B. LES CONSEILLERS D'INSERTION ET DE PROBATION : UN STATU QUO ALARMANT

Chevilles ouvrières de l'aménagement de peine, les services d'insertion et de probation ne bénéficient que de mesures d'une portée très limitée. En effet, les difficultés récurrentes des services pénitentiaires d'insertion et de probation (SPIP) sont mises par le projet de loi de programmation sur le compte de l'inadéquation des méthodes et de l'organisation des services et non des moyens humains. Aucun des acteurs de la chaîne pénale ne peut adhérer à cette analyse.

L' étude d'impact annexée à la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009 estimait nécessaire de réduire de 80 à 60 le nombre de dossiers suivis par chaque conseiller d'insertion et de probation, ce qui supposait la création de 1.000 postes supplémentaires 17 ( * ) .

Ces objectifs ont été oubliés : les créations successives d'ETPT au titre des « métiers de greffe, de l'insertion et de l'éducation » se sont élevées à 148 dans la loi de finances pour 2010, 114 dans la loi de finances pour 2011, 41 seulement dans la loi de finances pour 2012.

Au 1 er janvier 2011, 2.716 conseillers pénitentiaires d'insertion et de probation suivaient 239.996 placés sous main de justice, soit un ratio de 88,4 dossiers par CIP .

Votre rapporteure reste très réservée sur les conclusions de la mission conjointe de l'inspection générale des finances et de l'inspection des services judiciaires qui retient un effectif de référence des personnels d'insertion et de probation de 2.931 à 3.004 ETPT -soit une quasi stabilité au regard des effectifs actuels. Cette évaluation paraît très en retrait par rapport aux indications de l'étude d'impact de la loi pénitentiaire. Le groupe de travail sur les SPIP mis en place au ministère de la justice à la suite de l'affaire dite « de Pornic », sur la base de l'étude menée par la direction interrégionale des services pénitentiaires de Rennes, également utilisée par les inspections, estimait nécessaire d'atteindre un effectif de 3 110 à 3 528 CIP. Soit une insuffisance évaluée de 204 à 622 postes par rapport aux effectifs constatés en juin 2011 (2 716 ETPT).

Suivant les recommandations de cette mission, le projet de loi préconise un renforcement des SPIP par une réorganisation de leur mode de fonctionnement plutôt que par un accroissement de leurs personnels.

1. La mise en place d'équipes mobiles : une formule pour combler les postes vacants ?

L'annexe du projet de loi évoque (alinéa 138) la création d'équipes mobiles pour permettre de répondre aux besoins variables, selon les périodes, d'un SPIP à l'autre. La seule création d'emplois -88 ETPT- envisagée pour les SPIP est consacrée à la mise en place de ce dispositif.

Cette initiative peut apporter une réponse utile pour renforcer les services en cas d'absence temporaire mais non pour combler des postes vacants. Compte tenu de l'insuffisance des effectifs, on peut craindre que ce ne soit pourtant le cas au risque de fragiliser l'exigence de suivi sur la durée des personnes placées sous main de justice.

2. Un rôle accru et contesté pour les associations pour les enquêtes présentencielles

L'article 4 du projet de loi confie au secteur associatif habilité la compétence de principe pour mener les enquêtes présentencielles. L'annexe estime que 130 ETPT de conseiller d'insertion et de probation pourraient ainsi être redéployés et recentrés sur le suivi des personnes condamnées (voir supra le commentaire de l'article 4).

3. Une réorganisation sans renforcement d'effectifs

Le projet de loi de programmation énumère plusieurs pistes d'organisation destinées, sans création d'emploi, à adapter les effectifs à la charge de travail : mise en place d' « indicateurs fiables de mesure de la charge de travail et des résultats », « processus de répartition géographique des effectifs (...) afin de faire converger progressivement la charge d'activité entre les services », « organisation territoriale plus fine (...) notamment en faisant coïncider le nombre de résidences administratives (sur lesquelles sont affectés les conseillers d'insertion et de probation) et d'antennes (correspondant à un lieu d'exercice, elles peuvent être mixtes ou consacrées exclusivement au milieu ouvert ou à un établissement pénitentiaire) afin de réduire les rigidités dans la gestion des effectifs ».


* 17 Pour un coût salarial total de 32,8 millions d'euros compte non tenu des dépenses d'investissement.

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