2. Un taux de chômage qui pourrait être proche de 10 % fin 2009 et 10,5 % fin 2010
a) Une augmentation du taux de chômage de 0,6 point au dernier trimestre de 2008
Selon l'Insee, le taux de chômage au sens du BIT, après être descendu à 7,2 % au premier trimestre 2008 (taux le plus faible depuis le premier trimestre 1983 8 ( * ) ), est remonté à 7,8 % 9 ( * ) au quatrième trimestre 2008. L'augmentation du taux de chômage, de 0,6 point (soit 187.000 personnes), est l'une des trois plus élevées depuis 1975, les deux autres étant celles du deuxième trimestre 1984 (0,7 point) et du quatrième trimestre 1981 (0,6 point). Cela correspond à ce que l'on pouvait attendre, compte tenu de la croissance observée.
La crise marque donc la fin du cycle de baisse du taux de chômage initié au début de l'année 2006. Après une forte augmentation consécutive au premier choc pétrolier, depuis 1985, le taux de chômage moyen a été très exactement de 9 %, et a connu trois cycles autour de ce niveau, comme le montre le graphique ci-après.
Le taux de chômage en France (au sens du BIT)
(en %)
Source : Insee (enquête emploi)
b) Une augmentation du nombre de demandeurs d'emploi en janvier qui correspond à un rythme d'augmentation annuel de l'ordre de 4 points
Le taux de chômage continue de croître rapidement. Ainsi, selon les données du Pôle emploi, le nombre de demandeurs d'emploi inscrits en catégorie 1 a augmenté de 90.200 personnes au mois de janvier 2009, ce qui est la plus forte augmentation jamais observée depuis que l'assurance-chômage a adopté ce concept en 1991 .
Si la tendance constatée en janvier se maintenait, le nombre de demandeurs d'emploi de catégorie 1 pourrait donc augmenter d'environ 270.000 personnes au premier trimestre. Certes, le nombre de demandeurs d'emplois de catégorie 1 n'est pas directement comparable au chômage au sens
du BIT 10 ( * ) , mais les ordres de grandeur sont les mêmes (un peu plus de 2 millions de personnes dans les deux cas).
Un point de chômage au sens du BIT équivalant à environ 280.000 personnes, cela suggère que le taux de chômage pourrait augmenter d'un point dès le premier trimestre.
Si cette tendance se maintenait sur l'année, l'augmentation du chômage en glissement serait de l'ordre du million de personnes, soit 4 points de chômage.
Ce scénario paraît cependant excessivement pessimiste.
c) Une augmentation du taux de chômage de 2 points en 2009, qui le porterait à 10 % en fin d'année, et 10,5 % fin 2010 ?
Pour déterminer l'évolution vraisemblable du chômage, il est possible de recourir à la « loi d'Okun », selon laquelle l'augmentation du taux de chômage est égale à l'écart du taux de croissance par rapport à la croissance potentielle, multipliée par un certain coefficient, variant selon les pays. En effet, la croissance potentielle découlant de l'augmentation de la population active et de la productivité par travailleur, sur longue période le taux de chômage est stable si la croissance est égale à son potentiel.
Si on considère que, dans le cas de la France, la croissance potentielle est de l'ordre de 2 %, soit 0,5 % par trimestre, et le coefficient d'Okun de 0,3 11 ( * ) , en retenant le scénario 2 (croissance de - 3 % en 2009 et 0,5 % en 2010) le taux de chômage serait fin 2009 et fin 2010 autour de 9 % .
Si l'on retient un coefficient d'Okun de 0,5 (ce qui correspond à la situation observée de 1991 à 1993, et est compatible avec les dernières prévisions de l'Unedic 12 ( * ) ), en retenant le scénario 2 (croissance de - 3 % en 2009 et 0,5 % en 2010) le taux de chômage serait fin 2009 et fin 2010 de l'ordre de respectivement 10 % et 10,5 % .
Dans le pire des cas (scénario 3), le taux de chômage serait même de 10,5 % fin 2009 et 11,5 % fin 2010, ce qui serait nettement supérieur au maximum du deuxième trimestre 1997, de 10,9 %, comme l'indique le graphique ci-après.
Le taux de chômage de 1985 à 2010 (au sens du BIT)
(en %)
Avec un coefficient d'Okun de 0,5.
Sources : Insee, calcul de la commission des finances
La perspective d'un retour au plein emploi, lié au moindre dynamisme de la population active, s'éloigne d'autant plus que l'augmentation du taux de chômage attendue en 2009 13 ( * ) serait durable. On rappelle que, selon les déterminants habituels, une croissance de 2 % permet juste de stabiliser le taux de chômage. Si la croissance était de seulement 1 % pendant quelques années, le taux de chômage augmenterait encore de plusieurs dixièmes de point par an.
* 8 Le taux de chômage a été de 7,1 % au premier trimestre 1983.
* 9 Chiffre provisoire.
* 10 Le chômage au sens du BIT est évalué par l'Insee lors de l'« enquête emploi » (publiée en principe au mois de mars), réalisée auprès de l'ensemble des ménages et donc supposée plus exacte que le nombre de demandeurs d'emplois de catégorie 1 indiqué par l'assurance chômage. Le nombre de demandeurs d'emploi de catégorie 1 peut en effet connaître des fluctuations importantes, en fonction de la manière dont est gérée la liste des demandeurs d'emploi et de variation de l'incitation des chômeurs à s'inscrire. Par ailleurs, les deux notions ne sont pas les mêmes : au sens du BIT un chômeur est une personne qui n'exerce aucune activité et est immédiatement disponible pour travailler, alors que les demandeurs d'emploi de catégorie 1 recherchent nécessairement un CDI à temps plein et peuvent avoir travaillé 78 heures le mois précédent.
* 11 Ce qui correspond à la situation observée depuis 1990.
* 12 Dans ses prévisions du 11 mars 2009, l'assurance chômage retient l'hypothèse d'une croissance du PIB de -1,8 % à -1,5 % en 2009, suscitant une augmentation du nombre de chômeurs de l'ordre de 375.000 à 454.000 personnes en glissement, ce qui correspond à un coefficient d'Okun de 0,5.
* 13 La croissance annuelle de la population en âge de travailler doit passer d'environ 0,5 % jusqu'à récemment à 0 % à compter de 2011. Ce ralentissement est sans commune mesure avec les évolutions attendues du taux de chômage en 2009 (de l'ordre de 2 points), provenant du nombre très important de destructions d'emplois. Par ailleurs, l'approche par le coefficient d'Okun prend en compte ce phénomène à travers le taux de croissance potentielle pris comme référence (ici délibérément fixé au taux, assez bas, de 2 %).