EXAMEN DES ARTICLES
PREMIÈRE PARTIE -
DISPOSITIONS RELATIVES AUX RECETTES ET À L'ÉQUILIBRE
GÉNÉRAL POUR L'ANNÉE 2011
Section 1 - Dispositions
relatives aux recettes des régimes obligatoires de base et des
organismes concourant à leur financement.
Prime de partage des profits
Article 1er Instauration d'une prime pour les salariés des sociétés de cinquante salariés et plus dont le dividende par part ou action augmente
Objet : Cet article a pour objet de créer une prime de partage de la valeur ajoutée destinée aux salariés des sociétés de plus de cinquante salariés qui versent des dividendes en hausse à leurs actionnaires.
I - Les dispositions initiales du projet de loi
Les modalités de la mesure proposée, qui n'est pas codifiée, sont décrites à travers douze paragraphes.
Le paragraphe I définit le champ de la mesure . Il précise que celle-ci est applicable aux sociétés commerciales qui emploient habituellement cinquante salariés et plus . Ce faisant, il reprend la formulation du code du travail, à l'article L. 3322-2, pour définir le champ des entreprises soumises à l'obligation de prévoir une participation aux résultats.
Il indique également que la mesure est applicable aux sociétés commerciales du secteur public, détenues majoritairement, directement ou non, par l'Etat et/ou ses établissements publics, dès lors que ces sociétés ne bénéficient pas de subventions d'exploitation, ne sont pas en situation de monopole et ne sont pas soumises à des prix réglementés. Cette définition a pour objet de cibler les seules sociétés publiques dans lesquelles la notion de bénéfice et de dividende a réellement une signification.
Le paragraphe II fixe la règle de principe selon laquelle l'attribution par une société à ses associés ou actionnaires de dividendes dont le montant par part sociale ou par action est en augmentation par rapport à la moyenne des deux exercices précédents, entraîne le versement d'une prime au bénéfice de l'ensemble des salariés de la société.
Si la société appartient à un groupe, ce sont les dividendes versés par l'entreprise dominante qui sont pris en considération et qui entrainent, en cas de hausse, l'obligation du versement d'une prime à tous les salariés du groupe.
Le paragraphe III détermine les modalités de mise en place de la prime qui sont identiques à celles prévues pour l'intéressement ou la participation. Elle pourra donc, en application de l'article L. 3322-6 du code du travail, être instituée par convention ou accord collectif de travail, accord entre l'employeur et les représentants des organisations syndicales représentatives dans l'entreprise, accord conclu au sein du comité d'entreprise ou ratification d'un projet de contrat par référendum à la majorité des deux tiers du personnel.
Elle devra être mise en place dans un délai de trois mois suivant l'assemblée générale qui aura décidé d'attribuer des dividendes.
Si la négociation ne permet pas la conclusion d'un accord, un procès-verbal de désaccord est établi dans lequel sont consignés le dernier état des propositions des différentes parties et la prime que l'employeur s'engage à appliquer unilatéralement après avis du comité d'entreprise ou, à défaut, des délégués du personnel (s'il en existe).
Le paragraphe IV prévoit que la prime peut être uniforme ou modulée , comme pour la participation, en fonction de critères liés au salaire ou à la durée de présence des salariés dans l'entreprise.
Elle ne peut se substituer à aucun élément de rémunération prévu par ailleurs, en particulier les hausses de rémunérations légales, conventionnelles ou contractuelles.
Le paragraphe V définit les sanctions applicables en cas de non-respect de l'obligation d'instituer cette prime lorsque les conditions nécessaires à son instauration sont réunies. L'employeur qui se soustrairait à l'obligation d'engager une négociation serait ainsi passible, comme pour d'autres négociations obligatoires comme la NAO (négociation annuelle obligatoire sur les salaires), d'une peine d'un an de prison et/ou d'une amende de 3 750 euros.
Le paragraphe VI exonère de l'obligation d'instituer la prime les sociétés qui, au titre de l'année en cours, ont attribué au bénéfice de l'ensemble de leurs salariés, par accord d'entreprise, un avantage pécuniaire non obligatoire, alloué en tout ou en partie en contrepartie de l'augmentation des dividendes.
Cela signifie que la négociation collective d'entreprise peut instaurer un autre avantage pécuniaire que la prime , tel qu'un supplément d'intéressement ou de participation, ou encore l'attribution gratuite d'actions, dès lors que cet avantage bénéficie à l'ensemble des salariés et qu'il est alloué en contrepartie, au moins pour une part, de l'augmentation des dividendes.
Le paragraphe VII précise que les sociétés commerciales qui emploient moins de cinquante salariés peuvent se soumettre volontairement à ce dispositif. Elles bénéficieront alors du régime social favorable qui entoure la prime. Il convient néanmoins qu'elles versent des dividendes et que ceux-ci soient en augmentation. Elles pourront instituer la prime soit par un accord, soit à leur initiative, c'est-à-dire par décision unilatérale de l'employeur.
Le paragraphe VIII définit le régime social de la prime . Elle sera exonérée, dans la limite d'un plafond de 1 200 euros par salarié et par an, de cotisations patronales et salariales de sécurité sociale. En revanche, elle sera soumise à la CSG, à la CRDS et au forfait social, soit à un taux de prélèvement de 14 % (7,5 % pour la CSG, 0,5 % pour la CRDS et 6 % pour le forfait social).
A cet effet, l'employeur est tenu de déclarer à l'organisme chargé du recouvrement des cotisations dont il relève le montant des primes versées.
Le paragraphe IX mentionne expressément que l'article L. 131-7 du code de la sécurité sociale, qui pose le principe de la compensation des mesures de réduction ou d'exonération de cotisations et contributions sociales, n'est pas applicable à la prime .
Le paragraphe X précise que l'instauration d'une prime n'est pas applicable à Mayotte.
Le paragraphe XI spécifie que le dispositif de l'article s'applique à toutes les attributions de dividendes autorisées depuis le 1 er janvier 2011 . Toutefois, pour celles qui sont intervenues avant l'adoption de la présente loi, le délai de trois mois dans lequel l'accord ou la décision d'instituer la prime doit être pris ne commencera à s'écouler qu'à compter de la promulgation de la loi.
Le paragraphe XII prévoit une évaluation de la loi dans un délai de deux ans . A cet effet, le Gouvernement devra présenter au Parlement un bilan des accords et des mesures intervenues pour mettre en place la prime, ainsi que, le cas échéant, des propositions d'adaptations législatives pour en améliorer le dispositif.
II- Le texte adopté par l'Assemblée nationale
L'Assemblée nationale a approuvé l'économie générale du dispositif. Elle lui a néanmoins apporté un certain nombre de modifications dont les principales sont :
- au paragraphe I , elle a ajouté les références du code du travail permettant de définir précisément le seuil des cinquante salariés ;
- au paragraphe III , elle a prévu que l'accord instituant la prime devra être déposé auprès de l'autorité administrative et qu'à défaut de ce dépôt, la société ne pourra bénéficier de l'exonération de charges sociales prévue par cet article ; elle a également ajouté qu'une note d'information serait remise à chaque salarié concerné, précisant les modalités de calcul de la prime, son montant, ainsi que la date de son versement ;
- au paragraphe V, elle a limité le champ des sanctions applicables à l'employeur en cas de défaut d'engagement d'une négociation en vue de la conclusion d'un accord sur le versement d'une prime, celui-ci ne sera désormais que passible de l'amende ;
- au paragraphe XII , elle a prévu que le bilan que doit présenter le Gouvernement au Parlement devra intervenir avant le 15 septembre 2012.
L'Assemblée nationale a également ajouté deux nouveaux paragraphes à cet article :
- le paragraphe XIII pour stipuler que le présent dispositif s'appliquera jusqu'à l'intervention d'une loi suivant les résultats d'une négociation interprofessionnelle sur le partage de la valeur ajoutée qui pourra notamment proposer des adaptations législatives dans le champ de la participation et de l'intéressement ;
- le paragraphe XIV pour autoriser les entreprises de moins de cinquante salariés à conclure, jusqu'au 31 décembre 2014, un accord d'intéressement pour une durée d'un an (au lieu de trois ans). Une évaluation de cette mesure devra être fournie au Parlement au plus tard le 31 décembre 2012.
III - La position de la commission
Tout en regrettant la création d'une nouvelle « niche », votre commission approuve les modalités de mise en oeuvre du dispositif institué par cet article.
Celles-ci privilégient en effet le dialogue social et comportent un certains nombre de facteurs de souplesse à même de permettre à ce dialogue d'emprunter différentes voies et de s'adapter à la variété des situations dans lesquelles se trouvent les entreprises.
Plusieurs modifications peuvent contribuer à améliorer encore le mécanisme mis en place. C'est pourquoi, à l'initiative de son rapporteur, votre commission propose l'adoption de plusieurs amendements afin de :
- donner un peu de souplesse au calendrier de négociation des entreprises, en permettant que la décision d'attribuer une prime soit prise de manière anticipée (paragraphe III ) ;
- prévoir non seulement le dépôt de l'accord mais également celui de la décision unilatérale de l'employeur en cas d'échec des négociations ; cette formalité est en effet indispensable pour, d'une part, permettre un contrôle des accords et décisions prises, celles-ci ouvrant droit à des exonérations de cotisations sociales, d'autre part, disposer d'éléments statistiques (paragraphe III ) ;
- fixer un délai légèrement accru pour l'attribution d'une prime au titre des dividendes versés en 2011 : le délai dans lequel l'accord ou la décision d'instituer la prime pourrait intervenir s'étendrait jusqu'au 31 octobre 2011 (paragraphe XI ) ;
- prévoir que la période pendant laquelle les entreprises de moins de cinquante salariés peuvent conclure un accord d'intéressement pour une durée d'un an s'étendra jusqu'au 31 décembre 2012 , au lieu du 31 décembre 2014, de manière à encourage l'adoption rapide de tels accords (paragraphe XIV ) ;
- harmoniser les dates prévues pour l'évaluation des différents aspects de la loi, en les portant au 31 décembre 2012 , date à laquelle le Gouvernement devra remettre un bilan complet au Parlement, assorti d'éventuelles propositions d'adaptations législatives (paragraphe XII ) ;
- fixer une échéance au 31 décembre 2013 pour l'intervention d'une nouvelle loi à la suite de la négociation collective sur le partage de la valeur ajoutée (paragraphe XIII ).
Votre commission vous demande d'adopter cet article ainsi modifié.
Article 2 Rectification du montant de la compensation des exonérations de cotisations sociales
Objet : Cet article a pour objet de rectifier le montant de la compensation des réductions et exonérations de cotisations et contributions sociales approuvé dans la loi de financement initiale pour 2011.
I - Les dispositions initiales du projet de loi
Cet article fait partie des dispositions devant obligatoirement figurer dans une loi de financement rectificative de la sécurité sociale , conformément aux dispositions de la loi organique du 2 août 2005.
L'article 32 de la loi de financement pour 2011 a approuvé le montant des compensations pour 2011, en le fixant à 3,4 milliards d'euros .
Ce chiffre correspond uniquement aux dispositifs ciblés , les allégements généraux étant financés par un ensemble de recettes fiscales affectées à ce titre au régime général en application de l'article 56 de la loi de finances pour 2006. Les allégements sur les heures supplémentaires institués par la loi Tepa sont également compensés par l'affectation de recettes fiscales, comme le prévoit l'article 28 du projet de loi de finances pour 2008.
Les allégements ciblés de cotisations sociales sont compensés par des crédits budgétaires .
L'annexe 5 du PLFSS fournit le détail de ces exonérations. Pour 2011, l'annexe comporte quarante-trois mesures d'exonération , auxquelles s'ajoutent divers mécanismes d'exemptions d'assiette, qui figurent aussi dans ce même document, et sont au nombre de vingt-six.
Quatre missions contribuent pour l'essentiel à la compensation budgétaire des mesures ciblées d'allégement, ainsi que le montre le tableau ci-après.
(en millions d'euros) |
||||
Compensation budgétaire |
2009
|
2010
|
2011
|
|
Mission Travail |
2 180 |
1 891 |
1 560 |
|
Mission Outre-mer |
1 109 |
1 104 |
1 087 |
|
Mission Ville |
279 |
242 |
198 |
|
Mission Recherche |
47 |
509 |
427 |
|
Total des allégements ciblés compensés (toutes missions) |
3 831 |
3 958 |
3 448 |
|
Source : Annexe 5 du PLFSS |
Le présent article modifie le montant total de cette compensation en le portant à 3,6 milliards d'euros .
Selon l'exposé des motifs du projet de loi, cette rectification à la hausse de 115 millions d'euros vise notamment à tenir compte des crédits effectivement votés par le Parlement en loi de finances pour 2011. En effet, la mesure de rationalisation qui consistait à n'accorder le bénéfice de l'exonération en faveur des organismes d'intérêt général et des associations en zone de revitalisation rurale qu'aux structures de moins de dix salariés, qui devait conduire à une économie de 110 millions d'euros, n'a finalement pas été adoptée.
L'Assemblée nationale a adopté cet article sans modification.
II - La position de la commission
Votre commission rappelle qu'elle attend du Gouvernement un travail d'évaluation du coût et de l'efficacité de chacun des dispositifs en vigueur pour le 30 juin 2011. Il est en effet indispensable qu'une évaluation complète, régulière et approfondie de ces dispositifs soit effectuée et soumise au Parlement, compte tenu de leur enjeu financier.
Elle vous demande d'adopter cet article sans modification.