B. LE REDÉMARRAGE À LA HAUSSE DES DÉPENSES D'INDEMNISATION DES DEMANDEURS D'EMPLOI
La hausse du nombre des demandeurs d'emploi entraîne mécaniquement une augmentation des dépenses d'indemnisation financées par l'Assurance chômage. Ainsi, l'Unedic a chiffré que le nombre de chômeurs indemnisés continuerait à augmenter pour s'établir à 2 139 600 en décembre 2012.
Prévision du nombre des chômeurs indemnisés par l'Assurance chômage
(en milliers)
Source : Pôle emploi, Prévisions Unedic (situation financière de l'Assurance chômage pour les années 2011 et 2012, publiée le 22 septembre 2011)
La conséquence directe de cette dégradation de la conjoncture serait une aggravation du déficit de l'Unedic en raison de l' augmentation des dépenses d'assurance chômage . Celles-ci passeraient de 33,6 milliards en 2011 à 34,6 milliards d'euros en 2012 . Le compte de résultat de l'assurance chômage pourrait présenter un déficit supplémentaire de 2,5 milliards d'euros en 2011 et de 1,8 milliards d'euros en 2012.
La dette de l'assurance chômage continuerait aussi à se creuser, passant de 11 milliards d'euros fin 2011 à 12,8 milliards d'euros fin 2012 .
C. UNE POLITIQUE DE L'EMPLOI À CONTRETEMPS : LES BESOINS S'ACCROISSENT MAIS L'ETAT RÉDUIT SON ACTION
Face à l'accroissement du chômage et des dépenses de l'Assurance chômage, dont il faut préciser que le financement émane des cotisations et que sa gestion relève des partenaires sociaux, il apparaît paradoxal que l'Etat réduise ses moyens d'action de manière aussi importante en 2012. C'est, en effet, la mission « Travail et emploi » qui subit la plus forte baisse de crédits budgétaires (moins 11 %), devant la mission « Solidarité, insertion et égalité des chances ». Tous les compartiments de la politique de l'emploi sont visés par cette réduction de voilure pour l'an prochain :
- les crédits de la mission « Travail et emploi » s'établissent à 10,2 milliards d'euros de crédits de paiement, en réduction de 11 % par rapport à 2011 (11,6 milliards d'euros) ;
- les dépenses fiscales sont estimées à 10,81 milliards d'euros , au lieu de 11,13 milliards d'euros pour 2011 ;
- les allègements généraux de cotisations sont évaluées à 23,6 milliards d'euros 5 ( * ) , dont 20,1 milliards d'euros d'allègements généraux de charges « Fillon » et 3,5 milliards d'euros d'exonérations relatives aux heures supplémentaires de la loi du 21 août 2007 en faveur du travail, de l'emploi et du pouvoir d'achat (TEPA) 6 ( * ) ;
- et les exonérations ciblées de cotisations patronales, non compensées par la présente mission représenteront 1,84 milliard d'euros.
Au total, la politique de l'emploi mobilisera 47 milliards d'euros en 2012 (51,44 milliards d'euros en 2011), soit une réduction de 9 % de l'effort global de la Nation en faveur de l'emploi et de la lutte contre le chômage.
Le schéma ci-après présente la répartition des différentes composantes financières de la politique de l'emploi et du travail.
Répartition des dépenses de l'Etat au
titre
de la politique de l'emploi et du travail pour 2012
Sources : projet annuel de performances « Travail et emploi » annexé au projet de loi de finances pour 2012 et projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012
Alors que les politiques de l'emploi se justifient par leur effets contra-cyclique sur la conjoncture - accentuer le soutien à l'emploi lorsque le chômage augmente et, à l'inverse, soulager les finances publiques lorsque l'emploi est dynamique - votre rapporteur spécial constate que l'effort de l'Etat se relâche au moment même où les tensions sur le marché de l'emploi réapparaissent. Le budget 2012 est symptomatique d'une politique de l'emploi à contretemps .
Ce choix de la sous-budgétisation de la politique de l'emploi risque de s'avérer contre productif dans la mesure où le Gouvernement se placera de lui-même dans l'obligation de redéployer massivement des crédits en cours d'année comme cela a été le cas en 2009 et en 2010 pour faire face à la crise :
- la loi de finances pour 2009 prévoyait ainsi une baisse de 5,4 % du budget de la mission « Travail et emploi » par rapport à 2008. En réalité, les crédits effectivement consommés se sont établis à 13,7 milliards d'euros en AE et CP, soit un niveau supérieur de 12 % à celui des crédits votés en LFI. En raison de la crise économique, près de 1,5 milliard d'euros de crédits supplémentaires ont, en effet, été ouverts sur le volet « emploi » de la mission (programmes 102 et 103) eu titre du plan de relance ;
- en 2010, l'exécution des crédits a dépassé de 30 % l'autorisation votée en LFI notamment pour honorer la surconsommation de contrats aidés dont la dépense finale s'est élevée à 3,5 milliards d'euros de crédits au lieu de 1,77 milliard d'euros prévus initialement ;
- l'année 2011 a suivi la même pente avec l'ouverture supplémentaire de 350 millions d'euros supplémentaires en application de la loi de finances rectificative précitée du 29 juillet 2011.
Au final, sans méconnaître l'impératif de retour à l'équilibre des finances publiques, il ne s'agit pas de demander plus de dépenses mais de regretter le choix fait par le Gouvernement de se désengager des politiques actives de l'emploi et de lutte contre le chômage .
Le choix du Gouvernement est de réduire drastiquement les dépenses budgétaires d'intervention. Ce faisant, il prive le pays d'un levier de lutte important contre le chômage. Il fait même courir le risque d'une explosion des dépenses sur les dispositifs sous-budgétisés : les contrats aidés, l'accompagnement des restructurations économiques et les dépenses de solidarité.
La voie suivie par la nouvelle majorité sénatoriale est radicalement différente : plutôt que de réduire les seules dépenses d'intervention de la politique de l'emploi, elle propose de supprimer les niches fiscales et sociales très coûteuses et sans effet sur l'emploi. Ainsi, votre commission des finances et la commission des affaires sociales ont-elles voté la suppression du dispositif d'exonérations des heures supplémentaires. Cela représente une économie globale de 4,9 milliards d'euros bien supérieure à celle que souhaite faire le Gouvernement sur les dépenses d'intervention en faveur de l'emploi .
* 5 Source : projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2012 (annexe 5).
* 6 En 2011, Les allègements généraux de cotisations patronales s'élèvent à 24,43 milliards d'euros, dont 21,2 milliards d'euros d'allègements généraux de charges « Fillon » et 3,23 milliards d'euros d'exonérations relatives aux heures supplémentaires et complémentaires.