TITRE II - FAVORISER LES MODES ALTERNATIFS DE RÈGLEMENT DES LITIGES
Article 3 Conciliation préalable à la saisine de la juridiction de proximité - ou du tribunal d'instance
Cet article impose une tentative de conciliation par un conciliateur de justice, avant toute saisine de la juridiction de proximité ou du tribunal d'instance, pour les litiges dont le montant n'excède pas 4 000 euros 24 ( * ) , à peine d'irrecevabilité de la saisine.
Plusieurs exceptions, appréciées par le juge, sont prévues par le présent article :
« 1° si les parties sollicitent conjointement l'homologation d'un accord ;
« 2° Si les parties justifient d'autres diligences entreprises en vue de parvenir à une résolution amiable de leur litige ;
« 3° Si l'absence de recours à la conciliation est justifiée par un motif légitime ;
« 4° Si cette tentative de conciliation risque, compte tenu des délais dans lesquels elle est susceptible d'intervenir, de porter atteinte au droit des intéressés d'avoir accès au juge dans un délai raisonnable ».
Ce dispositif s'inscrit dans une volonté de développer les modes alternatifs de règlement des différends (MARD), dont la dernière étape a été le décret n° 2015-282 du 14 mars 2015 relatif à la simplification de la procédure civile, à la communication électronique et à la résolution amiable des différends, qui oblige notamment les parties à indiquer dans l'acte de saisine de la juridiction les démarches de résolution amiable précédemment entreprises 25 ( * ) .
Ce dispositif s'inspire de celui qui avait été mis en place, à titre expérimental, en matière de médiation familiale, par l'article 15 de la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles.
À cet égard, votre rapporteur s'est interrogé sur le devenir de cette expérimentation. En effet, l'article 15 de la loi de 2011 prévoyait la remise d'un rapport par le Gouvernement au Parlement, six mois au moins avant le terme de l'expérimentation, procédant à son évaluation en vue de décider de sa généralisation, de son adaptation ou de son abandon.
Compte-tenu des éléments fournis à votre rapporteur par les services du ministère de la justice ( cf. encadré infra ), votre rapporteur ne peut que déplorer qu'une insuffisance de moyens fasse obstacle à la poursuite et à la généralisation de cette expérience très positive.
Bilan de l'expérimentation menée en
matière
Le cadre légal et réglementaire de l'expérimentation : La double convocation (DC) : l'article 1 er du décret n° 2010-1395 du 12 novembre 2010 relatif à la médiation et à l'activité judiciaire en matière familiale permet au juge aux affaires familiales, saisi d'un litige, d'enjoindre aux parties de rencontrer un médiateur familial avant l'audience, dans les affaires qui lui apparaissent susceptibles de pouvoir faire l'objet d'une médiation. Ainsi, le magistrat convoque les parties en médiation et à l'audience d'examen de l'affaire. La tentative de médiation préalable obligatoire (TMPO) : l'article 15 de la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles prévoit que la saisine du juge par les parents aux fins de modification d'une décision fixant les modalités de l'exercice de l'autorité parentale ou la contribution à l'entretien et à l'éducation de l'enfant, devra être précédée, sous peine d'irrecevabilité, d'une tentative de médiation familiale. Par arrêtés du 16 mai 2013, la direction des services judiciaires (DSJ) a désigné deux juridictions expérimentales, les tribunaux de grande instance (TGI) d'Arras et de Bordeaux. Le terme des expérimentations a été fixé au 31 décembre 2014. Le bilan de l'expérimentation : Le bilan qualitatif et statistique de l'expérimentation, établi par le service de l'accès au droit et à la justice et de l'aide aux victimes (SADJAV), est très positif. Les acteurs de la médiation se sont appropriés les deux dispositifs expérimentaux. La tentative de médiation préalable obligatoire donne toutefois de meilleurs résultats que la double convocation à la fois en termes de taux de recours aux dispositifs par les juridictions ou spontanément par les parties, qu'en nombre d'accords. Le taux de recours à la TMPO pour l'ensemble des affaires concernées a été de 23,65 % et la proportion d'accords de 76,96 %. Quant à la DC, son taux de recours a représenté 17,09 % et sa proportion d'accords, 67,12 %. L'ensemble des acteurs judiciaires a souligné un apaisement du conflit après un entretien d'information 26 ( * ) , quel que soit le dispositif de médiation utilisé et ce, même en l'absence d'engagement en médiation ensuite. Il a notamment été relevé que lorsque les parties ont pu se rencontrer préalablement à l'audience dans le cadre de l'entretien d'information, celle-ci se déroulait dans un climat plus serein, et que des accords intervenaient dans la phase se déroulant entre cet entretien et la date de l'audience, le dialogue ayant été restauré. Le coût de l'expérimentation : S'agissant de l'impact des expérimentations sur les effectifs et l'organisation du travail en juridiction, il n'a pas été noté de changement significatif dans la charge de travail des magistrats. S'agissant de la charge de travail des greffes, les deux juridictions ont souligné l'augmentation de la charge de travail des fonctionnaires 27 ( * ) . Une réorganisation a été nécessaire, ainsi que la mise en oeuvre de moyens humains supplémentaires, en raison notamment de la double convocation. La charge de travail supplémentaire a été estimée à environ 0,6 ETPT à Arras et 1 à 1,3 ETPT à Bordeaux. Sur la durée de l'expérimentation, les crédits consacrés par le ministère de la justice à l'expérimentation ont été au total de 411 385 €, dont 331 130 € à la cour d'appel de Bordeaux et 80 255 € à la cour d'appel de Douai. Le budget alloué par les caisses d'allocations familiales (CAF) de Bordeaux et d'Arras a été au total de 356 568 €, dont 186 516 € à la cour d'appel de Bordeaux et 170 052 € à la cour d'appel de Douai. Source : services du ministère de la justice |
Concernant la conciliation, le présent article reprend l'une des préconisations du rapport d'avril 2015 de l'inspection générale des services judiciaires (IGSJ) 28 ( * ) .
Lors de leur audition par votre rapporteur, les représentants de la fédération des associations de conciliateurs de justice ont fait valoir que cette disposition s'inspirait d'une pratique qui avait déjà cours devant le tribunal d'instance et la juridiction de proximité pour les petits litiges.
En effet, selon le rapport d'avril 2015 de l'inspection générale des services judiciaires (IGSJ) 29 ( * ) , « très souvent, le conciliateur de justice est étroitement associé aux audiences, soit exclusivement du juge de proximité, soit du juge de proximité et du tribunal d'instance. Il prend ainsi en charge quelques dossiers envoyés par le juge de proximité ou le magistrat immédiatement. Il exerce sa mission dans une salle ou un local mis à sa disposition, à proximité de la salle d'audience .
« Cette pratique, très opérationnelle, est incitative parce qu'elle est présentée par le juge lui-même, qui, à l'audience, l'explique aux parties. Celles-ci n'ont pas la crainte de perdre du temps, puisqu'en cas d'échec de la tentative de conciliation, leur affaire est reprise dans le rôle normal de l'audience du jour ».
Le processus de conciliation « Conciliation » et « médiation » une distinction spécifique au droit français La conciliation est une spécificité du droit français. Le droit européen ne distingue pas les deux procédures. La directive du 21 mai 2008 30 ( * ) définit les modes alternatifs de règlement des différends comme « un processus structuré, quelle que soit la manière dont il est nommé ou visé, dans lequel deux ou plusieurs parties à un litige tentent par elles-mêmes, volontairement, de parvenir à un accord sur la résolution de leur litige avec l'aide d'un médiateur. Ce processus peut être engagé par les parties, suggéré ou ordonné par une juridiction ou prescrit par le droit d'un État membre ». En droit français, la médiation et la conciliation sont régies par les mêmes dispositions du code de procédure civile (CPC). L'article 1529 dispose que les deux processus « s'appliquent aux différends relevant des juridictions de l'ordre judiciaire statuant en matière civile, commerciale, sociale ou rurale, sous réserve des règles spéciales à chaque matière et des dispositions particulières à chaque juridiction ». Les méthodes utilisées par les conciliateurs et les médiateurs sont assez proches et se caractérisent par une grande souplesse d'adaptation aux situations particulières. Quant aux effets des deux procédures, ils sont identiques. Si les parties parviennent à un accord, il est établi un procès-verbal qui n'a force exécutoire que s'il est homologué par le juge. La différence entre conciliation et médiation réside dans le statut des intervenants. Le conciliateur de justice, auxiliaire du service de la justice, effectue une conciliation bénévole alors que le médiateur est un intervenant privé, rémunéré. La conciliation : La conciliation peut être conventionnelle. Elle est alors initiée par les parties elles-mêmes, personnes physiques ou morales. Elle peut porter sur tous les droits dont les personnes ont la libre disposition 31 ( * ) . L'essentiel des saisines est d'ailleurs d'origine conventionnelle. La conciliation peut également être judiciaire. Elle est un préalable obligatoire pour certains contentieux comme en matière de divorce. Le juge peut la mener lui-même ou la déléguer au conciliateur. Les principaux contentieux pour lesquels la conciliation est utilisée sont les suivants : les relations de voisinage, les relations propriétaire-locataire, le droit de la consommation. Les conciliateurs de justice Ils ont été institués par le décret n° 78-381 du 20 mars 1978 relatif aux conciliateurs de justice, et rattachés aux tribunaux d'instance. L'article 2 du décret prévoit que les conciliateurs sont choisis parmi les personnes justifiant d'une expérience juridique d'au moins trois ans, particulièrement qualifiés pour ces fonctions en raison de leurs compétences et de leur activité antérieure 32 ( * ) . Ils ne sont soumis à aucune obligation spécifique de formation. Ils exercent leur fonction bénévolement et reçoivent une indemnité forfaitaire annuelle de 232 euros, qui peut être portée à 458 euros sur autorisation des chefs de cour et sur présentation de justificatifs 33 ( * ) . Cette somme est destinée à couvrir les menues dépenses de secrétariat, de téléphone, de documentation et d'affranchissement qu'ils exposent dans l'exercice de leurs fonctions. La majorité des conciliateurs et des associations locales de conciliation est adhérente de la fédération nationale des conciliateurs de justice, ce qui améliore la diffusion des bonnes pratiques. En 2014, les 1 894 conciliateurs ont été saisis de 118 294 affaires. 68 663 affaires ont été conciliées, soit un taux de conciliation de 58%. Le taux de réussite du processus de conciliation est donc relativement élevé, que la conciliation soit judiciaire ou conventionnelle. Cependant, la plupart des conciliations sont conventionnelles. Seuls 7 % des litiges traités par les conciliateurs de justice résultent de saisines dans un cadre judiciaire. |
• Un dispositif pertinent dans son principe
mais incertain dans sa réalisation
Pour les petits litiges du quotidien, la conciliation rencontre un grand succès qui repose sur plusieurs facteurs comme la gratuité du dispositif, la grande souplesse du processus, une bonne organisation des conciliateurs de justice et la possibilité de donner force exécutoire à la conciliation par une homologation du juge.
La mise en place d'une obligation de tentative de conciliation préalable entraînerait également un allègement de la charge de travail des juridictions de proximité et des tribunaux d'instance, puisque les saisines de ces juridictions par déclaration au greffe représentaient 120 647 en 2013 soit respectivement 59,2 % de l'activité des juridictions de proximité et 15,98 % de celle des tribunaux d'instance, autant de dossiers qui ne seraient plus soumis au juge ou seulement pour homologation.
Même en cas d'échec de la conciliation, la procédure judiciaire qui suivra serait allégée car les différentes demandes auront déjà été examinées et formalisées lors de la tentative de conciliation préalable.
Cependant, votre rapporteur observe que le dispositif repose sur un pari risqué : la capacité pour les conciliateurs de justice d'absorber le surplus d'affaires qui leur seraient ainsi confiées .
En effet, actuellement, sur 118 294 saisines des conciliateurs, seuls 7 % des litiges traités par les conciliateurs de justice le sont dans un cadre judiciaire.
Or, selon l'étude d'impact annexée au projet de loi 34 ( * ) , bien qu'il ne soit pas aisé de quantifier à ce stade les effets de cette réforme, le rapport de l'IGSJ a estimé que 45 000 demandes 35 ( * ) viendraient s'ajouter à la charge actuelle des conciliateurs, ce qui constituerait une hausse d'activité de 33 % pour les conciliateurs 36 ( * ) .
Comme l'ont fait valoir les représentants des conciliateurs lors de leur audition par votre rapporteur, dans certains ressorts, on manque déjà actuellement de conciliateurs et les candidats ne sont pas très nombreux.
Ce constat est également partagé par l'inspection générale des services judiciaires (IGSJ qui relevait, dans son rapport d'avril 2015 37 ( * ) , qu'en 2013, les conciliateurs étaient au nombre de 1 788 38 ( * ) , soit une moyenne de 3 pour 100 000 habitants, avec une répartition très inégale sur le territoire. Selon ce rapport, « les acteurs déplorent la difficulté à susciter des vocations pour une fonction exigeante en termes de compétences, sans attrait financier, peu connue et manquant à l'évidence de reconnaissance .
« Aussi, la plupart des candidats, hormis les anciens magistrats, sont recrutés grâce à la mobilisation de réseaux de connaissance des conciliateurs en exercice. Ce mode de recrutement ne favorise pas une mixité des profils, alors même que les contentieux exigent des compétences diversifiées .
« [...] En outre, face à ces difficultés de recrutements, l'âge moyen des conciliateurs augmente. Quasiment tous les conciliateurs sont retraités, en raison de l'investissement exigé par ces fonctions bénévoles. La moyenne d'âge se situe entre 66 et 70 ans, mais 17,5 % des conciliateurs ont plus de 76 ans ».
COUR D'APPEL |
Nombre de conciliateurs déclarés en activité en 2014 |
37 |
1894 |
AGEN |
26 |
AIX |
142 |
AMIENS |
40 |
ANGERS |
80 |
BASSE-TERRE |
13 |
BASTIA |
0 |
BESANCON |
39 |
BORDEAUX |
56 |
BOURGES |
33 |
CAEN |
50 |
CAYENNE |
0 |
CHAMBERY |
32 |
COLMAR |
62 |
DIJON |
28 |
DOUAI |
134 |
FORT-de-France |
19 |
GRENOBLE |
71 |
LIMOGES |
14 |
LYON |
98 |
METZ |
27 |
MONTPELLIER |
60 |
NANCY |
44 |
NÎMES |
52 |
NOUMEA |
0 |
ORLÉANS |
54 |
PARIS |
162 |
PAU |
67 |
POITIERS |
70 |
REIMS |
46 |
RENNES |
160 |
RIOM |
27 |
ROUEN |
34 |
SAINT-DENIS DE LA RÉUNION |
11 |
SAINT-PIERRE ET MIQUELON |
0 |
TOULOUSE |
63 |
VERSAILLES |
80 |
PAPEETE |
0 |
Source : services du ministère de la justice
Certes, une amélioration des conditions de leur défraiement, qui ne permettent pas actuellement de couvrir les frais engagés, ainsi qu'une amélioration de leurs conditions matérielles d'exercice (moyens informatiques et de communication, locaux adaptés), comme l'a annoncé Mme Christiane Taubira, ministre de la justice, lors de son audition par votre commission, pourrait constituer une incitation à se porter candidat à ce type de fonctions mais votre rapporteur doute que cela suffise.
En outre, avec la généralisation de la tentative de conciliation préalable, se pose la question de la formation des conciliateurs . En effet, selon les représentants des conciliateurs rencontrés par votre rapporteur, si l'école nationale de la magistrature propose un module de formation spécifique pour les conciliateurs, cette formation ne revêt pas un caractère obligatoire. En 2014, 762 conciliateurs de justice ont suivi une ou plusieurs de ces formations.
Cette absence de formation peut constituer une difficulté, encore accentuée par la nécessité de recruter de nouveaux conciliateurs pour faire face à l'augmentation de leur activité.
Votre rapporteur s'est alors interrogé sur l'opportunité, comme cela avait été fait en 2011 pour la médiation familiale, de mettre en place une expérimentation préalable à la généralisation du dispositif.
Cependant, compte tenu des nombreuses exceptions prévues par le présent article, qui permettent d'écarter la tentative de conciliation si celle-ci est trop complexe à mettre en oeuvre, il a estimé que le principe du droit d'accès à un juge était préservé.
Ces exceptions reprennent en grande partie, en les adaptant à la conciliation, celles qui étaient prévues pour la médiation familiale à l'article 15 de la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles et notamment la possibilité de ne pas se soumettre à la tentative de conciliation préalable si, compte tenu des délais dans lesquels elle est susceptible d'intervenir, elle risque de porter atteinte au droit des intéressés d'avoir accès au juge dans un délai raisonnable.
Outre un amendement rédactionnel ( COM-23 ), votre commission a adopté un amendement de précision ( COM-24 ) concernant la dispense de conciliation préalable pour les parties qui sollicitent l'homologation d'un accord. En effet, il est prévu que cette sollicitation devra être conjointe alors que le code de procédure civile autorise une partie à demander seule cette homologation 39 ( * ) .
Votre commission a adopté l'article 3 ainsi modifié .
Article 4 (Ordonnance n° 2011-1540 du 16 novembre 2011 portant transposition de la directive 2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale, art. L. 211-4, L. 771-3, L. 771-3-1 et L. 771-3-3 [nouveau] du code de justice administrative) - Extension du champ de la médiation administrative
Le présent article ratifie l'ordonnance n° 2011-1540 du 16 novembre 2011 portant transposition de la directive 2008/52/CE du Parlement européen et du Conseil du 21 mai 2008 sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale et réforme les règles applicables à la médiation et la conciliation devant le juge administratif.
L'ordonnance du 16 novembre 2011 modifie la loi n° 95-125 du 8 février 1995 relative à l'organisation des juridictions et à la procédure civile , pénale et administrative , ainsi que le code de justice administrative (CJA).
Elle introduit dans la loi du 8 février 1995 des règles générales et notamment, à l'article 21, une définition de la médiation qui « s'entend de tout processus structuré, quelle qu'en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l'aide d'un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par le juge saisi du litige ».
Le présent article concerne pour l'essentiel la médiation et la conciliation en matière administrative. Il apporte divers ajustements aux dispositions du code de justice administrative issues notamment de l'ordonnance du 16 novembre 2011, pour favoriser le recours à la médiation et à la conciliation devant le juge administratif.
La médiation et la conciliation en matière administrative Une mission de conciliation a été reconnue aux tribunaux administratifs dès la loi n° 86-14 du 6 janvier 1986 fixant les règles garantissant l'indépendance des membres des tribunaux administratifs. Cette mission a été étendue aux cours administratives d'appel par la loi n° 2011-1862 du 13 décembre 2011 relative à la répartition des contentieux et à l'allègement de certaines procédures juridictionnelles. Cette mission de conciliation est actuellement régie par l'article L. 211-4 du code de justice administrative (CJA), qui prévoit que « dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, les chefs de juridiction peuvent, si les parties en sont d'accord, organiser une mission de conciliation et désigner à cet effet la ou les personnes qui en seront chargées ». Quant à la médiation, elle a été introduite dans la partie législative du CJA (article L. 771-3) par l'ordonnance n° 2011-1540 du 16 novembre 2011. L'article 21 de l'ordonnance définit la médiation comme « tout processus structuré, quelle qu'en soit la dénomination, par lequel deux ou plusieurs parties tentent de parvenir à un accord en vue de la résolution amiable de leurs différends, avec l'aide d'un tiers, le médiateur, choisi par elles ou désigné, avec leur accord, par le juge saisi du litige ». Elle ne peut cependant intervenir pour le règlement de différends qui concernent la mise en oeuvre par l'une des parties de prérogatives de puissance publique et a été limitée aux seuls différends transfrontaliers 40 ( * ) , excluant ainsi les litiges internes. Conciliation et médiation se distinguent par leurs champs d'application et leurs régimes juridiques respectifs. En particulier, la médiation se limite, en l'état du droit, aux litiges transfrontaliers non-régaliens relatifs à des droits disponibles tandis que la conciliation peut être mise en oeuvre à l'occasion de tous types de litiges, y compris ceux qui concernent la mise en oeuvre de prérogatives de puissance publique. Par ailleurs, le régime de la médiation fait l'objet d'une définition complète, en conformité avec les exigences du droit de l'Union européenne, alors que la conciliation n'est que très peu réglementée. Certains contentieux portés devant le juge administratif ne se prêtent pas à la recherche d'une solution amiable. Tel est le cas notamment du contentieux électoral. En effet, en cas d'irrégularités ayant eu une incidence sur la sincérité du scrutin, il n'y a pas d'alternative à l'annulation des élections. De même, la médiation paraît difficile à envisager s'agissant des contestations relatives aux mesures de police administrative car ces décisions prises pour des motifs de sécurité et d'ordre public ne peuvent donner lieu à négociation. Enfin, le contentieux de l'annulation de certaines décisions, qui intéressent une pluralité de personnes, telles que les décisions réglementaires ou les déclarations d'utilité publique, ne se prête pas non plus à la médiation, alors notamment que ces décisions ont été adoptées après enquête publique, qui constitue normalement le lieu d'expression des intérêts particuliers. Pour les contentieux susceptibles de faire l'objet d'un règlement amiable, un certain nombre de mécanismes préalables à la saisine du juge existent déjà comme le recours administratif préalable obligatoire (RAPO) ou la médiation interne 41 ( * ) . Dans ces cas, les frais d'intervention du « médiateur » de l'administration concernée ne sont pas à la charge du justiciable. La médiation et la conciliation sont tout de même appelées à se développer pour certains contentieux comme en matière de décisions individuelles d'urbanisme, de dommages de travaux publics, de contrats publics ou de responsabilité hospitalière et, surtout, en matière de contentieux sociaux (aide personnalisée au logement, aide sociale à l'enfance, carte de stationnement pour adulte handicapé, reconnaissance de la qualité de travailleur handicapé...). |
•
La suppression de la conciliation par
un tiers
À l'article L. 211-4 du code de justice administrative, le présent article (1° du II) supprime la possibilité, dans les tribunaux administratifs et les cours administratives d'appel, pour les chefs de juridiction, de confier une mission de conciliation à un tiers désigné à cet effet, avec l'accord des parties.
Cette suppression traduit le choix du projet de loi de maintenir deux procédures distinctes en les différenciant selon un critère organique. La conciliation relèverait du juge alors que la médiation serait opérée par un tiers exerçant sa mission dans le respect des règles fixées par l'ordonnance de 2011.
Cependant, alors même que les modes alternatifs de règlement des différends sont très peu utilisés en matière administrative, il est apparu dommage à votre rapporteur de priver les juridictions de cet outil. De plus, la possibilité pour le juge administratif de faire appel à un conciliateur extérieur permet de disposer, en matière administrative, des mêmes outils que ceux qui existent dans le domaine judiciaire, où la conciliation peut être réalisée par le juge ou par un tiers, le conciliateur de justice.
Dans une note transmise à votre rapporteur par ses services, le vice-président du Conseil d'État estime d'ailleurs que la modification envisagée « priverait le juge du pouvoir de confier la réalisation concrète de la mission de conciliateur à une personne extérieure à la juridiction, alors même que la diversité des outils mis à la disposition du juge doit conduire à donner la priorité aux procédures amiables "externalisés". Il serait souhaitable que le juge administratif puisse disposer d'une procédure de règlement alternatif des différends confiée à un tiers non rémunéré. Par conséquent, la juridiction administrative est défavorable à la modification proposée de l'article L. 211-4 du code de justice administrative ».
Pour l'ensemble de ces raisons, à l'initiative de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement COM-25 supprimant cette disposition.
•
La possibilité de recourir
à la médiation pour les litiges nationaux
L'un des freins au développement de la médiation en matière administrative résulterait de la limitation de son application aux seuls différends transfrontaliers.
La directive de 2008, dont est issu l'article L. 771-3 du CJA dans sa rédaction actuelle, limite en effet aux différends transfrontaliers, c'est-à-dire aux différends dans lesquels une des parties au moins est domiciliée ou a sa résidence habituelle dans un État de l'Union européenne autre que la France, le recours à la médiation.
La directive de 2008 précise cependant, dans son considérant n° 8, que, si « les dispositions de la présente directive ne devraient s'appliquer qu'à la médiation des litiges transfrontaliers, rien ne devrait empêcher les États membres de les appliquer également aux processus de médiation internes ».
Dès lors, le présent article prévoit (2° du II) de supprimer cette limitation et de permettre ainsi le recours à la médiation pour les litiges nationaux relevant de l'activité administrative non régalienne c'est-à-dire en dehors des domaines où l'autorité publique agit en mettant en oeuvre des prérogatives de puissance publique.
•
La répartition des frais de
médiation
Le présent article (3° du II) complète ensuite l'article L. 771-3-1 du CJA pour préciser les modalités de prise en charge des frais de médiation qui n'étaient pas prévues jusque-là en matière administrative. Il renvoie ainsi aux trois premiers alinéas de l'article 22-2 de la loi du 8 février 1995 et ouvre ainsi le bénéfice de l'aide juridictionnelle aux parties qui ont recours à la médiation administrative.
Ces dispositions énoncent que les frais de médiation sont répartis librement par les parties lorsqu'ils sont à leur charge. À défaut d'accord, ces frais sont répartis à parts égales, à moins que le juge n'estime qu'une telle répartition est inéquitable au regard de la situation économique des parties. Cette dernière répartition est également celle retenue lorsque l'une au moins des parties bénéficie de l'aide juridictionnelle. Les frais incombant à la partie bénéficiaire sont alors à la charge de l'État.
•
L'interruption des délais de
recours durant la médiation
Le présent article (4° du II) insère ensuite dans le CJA un nouvel article L. 771-3-3 qui prévoit l'interruption des délais de recours lorsqu'une médiation est initiée par les parties.
Les délais de recours courent à nouveau à compter de la date à laquelle l'une au moins des parties ou le médiateur déclare que la médiation est terminée.
Actuellement, rien n'est prévu pour les délais de forclusion, ce qui peut avoir pour effet de décourager les justiciables de recourir à la médiation pour préserver leurs délais de recours
Selon les éléments transmis à votre rapporteur par les services du Conseil d'État, cette disposition est « très attendue » et permettra de favoriser la médiation « préventive », préservant la possibilité pour les parties d'une saisine ultérieure du juge.
Enfin, le présent article ouvre la possibilité pour les juridictions spécialisées 42 ( * ) , relevant du Conseil d'État, de recourir à la médiation et à la conciliation (III). Cette possibilité n'était pas forcément pertinente jusqu'à présent puisque les litiges relevant de ces juridictions n'étaient que rarement transfrontaliers mais, avec la suppression de cette limitation, elle apparaît désormais opportune.
Votre commission a adopté l'article 4 ainsi modifié .
Article 5 (art. 2062, 2063, 2065 et 2066 du code civil) - Extension du champ d'application de la convention de procédure participative
Le présent article modifie les dispositions du code civil relatives à la procédure participative pour prévoir que celle-ci pourrait désormais être utilisée alors même qu'un juge a été saisi et pourrait avoir pour objet, outre la résolution amiable d'un différend, comme le prévoit le droit en vigueur, la mise en état du litige. À cet effet, la convention pourra préciser « les actes contresignés par avocats que les parties s'accordent à établir ».
Dans le cadre de la promotion des modes alternatifs de règlement des litiges, portée par le projet de loi, cette disposition, tirée du rapport remis par M. Pierre Delmas-Goyon à la garde des sceaux en décembre 2013 43 ( * ) , tente de réveiller l'engouement très limité pour cet outil en étendant son champ d'application 44 ( * ) .
La convention de procédure participative La loi n° 2010-1609 du 22 décembre 2010 relative à l'exécution des décisions de justice, aux conditions d'exercice de certaines professions réglementées et aux experts judiciaires a introduit dans le droit français la procédure participative, nouveau mode de résolution des conflits. Par la suite, le décret n° 2012-66 du 20 janvier 2012 relatif à la résolution amiable des différends a créé les articles 1542 à 1568 du code de procédure civile. Il s'agit d'une procédure de négociation entre les parties, conduite par leurs avocats, en vue de régler leur différend. L'accord auquel parviennent les parties est soumis au juge pour homologation. Avant d'homologuer la transaction, le juge s'assure, comme en matière de médiation, qu'elle préserve suffisamment les droits de chacune des parties. Aux termes de l'article 2062 du code civil, tels que résultant de la loi du 22 décembre 2010, « la convention de procédure participative est une convention par laquelle les parties à un différend qui n'a pas encore donné lieu à la saisine d'un juge ou d'un arbitre s'engagent à oeuvrer conjointement et de bonne foi à la résolution amiable de leur différend ». Les parties qui signent ce type de convention s'engagent donc, pour une durée déterminée, à tout mettre en oeuvre pour résoudre leur conflit. En application de l'article 2064 du code civil, les parties peuvent conclure une convention de procédure participative sur les droits dont elles ont la libre disposition à l'exception des différends entre employeur et salarié à propos d'un contrat de travail soumis aux dispositions du code du travail. La convention est écrite. Elle précise son terme, l'objet du différend et les pièces et informations nécessaires à la résolution du différend et les modalités de leur échange (article 2063 du code civil). Pour conclure une telle convention, chaque partie doit être assistée d'un avocat. La convention ne peut porter que sur des droits dont la personne à la libre disposition (article 2065 du code civil). Cependant, une convention de procédure participative peut être conclue par des époux en vue de rechercher une solution consensuelle en matière de divorce ou de séparation de corps (article 2067). Pendant la durée de la procédure, les parties s'engagent à ne pas saisir le juge. Toutefois, l'inexécution de la convention par l'une des parties autorise une autre partie à saisir le juge pour qu'il statue sur le litige (article 2065 du code civil). En application de l'article 2238 du code civil, « la prescription est [...] suspendue à compter de la conclusion d'une convention de procédure participative ». Les parties qui, au terme de la convention de procédure participative, parviennent à un accord réglant en tout ou partie leur différend peuvent soumettre cet accord à l'homologation du juge (article 2066 du code civil). La procédure participative peut être prise en charge au titre de l'aide juridictionnelle (article 10 de la loi n° 91-647 du 10 juillet 1991 relative à l'aide juridique ). Cependant, force est de constater que cette procédure n'a pas rencontré le succès escompté. Pour 2013, année de mise en place par le ministère de la justice de l'outil statistique permettant de mesurer le nombre de demandes d'homologation d'accords conclus par les parties, on en comptait sept devant le tribunal de grande instance et 39 devant le tribunal d'instance, toutes matières confondues. |
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La possibilité de recourir
à une convention de procédure participative une fois le juge
saisi
Inspirée du droit collaboratif anglo-saxon, la procédure participative permet à chaque partie, assistée de son avocat, de rechercher une solution amiable avant tout procès. En prévoyant à l'article 2062 que la convention de procédure participative peut intervenir alors même que le juge est saisi, le présent texte opère un véritable changement de logique.
Le décret n° 2015-282 du 11 mars 2015 45 ( * ) , modifiant l'article 757 du code de procédure civile, avait permis une première évolution, en admettant, devant le tribunal de grande instance, qu'une convention puisse être signée pendant le délai fixé pour enrôler l'assignation.
Selon Mme Soraya Amrani-Mekki, professeur à l'université Paris Ouest Nanterre La Défense, l'une des causes principales de l'échec de la convention de procédure participative « tient à sa condition chronologique, puisque l'article 2062 du code civil impose sa conclusion avant la saisine du juge. Or, à ce stade, il est souvent difficile d'obtenir un accord des parties sur les modalités de négociation sur le désaccord. La demande en justice permet parfois de libérer la tension et d'exprimer son mécontentement » 46 ( * ) .
Désormais, la convention de procédure participative pourrait intervenir à tout stade de la procédure judiciaire.
Corrélativement, en toute logique, le présent article modifie l'article 2065 pour préciser que seule la convention de procédure participative conclue avant l'instance rend la saisine du juge irrecevable pendant la durée de la convention. En effet, dans la nouvelle hypothèse prévue par le présent article, le juge est d'ores et déjà saisi au moment de la conclusion de la convention.
De même, il modifie l'article 2066 du même code pour préciser que faute d'accord au terme de la convention, seules les parties ayant conclu une convention avant saisine du juge seront dispensées de la conciliation ou de la médiation préalable prévue le cas échéant. Les parties qui ont décidé de recourir à une convention de procédure participative en cours d'instance se sont d'ores et déjà soumises aux obligations préalables à la saisine du juge.
À l'initiative de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement (COM-26) permettant de rétablir à l'article 2062 du code civil la précision selon laquelle la convention de procédure participative est conclue « pour une durée déterminée ». Cette précision est en effet importante puisqu'en application de l'article 2065, « tant qu'elle est en cours, la convention de procédure participative rend irrecevable tout recours au juge pour qu'il statue sur le litige ».
• Les actes contresignés par avocats
Le présent article modifie les articles 2062 et 2063 du code civil pour prévoir que la convention de procédure participative pourra avoir pour objet « la mise en état du litige », alors qu'actuellement, son champ d'application est limité à la résolution amiable des différends des parties.
Votre commission a adopté un amendement de clarification ( COM-27) permettant de respecter l'ordre chronologique du déroulement des actions envisagées, en mentionnant d'abord la résolution amiable du différend et ensuite la mise en état du litige.
Dans le cadre de cette mise en état, le présent article modifie l'article 2063 du code civil pour prévoir que la convention de procédure participative précise « le cas échéant, les actes contresignés par avocats que les parties s'accordent à établir ». Il consacre ainsi l'acte de procédure d'avocats.
L'acte de procédure d'avocats est défini par le groupe de travail présidé par M. Renaud Le Breton de Vannoise, président du tribunal de grande instance de Pontoise 47 ( * ) , comme « un acte signé par les avocats des parties à un litige ayant ou non donné lieu à la saisine d'une juridiction, visant à définir l'objet de la preuve et à administrer celle-ci, conjointement et de bonne foi ». Il prend ainsi la forme d'un acte contresigné par un avocat, au sens du chapitre I er bis de la loi n° 71-1130 du 31 décembre 1971 portant réforme de certaines professions judiciaires et juridiques 48 ( * ) .
Dans son rapport sur le juge du XXI ème siècle, M. Pierre Delmas-Goyon 49 ( * ) identifie plusieurs types d'actes de procédure d'avocat : les actes de constatation (déplacement sur les lieux, constatations matérielles en présence d'un sachant...), les actes de certification des pièces détenues par les parties, les actes d'enquête (auditions, consultations de techniciens...) et les actes de désignation (d'un sachant, d'un médiateur...). Ils permettraient aux parties de s'accorder sur certains éléments de l'administration de la preuve.
Afin de sécuriser cette extension du champ de la convention de procédure participative à la mise en état du litige, votre commission a adopté un amendement (COM-28) qui prévoit que la liste des actes de procédure sur lesquels les parties pourront s'accorder sera fixée par décret en Conseil d'État.
Même si tel n'est pas son objet principal, l'utilisation de ce type d'actes pourrait favoriser la résolution amiable du litige. En s'accordant point par point, et en rétablissant un dialogue qui avait pu être rompu, les parties pourraient finir pas s'accorder sur l'ensemble de l'affaire.
En tout état de cause, ces actes permettraient aux parties de procéder elles-mêmes à des constats, des expertises, des auditions... sans attendre que le juge les ordonne, gagnant ainsi un temps précieux et allégeant d'autant la charge des juridictions. Cette procédure permettrait d'« affiner » le litige avant sa transmission au juge permettant ainsi un traitement judiciaire plus efficace et plus rapide.
Entendus par votre rapporteur, les représentants des syndicats de magistrats se sont montrés hostiles à la mise en place des actes de procédure d'avocat, estimant qu'il risquait d'en découler une « privatisation » de la justice pour le syndicat de la magistrature, et un allongement des délais contentieux pour l'union syndicale des magistrats.
De fait, ces actes pèseront sur les parties elles-mêmes. Cependant dans la mesure où la conclusion d'une convention de procédure participative ayant pour objet la mise en état de l'affaire est laissée au libre choix des parties et ne doit certainement pas devenir un préalable obligatoire à la saisine du juge, votre rapporteur ne voit pas d'inconvénient à les autoriser.
Dès lors, si dans son principe, votre rapporteur s'est montré favorable à la mise en place d'un tel dispositif, il s'interroge néanmoins sur son succès potentiel, dans la mesure où la convention de procédure participative ne semble pas être entrée dans la culture tant des professionnels que des justiciables.
Votre commission a adopté l'article 5 ainsi modifié .
Article 6 (art. 2044, 2047, 2052, 2053 à 2058 du code civil) - Clarification des règles applicables à la transaction
Le présent article précise la définition de la transaction prévue à l'article 2044 du code civil, en prévoyant qu'il s'agit d'un contrat par lequel les parties, « par des concessions réciproques », terminent une contestation née, ou préviennent une contestation à naître. Il mentionne ainsi l'une des conditions essentielles de la transaction issue d'une jurisprudence constante.
Il propose ensuite une nouvelle rédaction de l'article 2052 du code civil, pour prévoir que la transaction fait obstacle à l'introduction ou à la poursuite d'une action en justice ayant le même objet. Actuellement, l'article 2052 dispose que les transactions ont, entre les parties, l'autorité de la chose jugée. Elles ne peuvent être attaquées pour cause d'erreur de droit, ni pour cause de lésion.
Ces modifications apportées aux règles du code civil applicables aux transactions, non modifiées depuis 1804, tiennent compte des apports de la jurisprudence dégagée au fil du temps.
Votre commission a estimé que ces clarifications étaient bienvenues et a adopté un amendement de simple précision rédactionnelle.
Le présent article abroge ensuite les articles suivants, en ce qu'ils seraient redondants par rapport aux règles du droit commun des contrats ou aux règles applicables aux contrats spéciaux :
- l'article 2047 du code civil relatif à la possibilité de prévoir dans la transaction une peine pour celui qui manquera à son exécution ;
- l'article 2053 sur la rescision pour erreur sur la personne ou sur l'objet de la contestation, ou pour dol ou violence ;
- l'article 2054 relatif à la rescision de la transaction faite en exécution d'un titre nul ;
- l'article 2055 qui prévoit la nullité d'une transaction faite sur pièces qui depuis ont été reconnues fausses ;
- l'article 2056 relatif à la nullité d'une transaction sur un jugement passé en force de chose jugée ;
- l'article 2057 relatif aux conditions de rescision d'une transaction quand des titres inconnus au moment de la transaction ont été postérieurement découverts ;
- l'article 2058 relatif à la réparation de l'erreur de calcul dans une transaction.
Or, selon M. Loïc Cadiet, entendu par votre rapporteur, ces différentes abrogations soulèvent d'importantes questions puisqu'elles feraient tomber la transaction dans le droit commun des contrats, gommant ainsi sa spécificité, notamment en ce qui concerne la nullité, et risquant de réduire le degré de sécurité juridique qui s'attache à cet outil.
À titre conservatoire et pour se laisser le temps d'approfondir cette question, à l'initiative de son rapporteur, votre commission a adopté un amendement ( COM-31 ) revenant sur ces abrogations. Elle a aussi adopté un amendement rédactionnel ( COM-30 ).
Votre commission a adopté l'article 6 ainsi modifié .
Article 7 (art. 1592 et intitulé du titre XVI du livre III du code civil) - Précisions relatives à l'utilisation de la notion d'arbitrage
En premier lieu, à l'article 1592 du code civil, le présent article remplace le terme « arbitrage » par celui d'« appréciation ». En effet, cet article concerne la possibilité pour les parties, dans le cadre d'un contrat de vente, de s'en remettre à l'estimation faite par un tiers du prix de la vente. L'utilisation du terme « arbitrage » est donc source de confusion puisqu'il fait référence à un processus particulier régi par le titre XVI du livre III du code civil et par le livre IV du code de procédure civile.
Le même article 1592 prévoit ensuite que si le tiers ne veut ou ne peut faire « l'estimation », il n'y a pas de vente. Par cohérence avec cette rédaction, il est apparu plus opportun à votre rapporteur d'utiliser également le mot « estimation » au début de l'article, plutôt que le mot « appréciation », pour éviter de multiplier les notions utilisées.
Votre commission a donc adopté un amendement de précision ( COM-32 ) en ce sens.
En second lieu, le présent article modifie l'intitulé du titre XVI du livre III du code civil, « Du compromis », pour le rédiger ainsi : « De la convention d'arbitrage ». Cette rédaction couvrirait ainsi à la fois le compromis et la clause compromissoire abordés dans le titre XVI, et s'inscrirait en cohérence avec le chapitre I er « La convention d'arbitrage » du titre I er du livre IV du code de procédure civile, dont l'article 1442 dispose que « la convention d'arbitrage prend la forme d'une clause compromissoire ou d'un compromis ».
Votre commission a adopté l'article 7 ainsi modifié .
* 24 Pour ces litiges, l'article 843 prévoit que « la juridiction peut être saisie par une déclaration faite, remise ou adressée au greffe, où elle est enregistrée ».
* 25 Si les parties indiquent dans l'acte de saisine avoir déjà entrepris des démarches de résolution amiable de leur différend qui n'ont pas abouti, elles seront alors dispensées de l'obligation de tentative de conciliation préalable. Si elles n'ont entrepris aucune démarche en ce sens, alors elles seront soumises au présent dispositif.
* 26 Le taux de présence des deux parties lors de l'entretien d'information s'est établi à 51,85 % pour la TMPO et à 66,95 % pour la DC.
* 27 Augmentation du nombre de demandes de renseignements, accueil physique et téléphonique des parties, temps consacré à l'enregistrement des données concernant les affaires et à la convocation des parties, gestion des agendas des associations de médiation familiale...
* 28 Rapport de l'inspection générale des services judiciaires (IGSJ) sur le développement des modes amiables de règlement des différends, réalisé avec l'appui du secrétariat général à la modernisation de l'action publique, n° 22-15, avril 2015, p. 43. Ce rapport est consultable à l'adresse suivante : http://www.justice.gouv.fr/publication/2015_THEM_Rapport_definitif_reglement_conflits.pdf.
* 29 Rapport de l'inspection générale des services judiciaires (IGSJ) précité p. 27 et 28.
* 30 Directive 2008/52/CE du 21 mai 2008 sur certains aspects de la médiation en matière civile et commerciale .
* 31 Ne peuvent donc faire l'objet de conciliation les différends portant sur l'état des personnes ou le droit de la famille par exemple.
* 32 En application de l'article 3 du décret du 20 mars 1978, un conciliateur est nommé « pour une première période d'un an par ordonnance du premier président de la cour d'appel, après avis du procureur général, sur proposition du juge d'instance. À l'issue de celle-ci, le conciliateur de justice peut, dans les mêmes formes, être reconduit dans ses fonctions pour une période renouvelable de deux ans . »
* 33 Arrêté JUSB0610191 du 12 juin 2006
* 34 Étude d'impact annexée au projet de loi p. 46 et 47.
* 35 En effet, sur les 120 647 affaires qui font l'objet d'une déclaration au greffe en application de l'article 843 du CPC, toutes n'ont pas vocation à faire l'objet d'une tentative de conciliation préalable.
* 36 Si l'on se base sur les chiffres de 2014, cette proportion serait plutôt de 38 %.
* 37 Rapport de l'inspection générale des services judiciaires (IGSJ) précité, p. 27.
* 38 Leur nombre est passé à 1 894 en 2014 selon les chiffres clés de la justice, cf. encadré supra .
* 39 En matière d'homologation d'un accord de conciliation, l'article 1541 du code de procédure civile dispose que « la demande tendant à l'homologation du constat d'accord est présentée au juge par requête d'une des parties à moins que l'une d'elles s'oppose à l'homologation dans l'acte constatant son accord ». En matière de procédure participative, l'homologation d'un accord mettant fin à un différend est régie par l'article 1557 qui dispose que « la demande tendant à l'homologation de l'accord des parties [...] est présentée au juge par requête de la partie la plus diligente ou de l'ensemble des parties ».
* 40 C'est-à-dire pour lesquels l'une des parties au moins est domiciliée ou a sa résidence habituelle dans un État de l'Union européenne autre que la France.
* 41 Par exemple : les comités consultatifs de règlement amiable des litiges relatifs aux marchés publics, les commissions régionales de conciliation et d'indemnisation, chargées du règlement amiable des litiges relatifs aux accidents médicaux, les commissions de médiation chargées, pour l'application du droit au logement opposable, de préciser le caractère prioritaire de la demande de logement ou d'hébergement...
* 42 La Cour national du droit d'asile, les juridictions ordinales, les juridictions spécialisées en matière de contentieux d'aide sociale...
* 43 Le juge du XXI ème siècle Un citoyen acteur, une équipe de justice , rapport précité, p. 79 et suivantes.
* 44 Un premier pas en ce sens avait été réalisé par la loi n° 2015-990 du 6 août 2015 pour la croissance, l'activité et l'égalité des chances économiques , qui a supprimé, à l'article 2064 du code civil, l'exclusion de la matière sociale de la procédure participative, sous réserve de la libre disposition des droits.
* 45 Décret n° 2015-282 du 11 mars 2015 relatif à la simplification de la procédure civile à la communication électronique et à la résolution amiable des différends .
* 46 L'avocat du XXI ème siècle. - Projet J21, procédure participative et acte de procédure d'avocats , par Soraya Amrani-Mekki, La semaine juridique édition générale n° 41, 5 octobre 2015, 1052.
* 47 Ce groupe de travail, composé d'un professeur de droit, d'avocats et de magistrats a travaillé à l'élaboration d'un projet de décret relatif à l'acte de procédure d'avocat, remis au garde des sceaux le 16 février 2015. Ce document a été adressé à votre rapporteur par les représentants de la conférence nationale des présidents de tribunaux de grande instance.
* 48 Ce chapitre a été créé par l'article 3 de la loi n° 2011-331 du 28 mars 2011 de modernisation des professions judiciaires ou juridiques et certaines professions réglementées .
* 49 Rapport précité p. 79 et suivantes.