D. LE SOUTIEN FINANCIER À L'ÉCONOMIE SOCIALE ET SOLIDAIRE

A la diversité des modèles de l'économie sociale et solidaire répond un foisonnement d'initiatives, aussi bien locales qu'organisées au sein de réseaux nationaux, pour apporter à ces structures une aide au démarrage ou à la croissance.

1. Le dynamisme de la finance solidaire

• De même que l'économie sociale et solidaire répond souvent au besoin de travailleurs de donner du sens à leur activité, la finance solidaire permet à des épargnants de donner à leurs investissements une utilité sociale qu'ils ne trouveraient pas dans des placements financiers traditionnels.

Elle est mise en oeuvre par des institutions qui canalisent cette épargne vers des entreprises et des associations dont l'activité est à forte utilité sociale et environnementale.

La finance solidaire caractérise un degré d'investissement plus fort de l'épargnant que l'investissement socialement responsable (ISR), qui se contente de construire un portefeuille en prenant en compte, en plus des critères financiers, les pratiques environnementales, sociales ou sociétales et de gouvernance de l'entreprise.

D'après le baromètre établi par Finansol, association qui attribue un label aux produits de finance solidaire, l'encours de la finance solidaire était de 4 712 millions d'euros à la fin 2012 , en hausse de 33 % sur un an. L'épargne salariale y participe à hauteur de 2,6 milliards d'euros.

L'épargne solidaire comprend ainsi :

- l'épargne bancaire : épargne de partage (livrets, OPCVM, assurance-vie) et épargne d'investissement solidaire (livrets CODEVair, livrets bancaires solidaires, OPCVM solidaires) ;

- l'épargne salariale : fonds commun de placement d'entreprises solidaires (voir infra ) ;

- dans une moindre mesure, l'épargne dans le capital d'entreprises solidaires.

Cette épargne irrigue in fine des projets liés à l'environnement, à l'emploi, au logement et à la solidarité internationale. Les financements solidaires ont permis de loger 4 400 personnes en 2012, de soutenir 12 000 entreprises et d'approvisionner 4 000 ménages en électricité provenant de sources renouvelables. Ces financements sont aussi tournés vers l'international et soutiennent notamment les institutions de microfinance.

Les acteurs du financement solidaire sont nombreux, depuis les associations locales jusqu'aux grands réseaux nationaux. Hors Corse, quatre financeurs solidaires sont présents dans l'ensemble des régions françaises métropolitaines : l'ADIE (microcrédit pour la création d'entreprise), France Active (aide à la création et au financement des entreprises solidaires), Habitat et Humanisme (logement et insertion des personnes en difficulté) et la Nef (coopérative de finances solidaires pour soutenir la création et le développement d'activités professionnelles et associatives à des fins d'utilité sociale et environnementale).

• S'agissant plus particulièrement de l'épargne salariale , celle-ci fait l'objet d'un dispositif reposant sur l'agrément « entreprise solidaire » , qui trouve son origine dans la loi du 19 février 2001 sur l'épargne salariale.

Cette loi a prévu la possibilité, pour les salariés, de « flécher » une partie de leur épargne vers des fonds investissant dans ce type d'entreprises. Ce fléchage ne peut être que partiel, car les fonds « solidaires » (dits fonds 90/10) ne peuvent investir que de 5 à 10 % de leurs actifs dans des entreprises solidaires.

Pour mémoire, les entreprises solidaires, aux termes du droit actuel, peuvent relever de l'une des deux catégories suivantes :

- soit elles emploient des salariés dans le cadre de contrats aidés ou en situation d'insertion professionnelle ;

- soit elles respectent un écart de rémunération fixé par décret de 1 à 5.

Sont également assimilées à ces entreprises des organismes de financement ou de crédit orientés vers les entreprises solidaires.

Par la suite, le dispositif a pris de l'ampleur. A l'accès à l'épargne salariale, s'est ajouté un accès privilégié à des dispositifs fiscaux de réductions d'impôt sur la fortune (dispositif « ISF-PME ») ou d'impôt sur le revenu (dispositif « Madelin ») au titre d'investissements dans certaines catégories de PME.

Or les débats de 2001 ont montré la difficulté à définir précisément le champ de l'économie solidaire, ce qui justifie sans doute le retour, douze ans plus tard, sur le périmètre des entreprises solidaires identifié à l'époque.

Votre rapporteur a en effet été alerté de la diversité d'interprétation des règles d'attribution de l'agrément selon les territoires, qui permet à des entreprises d'y avoir accès sans qu'elles relèvent véritablement de ce qui en constituait l'esprit à l'origine.

2. Des dispositifs de soutien public en voie de renforcement

Les institutions publiques jouent également un rôle de soutien à l'économie sociale et solidaire.

La Caisse des dépôts et consignations a une mission historique de financement de l'économie sociale et solidaire.

Elle gère pour le compte de l'Etat certains dispositifs : prêts sur le dispositif NACRE (création d'entreprises par des chômeurs ou des allocataires de minima sociaux), gestion du fonds de cohésion sociale ainsi que de l'action « financement de l'ESS » du programme des investissements d'avenir.

Elle procède également à des interventions pour compte propre d'un montant d'environ 45 millions d'euros par an : investissements dans des fonds de prêt d'honneur ou de microcrédits, dans des fonds ou sociétés d'investissements spécialisées dans le financement de l'ESS, ainsi que des subventions.

La Banque publique d'investissement , groupe public au service du financement et du développement des entreprises créé par la loi n° 2012-1559 du 31 décembre 2012, agit en appui des politiques publiques conduites par l'Etat et par les régions.

L'une de ses missions consiste à participer au développement de l'économie sociale et solidaire. OSEO, CDC-Entreprises et le Fonds stratégique d'investissement, regroupés aujourd'hui au sein de BPI-France, ont ainsi financé l'économie sociale et solidaire à hauteur d'environ 95 millions d'euros en 2012.

BPI-France a annoncé la mise en place de nouveaux dispositifs :

- l'accès aux fonds de financement : BPI-France devrait créer un « fonds de fonds » qui financera les différents fonds ciblant les entreprises de l'ESS au sens de l'article premier du projet de loi 8 ( * ) . L'un de ces fonds devrait cibler tout particulièrement les SCOP.

BPI-France estime la capacité d'engagement de ces différents fonds à une somme comprise entre 50 et 100 millions d'euros. La participation de BPI-France sera limitée à une quote-part ;

- l'accès aux prêts bancaires : BPI-France a annoncé la création d'un prêt participatif et solidaire, visant des investissements de 10 000 à 50 000 euros, pour un engagement total de plusieurs dizaines de millions d'euros.

- « crowfunding » : BPI-France a annoncé la mise en place d'un portail numérique permettant de fédérer via Internet de nombreux petits investisseurs (crowdfunding) afin de financer des entreprises relevant de l'économie sociale et solidaire.

Enfin, comme indiqué supra , BPI-France sera amené à gérer le fonds pour l'innovation sociale dont la création a été annoncée par le président de la République le 29 avril dernier.


* 8 Nicolas Durfourcq, directeur général de BPI-France, Rapport sur le financement de l'économie sociale et solidaire par BPI-France , remis au ministre délégué chargé de l'économie sociale et solidaire et de la consommation, 31 mars 2013.

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