ARTICLE 18 ter A
(Art.
L. 214-126 et L. 214-136 du code monétaire et
financier)
Alignement des conditions de suspension du rachat par les
OPCI
de leurs actions ou parts sur le régime des OPCVM
Commentaire : le présent article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Jérôme Chartier, rapporteur, propose d'aligner sur le régime des organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) les conditions dans lesquelles le rachat par les organismes de placement collectif immobilier (OPCI) de leurs actions ou parts peut être suspendu.
I. LE RÉGIME DE SUSPENSION PROVISOIRE DES RACHATS D'ACTIONS OU PARTS D'ORGANISMES DE PLACEMENT COLLECTIF
A. LES OPCI, VÉHICULES IMMOBILIERS DE CONCEPTION ANALOGUE AUX OPCVM
Les organismes de placement collectif immobilier (OPCI), dont le régime juridique a été fixé par une ordonnance du 13 octobre 2005 270 ( * ) et le régime fiscal, à l'initiative de votre rapporteur, défini par l'article 28 de la loi de finances rectificative pour 2005 271 ( * ) , sont gérés par des sociétés de gestion agréées par l'Autorité des marchés financiers (AMF). Ils comprennent deux types de véhicules selon une structure inspirée de celle des organismes de placement collectif en valeurs mobilières (OPCVM) :
- les sociétés de placement à prépondérance immobilière à capital variable ( SPPICAV ), dont les règles sont fixées par les articles L. 214-120 à L. 214-129 du code monétaire et financier et qui sont avant tout dédiées aux investisseurs institutionnels. Leur régime fiscal est celui des revenus de placements mobiliers et ils sont soumis à une obligation de distribution de 85 à 100 % des revenus locatifs et de 50 à 100 % des plus-values de cession ;
- les fonds de placement immobilier ( FPI ), copropriétés de valeurs mobilières sans personnalité morale régies par les articles L. 214-130 à L. 214-143 du code monétaire et financier. Le régime fiscal applicable est celui des revenus fonciers et les FPI sont tenus de distribuer 85 % du résultat et des plus-values de cession.
Au 30 avril 2010, l'essentiel de l'offre d'OPCI était constitué de 81 fonds à règles de fonctionnement allégées , agréés par l'AMF et dédiés aux investisseurs institutionnels. Leur actif brut global s'élevait à 8 milliards d'euros.
B. LE MÉCANISME DE SUSPENSION PROVISOIRE DES RACHATS D'ACTIONS OU PARTS
Afin d'éviter une crise de liquidité et une déstabilisation de la valeur d'un OPCI à la suite du retrait brutal d'un investisseur qui en détient plus de 20 % des parts ou actions, un mécanisme de suspension des rachats d'actions ou parts, dans les conditions fixées par le règlement général de l'AMF, est prévu par l'article L. 214-101 du code monétaire et financier.
De même, les articles L. 214-126 (pour les SPPICAV) et L. 214-136 (pour les FPI) du code monétaire et financier prévoient que le rachat par la société de ses actions, ou par le fonds de ses parts, peut être suspendu , à titre provisoire, par le conseil d'administration ou le directoire (ou par la société de gestion dans le cas des FPI), en cas de force majeure et si l'intérêt de l'ensemble des actionnaires ou porteurs de parts le commande , dans des conditions fixées par le règlement général de l'AMF.
L'article 424-13 du règlement général prévoit qu'en cas de recours à cette faculté de suspension, la société de gestion informe l'AMF et les porteurs de l'OPCI des raisons et modalités de la suspension des rachats au plus tard au moment de sa mise en oeuvre.
Cette faculté est analogue à celle que prévoient les articles L. 214-19 et L. 214-30 du même code pour les sociétés d'investissement à capital variable (SICAV) et les fonds communs de placement (FCP). Trois différences subsistent toutefois :
- le rachat par les SICAV et FCP de leurs actions ou parts peut être provisoirement suspendu « quand des circonstances exceptionnelles l'exigent » ;
- l'émission de nouvelles actions ou parts peut également être suspendue ;
- les conditions sont fixées par le conseil d'administration ou le directoire de la SICAV et par le règlement du FCP, et non par le règlement général de l'AMF.
II. LE DISPOSITIF INTRODUIT PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE
Le présent article, adopté par l'Assemblée nationale à l'initiative de notre collègue député Jérôme Chartier, rapporteur, avec l'avis favorable du Gouvernement, modifie les articles L. 214-126 et L. 214-136 du code monétaire et financier, précités, afin d'aligner sur le régime des OPCVM les conditions dans lesquelles le rachat par les OPCI de leurs actions ou parts peut être suspendu .
Notre collègue député Jérôme Chartier a considéré que la distinction actuelle entre le cas de « force majeure » et les « circonstances exceptionnelles » ne reposait sur aucune donnée objective, le législateur n'ayant pas souhaité faire de différence particulière entre les OPCVM, dont le régime a été créé antérieurement, et les OPCI sur cette faculté.
Le présent article procède donc à une substitution des termes « en cas de force majeure » par les termes « quand des circonstances exceptionnelles l'exigent » dans le premier alinéa de l'article L. 214-126 et le deuxième alinéa de l'article L. 214-136.
III. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Votre commission approuve ces dispositions et considère que la faculté de suspension des rachats par les OPCI demeure suffisamment encadrée , en particulier par le caractère impérieux du respect de l'intérêt de l'ensemble (et non d'une catégorie) des actionnaires ou porteurs de parts, principe cardinal en matière de gestion collective.
La notion de « force majeure » est traditionnellement définie par la doctrine et la jurisprudence en fonction de trois critères : il s'agit d'un événement extérieur à la personne mise en cause, imprévisible dans sa survenance, et irrésistible ou insurmontable quant à ses effets. Cette notion du droit civil est cependant appréciée de manière très stricte , en particulier quant au critère d'irrésistibilité, et peut se révéler mal adaptée au fonctionnement des marchés et à l'environnement de l'épargne.
Le droit financier a ainsi davantage recours à la notion de « circonstances exceptionnelles », et l'article 2 du présent projet de loi s'y réfère pour définir les situations d'urgence déterminant les nouveaux pouvoirs de l'AMF.
Décision de la commission : votre commission a adopté cet article sans modification.
* 270 Ordonnance n° 2005-1278 du 13 octobre 2005 définissant le régime juridique des organismes de placement collectif immobilier et les modalités de transformation des sociétés civiles de placement immobilier en organismes de placement collectif immobilier.
* 271 Loi n° 2005-1720 du 30 décembre 2005 de finances rectificative pour 2005.