B. LES ENJEUX POUR SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON

1. La France est partie à la convention au titre de Saint-Pierre-et-Miquelon.

Au sein de l'OPANO, la France a le statut d' « Etat côtier » au titre de l'archipel. En effet, la politique commune de la pêche ne s'applique pas à Saint-Pierre-et-Miquelon, qui fait partie des « pays et territoires d'outre-mer » (PTOM) au sens du droit de l'Union européenne. À la différence du statut des « régions ultrapériphériques » (Martinique, Guadeloupe, Guyane, Saint Martin, La Réunion et Mayotte), le droit de l'Union européenne ne s'applique pas aux PTOM, sauf exception (cf. article 198 du TFUE). En conséquence, les Etats membres peuvent être membre d'une organisation régionale de gestion des pêches (ORGP) au titre de leurs PTOM. De la même manière, le Danemark est membre de l'OPANO au titre du Groenland et des îles Féroé.

Les navires qui pratiquent la pêche sous pavillon français dans la zone de la convention sont essentiellement des navires de l'archipel. Les navires en provenance de métropole opérant dans la zone sont très peu nombreux. En tant que membre de l'Union européenne, la France se voit également attribuer une part des droits qui reviennent à l'Union, mais les principaux Etats concernés par les quotas de l'Union sont l'Espagne, le Portugal et les Etats baltes.

2. La pêche est un secteur clé de l'économie de l'archipel

Pendant des siècles, l'archipel de Saint-Pierre-et-Miquelon a vécu exclusivement de la pêche. Si la filière halieutique a ainsi longtemps constitué le principal moteur de l'économie locale, le secteur est en crise depuis les années 1990.

En 1992, la ZEE française a été réduite à un étroit couloir maritime de quelques milles nautiques de largeur sur 200 milles nautiques de longueur, suite à un arrêt du tribunal arbitral de New York du 10 juin 1992 qui est venu régler un différend vieux de vingt ans entre le Canada et la France 3 ( * ) . La même année, le Canada a instauré un moratoire sur la morue dans sa zone et l'OPANO, à l'instigation du Canada, a adopté la même mesure dans la zone de réglementation. Ces décisions ont profondément affecté l'industrie de la pêche à Saint-Pierre-et-Miquelon.

Depuis, l'Etat et les collectivités consacrent des efforts importants au soutien du secteur, sans parvenir à le redynamiser totalement. Ces efforts ont été largement impuissants à enrayer la chute de la filière. La pêche en haute mer, en particulier, est passée de 6 000 tonnes par an au début des années 2000 à quelques centaines de tonnes annuelles actuellement, selon les statistiques de l'OPANO.

Dans son rapport public annuel de 2016 4 ( * ) , la Cour des comptes constate l'échec des politiques de soutien à la filière de la pêche industrielle menées depuis les années 1990 à Saint-Pierre-et-Miquelon, l'exploitation des produits halieutiques restant toutefois une des principales activités économiques dans l'archipel. Elle recommande ainsi aux pouvoirs publics d'accompagner la restructuration de la filière halieutique, en s'appuyant sur la pêche artisanale et le développement de l'aquaculture.

3. La France défend les intérêts de Saint-Pierre-et-Miquelon à l'OPANO

En matière de pêche, les réglementations qui s'appliquent à l'archipel sont déterminés par :

(i) L'OPANO pour les espèces qu'elle gère dans la zone de réglementation (les eaux internationales)

(ii) La CICTA, Commission Internationale pour la Conservation des Thonidés de l'Atlantique, pour les pêcheries de thonidés dans les eaux internationales ;

(iii) L'accord franco-canadien de 1994 dans les espaces maritimes français et canadiens de la zone 3PS de l'OPANO (l'accord fixe aussi des droits historiques pour les pêcheurs français dans les eaux canadiennes, au-delà du 3PS) ;

(iv) La réglementation française pour les espèces de la ZEE française qui ne sont pas déjà gérées par l'accord franco-canadien.

ZONE ÉCONOMIQUE EXCLUSIVE DE SAINT-PIERRE-ET-MIQUELON

(source : IFREMER)

Parmi les espèces gérées par l'OPANO, cinq concernent directement l'archipel : le rouget (en zone 3M), la limande à queue jaune (en zone 3LNO), le flétan du Groenland (en zone 3LMNO), l'encornet (en zones 3et 4) et la crevette grise (en zone 3L).

La clé de répartition des quotas entre Etats a été fixée en 1978 au moment de la négociation de la convention. L'enjeu des négociations annuelles porte essentiellement sur les totaux autorisés de capture (TAC). Ainsi, en 2014, la décision prise par l'OPANO d'instaurer un moratoire sur la crevette grise en zone 3L pour 2015 a affecté la filière de Saint-Pierre-et-Miquelon, qui bénéficiait d'un quota de 48 tonnes l'année précédente exploité par la Société nouvelle des pêches de Miquelon (SNPM).

Par ailleurs, des questions peuvent se poser quant à l'ajout de nouvelles espèces dont la gestion pourrait être effectuée au sein de l'OPANO et quant à la répartition des quotas entre les pays pour ces nouvelles espèces.

Lors des négociations annuelles à l'OPANO, la France est représentée par une délégation présidée par le président du Conseil territorial de Saint-Pierre-et-Miquelon, et composée de représentants issus de l'administration (Direction des pêches et de l'aquaculture, Direction générale des outre-mer, Secrétariat Général de la Mer, Direction des territoires, de l'alimentation et de la mer) ainsi que de l'industrie de la pêche maritime. Les instructions sont préparées de façon interministérielle. Au sein de l'OPANO, la France défend les règles de gestion applicables au niveau européen et s'assure de la prise en compte des intérêts des pêcheries de Saint-Pierre-et-Miquelon.


* 3 Le 2 décembre 1994, un accord entre le Canada et la France a été signé qui définit les modalités de coopération des deux Etats dans la zone 3PS de l'OPANO. L'accord précise également les conditions d'accès aux quotas de pêche attribués à la France.

* 4 Cour des comptes, Rapport public annuel 2016, « la filière de la pêche à Saint-Pierre-et-Miquelon : un avenir incertain ».

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