B. UN IMPÔT D'AVENIR

Comme le note la Commission européenne dans son Livre vert 3 ( * ) , dans les années à venir « il est possible que le financement de l'Etat-providence doive reposer moins qu'aujourd'hui sur l'imposition du travail et des revenus du capital (épargne), ce qui plaide (...) en faveur d'un basculement vers la fiscalité indirecte ». En effet, dans une économie globalisée, il n'est plus possible de financer la protection sociale, c'est-à-dire la santé et la politique familiale, par des charges sur les salaires qui poussent à la délocalisation des activités et des emplois. Il convient au contraire de financer ces charges de solidarité non plus par des impôts sur la production mais par des taxes sur les produits et les services. Tel est l'enjeu de la « TVA sociale » décrit notamment par le Président de votre commission des finances, Jean Arthuis, dans son rapport d'information « TVA sociale : comment redonner de la compétitivité à l'économie française ? » 4 ( * ) .

Au-delà des cas bien connus du Danemark et de l' Allemagne , plusieurs autres pays européens engagent progressivement ce mouvement de basculement. Ainsi, le 4 janvier 2011, le Royaume-Uni a-t-il relevé son taux normal de TVA de 17,5 % à 20 %, dépassant dès lors les taux pratiqués en France (19,6 %) et en Allemagne (19 %). Lors de son récent déplacement en République tchèque , votre rapporteur général a également constaté l'intention du gouvernement de ce pays de financer par un relèvement du taux normal de la TVA et, surtout, la suppression de la plupart des taux réduits, un allègement des charges pesant sur les employeurs ainsi que sur les ménages.

Ainsi, alors que le taux de TVA pratiqué par la France se trouvait il y a quelques années dans le haut de la fourchette des taux pratiqués en Europe, il se situe désormais plutôt dans la moyenne . Comme l'illustre le tableau ci-dessous, quatorze Etats membres de l'UE présentaient un taux normal inférieur à celui de la France en 2000, date à laquelle notre pays a baissé son propre taux d'un point pour le ramener à 19,6 %. Désormais, seuls six Etats pratiquent un taux plus bas que le sien.

L'évolution du taux normal de TVA au sein de l'Union européenne (UE)

entre 2000 et 2011

(en %)

Belgique

Bulgarie

République tchèque

Danemark

Allemagne

Estonie

Grèce

2000

21

20

22

25

16

18

18

Mai 2011

21

20

20

25

19

20

23

Espagne

France

Irlande

Italie

Chypre

Lettonie

Lituanie

2000

16

19,6

21

20

10

18

18

Mai 2011

18

19,6

21

20

15

22

21

Luxembourg

Hongrie

Malte

Pays-Bas

Autriche

Pologne

Portugal

2000

15

25

15

17,5

20

22

17

Mai 2011

15

25

18

19

20

23

23

Roumanie

Slovénie

République slovaque

Finlande

Suède

Royaume Uni

2000

19

19

23

22

25

17,5

Mai 2011

24

20

20

23

25

20

Source : d'après Commission européenne

Dans les pays en difficulté bénéficiant du soutien du Fonds européen de stabilité financière (FESF) et mettant en oeuvre un plan d'ajustement élaboré conjointement par la Commission européenne, la Banque centrale européenne et le Fonds monétaire international, la TVA est un instrument central de la politique fiscale , selon des modalités différentes en fonction des caractéristiques des économies. Ainsi, le plan de rigueur irlandais prévoit à la fois une augmentation du taux normal de TVA - qui passera de 21 % à 22 % en 2013, puis à 23 % en 2014 - et une réduction du taux applicable à certains secteurs d'activité, tels que le tourisme. Au Portugal , en revanche, c'est une véritable « TVA sociale » qui est instituée, avec d'une part une hausse de trois points du taux normal (qui passe à 23 %) et, d'autre part, un allègement des charges sociales pesant sur les entreprises.

D'une certaine manière, on peut interpréter le Livre vert sur l'avenir de la TVA, publié le 1 er décembre 2010 par la Commission européenne, comme procédant d'un souci d'anticiper et de préparer le « basculement » des systèmes de prélèvements obligatoires en modernisant (pour rendre le système de TVA « plus simple, plus robuste et plus efficace ») le principal impôt d'avenir.

Le Livre vert souligne l'efficacité des taxes à la consommation, dès lors qu'elles constituent une base plus large et plus stable que les bénéfices et les revenus. Il relève en particulier que « cette base plus large permet l'application de taux plus bas, ce qui réduit les effets de distorsion de la fiscalité et se répercute favorablement sur la croissance et l'emploi ».


* 3 « Livre vert sur l'avenir de la TVA - Vers un système de TVA plus simple, plus robuste et plus efficace » (1 er décembre 2010).

* 4 Rapport d'information n° 283 (2006-2007).

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