EXPOSÉ GÉNÉRAL

I. UN RETOUR À L'ÉQUILIBRE DE LA BRANCHE VIEILLESSE DE FAÇADE

La branche vieillesse demeurera en déficit en 2016. Le retour à l'équilibre des seuls régimes de base prévu pour 2016 ne compense pas la persistance du déficit du Fonds de solidarité vieillesse (FSV). Il devrait, par ailleurs, n'être que temporaire, la situation financière des régimes de base devant de nouveau être déficitaire à partir de 2019.

Figure n° 1 : Évolution des soldes de la branche vieillesse et du FSV de 2010 à 2019

(en milliards d'euros)

2010

2011

2012

2013

2014

2015

2016

2017

2018

2019

Régime général

- 8,9

- 6,0

- 4,8

- 3,1

- 1,2

- 0,6

0,5

1,1

0,4

- 0,1

Tous régimes de base

- 10,8

- 7,9

- 6,1

- 3,6

- 0,8

- 0,2

0,9

1,2

0,0

- 1,0

FSV

- 4,1

- 3,4

- 4,1

- 2,9

- 3,5

- 3,8

- 3,7

-3,6

- 3,1

- 2,8

Total branche vieillesse

- 14,9

- 11,3

- 10,2

- 6,5

- 4,3

- 4

- 2,8

- 2,4

- 3,1

- 3,8

Source : Annexe B des lois de financement de la sécurité sociale

A. LE NET RECUL DU DÉFICIT DES RÉGIMES DE BASE PERMET D'ENVISAGER LEUR RETOUR À L'ÉQUILIBRE EN 2016

1. Accentuée en 2014, la baisse du déficit de la branche vieillesse s'est poursuivie plus modérément en 2015 mais devrait permettre un retour à l'équilibre des régimes de base en 2016

L'article 1 er du projet de loi porte l'approbation des tableaux d'équilibre de l'exercice 2014 . Alors que l'année 2013 avait été marquée par un rythme déjà soutenu de réduction du déficit de la branche vieillesse, l'année 2014 a vu ce rythme s'accélérer pour les régimes de base. Le déficit du régime général s'élève en effet à 1,2 milliard d'euros et celui de l'ensemble des régimes de base à 800 millions d'euros.

En 2015 , d'après les chiffres établis à l'article 5 du projet de loi , la baisse du déficit se poursuit, mais à un rythme moins soutenu, portant le déficit du régime général à 600 millions d'euros, ce qui permet à l'ensemble des régimes de base de frôler l'équilibre puisque leur déficit ne s'élève plus qu'à 200 millions d'euros.

Comme le montrent les articles 26 et 27 , le mouvement de baisse des déficits enregistré depuis 2013 se transforme en 2016 . L'année prochaine devrait être marquée, pour la première depuis 11 ans, par un excédent de la branche vieillesse du régime général, s'élevant à 900 millions d'euros, contribuant à l'excédent de l'ensemble des régimes de base obligatoires qui s'élèvera à 500 millions d'euros. La branche vieillesse, hors FSV, sera la seule branche, avec la branche accidents du travail-maladies professionnelles à être à l'équilibre en 2016.

Les niveaux de dépenses et de recette des régimes de base sont en progression. En 2014, elles s'élevaient respectivement à 219,9 et 219,1 milliards d'euros. En 2015, la branche affiche un montant de dépenses de 223,8 milliards d'euros pour 223,5 milliards d'euros de recettes. Les prévisions pour 2016, dans la perspective du retour à l'équilibre, prévoient un niveau de dépenses de 227,8 milliards d'euros pour 228,7 milliards d'euros de recette.

Selon le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale de septembre 2015, les montants de prestations servies par les régimes de base s'élèvent à 215,6 milliards d'euros en 2014, en hausse de 1,9 % par rapport à 2013. Ils devraient continuer à progresser à ce rythme au cours des années 2015 et 2016 pour atteindre respectivement 219,3 milliards d'euros en 2015 et 223,7 milliards d'euros en 2016. En 2014, les charges de gestion des régimes de base s'élèvent à 2,2 milliards d'euros.

2. Une conjoncture rare : des recettes plus dynamiques que les dépenses

Comme le note la Cour des comptes 6 ( * ) pour l'année 2014, « la baisse du déficit [de la branche vieillesse] résulte de la poursuite d'un rythme de progression des produits près de deux fois supérieur à celui des charges, dans un contexte marqué par le très net ralentissement de ces dernières » . Les produits ont en effet crû de 3,8% contre 2% seulement pour les charges.

- La forte dynamique des recettes au cours des années 2014, 2015 et 2016 est essentiellement due aux mesures prises en 2012 et 2014 sur la hausse des taux de cotisation et la fiscalisation de la majoration de pension.

La hausse des taux de cotisation de 0,3 point pour les salariés et de 0,3 point pour les employeurs, entamée en 2012 7 ( * ) , se poursuivra jusqu'en 2017 et pèsera durablement sur le coût du travail ( cf . tableau page suivante).

- En 2014 , la hausse des recettes est imputable pour plus de la moitié à la hausse des taux de cotisation passant de 16,85 % en 2013 à 17,25 %. Cette mesure a permis une augmentation de 4% des cotisations sociales, soit une hausse des recettes de 2 milliards d'euros pour la caisse nationale d'assurance vieillesse des travailleurs salariés (Cnav), d'après la commission des comptes de la sécurité sociale.

Figure n° 2 : Les hausses de cotisations vieillesse prévues par le décret de 2012 et par la loi de 2014

2012

2013

2014

2015

2016

2017

Taux de cotisation salariale

6,75 %

6,85 %

7,05 %

7,15 %

7,25 %

7,30 %

Dont effet décret de juillet 2012

-

0,10 %

0,05 %

0,05 %

0,05 %

-

Dont effet réforme 2014

-

-

0,15 %

0,05 %

0,05 %

0,05 %

Taux de cotisation patronale

9,90 %

10,00 %

10,20 %

10,30 %

10,40 %

10,45 %

Dont effet décret de juillet 2012

-

0,10 %

0,05 %

0,05 %

0,05 %

-

Dont effet réforme 2014

-

-

0,15 %

0,05 %

0,05 %

0,05 %

Impact hausses de taux en Md€

-

0,9

2,0

1,0

1,0

0,6

Dont effet décret de juillet 2012

-

0,9

0,5

0,5

0,5

-

Dont effet réforme 2014

-

-

1,5

0,5

0,5

0,6

Source : Commission des comptes de la sécurité sociale, rapport de septembre 2014

Les contributions, impôts et taxes affectés ont également augmenté de 3 % en 2014 contre 9,4 % en 2013, résultant de la modification des recettes affectées dans le PLFSS pour 2014. En 2014, la Cnav a obtenu une augmentation de la fraction du forfait social relevée à 80 % (soit + 2,9 milliards d'euros) destinée à compenser la baisse des fractions de taxe sur les salaires et de prélèvement social sur les revenus du capital. Enfin, les transferts du FSV en faveur des régimes de base sont en hausse de 4 % en 2014, en raison principalement de la progression des prises en charge de cotisations au titre des périodes assimilées du chômage.

- En 2015 , la poursuite de la hausse des taux de cotisation (17,45 %) se traduit par une recette supplémentaire de 1 milliard d'euros. Les transferts en faveur du régime général sont également à la hausse en raison de l'intégration financière du Régime social des indépendants qui entraîne une hausse de la part de la contribution sociale de solidarité des sociétés (C3S) affectée à la branche vieillesse du régime général. Ce transfert permettrait de compenser le coût des charges supplémentaires généré par cette intégration et qui s'élèverait à 1 milliard d'euros. À l'instar de 2014, la situation excédentaire du régime des salariés agricoles entraîne un transfert de 500 millions d'euros. Enfin, la loi du 20 janvier 2014 a prévu la prise en charge, par le FSV, des cotisations au titre des périodes de stages et de formation professionnelle des chômeurs, ce qui permet un transfert vers le régime général de 200 millions d'euros dès 2015.

- Les prévisions de recettes pour l'année 2016 tablent, une nouvelle fois, sur une hausse des recettes de cotisations sociales de 1 milliard d'euros consécutive à la poursuite de la hausse du taux (17,65 %). Une baisse des transferts du FSV devrait être observée en 2016 pour les régimes de base, en raison du passage d'une prise en charge forfaitaire par régime à une prise en charge proportionnelle du minimum contributif. La Cnav devrait l'année prochaine encore bénéficier de transferts de la mutualité sociale agricole (0,7 milliard d'euros) ainsi que de certains régimes spéciaux.

- L'augmentation moins rapide des dépenses au cours des années 2014 à 2016 est principalement due aux effets positifs de la réforme des retraites de 2010 8 ( * ) ainsi qu'à une très faible inflation qui a entraîné l'absence de revalorisation des pensions en 2014.

- En 2014 , 658 000 départs à la retraite ont été enregistrés au sein du régime général, soit une baisse de 4 % par rapport à 2013. La commission des comptes de la sécurité sociale estime que la réforme de 2010, en reculant l'âge légal de deux ans, a permis de dégager une économie de 3,3 milliards d'euros pour la seule année 2014. Cette baisse du nombre de départs à la retraite masque cependant la très forte dynamique des départs à la retraite anticipés, due principalement à la réforme de 2012 9 ( * ) . En 2014, ils ont concernés 157 000 personnes, soit une hausse de + 8,9 % par rapport à 2013, et représentent près d'un quart des départs à la retraite sur l'année. Le coût supplémentaire pour les régimes de base induit par les retraites anticipées s'élève à 2 milliards d'euros pour l'année 2014, dont 631 millions d'euros sont imputables directement au décret de 2012. Sans cette réforme, le nombre de départs anticipés aurait été de 90 000 pour un coût de 1,4 milliard d'euros.

Par ailleurs, la moindre dynamique des dépenses s'explique par la faible revalorisation des retraites au cours de l'année 2014 (0,32 % contre 1,5 % en 2013). Les pensions n'ont en effet pas été revalorisées au 1 er octobre 2014 en raison, d'une part, de la faiblesse de l'inflation prévisionnelle (0,4 %) et, d'autre part, de l'application d'un correctif de - 0,5 point correspondant à la surévaluation de l'inflation prévisionnelle retenue lors de la revalorisation du 1 er avril 2013 10 ( * ) . La prime exceptionnelle de 40 euros, versée aux pensionnés modestes dont le revenu mensuel est inférieur à 1 200 euros, a été financée par le FSV et représente une dépense de 232 millions d'euros. Elle n'apparaît donc pas dans les comptes des régimes de base de la branche vieillesse.

- Une baisse du nombre de départs en retraite de 7,2 % par rapport à 2014 est attendue en 2015 , ce qui devrait porter le nombre de personnes concernées à 610 000. La progression du nombre de départs anticipés serait toujours importante et entraînerait une dépense de 2,5 milliards d'euros en 2015 (dont 838 millions d'euros dus à la réforme de 2012). De plus, la faiblesse de l'inflation explique que la revalorisation des pensions, intervenue le 1 er octobre 2015, n'ait été que de 0,1 %. Le report de la date de revalorisation du 1 er avril au 1 er octobre permet de minorer l'effet de la revalorisation, qui en rythme annuel pour 2015, ne s'élèvera qu'à 0,03 %.

- En 2016 , 610 000 personnes devraient faire liquider leurs droits à la retraite, soit un chiffre parfaitement stable par rapport à 2015. La réforme de 2010, d'après la commission des comptes de la sécurité sociale, permettra de réaliser une économie de 5,1 milliards d'euros en 2016. Le nombre de départs à la retraite anticipés devrait en revanche connaître un « pic » pour atteindre 184 000 personnes concernées, ce qui représentera une dépense de 3 milliards d'euros supplémentaires. Sans la réforme de 2012, ce chiffre n'aurait été que de 100 000, ce qui aurait permis une économie supplémentaire de 1 à 1,2 milliard d'euros. Les prévisions d'inflation à la hausse (1 %) devraient, par ailleurs, conduire à une revalorisation plus forte des pensions mais dont l'impact sera limité sur l'année entière (0,3 %) en raison du décalage de la date de revalorisation au 1 er octobre.

L'impact financier de la réforme de 2010 sur les dépenses et, dans une moindre mesure, de la réforme de 2012-2014 sur les recettes expliquent principalement la réduction du déficit intervenue depuis 2013 pour les seuls régimes de base de l'assurance vieillesse. Leur retour à l'équilibre en 2016 sera de courte durée et n'est en rien suffisant pour compenser le déficit aggravé du FSV et les perspectives financières négatives du système des retraites après 2019.


* 6 Rapport sur l'application des lois de financement de la sécurité sociale, septembre 2015.

* 7 Par le décret n° 2012-847 du 2 juillet 2012. La loi n° 2014-40 du 20 janvier 2014 garantissant l'avenir et la justice de notre système de retraite accentue la hausse du taux de cotisation au titre de l'assurance vieillesse.

* 8 Loi n° 2010-1330 du 9 novembre 2010 portant réforme des retraites.

* 9 Le décret n'° 2012-247 du 2 juillet 2012 relatif à l'âge d'ouverture du droit à pension de vieillesse a assoupli les conditions de départ anticipé à 60 ans avec la fin de la majoration de deux ans de la durée d'assurance requise pour obtenir le taux plein, l'ouverture du dispositif aux personnes ayant commencé à travailler avant 20 ans et non plus 18 ans, la meilleure prise en compte des aléas de la carrière... Dans une moindre mesure, l'élargissement du champ des périodes pouvant être considérées comme des trimestres réputés cotisés, par la loi du 20 janvier 2014, contribue également au dynamisme des départs à la retraite anticipés.

* 10 Comme l'explique le rapport de la commission des comptes de la sécurité sociale, « aux termes de la loi du 21 août 2003, le coefficient de revalorisation des pensions est égal à l'évolution prévisionnelle des prix hors tabac pour l'année N, corrigé, le cas échéant, de la révision de la prévision d'inflation de l'année N-1 telle que figurant dans le rapport économique et financier annexé au projet de loi de finances de l'année N ».

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