EXAMEN EN COMMISSION
Réunie le mercredi 13 novembre 2013, la commission a procédé à l'examen du rapport sur la proposition de loi n° 47 (2013-2014) relative à la prévention des inondations et à la protection contre celles-ci.
M. Raymond Vall , président . - Nous avons désigné il y a quelques semaines Louis Nègre rapporteur de ce texte. Je lui laisse la parole pour nous présenter son rapport et nous expliquer en détail les objectifs poursuivis par la proposition de loi de notre collègue Pierre-Yves Collombat.
M. Louis Nègre , rapporteur . - Ce texte a pour ambition de mettre en oeuvre les préconisations du rapport publié le 24 septembre 2012, à la suite des travaux de la mission commune d'information sur les inondations dans le Var et le Sud-est de la France, que j'ai eu l'honneur de présider et dont Pierre-Yves Collombat était rapporteur. Notre constat était le suivant : si les dispositifs de gestion immédiate de l'urgence et de l'indemnisation après-crise existent et peuvent être améliorés, la politique de prévention des inondations est pratiquement inexistante dans notre pays.
Quels en sont en effet les résultats ? Fin février 2010, tempête Xynthia, cinquante-trois morts, 700 millions d'euros de dégâts. Les 15 et 16 juin 2010, à Draguignan et dans la basse vallée de l'Argens, dans le Var, vingt-trois morts, deux disparus, 1,2 milliard d'euros de dégâts. En novembre 2011, dans la basse vallée de l'Argens et le Sud-Est de la France, quatre morts, 500 à 800 millions d'euros de dégâts. En décembre 2011, inondations dans les Vosges. En octobre 2012, pluies torrentielles sur La Garde et Toulon, deux morts. En octobre et novembre 2012, inondations dans le Pas-de-Calais. En juin 2013, inondations en Haute-Garonne et dans les Hautes-Pyrénées, 127 communes sinistrées, 134 millions d'euros de dégâts. Fin octobre 2013, inondations dans la Drôme et l'Ardèche. Voilà le contexte. Voilà la litanie des conséquences qui doit nous faire prendre conscience du problème. On constate en moyenne un milliard d'euros de dégâts chaque année du fait des inondations, sans parler des pertes humaines. L'ensemble des assurés, par l'intermédiaire de surprimes de cotisations, finance l'indemnisation à hauteur de 500 millions par an. Nous ne pouvons pas continuer ainsi. On traite les conséquences des inondations, mais on n'effectue aucune prévention en amont.
C'est pourquoi la présente proposition de loi est articulée en trois volets : la prévention des inondations, la gestion des situations de crise et pour finir, l'après-crise.
Je serai très bref sur le premier volet concernant la prévention des inondations. En effet, ces dispositions ont déjà été adoptées par le Sénat, dans le cadre de la deuxième lecture du projet de loi d'affirmation des métropoles. Il s'agit de clarifier l'exercice des missions en matière de prévention des inondations. À ce jour, aucune politique globale n'est menée, notamment du fait de l'absence d'une compétence clairement définie et attribuée. La compétence « gestion des milieux aquatiques et prévention contre les inondations » est donc créée, avec, si nécessaire, un financement adapté. Cette compétence, confiée aux intercommunalités, a vocation à être exercée par des établissements publics territoriaux de bassin, au niveau des grands fleuves, et par des établissements publics d'aménagement et de gestion de l'eau, au niveau des sous-bassins fluviaux. La gestion des ouvrages et équipements de prévention a été rationalisée. Il est prévu que l'ensemble du dispositif entre en vigueur de manière progressive, afin de laisser aux collectivités le temps de s'adapter. Je vous proposerai donc, par cohérence juridique, de supprimer ces articles, déjà votés par le Sénat dans le texte métropoles. Il s'agit des articles 1 er à 5, 13 et 14.
L'article 6 propose de donner une définition législative à la notion de cours d'eau, sur la base des critères dégagés par la jurisprudence. Cela permettra de clarifier les responsabilités des différents acteurs, dans un contexte où les contentieux liés à la police de l'eau ont tendance à se généraliser. Je vous proposerai d'adopter un amendement pour combler l'oubli d'un critère important de définition des cours d'eau : l'écoulement peut en effet ne pas être permanent tout au long de l'année, en particulier sur le pourtour méditerranéen et dans les outre-mer.
L'article 7 prévoit une élaboration conjointe des plans de prévention des risques naturels prévisibles, entre l'État et les collectivités territoriales, et une simplification des procédures de révision de ces plans. L'objectif de l'auteur du texte, et j'y souscris pleinement, est de garantir une meilleure association des élus locaux à l'élaboration des PPRI, afin de réduire le caractère particulièrement conflictuel de cette procédure.
Je vous proposerai cependant un amendement de réécriture de cet article. En effet, la formulation retenue fait référence à une élaboration conjointe des plans. Cette notion d'élaboration conjointe soulève des problèmes sérieux en termes de responsabilité pénale et civile des élus. C'est pourquoi il est préférable de supprimer ces mots et de préciser à l'article L. 562-3 du code de l'environnement, relatif à l'élaboration des plans de prévention, que les collectivités sont associées à l'élaboration des plans, avant leur prescription, et à chaque étape de leur élaboration. L'amendement précise également que la population doit être informée et consultée, conformément à ce que recommandait le rapport de notre mission d'information.
L'article 8 augmente la représentation des élus locaux au sein des instances délibérantes des comités de bassin et des agences de l'eau, afin de les rendre majoritaires. Il est, je crois, très important que les élus soient mieux associés également à ce niveau de décision. Vous l'aurez compris, à travers cette proposition de loi, le but est que les élus locaux aient davantage un droit de regard sur la politique de prévention.
J'en arrive au deuxième volet du texte, consacré à la gestion de crise à proprement parler. L'article 9 vise à mieux associer les maires à la conduite des opérations de secours par le préfet. Ce n'est pas toujours le cas sur le terrain, et aucun texte ne prévoit formellement, à ce jour, une telle information. Je vous proposerai ici un amendement de clarification : la rédaction de l'article indique que les préfets assurent la direction des opérations en liaison avec les maires. Les mots « en liaison » semblent laisser entendre qu'il existe une co-direction des opérations de secours et donc à nouveau une co-responsabilité. Ce n'est pas l'objectif visé. Je vous propose de sécuriser la rédaction et de préciser que le préfet doit être en contact régulier avec les maires, si les moyens de communication le permettent.
L'article 10 vise les réserves communales de sécurité civile. L'article L. 724-1 du code de sécurité intérieure est réécrit pour préciser notamment que ces réserves peuvent intervenir hors des limites de la commune. Cette disposition va dans le sens d'une meilleure réactivité en cas de crise sur le terrain et d'une aide aux communes voisines. Je vous proposerai toutefois de préciser par amendement que l'intervention hors de la commune ne peut se faire qu'avec l'accord écrit, par mail par exemple, des maires concernés. Cela me semble important, notamment au regard du principe constitutionnel de libre administration des collectivités territoriales.
L'article 11 réécrit l'article L. 125-1 du code des assurances pour prévoir que l'arrêté interministériel constatant l'état de catastrophe naturelle ne peut être pris qu'après avis d'une « commission permanente composée notamment de représentants des collectivités territoriales, de représentants d'entreprises d'assurances et de personnalités qualifiées ». Il est important, là encore, d'associer les parties prenantes à la prise de décision. Je vous soumettrai un amendement renvoyant à un décret le soin de préciser le détail de la composition de cette commission permanente. L'amendement supprimera également la dernière phrase de l'article qui précise que l'arrêté interministériel est susceptible de recours, dans la mesure où il s'agit là du droit commun.
L'article 12 prévoit la création d'une commission de suivi des opérations liées à l'après-crise, présidée par le préfet. Il s'agit là d'une disposition unanimement réclamée par les élus et par les sinistrés. Cette commission permettra de faire le point sur l'avancement des travaux, des indemnisations et sera un lieu d'échange et d'information sur tout sujet intéressant les élus et les sinistrés. Il s'agit là d'une grande avancée. Je crois que cet article, en apparence modeste, constituera un progrès important sur le terrain.
Je vous proposerai la suppression des articles 13 et 14, déjà votés dans le cadre du projet de loi métropoles.
Le dernier volet du texte porte sur les dispositions relatives à l'indemnisation. L'article 15 supprime l'exigence de la parution d'un décret qui conditionne, actuellement, le bénéfice du remboursement anticipé par le fonds de compensation pour la TVA des dépenses d'investissement faites par les communes en réparation des dégâts causés par des intempéries exceptionnelles. Je vous proposerai d'adopter cet article sans modification.
L'article 16 permet de déroger aux règles de publicité et de mise en concurrence du code des marchés publics en cas de situation d'urgence impérieuse résultant, notamment, d'une catastrophe naturelle. Cette disposition dérogatoire est bienvenue dans son esprit, mais est déjà prévue par l'article 35 du code des marchés publics, de nature réglementaire. Le seul effet juridique de la proposition de loi est donc de l'élever au niveau législatif, sans rien changer au fond du droit existant. Cela me paraît excessif, et je vous proposerai donc la suppression de cet article.
L'article 17 instaure une assurance habitation obligatoire pour les propriétaires. L'objectif est de porter à 100 % un taux de couverture des propriétaires qui est déjà très élevé sur une simple base volontaire, de l'ordre de 98 %. J'y étais dans un premier temps favorable. Toutefois, cette nouvelle assurance obligatoire présente des inconvénients d'ordres juridique et pratique. Juridiquement, les principes du droit national et européen ne permettent pas d'instaurer une assurance obligatoire pour d'autres risques que ceux encourus au titre de la responsabilité civile des assurés à l'égard des tiers. Pratiquement, l'application effective de cette nouvelle obligation aux 2 % de propriétaires qui ne sont pas encore assurés nécessiterait un dispositif de contrôle onéreux, dont le coût serait égal voire supérieur au surcroît de primes espéré. Et son efficacité serait de toute façon douteuse, puisque ce taux de 2 % semble correspondre au minimum incompressible des récalcitrants à tout dispositif d'assurance obligatoire, comme le montre l'exemple de l'assurance automobile obligatoire. En conséquence, je vous proposerai la suppression de cet article.
L'article 18, d'une part, prévoit une modulation de la surprime d'assurance contre les risques de catastrophe naturelle en fonction des efforts des assurés pour renforcer leur propre protection, d'autre part, interdit toute modulation des franchises d'assurance en fonction de l'absence d'un plan de prévention des risques naturels dans la commune ou du nombre d'événements calamiteux constatés dans le passé. Le second volet de cet article mérite d'être approuvé, car cette modulation des franchises est une forme de sanction injuste pour les assurés, qui ne peuvent être tenus personnellement responsables ni de l'incurie des pouvoirs publics, ni de l'acharnement du sort sur leurs biens. Quant au premier volet, la modulation de la surprime sera inopérante compte tenu du niveau modeste de celle-ci, de l'ordre de 25 euros pour un contrat multirisques habitation standard. Je vous proposerai donc un amendement qui fera porter la modulation sur la prime de base, qui pourra être réduite si l'assuré veille à renforcer sa protection contre les catastrophes naturelles, en application de l'article L. 113-4 du code des assurances.
L'article 19 prévoit que l'obligation de couvrir les risques de catastrophes naturelles ne s'impose pas aux entreprises d'assurance pour les biens construits et les activités exercées en violation des lois et règlements en vigueur. Actuellement, les assureurs ne peuvent refuser la garantie catastrophe naturelle qu'aux biens immobiliers et activités implantés dans des zones classées inconstructibles par un plan de prévention ou en violation des règles administratives tendant à prévenir les dommages causés par une catastrophe naturelle. L'élargissement proposé de cette clause à toutes les formes de violation des lois et règlements me paraît excessive, car les assureurs trouveront toujours moyen d'invoquer une irrégularité quelconque pour refuser de faire jouer la garantie. Par exemple, une entreprise qui violerait le droit du travail ou une construction qui ne respecterait pas la réglementation thermique pourraient se voir privées de la garantie « catastrophe naturelle » ! Je vous proposerai donc de réserver l'hypothèse d'un retrait de la garantie au seul cas d'un bien immobilier construit dans une zone classée inconstructible par un plan de prévention, tout en lui donnant un caractère automatique.
L'article 20 prévoit que les aides versées par le Fonds d'intervention pour les services, l'artisanat et le commerce en cas de catastrophe naturelle doivent être calculées en tenant compte des franchises d'assurance appliquées dans le régime des catastrophes naturelles. Cela me semble équitable, et je vous proposerai d'adopter cet article sans modification.
L'article 21 vise à étendre le bénéfice du régime des catastrophes naturelles aux dommages relevant actuellement du régime des calamités agricoles. Tout en partageant l'objectif d'améliorer la couverture des agriculteurs contre les risques de catastrophe naturelle, je ne pense pas que ce soit la bonne méthode. Cette extension de son champ aurait pour effet de déséquilibrer gravement sur le plan financier le régime des catastrophes naturelles, et il faudrait alors soit augmenter la surprime, soit réduire le niveau des indemnisations. Lors des auditions des cabinets ministériels, nous avons appris que le Gouvernement avait engagé une réflexion pour améliorer, comme nous le souhaitons tous, le régime des calamités agricoles, aujourd'hui bien insuffisant. De plus, le régime actuel fait également intervenir de manière très complexe des fonds européens. Il est, c'est clair, urgent d'améliorer ce régime et le Gouvernement devra s'engager lors de la discussion en séance à prendre les mesures nécessaires. Mais, en l'état, je vous proposerai la suppression de cet article.
Enfin, l'article 22 est la traditionnelle disposition de gage, par une majoration des droits sur les tabacs, des éventuelles conséquences financières de la proposition de loi pour les collectivités territoriales.
M. Jean-Jacques Filleul . - Le groupe socialiste partage l'avis de Louis Nègre sur le fond et soutient globalement l'esprit des amendements proposés. Je ne reviens pas sur la décentralisation des compétences, qui est une réalité. La Loire n'a pas débordé depuis 1860 et pourtant tout le monde s'en préoccupe.
La définition du cours d'eau à l'article 6 est utile. Je suis également d'accord avec la nécessité d'expliciter la notion d'élaboration « conjointe » à l'article 7, afin de clarifier le régime de responsabilité. Je m'interroge sur la portée juridique de l'expression « aussi précocement que possible » en matière d'association de la population. Je suis favorable à l'amendement de précision à l'article 9, afin de ne pas surcharger la responsabilité des maires. En revanche, quel est le statut juridique de la cellule de crise ? La suppression de l'article 16 me semble pertinente, pour ne pas être redondant avec le droit en vigueur. Enfin, la question de l'indemnisation et des assurances est extrêmement complexe : je salue le travail du rapporteur sur ce point et souscris aux amendements proposés.
M. Charles Revet . - Le groupe UMP s'associe à la démarche du rapporteur et votera également ce texte. En matière de prévention, je ne suis pas certain que l'on soit arrivé jusqu'au bout de la logique. Il y a encore beaucoup de travail à faire pour analyser, par exemple, l'incidence des pratiques agricoles sur l'érosion des sols et les inondations.
M. André Vairetto . - Je salue l'implication au long cours du rapporteur sur ce sujet sensible des inondations. Comme l'a dit Jean-Jacques Filleul, le groupe socialiste votera ce texte. J'ai simplement quelques précisions à apporter.
En ce qui concerne le transfert aux EPCI de la compétence en matière de gestion des milieux aquatiques et de prévention des inondations, je rappelle que la commission n'avait à l'époque pas suffisamment d'éléments pour se prononcer sur cette question. L'évaluation technique ne nous avait été fournie par l'administration qu'au moment du passage en séance plénière, et avait alors permis le vote de ces dispositions. Mais n'oublions pas non plus que les premières personnes en charge de l'entretien des cours d'eau sont les riverains.
Sur le plan financier, le transfert des digues aux intercommunalités représente un poids considérable. L'intervention de l'État est certes maintenue, par le biais de mécanismes comme le fonds Barnier ou les plans d'action et de prévention des inondations (PAPI), mais les craintes subsistent. Il serait également souhaitable de réfléchir à un dispositif de péréquation pour la taxe créée.
L'idée d'associer l'ensemble des parties prenantes à la gestion du risque inondation est positive, mais il ne faut pas que cela induise des responsabilités supplémentaires, notamment pénales, pour les élus.
En revanche, l'augmentation de la représentativité des collectivités dans le comité de bassin me paraît prématurée. Pourquoi ne pas attendre les conclusions du rapport Lesage pour prendre en compte les évolutions suggérées en matière de gouvernance de la politique de l'eau ?
Enfin, la création d'une commission permanente à l'article 11 me laisse perplexe. Il faut veiller à ne pas alourdir le processus de décision.
Mme Évelyne Didier . - Je vais m'abstenir sur ce texte qui me laisse dubitative. Les situations à prendre en compte sont extrêmement variées, entre les tempêtes, la montée des eaux, les hausses de nappes phréatiques, etc. On se heurte parfois à des problèmes d'ordre purement technique. Par exemple, les cartes des PPRI sont établies au 1/10 000 ème , ce qui veut dire que selon la manière dont on interprète l'épaisseur du trait, une propriété peut être incluse ou non dans le périmètre. Sans doute faudrait-il des cartes plus fines. Quant à la question de la constructibilité, celle-ci se gère directement au niveau du PLU.
M. Louis Nègre . - Mes propositions concernent les gens qui construisent illégalement, sans permis.
M. Raymond Vall , président . - Et cela existe !
Mme Évelyne Didier . - Cela ne devrait pas exister. Ma commune a racheté et rasé les propriétés en zone inondable, et déplacé les équipements publics. Il faut que les élus veillent à la bonne application des documents d'urbanisme.
M. Raymond Vall , président . - Les choses ne sont pas toujours aussi simples. Dans ma commune, une centaine de maisons sont construites le long d'une canalisation d'évacuation des eaux qui fonctionne plutôt bien en temps normal. Mais il arrive que le niveau du Gers soit tel que la canalisation reflue l'eau dans l'autre sens ! Il est parfois difficile de faire le tri entre les constructions légitimes et les constructions illégitimes. La police du PLU demande des moyens que toutes les communes sont loin d'avoir.
Mme Évelyne Didier . - En termes de calendrier, je trouve également que cette proposition de loi arrive un peu tôt. Il aurait fallu attendre les conclusions des Assises nationales des risques naturels des 2 et 3 décembre prochains.
Surtout, je m'inquiète de l'esprit de ce texte qui consacre le désengagement de l'État. On reporte la politique de prévention sur les collectivités, notamment en matière de digues, qui sont très coûteuses. Ne pourrait-on pas, en considérant les effets vertueux de cette politique, mobiliser une aide du secteur assurantiel ?
M. Henri Tandonnet . - Il est toujours délicat de trouver un juste équilibre entre prévention et solidarité nationale.
Le Sénat a voté le transfert au bloc communal de la compétence de gestion des milieux aquatiques. On ne va pas revenir dessus, mais il n'est pas certain que l'Assemblée nationale suivra cette démarche.
En ce qui concerne la définition du cours d'eau donnée à l'article 6, sera-t-elle incorporée dans le code de l'environnement ou ne s'appliquera-t-elle que dans le cadre de cette loi ? Je suis favorable à une approche large, d'autant plus que cette définition ne fait que reprendre les critères de la jurisprudence. Quant à l'article 7, il faut être vigilant sur sa compatibilité avec la directive cadre sur les inondations.
Je suis d'accord avec la définition proposée à l'article 19, qui consiste à exclure les constructions illégales du droit à indemnisation. En revanche, comment définir, à l'article 18, les travaux de « nature à prévenir les inondations » pour moduler les cotisations ? Cette disposition me semble difficile à mettre en oeuvre.
Je souhaiterais enfin davantage de précisions sur la nature du lien entre catastrophes naturelles et calamités agricoles à l'article 21.
M. Louis Nègre . - Je vais être bref dans mes réponses et revenir globalement sur la philosophie du texte. Les élus locaux ne sont pas satisfaits du cadre actuel. Avec Pierre-Yves Collombat, nous souhaitons simplement définir un cadre qui leur permette de s'engager et de prendre leurs responsabilités en matière de gestion des risques aquatiques.
Cette proposition de loi ne s'adresse pas aux élus déjà vertueux. Elle vise surtout à définir un socle minimal pour protéger les personnes et les biens. Je rappelle que la destruction de valeur en raison des inondations est considérable en France, de l'ordre d'un milliard d'euros chaque année. Il faut engager un cycle vertueux, où les efforts de prévention permettent une baisse des primes d'assurance, qui finance à son tour la prévention. L'objectif de la proposition de loi est d'enclencher cette dynamique. Avec en perspective le modèle hollandais, qui est le plus sophistiqué en la matière, étant donné le niveau élevé du risque inondation dans ce pays.
EXAMEN DES ARTICLES
Article 1 er
L'amendement n° 19 est adopté et l'article 1 er est supprimé.
Article 2
L'amendement n° 20 est adopté et l'article 2 est supprimé.
Article 3
L'amendement n° 21 est adopté et l'article 3 est supprimé.
Article 4
L'amendement n° 22 est adopté et l'article 4 est supprimé.
Article 5
L'amendement n° 23 est adopté et l'article 5 est supprimé.
M. Louis Nègre . - L'amendement n° 24 a deux objectifs : placer la définition du cours d'eau dans le code de l'environnement, dans la section relative à la police et à la conservation des eaux, et compléter la définition du cours d'eau. Le texte de la proposition de loi, reprenant les critères dégagés par la jurisprudence, distingue la nécessité d'un lit naturel et d'un débit suffisant la majeure partie de l'année. Il semble important d'y ajouter un autre élément constant dans la jurisprudence, qui est qu'un cours d'eau peut ne pas avoir un écoulement constant toute l'année, notamment dans les outre-mer ou sur le pourtour méditerranéen.
Mme Esther Sittler . - Il peut aussi y avoir un simple manque d'entretien qui empêche l'eau de s'écouler.
M. Raymond Vall , président . - On parle ici de la seule définition du cours d'eau, et non de la conséquence de certaines négligences.
M. Louis Nègre . - Il ne s'agit que d'une codification de la jurisprudence.
Mme Évelyne Didier . - Je rappelle qu'en 2006, lors du débat sur la loi sur l'eau, nous n'avions pas réussi à réunir un consensus sur ce point.
L'amendement n° 24 est adopté et l'article 6 ainsi rédigé.
M. Louis Nègre . - L'amendement n° 25 réécrit l'article 7 en poursuivant plusieurs objectifs.
La formulation initiale de la proposition de loi fait référence à une élaboration conjointe des plans de prévention des risques naturels prévisibles par l'État et les collectivités territoriales. Cette élaboration conjointe soulève des problèmes sérieux en termes de responsabilité pénale et civile des élus. Or, l'objectif des auteurs du texte est de mieux associer les élus à l'élaboration de ces plans, dont la responsabilité doit être assumée entièrement par l'État. C'est pourquoi il est préférable de préciser à l'article L. 562-3 du code de l'environnement, relatif à l'élaboration des PPRN, que les collectivités sont associées à l'élaboration des plans, avant leur prescription, et à chaque étape de leur élaboration. L'amendement précise également que la population est informée et consultée, conformément aux recommandations du rapport de la mission d'information et à la rédaction initiale du présent article.
L'alinéa 5 de l'article précise que le PPRN identifie la nature du risque prévisible et que la population est associée à la détermination du risque. Cet alinéa est reformulé, et la référence à la participation du public est supprimée puisque satisfaite par ailleurs par l'amendement. L'alinéa 8 est supprimé par cohérence, puisqu'il fait référence à l'élaboration conjointe du PPRN.
L'alinéa 10 est satisfait par le droit en vigueur : il est déjà possible, en vertu de l'article L. 562-4-1 relatif à la procédure de révision des PPRN, d'utiliser la procédure simplifiée de modification pour tout changement du plan qui ne remet pas en cause son économie générale.
J'insiste particulièrement sur ce point. La proposition de Pierre-Yves Collombat est encore plus restrictive que le droit actuel, en ajoutant deux critères supplémentaires. Je propose d'en revenir au droit existant afin de limiter les entraves à la mise en oeuvre du droit de révision des PPRN, dont la possibilité concrète fait déjà l'objet de nombreux doutes chez les élus locaux.
M. Henri Tandonnet . - A juste titre ! Une fois que les services de l'État ont élaboré le PPRI, ils refusent de le modifier. Les collectivités n'ont en pratique aucune capacité concrète d'initiative en la matière.
M. Jean-Jacques Filleul . - Il est impératif de pouvoir faire évoluer les PPRI.
M. Raymond Vall , président . - Il y a effectivement un problème de bonne volonté de l'État. Louis Nègre veut donner plus de moyens aux élus pour faire évoluer les choses.
M. Louis Nègre . - Je conçois que le cadre actuel est difficile à mettre en oeuvre. Il faut peut-être réfléchir à un droit d'initiative plus concret des collectivités pour la révision des PPRI.
M. Raymond Vall , président . - L'élu doit pouvoir montrer à ses concitoyens qu'il a pris ses responsabilités.
M. Louis Nègre . - Je vous propose donc de conserver cet amendement en l'état, et je m'engage à préparer un autre amendement pour la séance publique pour donner la possibilité aux collectivités de demander la révision des PPRI, après avoir travaillé avec les services de l'État sur les modalités concrètes de sa mise en oeuvre.
L'amendement n° 25 est adopté et l'article 7 ainsi rédigé.
Mme Évelyne Didier . - L'amendement n° 1 a simplement pour objectif de signifier que la responsabilisation des collectivités ne doit pas entraîner le désengagement de l'État.
M. Raymond Vall , président . - C'est tout le débat que nous venons d'avoir sur une meilleure association des élus.
M. Henri Tandonnet . - Tout le monde souhaite une augmentation de la représentation des élus locaux.
M. Louis Nègre . - En effet, il est impératif que les élus soient majoritaires dans ce domaine. Je demande le retrait de cet amendement, à défaut mon avis sera défavorable.
Mme Évelyne Didier . - Mon amendement est maintenu.
M. Jean-Jacques Filleul . - Le groupe socialiste s'abstient.
L'amendement n° 1 n'est pas adopté.
L'article 8 est adopté sans modification.
M. Louis Nègre . - L'amendement n° 26 clarifie la signification du terme « en liaison » pour l'organisation des opérations de secours entre le préfet et les maires. Il n'y a pas de commandement partagé.
L'amendement n° 26 est adopté.
L'amendement n° 2, satisfait, devient sans objet.
L'article 9 est adopté ainsi rédigé.
M. Louis Nègre . - L'amendement n° 27 poursuit deux objectifs. Il vise, d'une part, à supprimer l'alinéa 2 : l'article L. 724-1 du code de la sécurité intérieure prévoit déjà que les réserves communales de sécurité civile peuvent être mises en oeuvre par décision motivée de l'autorité de police compétente ; ajouter que cette mise en oeuvre ne peut intervenir que dans le cas où « la probabilité de survenance d'un événement calamiteux exceptionnel est forte » restreint le champ d'action possible des réserves communales, ce qui n'est pas opportun.
Il propose, d'autre part, de préciser les modalités d'intervention des réserves communales hors du territoire de leur commune : afin de respecter le principe de libre administration des collectivités territoriales et de ne pas créer de problèmes de responsabilité pour les élus concernés, l'accord écrit des maires des communes dans lesquelles l'intervention est prévue devra être recueilli avant toute action.
L'amendement n° 27 est adopté et l'article 10 ainsi rédigé.
M. Louis Nègre . - L'amendement n° 28 renvoie à un décret de détail de la composition de la commission permanente consultée avant le constat de l'état de catastrophe naturelle par arrêté interministériel. Il supprime également la dernière phrase qui précise que l'arrêté est susceptible de recours, dans la mesure où il s'agit d'un principe général du droit administratif.
L'amendement n° 28 est adopté.
Mme Évelyne Didier . - L'amendement n° 3 vise à substituer à l'arrêté interministériel actuellement prévu un arrêté du seul ministre chargé de la sécurité civile, plus à même d'apprécier les conséquences et effets des catastrophes naturelles. Il s'agit là d'une proposition formulée à l'époque par Nicole Bricq, pour des raisons d'efficacité.
M. Louis Nègre . - Mon avis est défavorable. L'arrêté constatant l'état de catastrophe naturelle est aujourd'hui un arrêté interministériel, impliquant le ministère de l'intérieur, le ministère de l'économie et le ministère de l'écologie. Il ne semble pas opportun d'exclure ces deux derniers acteurs. En pratique, le pilotage est d'ores et déjà assuré par la direction générale de la sécurité civile au sein du ministère de l'intérieur. En outre, la commission « CATNAT » se réunit tous les mois et fonctionne bien.
L'amendement n° 3 n'est pas adopté.
L'article 11 est adopté ainsi rédigé.
Article 12
L'article 12 est adopté sans modification.
Article 13
L'amendement n° 29 est adopté et l'article 13 est supprimé.
Article 14
L'amendement n° 13 est adopté et l'article 14 est supprimé.
L'amendement n° 10 devient sans objet.
Article 15
L'article 15 est adopté sans modification.
M. Louis Nègre . - Il n'est pas opportun d'élever la règle relative aux marchés publics du niveau réglementaire au niveau législatif.
Les amendements identiques n° s 14 et 11 sont adoptés et l'article 16 est supprimé.
M. Louis Nègre . - Il est inutile de se battre pour les 2 % de récalcitrants qui ne veulent pas s'assurer. La loi doit être pragmatique.
M. Henri Tandonnet . - Ce n'est de toute façon pas le but de cette loi !
L'amendement n° 15 est adopté et l'article 17 est supprimé.
M. Louis Nègre . - L'amendement que je propose vise à faire passer un message de neutralité financière.
L'amendement n° 16 est adopté.
L'amendement n° 12, satisfait, devient sans objet.
L'article 18 est adopté ainsi rédigé.
M. Louis Nègre . - Mon amendement vise à déchoir l'assuré du bénéfice de son assurance en cas de construction illégale.
Mme Évelyne Didier . - Je ne suis pas d'accord, laissons les assurances faire leur propre police.
M. Louis Nègre . - C'est le système actuel. Je suis simplement plus rigoureux.
Mme Évelyne Didier . - Les constructions illégales sont aussi la faute de ceux qui les laissent s'installer.
M. Jean-Jacques Filleul . - Qu'en est-il des constructions anciennes et des caravanes ?
M. Louis Nègre . - On parle des constructions intervenues après l'entrée en vigueur du PPRI et sans autorisation administrative. Quant aux caravanes, cela ne pose pas de problème, du moment qu'elles sont installées légalement.
M. Raymond Vall , président . - Ce système m'inquiète lorsqu'il y a des vies humaines en jeu. Peut-on construire des aires d'accueil en zone inondable ?
M. Jean-Jacques Filleul . - Il en existe beaucoup !
M. Raymond Vall , président . - Il me semble quand même que Louis Nègre atténue sensiblement la portée de l'article 19 de la proposition de loi.
M. Jean-Jacques Filleul . - Dans ce cas, nous suivons sa proposition.
L'amendement n° 17 est adopté et l'article 19 ainsi rédigé.
Article 20
L'article 20 est adopté sans modification.
Article 21
L'amendement n° 18 est adopté et l'article 21 est supprimé.
Article 22
L'article 22 est adopté sans modification.
La proposition de loi est adoptée dans la rédaction issue des travaux de la commission.