les accords examinés sont issus.
En effet, la France, de même que le Congo, la RDC et le Panama, sont signataires de la Convention relative à l'aviation civile internationale ainsi que de l'Accord relatif au transit des services aériens internationaux précités.
Liste des accords conclus par la France et des négociations en cours dans le domaine aérien avec des États africains Des accords ont été conclus avec les États africains suivants : Afrique du Sud, Algérie, Benin, Botswana, Burkina Faso, Burundi, Cameroun, Cote d'Ivoire, Djibouti, Égypte, Gabon, Ghana, Guinée, Kenya, Liberia, Libye, Madagascar, Malawi, Mali, Maroc, Mauritanie, Mozambique, Namibie, Niger, Nigeria, Ouganda, République Centrafricaine, République du Congo République Démocratique du Congo, Rwanda, Sénégal, Sierra Léone, Soudan, Tanzanie, Tchad, Togo, Tunisie, Zambie, Zimbabwe. En outre, une modernisation des accords aériens a été négociée avec les États africains suivants, pour se substituer aux cadres bilatéraux toujours en vigueur : Benin, Côte d'Ivoire, Égypte, Gabon, Mozambique et Sierra Léone. La plupart de ces accords devraient être signés rapidement (comme celui entre la France et la Côte d'Ivoire, signé en 2016). Un premier accord aérien a été paraphé avec l'Angola en juin 2015, encore en instance de signature. Enfin des négociations sont en cours avec l'Éthiopie. Source : réponses au questionnaire de votre rapporteur |
* 1 Standards And Recommended Practices.