II. ANALYSE PAR PROGRAMME
Le présent rapport spécial porte sur les cinq programmes de la mission qui définissent le coeur de l'action du Gouvernement en matière d'écologie, de développement et de mobilité durables 23 ( * ) : le programme 113 « Paysages, eau et biodiversité » ; le programme 159 « Information géographique et cartographique » ; le programme 181 « Prévention des risques », le programme 174 « Énergie, climat et après-mines » et le programme 217 support de la mission.
A. LE PROGRAMME 113 « PAYSAGES, EAU ET BIODIVERSITÉ »
Évolution des crédits des actions du programme 113 entre 2014 et 2015
Actions |
Sous-actions |
LFI 2014 (en M€) |
PLF 2015 (en M€) |
||
AE |
CP |
AE |
CP |
||
Action 1 - Sites, paysages, publicité |
Sites, paysages, publicité |
7,16 |
6,17 |
6,00 |
6,00 |
Sous-total action 1 |
7,16 |
6,17 |
6,00 |
6,00 |
|
Action 2 - Logistique, formation et contentieux |
Fonctionnement courant et logistique |
1,36 |
1,02 |
2,20 |
2,20 |
Contentieux de l'ingénierie, de l'eau et de la biodiversité |
5,11 |
5,11 |
3,73 |
3,73 |
|
Sous-total action 2 |
6,47 |
6,13 |
5,93 |
5,93 |
|
Action 7 - Gestion des milieux et biodiversité |
Milieux et espaces marins |
33,67 |
33,47 |
35,53 |
35,93 |
Mesures territoriales dans le domaine de l'eau |
14,80 |
14,55 |
14,02 |
14,02 |
|
TVB - Espaces protégés |
107,08 |
106,24 |
106,93 |
106,53 |
|
Natura 2000 |
30,02 |
31,08 |
31,05 |
31,05 |
|
Connaissance et préservation de la biodiversité |
76,19 |
74,61 |
75,79 |
74,69 |
|
Sécurité d'approvisionnement des matières premières |
1,77 |
1,77 |
1,77 |
1,77 |
|
Sous-total action 7 |
263,53 |
261,72 |
265,09 |
263,99 |
|
Action 8 - Fonds d'investissement pour la biodiversité et la restauration écologique (FIBRE) |
Connaissance des écosystèmes |
0,00 |
0,00 |
- |
- |
Remise en bon état des écosystèmes |
0,00 |
2,00 |
- |
- |
|
Sous-total action 8 |
0,00 |
2,00 |
- |
- |
|
Total programme 113 - PEB |
277,16 |
276,02 |
277,02 |
275,92 |
Source : commission des finances, d'après les documents budgétaires
1. Un programme avant tout consacré à la gestion intégrée de la ressource en eau et à la protection de la biodiversité
Ce programme se décompose en trois actions 24 ( * ) :
- l'action 1 « Sites, paysages, publicité » , qui recouvre les activités de protection et de gestion des sites classés ;
- l'action 2 « Logistique, formation et contentieux » , qui porte sur les dépenses de fonctionnement courant (formation, communication, frais de déplacement...) d'une part et de contentieux (ingénierie publique concurrentielle, eau et biodiversité, sites, publicité) d'autre part ;
- l'action 7 « Gestion des milieux et biodiversité » , qui a pour finalités l'application du contenu des directives communautaires dans les domaines de l'eau et de la nature, la mise en oeuvre de la stratégie nationale pour la biodiversité 2011-2010 et les décisions prises lors des conférences environnementales assorties d'une feuille de route, et de contribuer aux actions internationales dans les domaines de l'eau et de la biodiversité.
2. La quasi-reconduction des crédits du programme par rapport à 2014
Le projet de loi de finances pour 2015 propose que le programme 113 « Paysages, eau et biodiversité » reçoive une dotation fixée à hauteur de 277,02 millions d'euros en autorisations d'engagement et à 275,92 millions d'euros en crédits de paiement . Ces montants sont quasiment stables par rapport à l'année dernière.
S'agissant de la nature des dotations, on constate que le principal poste, à hauteur de 106,93 millions d'euros en AE et 106,53 millions d'euros en CP est consacré à l'action 7 « gestion des milieux et biodiversité » qui concerne tout particulièrement les espaces protégés .
Une telle ventilation semble ainsi répondre aux priorités de cette année 2015 pour laquelle le Gouvernement entend respecter tout particulièrement ses engagements souscrits au niveau européen dans les domaines de la gestion intégrée de la ressource en eau et de la préservation de la biodiversité.
Une telle priorité s'inscrit également dans le contexte de la mise en oeuvre des objectifs de moyen à long termes de deux directives, à savoir la directive-cadre 2000/60/CE du 23 octobre 2000, dite directive-cadre sur l'eau, et la directive-cadre 2008/56/CE du 17 juin 2008 sur une stratégie pour le milieu marin, dite DCSMM, sur une période de dix à douze ans suivant leur transposition.
On peut toutefois observer que le projet de loi relatif à la biodiversité, qui devait permettre la cohérence de l'action dans ce domaine, a été délibéré par le Conseil des ministres le 26 mars 2014 et que la commission du développement durable de l'Assemblée nationale a établi son texte le 26 juin 2014. Ce texte n'a pas été inscrit à l'ordre du jour du l'Assemblée nationale.
La poursuite de la mise en oeuvre de la directive-cadre 2008/56/CE du 17 juin 2008 sur une stratégie pour le milieu marin La directive-cadre « Stratégie pour le milieu marin » (2008/56/CE), dont l'objectif est de parvenir à un bon état écologique du milieu marin européen au plus tard en 2020 et qui concerne l'ensemble des activités, s'inscrit sur une durée de près de douze ans. Elle implique l'élaboration de stratégies coordonnée s entre les différents États-membres et destinées à protéger, voire à restaurer, les écosystèmes marins d'Europe ainsi qu'à assurer la viabilité écologique des activités marines. À cet effet, chaque État concerné a constitué des sous-régions marines et élaboré un plan d'action pour le milieu marin (PAMM) spécifique. La mise en oeuvre progressive des PAMM a reposé sur une première série d'actions initiées en 2012, à savoir l'évaluation initiale de l'état écologique des eaux marines et de l'impact environnemental des activités humaines sur ces eaux, la définition du bon état écologique pour ces mêmes eaux reposant sur des descripteurs qualitatifs, ainsi que la définition d'objectifs environnementaux et d'indicateurs associés en vue de parvenir à un bon état écologique du milieu marin. La période 2013-14 a quant à elle été marquée par la définition de programmes de surveillance en vue de l'évaluation permanente de l'état des eaux marines et de la mise à jour périodique des objectifs. L'ensemble de ces mesures doit aboutir à l'adoption d'un programme d'actions satisfaisant les critères de bon état écologique des eaux marines en 2015 et 2016. Source : site Internet de la Commission européenne |
En outre, votre rapporteur spécial ne peut que s'inquiéter du montant conséquent des restes à payer indiqué par le suivi des crédits de paiement associés à la consommation des autorisations d'engagement (hors titre 2).
S'il est vrai que l'évaluation des engagements des années antérieures non couverts par des paiements baisse globalement entre 2012 et 2013 de près de 37 % (70,7 millions d'euros), celle-ci est de nouveau orientée à la hausse entre 2014 et 2015. Ce sont ainsi plus de 143 millions d'euros d'engagements non couverts par des paiements au 31 décembre 2014 25 ( * ) , c'est-à-dire environ la moitié de la dotation en crédits de paiements du programme en 2015, qui s'établit à 275 millions d'euros .
Une telle situation devrait conduire à la préemption des futurs crédits de paiement pour solder des engagements antérieurs, au risque de contrarier la réalisation de nouveaux projets.
Le projet de loi de finances pour 2015 présente une évolution contrastée des crédits selon les différentes actions du programme.
a) « Sites, paysages, publicité » (action 1)
L'action 1 représente 2,2 % des crédits du programme, pour un montant de 6 millions d'euros en AE (+ 10,3 % par rapport à 2014) et en CP (- 5,1 % par rapport à 2014).
Cette action vise à inciter les acteurs concernés par la conservation des sites et paysages, considérés comme remarquables et exceptionnels, et impliqués dans la gestion des paysages plus communs à adopter des mesures de protection ou de gestion.
L'importance du rôle des collectivités territoriales, notamment pour ce qui concerne la gestion de sites classés, qu'ils relèvent du patrimoine national (Grands sites de France) ou mondial (UNESCO), légitime ainsi qu'elles bénéficient d'un transfert de 1,48 million d'euros d'autorisations d'engagement et de crédits de paiement.
Il n'est pas certain que les crédits prévus par le Gouvernement soient en rapport avec les charges supportées par les collectivités territoriales pour faire face aux impératifs de gestion consécutifs à l'accroissement prévu du nombre de sites classés, ce qui constitue une nouvelle illustration de l'effet de ciseau entre l'attrition des concours de l'État aux collectivités et l'augmentation des dépenses mises à leur charge.
b) « Logistique, formation et contentieux » (action 2)
L'action 2 représente 2,1 % des crédits du programme, pour un montant de 5,93 millions d'euros en AE et CP , soit une baisse respective de 8 % et de 3 %.
Cette tendance baissière peut ainsi s'expliquer par la baisse relative de la sous-action 1 consacrée au « fonctionnement courant et logistique » contribuant pour partie au financement de l'exposition universelle de Milan prévue en 2015.
Alors que les frais de représentation de communication et de mission de la direction générale représentent globalement, pour l'année 2015, 1,86 million d'euros en AE et 1,43 million d'euros en CP 26 ( * ) , ce seront près de 93 750 euros d'AE et 420 625 euros de CP qui couvriront la contribution 2015 du programme 113 à la participation française à l'exposition universelle de Milan.
Cette baisse contraste toutefois avec la forte hausse des crédits affectés au règlement des contentieux lequel, avec un montant de l'ordre de 3,73 millions d'euros pour 2015, constitue le poste le plus élevé de cette sous-action.
S'il est vrai que ces crédits regroupent les dotations nécessaires au règlement des litiges relevant de divers contentieux relatifs à la mise en oeuvre de programmes (ingénierie publique concurrentielle, sites, publicité, eau et biodiversité) qui sont provisionnés dès lors que la probabilité de condamnation de l'État par les instances communautaires est estimée supérieure à 50 %, on est toutefois en droit de s'interroger sur la cohérence de la politique conduite depuis 2012 avec les engagements qui sont ceux de la France, au regard des actions contentieuses se soldant par un surcoût, qui peut être prévenu bien en amont, pour les finances publiques.
c) « Gestion des milieux et biodiversité » (action 7)
L'action 7 représente 95,7 % des crédits du programme, pour un montant de 265 millions d'euros en AE (- 0,34 % par rapport à 2014), et de 263,9 millions d'euros en CP (- 0,07 % par rapport à 2014).
À cette dotation doivent s'ajouter des fonds de concours et attributions de produits à hauteur de 2,1 millions d'euros en AE et de 17 millions d'euros en CP .
Ces fonds destinés aux dépenses d'investissement devraient provenir des Agences de l'eau Adour-Garonne, Loire-Bretagne, Rhône-Méditerranée-Corse ainsi que Seine-Normandie. S'il est vrai que ces financements sont voués à financer les opérations d'investissement définies par la politique de restauration de la continuité écologique des cours d'eau, un tel prélèvement risque de priver ces agences de mobiliser les moyens nécessaires à la mise en oeuvre du plan national d'action pour la restauration de la continuité écologique des cours d'eau et ainsi d'empêcher la France d'honorer ses engagements européens dans ce domaine.
Ainsi, force est de constater que le prélèvement, annoncé pourtant comme exceptionnel pour 2014, de 210 millions d'euros sur le fonds de roulement des agences effectué est renouvelé en 2015, à hauteur de 175 millions d'euros. La réitération d'une telle démarche place ces établissements dans une situation difficile. En effet, on ne peut exclure que de telles ponctions récurrentes sur leur fonds de roulement risquent d' obérer la capacité de ces agences de l'eau à conduire leurs interventions en matière d'assainissement ou d'entretien du réseau potable, où elles agissent aux côtés des collectivités territoriales. À cet égard, votre rapporteur spécial se fait l'écho des craintes évoquées par l'Association des Maires de France sur cette question 27 ( * ) .
Par ailleurs, cinq sous-actions se partagent les crédits du programme :
- la sous-action « milieux et espaces marins » reçoit 4,58 millions en AE et 4,38 millions en CP, qui serviront notamment à poursuivre les actions déjà engagées pour le littoral et la gestion du trait de côte 28 ( * ) ;
- la sous-action « mesures territoriales dans le domaine de l'eau » sera abondée à hauteur de 9,8 millions d'euros en AE et CP , avec comme poste le plus important, doté de 3,67 millions d'euros en AE et CP, le financement des dépenses afférentes à l'exercice régalien de la police de l'eau et de la nature , au titre de la directive de 2008 sur le droit pénal environnemental 29 ( * ) et des différentes directives sectorielles ;
- la sous-action « Trame verte et bleue 30 ( * ) et espaces protégés » reçoit une dotation de 2,92 millions d'euros en AE et CP ;
- la sous-action « Natura 2000 » reçoit 13,15 millions d'euros en AE et 13,3 millions d'euros en CP pour partie affectés à la réalisation des documents d'objectif (DOCOB) triennaux qui devront être adoptés par la totalité des 1 750 sites classés Natura 2000 ;
- la sous-action « Connaissance et préservation de la biodiversité » reçoit 2,15 millions d'euros en AE et en CP principalement destinés au financement de l'amélioration de la connaissance identifiée par la stratégie nationale pour la biodiversité comme un élément clé.
En outre, l'action 8 « Fonds d'investissement pour la biodiversité et la restauration écologique » , qui était abondée à hauteur de deux millions d'euros de crédits de paiement en 2014, est supprimée , contribuant ainsi à la simplification de l'architecture du programme.
* 23 Le programme 203 « Infrastructures et services de transport » et le programme 205 « Sécurité et affaires maritimes, pêche et aquaculture » font l'objet du rapport de notre collègue Marie-Hélène Des Esgaulx, tandis que le programme 170 « Météorologie » est analysé par notre collègue Vincent Capo-Canellas.
* 24 L'action 8 « Fonds d'investissement pour la biodiversité et la restauration écologique », qui portait, dans la loi de finances pour 2014, sur les crédits de paiement destinés à couvrir les dépenses engagées en 2012 et 2013, disparaît dans la maquette 2015.
* 25 Comme chaque année, il s'agit principalement des contrats NATURA 2000 (32 % du total), de la Trame verte et bleue (22 %) ainsi que des mesures territoriales dans le domaine de l'eau et des espaces marins (20 %).
* 26 Contre 1,38 million d'euros en AE et 1,03 million d'euros en CP pour l'année 2014.
* 27 Communiqué de l'Association des maires de France (AMF), en date du14 octobre 2014.
* 28 La gestion du trait de côte recevant une dotation à hauteur de 2,70 millions d'euros en AE et 2,43 millions d'euros en CP pour 2015.
* 29 Directive 2008/99/CE du Parlement européen et du Conseil du 19 novembre 2008 relative à la protection de l'environnement par le droit pénal.
* 30 La constitution d'une Trame verte et bleue comme outil d'aménagement du territoire a pour finalité de créer des continuités territoriales, conformément aux préconisations du Grenelle de l'environnement et aux dispositions des articles L. 371-1 et suivants du code de l'environnement.