CHAPITRE IV : CUMUL D'ACTIVITÉS ET ENCOURAGEMENT À LA CRÉATION D'UNE ENTREPRISE

« Nul n'est contraint de faire carrière au service de l'Etat mais, pour ceux qui s'y consacrent, ce service est une noble et stricte obligation » disait le général de Gaulle.

Cette obligation de servir a été assortie d'une obligation d'exclusivité : à la différence des salariés de droit privé, qui peuvent librement exercer une activité lucrative annexe, à la condition de demeurer loyaux envers leur employeur et de respecter la législation relative à la durée maximale de travail, les agents publics sont soumis à un principe général d'interdiction du cumul d'activités, publiques ou privées .

Les cumuls d'activités au sein de la sphère publique sont interdits depuis une loi du 28 avril 1816. Ce principe figure aujourd'hui à l'article 7 d'un décret-loi du 29 octobre 1936 relatif aux cumuls de retraites, de rémunérations et de fonctions, qui interdit d'exercer plusieurs emplois rémunérés sur les budgets de collectivités publiques, sauf dérogation exceptionnelle.

L'article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires dispose quant à lui que « les fonctionnaires consacrent l'intégralité de leur activité professionnelle aux tâches qui leur sont confiées », et « ne peuvent exercer à titre professionnel une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit ». Il leur interdit également de prendre des intérêts susceptibles de compromettre leur indépendance dans des entreprises qui sont contrôlées ou en relation avec leur administration.

La rigueur de ce principe obéit à deux types de considérations : protéger l'agent contre la tentation de négliger ses obligations de service au bénéfice d'une activité étrangère aux missions de service public qui lui sont confiées et éviter que son intérêt personnel ne le conduise à méconnaître ou à bafouer l'intérêt général dont il est le gardien en tant qu'agent public, d'une part ; lutter contre le chômage et éviter une concurrence déloyale pour certaines professions privées, d'autre part.

Elle a cependant été atténuée au nom de considérations tout aussi légitimes : valoriser l'expertise interne à l'administration et développer les compétences des agents.

Le décret-loi du 29 octobre 1936 relatif aux cumuls de retraites, de rémunérations et de fonctions définit ainsi les conditions dans lesquelles il peut être exceptionnellement dérogé à l'interdiction générale de cumul avec une activité professionnelle publique ou privée. Ces dérogations concernent, pour le secteur privé, la production d'oeuvres littéraires, artistiques ou scientifiques, les expertises, consultations ou enseignements donnés par des fonctionnaires dans les domaines ressortissant à leurs compétences et, pour les seuls personnels enseignants, l'exercice d'une profession libérale. D'autres dérogations se sont ajoutées au fil des ans, tantôt générales, tantôt propres à certaines catégories d'agents publics.

Cette réglementation complexe s'applique non seulement à l' ensemble des agents publics en position d'activité, qu'ils soient fonctionnaires ou agents non titulaires, à temps complet ou à temps incomplet, mais également à certains salariés de droit privé , employés par des entreprises publiques, des établissements publics à caractère industriel et commercial ou des organismes financés sur fonds publics.

Elle est aujourd'hui largement critiquée et son adaptation aux besoins de l'administration est remise en question.

Dans le prolongement du rapport adopté par l'assemblée générale du Conseil d'État le 27 mai 1999 sur le cumul d'activités et de rémunérations des agents publics, une première évolution est intervenue afin de prendre en compte la situation des agents à temps incomplet. Un décret n° 2003-22 du 6 janvier 2003 34 ( * ) , pris sur le fondement de la loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001 relative à la résorption de l'emploi précaire, les a ainsi autorisés à cumuler leur emploi avec une activité privée rémunérée dans des conditions compatibles avec leurs obligations de service et sous réserve que cette activité ne porte pas atteinte au fonctionnement normal, à l'indépendance ou à la neutralité du service.

Le chapitre IV du projet de loi relatif à la modernisation de la fonction publique tend à opérer une réforme d'ensemble des règles de cumuls d'activités, afin de les simplifier tout en maintenant un régime d'interdiction de principe.

Article 13 (art. 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983) : Redéfinition de l'interdiction de cumul d'activités et de ses exceptions

Cet article a pour objet de réécrire l'article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, afin de redéfinir le régime de cumul d'activités applicable aux agents publics, en autorisant notamment un cumul pour création ou reprise d'une entreprise.

Le texte proposé comporte cinq paragraphes :

- le premier paragraphe (I) conserve la double obligation d'exclusivité et de désintéressement qui s'impose actuellement aux agents publics, tout en permettant à un décret en Conseil d'Etat d'y déroger ;

- les deuxième (II) et troisième (III) paragraphes énoncent les activités et le quatrième paragraphe (IV) mentionne les agents échappant à cette interdiction ;

- le cinquième paragraphe (V) prévoit les sanctions applicables en cas de violation des règles édictées.

1. Le maintien de la double obligation d'exclusivité et de désintéressement

En disposant que « les fonctionnaires et agents non titulaires de droit public consacrent l'intégralité de leur activité professionnelle aux tâches qui leur sont confiées » et « ne peuvent exercer à titre professionnel une activité privée lucrative de quelque nature que ce soit », le premier alinéa du I maintient l' obligation d'exclusivité applicable aux agents publics.

Pour les fonctionnaires , cette obligation est actuellement énoncée au premier alinéa de l'article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, dans les termes repris par le projet de loi.

Elle vaut pour les agents des trois fonctions publiques, titulaires ou stagiaires 35 ( * ) , en position d'activité à temps plein ou à temps partiel, pendant la durée de leur service, mais également pendant leurs heures de liberté, leurs congés annuels ou leurs congés de maladie. De même, les autorisations d'absence ne peuvent avoir pour conséquence de permettre l'exercice d'une activité professionnelle. Si la suspension provisoire interrompt l'obligation d'exclusivité, le maintien, au moins partiel, de la rémunération publique s'oppose à la reconnaissance de la liberté de cumul.

L'interdiction du cumul d'activités a été étendue aux fonctionnaires ne relevant pas du statut général : magistrats judiciaires 36 ( * ) , praticiens hospitaliers publics 37 ( * ) , militaires 38 ( * ) , fonctionnaires des assemblées parlementaires.

Pour les agents non titulaires , l'obligation d'exclusivité résulte du décret-loi du 29 octobre 1936 qui interdit l'exercice d'activités privées lucratives à l'ensemble des agents publics travaillant dans les services publics. Elle est également énoncée à l'article 38 du décret n° 86-83 du 17 janvier 1986, pour les agents contractuels de l'Etat, et à l'article 23 du décret n° 88-145 du 15 février 1988 39 ( * ) , pour ceux des collectivités territoriales. Après l'adoption du projet de loi, elle acquerra une valeur législative.

La jurisprudence administrative fait prévaloir une conception large de la notion d'agent non titulaire, puisqu'elle inclut dans cette catégorie les maîtres des établissements d'enseignement privé sous contrat d'association 40 ( * ) , alors qu'elle leur reconnaît par ailleurs la qualité de salarié de droit privé 41 ( * ) .

La définition des activités prohibées est délicate.

Si la question de la nature privée d'une activité reçoit une réponse claire, celle de sa nature lucrative et professionnelle paraît moins évidente. Quant à la notion d'activité elle-même, elle suppose que le fonctionnaire joue un rôle actif et déterminant.

Ainsi, une activité est dite lucrative lorsque celui qui l'exerce a pour objectif d'en retirer un bénéfice, peu importe qu'elle soit déficitaire ou que l'intéressé ne perçoive pas de rémunération. Elle est dite professionnelle lorsqu'elle poursuit un but lucratif et qu'elle est pratiquée de manière habituelle. Cependant, ce critère de répétition ou d'habitude est d'un emploi délicat. Il semble que le seuil soit assez bas : ainsi, le fonctionnaire qui a été chauffeur-livreur pour une société privée, à plusieurs reprises durant une période de trois mois, a exercé une activité professionnelle 42 ( * ) .

Aussi les deuxième à cinquième alinéas du I prévoient-ils spécifiquement l' interdiction de trois types d'activités , y compris si elles sont à but non lucratif :

- la participation aux organes de direction de sociétés ou d'associations à but lucratif ;

- les interventions -consultations, expertises, plaidoiries en justice- dans des litiges intéressant une personne publique , y compris devant une juridiction étrangère ou internationale, sauf si cette prestation est assurée au profit d'une personne publique ;

- la prise d'intérêts , directement ou par personnes interposées, dans une entreprise soumise au contrôle de l'administration à laquelle l'agent appartient ou en relation avec cette dernière, si cette prise d'intérêts est de nature à compromettre son indépendance.

La première de ces prohibitions constitue la consécration d'une jurisprudence ancienne. Le Conseil d'Etat s'est en effet opposé à ce que les membres de la fonction publique puissent être administrateurs au sein des organes de direction de sociétés commerciales, quelle que soit leur forme juridique, et ce alors même qu'ils n'auraient pas été rémunérés. Il a considéré que seules les sociétés poursuivant un objet désintéressé pouvaient faire exception à cette règle 43 ( * ) . En revanche, la simple possession de parts sociales ou d'actions n'est pas limitée par la réglementation des cumuls, sous réserve de respecter l'obligation de désintéressement.

Le deuxième interdit constitue la reformulation de dispositions figurant actuellement à l'article 3 du décret-loi du 29 octobre 1936. Sa légitimité ne fait pas de doute : les agents publics ne doivent pas être amenés à prendre position dans une affaire où une personne publique est partie, sauf s'ils sont mandatés par elle. La jurisprudence en a cependant nuancé la portée : la règle ne vaut que lorsqu'un litige est né 44 ( * ) et n'a pas pour effet d'entraîner la nullité de la procédure 45 ( * ) .

La troisième prohibition constitue la reprise, dans les mêmes termes, du dernier alinéa actuel de l'article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 qui consacre l' obligation de désintéressement des fonctionnaires. Selon le Conseil d'Etat, il existe un principe général en vertu duquel « les fonctionnaires ne doivent pas se trouver dans une situation telle que leur intérêt personnel puisse être, le cas échéant, en contradiction avec les intérêts de l'Etat ou de la collectivité publique dont ils doivent assurer la défense 46 ( * ) ».

2. Les dérogations au principe de la prohibition du cumul d'activités

Le dernier alinéa du I accorde au pouvoir réglementaire une faculté générale de prévoir, par décret en Conseil d'Etat, des dérogations à l'interdiction de cumul , tant avec une activité privée qu'avec une activité publique, au bénéfice des fonctionnaires et des agents non titulaires de droit public. Cette activité devra simplement demeurer accessoire, être compatible avec les fonctions confiées à l'agent et ne pas affecter leur exercice : le cumul ne devra pas porter atteinte à la dignité des fonctions, à l'organisation, au fonctionnement normal, à l'indépendance ou à la neutralité du service public.

Le ministère de la fonction publique a ainsi indiqué à votre rapporteur qu'il envisageait de permettre aux agents publics :

- d'exercer des activités d'enseignement, déjà autorisées par l'article 3 du décret-loi du 29 octobre 1936 à la double condition qu'elles ressortissent à leur compétence et que le cumul soit accepté par leur chef de service. Dans son rapport de 1999, le Conseil d'Etat a préconisé de supprimer cette restriction afin de permettre à un agent public de dispenser des cours dans des domaines correspondant à leurs capacités ou connaissances personnelles et pas seulement aux fonctions qu'ils exercent ;

- de prêter leur concours à des organisations internationales ;

- ou encore d'accomplir une mission d'intérêt public de coopération internationale, y compris auprès d'un Etat étranger.

Toutefois, un certain nombre de dérogations seront directement prévues par la loi .

Certaines tiennent aux activités exercées . Elles sont énumérées aux paragraphes II et III du texte proposé pour l'article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983. Il s'agit, selon les indications fournies par le ministère de la fonction publique à votre rapporteur, de « celles qui correspondent aux grands principes de liberté du fonctionnaire, et au-delà, de tout individu : liberté du commerce avec la création ou reprise d'entreprise, liberté de détention d'un patrimoine et de sa gestion, liberté d'expression et de création ».

La dérogation à l'interdiction d'exercer à titre professionnel une activité privée lucrative et de participer aux organes de direction de sociétés ou d'associations à but lucratif recruté dans une administration publique instituée pour favoriser la création ou la reprise d'entreprises constitue la principale innovation de cet article du projet de loi.

Pourront en bénéficier non seulement, comme le prévoyait le texte du Gouvernement, le fonctionnaire et l' agent non titulaire de droit public , mais également, ainsi que l'a ajouté l'Assemblée nationale sur un amendement de M. Michel Piron soutenu par la commission des lois et par le Gouvernement, le dirigeant d'une société ou d'une association à but lucratif , lauréat d'un concours ou recruté en qualité d'agent non titulaire .

L'intéressé devra, d'une part, déclarer son intention de créer, de reprendre ou de continuer à diriger une entreprise à l'autorité dont il relève pour l'exercice de ses fonctions, d'autre part, se soumettre au contrôle de la commission de déontologie , instituée par l'article 87 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques et réformée par l'article 11 du projet de loi.

La durée de la dérogation ne pourra excéder un an à compter, soit de la reprise ou de la création de l'entreprise, soit du recrutement de l'intéressé.

Pour tenir compte des dispositions de l'article 14 du projet de loi, qui autorisent de plein droit un fonctionnaire ou un agent non titulaire de droit public à accomplir un service à temps partiel pour créer ou reprendre une entreprise, le II fait une mention spécifique de cette hypothèse. Une telle mention semble inutile. Aussi votre commission vous soumet-elle un amendement tendant à la supprimer.

Elle vous soumet également un amendement ayant pour objet de permettre la prolongation pour une année supplémentaire, au maximum, de la possibilité offerte à un agent public et au dirigeant d'une société ou d'une association à but lucratif recruté par une administration publique de déroger pendant un an à l'interdiction du cumul d'activités pour créer, reprendre ou continuer à gérer une entreprise .

Il s'agit d'une mesure d'harmonisation avec les dispositions précitées de l'article 14 du projet de loi, qui permettent à un agent public d'accomplir de plein droit un service à temps partiel pour créer ou reprendre une entreprise pour une durée d'un an pouvant être prolongée d'une année supplémentaire.

Le délai d'un an semble en effet insuffisant pour apprécier la viabilité de l'entreprise .

Enfin, votre commission vous soumet deux amendements de précision .

Plusieurs personnes entendues par votre rapporteur ont exprimé le souhait que seuls les agents publics employés à temps partiel puissent créer ou reprendre une entreprise. L'option retenue par le projet de loi, à laquelle votre rapporteur souscrit, est de permettre à l'agent public créateur d'entreprise d'organiser son temps comme il le souhaite : soit en effectuant ses activités privées en sus de son activité à temps plein, soit en demandant le bénéfice d'un mi-temps. Naturellement, le type d'activité et la charge qu'elle implique conditionneront son choix. A titre d'exemple, le recours au mi-temps ne semble pas nécessaire pour la création de sites web lucratifs.

La deuxième série de dérogations législatives à l'obligation d'exclusivité, prévue par le premier alinéa du III, tient à la faculté reconnue aux fonctionnaires et aux agents non titulaires de droit public, d'une part, de détenir librement des parts sociales et de percevoir les bénéfices qui s'y attachent, d'autre part, de gérer librement leur patrimoine personnel ou familial, à la condition de ne pas participer aux organes de direction de sociétés ou d'associations à but lucratif.

Ces dispositions apportent une clarification utile. Dans un avis rendu le 9 février 1949, le Conseil d'Etat avait certes relevé que le législateur n'avait pas entendu interdire aux fonctionnaires la gestion et la surveillance de leur patrimoine personnel ou familial mais appelé de ses voeux la modification du décret-loi du 29 octobre 1936. Jusqu'à présent aucun texte n'était venu reprendre cette proposition ; toutefois, l'administration avait admis la compatibilité des fonctions de syndic de copropriété avec un emploi public à la condition qu'elles se limitent à la seule administration d'un immeuble dont l'agent est copropriétaire.

Enfin, les dernières dérogations législatives à l'obligation d'exclusivité, prévues par les deuxième et troisième alinéas du III, reprennent en les précisant des dispositions du décret-loi du 29 octobre 1936. Elles concernent :

- la production d'oeuvres de l'esprit , énumérées aux articles L. 112-1, L. 112-2 et L. 112-3 du code de la propriété intellectuelle 47 ( * ) ;

- l'exercice, par les membres du personnel enseignant, technique ou scientifique des établissements d'enseignement et les personnes pratiquant des activités à caractère artistique , des professions libérales qui découlent de la nature de leurs fonctions .

S'agissant des oeuvres de l'esprit , le renvoi au code de la propriété intellectuelle permet de définir plus précisément les contours de cette dérogation, à la différence de la référence aux « oeuvres scientifiques, littéraires ou artistiques » qui figure dans le décret-loi du 29 octobre 1936. Seule la production autonome de telles oeuvres, sans lien de subordination avec un organisme privé, est autorisée. Le fonctionnaire doit ainsi être rémunéré à l'acte et ne pas avoir signé de contrat de travail. A titre d'exemple, le juge administratif a considéré que le fait d'animer régulièrement une émission radiophonique ou télévisée constituait une activité professionnelle.

Quant aux activités libérales , elles se distinguent des consultations, expertises et enseignements par leur caractère habituel. Leur autorisation s'explique par la volonté d'assurer la pérennité et le développement des compétences juridiques, scientifiques et techniques de l'administration française. La jurisprudence ayant adopté une interprétation restrictive des dispositions du décret-loi du 29 octobre 1936, plusieurs textes réglementaires ou législatifs en ont élargi le champ d'application au bénéfice, notamment, des architectes employés par les collectivités publiques ou encore des praticiens hospitaliers : les premiers peuvent exercer des missions de maîtrise d'oeuvre, à titre libéral et pour le compte de personnes publiques ou privées 48 ( * ) ; les seconds peuvent disposer d'un secteur libéral, c'est-à-dire soigner des patients à titre personnel dans le cadre de l'hôpital public 49 ( * ) .

Les autres dérogations à l'obligation d'exclusivité prévues par la loi tiennent à la durée de travail des agents publics .

Le IV du texte proposé par cet article pour l'article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 reprend ainsi l' exception prévue par la loi n° 2001-2 du 3 janvier 2001 relative à la résorption de l'emploi précaire au profit des agents qui exercent leurs fonctions à temps non complet et pour une durée inférieure au mi-temps, qui figure actuellement au deuxième alinéa du même article.

Cette exception est légitime : les intéressés n'ont nullement choisi leur situation, le contenu des emplois permanents à temps non complet étant déterminé par leur employeur, principalement en raison de la faiblesse de sa démographie et de ses ressources.

3. La sanction de la méconnaissance de la double obligation d'exclusivité et de désintéressement

Le V du texte proposé par cet article pour l'article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 reprend les dispositions de l'article 6 du décret-loi du 29 octobre 1936, en application desquelles la violation de l'interdiction de cumul donne lieu au reversement des sommes indûment perçues, par voie de retenue sur le traitement de l'agent, sans préjudice des sanctions pénales applicables, prévues par l'article 432-12 du code pénal en cas de prise illégale d'intérêts.

En revanche, il ne précise plus que cette violation peut entraîner des sanctions disciplinaires, cette mention apparaissant superflue puisque toute méconnaissance du statut peut motiver de telles sanctions.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 13 ainsi modifié .

Article 14 (art. 37 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, 60 bis de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 et 46-1 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986) : Droit au service à temps partiel pour l'agent public qui crée ou reprend une entreprise

Cet article a pour objet d'accorder à l'agent public qui crée ou reprend une entreprise le droit d'accomplir un service à temps partiel pour une durée maximale d'un an pouvant être prolongée pour une année supplémentaire au maximum .

A cette fin, il modifie l'article 37 bis de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, l'article 60 bis de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et l'article 46-1 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière.

Ce service à temps partiel, comme le service à temps partiel de droit commun, ne pourra être inférieur au mi-temps , pour des raisons liées tant au maintien d'une rémunération suffisante qu'au souci d'assurer un lien effectif de l'agent avec le service.

L' autorisation sera de droit , l'administration de l'agent ayant simplement la faculté de différer l'octroi du service à temps partiel pour une durée ne pouvant excéder six mois à compter de la réception de la demande de l'intéressé.

La demande devra toutefois être soumise à l' examen de la commission de déontologie instituée par l'article 87 de la loi n° 93-122 du 29 janvier 1993 relative à la prévention de la corruption et à la transparence de la vie économique et des procédures publiques et réformée par l'article 11 du projet de loi.

L'agent public ne pourra être autorisé à exercer ce droit pour une nouvelle création ou reprise d'entreprise moins de trois ans après la fin d'un service à temps partiel pour création ou reprise d'entreprise .

En première lecture, l'Assemblée nationale a adopté deux amendements rédactionnels présentés par sa commission des lois et soutenus par le Gouvernement.

Votre commission vous soumet trois amendements de précision et vous propose d'adopter l'article 14 ainsi modifié .

Article 15 (art. L. 123-2-2 nouveau du code de la sécurité sociale) : Application aux agents des organismes de protection sociale des nouvelles dispositions relatives au cumul d'activités

Cet article, adopté sans modification par l'Assemblée nationale en première lecture, a pour objet d'insérer un article L. 123-2-2 dans le code de la sécurité sociale, afin de rendre les nouvelles dispositions relatives au cumul d'activités des agents publics applicables aux agents de droit privé des organismes de sécurité sociale régis par les conventions collectives nationales, tout en prévoyant que des adaptations pourront y être apportées par décret en Conseil d'Etat.

Les caisses de sécurité sociale sont, pour la plupart, régies par le droit privé. Leurs agents sont soumis aux dispositions du code du travail : dans le régime général, seuls les directeurs des trois caisses nationales et de l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale (ACOSS) sont des agents publics, tandis que les 180.000 agents des caisses nationales, régionales et locales sont des agents de droit privé. Leurs conditions de travail sont fixées par convention collective 50 ( * ) et le contentieux des conflits individuels du travail relève du conseil de prud'hommes.

Toutefois, étant donné que les organismes de sécurité sociale remplissent une mission de service public, leurs personnels peuvent être soumis à des obligations spécifiques, inspirées de celles qui s'appliquent aux agents publics. Il en va ainsi de l'exercice du droit de grève et des possibilités de cumul d'emplois et de rémunérations. L'interdiction faite à ces personnels « d'occuper un emploi privé rétribué ou d'effectuer à titre privé, un travail moyennant rémunération » est énoncée à l'article L. 324-1 du code du travail. En outre, l'article premier du décret-loi du 29 octobre 1936 rend applicables toutes les règles relatives au cumul aux personnels des « organismes publics ou privés dont le budget de fonctionnement est alimenté en permanence et pour plus de 50 % de son montant soit par des taxes fiscales ou parafiscales, soit par des cotisations rendues obligatoires en vertu d'un texte légal ou réglementaire ». Les caisses de sécurité sociale entrent toutes dans cette catégorie 51 ( * ) .

Compte tenu de l'abrogation du décret-loi du 29 octobre 1936 et de l'article L. 324-1 du code du travail, respectivement par les articles 16 et 17 du projet de loi, il convient, pour maintenir la soumission des agents des caisses de sécurité sociale aux interdictions de cumul, de prévoir une disposition spécifique au sein du code de la sécurité sociale.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 15 sans modification .

Article 16 (décret-loi du 29 octobre 1936, art. 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983, art. 39 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984, art. 60 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984, art. 46 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986, art. L. 952-20 du code de l'éducation) : Abrogation du décret-loi du 29 octobre 1936 - Suppression des règles de cumuls plus restrictives applicables aux agents à temps partiel - Maintien des régimes spécifiques de cumuls

Cet article a pour objet d'abroger le décret-loi du 29 octobre 1936 relatif aux cumuls de retraites, de rémunérations et de fonctions, de supprimer les dispositions législatives soumettant les agents publics à temps partiel à un régime de cumuls d'activités et de rémunérations plus restrictif que les agents publics à temps complet et de prévoir le maintien des règles législatives particulières de cumuls actuellement en vigueur.

1. Abrogation du décret-loi du 29 octobre 1936

Le premier paragraphe (I) tend à abroger le décret-loi du 29 octobre 1936 relatif aux cumuls de retraite, de rémunérations et de fonctions .

Les dispositions qui ne sont pas reprises dans le projet de loi ont trait au cumul d'emplois publics (article 7), à l'encadrement du cumul de rémunérations (article 9), aux interdictions spécifiques aux ingénieurs des corps civils et militaires de l'État (article 5) et au cumul de pensions (articles 16 à 24 ter ).

La plupart d'entre elles revêtent un caractère réglementaire. Quant aux règles applicables en matière de retraites, elles sont dorénavant prévues par le code des pensions civiles et militaires.

L'exposé des motifs du projet de loi annonce que « les cumuls d'activités pour le compte de l'administration seront assouplis. Le compte de cumul de rémunérations publiques, source de lourdeurs et appliqué très inégalement, sera supprimé ». Le ministère de la fonction publique a indiqué à votre rapporteur qu'il envisageait également de supprimer le plafonnement des cumuls de rémunérations publiques, qui n'existe pas pour les rémunérations privées.

À la différence du cumul avec un emploi privé, qui expose l'agent à des risques déontologiques, l'exercice d'une activité accessoire pour le compte de l'administration doit être facilité, notamment pour dynamiser le service public en milieu rural, en permettant la polyvalence des agents publics au sein de plusieurs collectivités. La notion même de « cumul d'emplois » devrait être supprimée, le dispositif du décret-loi de 1936 s'étant avéré très rigide dans la mesure où il reposait sur une définition très contraignante de l'emploi public, avec un double critère : la fonction exercée devait représenter à elle seule l'activité normale d'un agent et la rémunération liée à la fonction devait constituer, à raison de sa quotité, un traitement normal.

Les règles législatives relatives aux cumuls d'activités figureront désormais :

- pour les agents publics (fonctionnaires et agents non titulaires de droit public), à l'article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires (article 13 du projet de loi) ;

- pour les agents de droit privé des organismes de sécurité sociale, à l'article L. 123-2-2 du code de la sécurité sociale (article 15 du projet de loi).

Quant aux agents sous statut spécifique des entreprises publiques et aux agents de droit privé des établissements publics à caractère industriel et commercial, il reviendra à leurs statuts particuliers de fixer des régimes de cumuls adaptés à leur travail et à leurs obligations professionnelles.

En application du V de l'article 26 du projet de loi, les dispositions du chapitre IV n'entreront en vigueur qu'à compter de la publication du décret d'application du nouvel article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 et au plus tard le 1 er juillet 2007. Votre rapporteur souhaite vivement que ce délai soit mis à profit pour élaborer les règles de cumuls applicables à ces agents, faute de quoi ils ne seront plus soumis à aucune interdiction.

2. Interdiction de cumuler le supplément familial de traitement avec un avantage de même nature

Le deuxième paragraphe (II) a pour objet de modifier le dernier alinéa de l'article 20 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires, relatif au supplément familial de traitement , afin de tirer la conséquence de l'abrogation du décret-loi du 29 octobre 1936 opérée par le I.

Le droit au supplément familial de traitement est ouvert en fonction du nombre d'enfants à charge, à raison d'un seul droit par enfant.

L'article 10 du décret n° 85-1148 du 24 octobre 1985 relatif à la rémunération des personnels civils et militaires de l'Etat, des personnels des collectivités territoriales et des personnels des établissements publics d'hospitalisation n'autorise qu'un seul des deux parents à le percevoir lorsqu'ils sont tous deux fonctionnaire civil, militaire, magistrat ou agent non titulaire de droit public, employé à temps complet ou non.

La loi n° 91-715 du 26 juillet 1991 a étendu le champ de cette interdiction en mentionnant à l'article 20 de la loi du 13 juillet 1983 que : « Le supplément familial de traitement n'est pas cumulable avec un avantage de même nature accordé pour un même enfant par un organisme public ou financé sur fonds publics au sens de l'article 1 er du décret-loi du 29 octobre 1936 relatif aux cumuls de retraites, de rémunérations et de fonctions . »

Les organismes en question sont les administrations publiques, les établissements publics à caractère industriel et commercial, les entreprises publiques figurant sur une liste établie par décret, ainsi que les organismes, publics ou privés, dont le budget de fonctionnement est alimenté à plus de 50 % soit par des cotisations publiques, des taxes fiscales ou parafiscales ou des cotisations obligatoires, soit par des subventions allouées par un des employeurs, établissements, entreprises ou organismes précités.

En remplaçant la référence au décret-loi du 29 octobre 1936 par une référence aux employeurs visés aux 1°, 2° et 3° de l'article L. 86-1 du code des pensions civiles et militaires de retraite, le projet de loi revient sur cette interdiction. Les employeurs ainsi visés sont en effet : les administrations de l'Etat et leurs établissements publics administratifs, les collectivités territoriales et leurs établissements publics administratifs, les établissements employant des agents de la fonction publique hospitalière.

Telle n'était pas l'intention du Gouvernement. Votre commission vous soumet en conséquence un amendement tendant à maintenir l'interdiction de cumuler le supplément familial de traitement perçu par un agent public avec un avantage de même nature perçu par son conjoint lorsque ce dernier appartient à la sphère publique .

3. Soumission des agents public à temps partiel aux règles de cumul de droit commun

Les troisième (III) et quatrième (IV) paragraphes tendent à supprimer les dispositions particulièrement restrictives en matière de cumul d'activités qui s'appliquent aux agents à temps partiel.

En effet, l'article 39 de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique de l'Etat, l'article 60 de la loi n° 84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et le dernier alinéa de l'article 46 de la loi n° 86-33 du 9 janvier 1986 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique hospitalière ne permettent aux agents travaillant à temps partiel :

- ni de bénéficier des dérogations autorisant les agents publics à donner des enseignements relevant de leur compétence, à fournir des consultations ou expertises ou à exercer une profession libérale découlant de l'exercice de leurs fonctions ;

- ni de cumuler deux emplois publics.

À la différence du travail à « temps non complet », le service à temps partiel résulte toujours d'une demande de l'agent. Telle est la raison pour laquelle les agents à temps partiel sont soumis à des interdictions de cumul plus strictes : dès lors qu'un agent choisit de ne pas exercer l'ensemble de ses obligations de service, il ne doit pas utiliser le temps libre qu'il a ainsi dégagé pour entreprendre une autre activité professionnelle, éventuellement plus rémunératrice.

Toutefois, cette interdiction générale et absolue semble trop rigide eu égard à la diversité des situations des agents.

En premier lieu, le temps partiel, théoriquement librement choisi par l'agent, est aussi subi dans de nombreux cas. L'exemple le plus fréquent est celui de la mère de famille obligée de recourir au temps partiel pour s'occuper de ses enfants. Elle doit renoncer à son activité administrative pour une fraction de son temps mais pourrait, sur ce temps, exercer certaines activités privées. Ainsi, une mère de famille qui s'occuperait de ses enfants le mercredi pourrait en profiter pour élaborer quelques fascicules de cours à distance.

En deuxième lieu, les agents à temps partiel perçoivent un traitement inférieur à celui des agents à temps plein. L'utilité d'une rémunération accessoire peut s'avérer particulièrement forte.

Enfin, la conception selon laquelle l'administration détiendrait le monopole de l'activité d'un individu doit être contrebalancée par le principe de libre choix professionnel de chacun, et de liberté du travail, qui invitent à ne pas maintenir de régime spécifique aux agents à temps partiel. Si ceux-ci désirent travailler plus, le cas échéant au profit de tiers à l'administration, ils doivent pouvoir le faire.

Telles sont les raisons pour lesquelles le projet de loi tend à soumettre les agents à temps partiel au droit commun des cumuls d'activités.

4. Coordination

Le paragraphe IV bis , inséré par l'Assemblée nationale en première lecture sur un amendement de sa commission des lois soutenu par le Gouvernement, tend à modifier l'article L. 952-20 du code de l'éducation, qui permet aux enseignants d'une unité de formation et de recherche de pharmacie exerçant conjointement des fonctions de pharmacien ou de biologiste des hôpitaux d'être autorisés à occuper ces deux emplois, afin de substituer la référence à l'article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires à la mention du décret-loi du 29 octobre 1936 relatif aux cumuls des retraites, des rémunérations et des fonctions.

5. Maintien des régimes spécifiques de cumuls d'activités et de rémunérations

Le cinquième paragraphe (V) tend à rappeler que le projet de loi n'a ni pour objet ni pour effet de rendre caduques les dispositions législatives spéciales en matière de cumuls d'activités et de rémunérations.

Trois séries de dispositions sont spécifiquement mentionnées :

- l'article 14 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture, aux termes duquel les architectes fonctionnaires ou salariés de l'Etat et des collectivités publiques peuvent, dans des conditions fixées par décret en Conseil d'Etat, exercer des missions de conception et de maîtrise d'oeuvre au profit d'autres collectivités publiques ou de personnes privées ;

- l'article 38 de la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains qui, depuis sa modification par l'article 100 de la loi n°2004-809 du 13 août 2004 relative aux libertés et responsabilités locales, interdit aux architectes des Bâtiments de France d'exercer une mission de conception ou de maîtrise d'oeuvre à titre libéral, les missions engagées avant le 1 er décembre 2005 pouvant toutefois être poursuivies jusqu'au 31 décembre 2007 ;

- les articles L. 6154-1 à L. 6154-7 du code de la santé publique, qui permettent aux personnels médicaux et pharmaceutiques travaillant à temps plein dans un établissement de santé d'exercer en supplément une activité libérale.

Cette énumération s'avère à la fois incomplète, dans la mesure où il existe bien d'autres régimes de cumuls particuliers 52 ( * ) , et inutile car, en vertu de l'adage lex specialis derogat generalibus , les lois spéciales l'emportent sur tout texte général, même postérieur. Sa seule justification est d'apaiser les craintes des professionnels concernés.

Votre commission vous propose d'adopter l'article 16 ainsi modifié .

Article 17 : Coordinations au sein du code du travail

Cet article a pour objet de supprimer les dispositions du code du travail relatives à l'interdiction faite aux agents d'organismes appartenant à la sphère publique d'exercer une activité privée.

Le 1° du premier paragraphe (I) tend à abroger l'article L. 324-1 qui interdit « aux fonctionnaires, agents et ouvriers des services publics de l'Etat, des départements et des communes, offices et établissements publics, aux personnels commissionnés aux titulaires de la société nationale des chemins de fer français ou des réseaux de chemins de fer d'intérêt local et autres services concédés, compagnies de navigation aériennes et maritimes subventionnées, régies municipales et départementales, directes ou indirectes, ainsi qu'au personnel titulaire des organismes de sécurité sociale, d'occuper un emploi privé rétribué ou d'effectuer à titre privé, un travail moyennant rémunération . » En application de l'article R. 362-4 du même code, la violation de cette interdiction est constitutive d'une contravention de cinquième classe.

L'abrogation de l'article L. 324-1 du code du travail semble justifiée dans la mesure où :

- d'une part, les règles relatives aux cumuls d'activités des agents publics et des agents des organismes de sécurité sociale seront désormais fixées respectivement à l'article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires (article 13 du projet de loi) et à l'article L. 123-2-2 du code de la sécurité sociale (article 15 du projet de loi) ;

- d'autre part, les agents sous statut spécifique des entreprises publiques ou les agents de droit privé des établissements publics à caractère industriel et commercial ont vocation à être régis par des régimes de cumuls particuliers.

Tirant les conséquences de cette abrogation, les 2°, 3° et 5° (le 5° ayant été inséré par l'Assemblée nationale en première lecture sur proposition de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement) du I tendent à supprimer les références à l'article L. 324-1 du code du travail dans trois articles du même code :

- l'article L. 324-3, qui interdit aux employeurs privés d'embaucher des agents si cet emploi les place en situation de cumul illégal ;

- l'article L. 324-4, énumérant les activités qui ne sont pas concernées par l'interdiction de cumul ;

- l'article L. 325-1, relatif à la répression du travail illégal.

Pour supprimer cette même référence à l'article L. 324-1 du code du travail, le 4° du I tend à réécrire l'article L. 122-3-20 du code du travail, aux termes duquel les fonctionnaires et les agents non titulaires de droit public peuvent également bénéficier du « contrat vendanges », contrat à durée déterminée d'une durée maximale d'un mois que peuvent signer les salariés en congés payés.

Enfin, le second paragraphe (II) , inséré par l'Assemblée nationale en première lecture sur proposition de sa commission des lois et avec l'avis favorable du Gouvernement, tend à modifier l'article 156 de la loi n° 2002-276 du 27 février 2002 relative à la démocratie de proximité, qui concerne les opérations de recensement, afin de substituer la référence à l'article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 portant droits et obligations des fonctionnaires à la référence à l'article L. 324-1 du code du travail.

Les dispositions ainsi modifiées prévoient, d'une part, que les enquêtes de recensement sont effectuées par des agents recenseurs, agents de la commune ou de l'établissement public de coopération intercommunale affectés à cette tâche ou recrutés par eux à cette fin, d'autre part, que cette activité est exclue de l'interdiction de cumul lorsqu'elle présente un caractère accessoire.

Votre commission vous soumet un amendement rédactionnel et vous propose d'adopter l'article 17 ainsi modifié .

Article 17 bis (nouveau) (chap. IX bis et art. 72-1 nouveaux de la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984) : Expérimentation d'un dispositif de cumul d'emplois à temps non complet dans les zones de revitalisation rurale pour les fonctionnaires de l'Etat

Cet article, inséré par l'Assemblée nationale en première lecture sur un amendement de M. Pierre Morel-A-L'Huissier soutenu par la commission des lois et le Gouvernement, a pour objet de permettre, à titre expérimental et pour une durée de trois ans, le cumul d'emplois permanents à temps non complet par des fonctionnaires de l'Etat dans les zones de revitalisation rurale .

L'objectif recherché est d' assurer le maintien des services publics en milieu rural .

Les fonctionnaires concernés, dont l' accord sera requis, auront la garantie de bénéficier d'une rémunération équivalente à celle d'un temps complet . Leur traitement ainsi que les indemnités ayant le caractère de complément de traitement seront calculées au prorata du nombre d'heures hebdomadaires de service afférent à chaque emploi.

Le décret en Conseil d'Etat devant notamment préciser les conditions de cumul d'emplois et les règles applicables aux intéressés en cas de modification de la durée hebdomadaire d'activité de l'emploi ou des emplois occupés, pourra prévoir « les dérogations aux dispositions du statut général rendues nécessaires par la nature de ces emplois ».

L' expérimentation débutera à compter de l'entrée en vigueur de ce décret. Avant le terme de trois ans prévu par la loi, un bilan devra être établi par le ministère de la fonction publique.

Les trois conditions requises par l'article 37-1 de la Constitution et la jurisprudence du Conseil constitutionnel pour la validité d'une telle expérimentation -un objet limité, une durée limitée, une évaluation des résultats obtenus- sont remplies.

Sur le plan statutaire, les emplois susceptibles d'être occupés par des agents à temps non complet pourront relever des différentes catégories A, B et C. Sur le plan fonctionnel, le temps non complet étant conditionné au fait qu'un des emplois cumulés se trouve en zone de revitalisation rurale, il est probable que les fonctions concernées relèveront de services à forte implantation territoriale : sous-préfectures, subdivisions de l'équipement ou structures locales du ministère des finances (trésor, impôts...).

Les zones de revitalisation rurale (ZRR) visent à aider le développement de territoires ruraux à partir de critères objectifs. Créées par la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, elles couvrent environ le tiers du territoire national et regroupent 4,5 millions d'habitants. La loi n° 2005-157 du 23 février 2005 relative au développement des territoires ruraux a modifié les critères devant être pris en compte pour délimiter leur périmètre et complété les avantages fiscaux dont elles bénéficient.

La réforme de la définition des zones de revitalisation rurale

L'article 2 de la loi relative au développement des territoires ruraux a actualisé les critères de fixation du périmètre des ZRR autour d'un nouveau « pivot » : l'EPCI à fiscalité propre.

Les ZRR comprennent les communes membres d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, incluses dans un arrondissement ou un canton caractérisé par une très faible densité de population ou par une faible densité de population et satisfaisant à l'un des trois critères socio-économiques suivants :

- déclin de la population ;

- déclin de la population active ;

- forte proportion d'emplois agricoles.

Les EPCI à fiscalité propre dont au moins la moitié de la population est incluse en zone de revitalisation rurale en application des critères définis aux alinéas précédents sont, pour l'ensemble de leur périmètre, inclus dans ces zones.

Les zones de revitalisation rurale comprennent également les communes appartenant au 1er janvier 2005 à un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre dont le territoire présente une faible densité de population et satisfait à l'un des trois critères socio-économiques précités. Si ces communes intègrent un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre non inclus dans les zones de revitalisation rurale, elles conservent le bénéfice de ce classement jusqu'au 31 décembre 2009.

La modification du périmètre de l'intercommunalité en cours d'année n'emporte d'effet, le cas échéant, qu'à compter du 1 er janvier de l'année suivante.

Les communes classées en zones de revitalisation rurale au titre de la loi n° 95-115 du 4 février 1995 d'orientation pour l'aménagement et le développement du territoire, qui respectent les critères définis ci-dessus, et qui ne sont pas membres d'un établissement public de coopération intercommunale à fiscalité propre, restent classées en zone de revitalisation rurale jusqu'au 31 décembre 2006.

Cette possibilité de cumuler des emplois à temps non complet n'était jusqu'à présent offerte qu'aux fonctionnaires territoriaux , et ce depuis un décret n° 55-1542 du 29 novembre 1955 pour les agents de l'ancienne administration communale.

Elle s'avère en effet particulièrement adaptée à la faiblesse des besoins des communes rurales en emploi public, où un même secrétaire de mairie officie pour plusieurs communes, ou à des besoins en compétences spécialisées ne justifiant par un temps complet à l'échelle d'une collectivité, par exemple pour un enseignement artistique.

Dans les collectivités locales, 18,9 % des emplois correspondent ainsi à des postes à temps non complet , c'est-à-dire à des emplois créés pour des durées de travail inférieures à la durée hebdomadaire de référence. Cette proportion varie toutefois fortement : elle est de 13 % pour les titulaires mais de 52 % pour les non titulaires. Ainsi, sur les 246.176 agents à temps non complet, 102.720 sont non titulaires.

Les dispositions applicables aux fonctionnaires territoriaux nommés dans des emplois permanents à temps non complet figurent aujourd'hui au chapitre XII et aux articles 104 à 108 de la loi °84-53 du 26 janvier 1984 portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale, et sont précisées par un décret n° 91-298 du 20 mars 1991.

Les représentants des organisations syndicales reçus par votre rapporteur se sont opposés à leur extension à la fonction publique de l'Etat au double motif qu'elle contreviendrait à l'engagement pris par le Gouvernement devant le Conseil supérieur de la fonction publique de l'Etat d'y renoncer et qu'elle induirait des difficultés de gestion.

Aucun de ces deux arguments ne suffit à justifier la remise en cause d'une réforme dont l'utilité est manifeste.

Si elle comporte incontestablement des éléments de complexité, la gestion des personnels à temps non complet s'avère banale au sein de la fonction publique territoriale, qui plus est dans un contexte d'autonomie des collectivités locales employeurs les unes par rapport aux autres

Selon les indications communiquées à votre rapporteur par le ministère de la fonction publique, le mode de gestion des agents de l'Etat pourrait, sous toutes réserves, être le suivant.

« Le recours au temps non complet ne pourrait se faire que dans le cadre du cumul de plusieurs emplois à temps non complet. Ces derniers devraient permettre à l'agent de disposer d'une rémunération égale à celle d'un emploi à temps plein correspondant au même niveau statutaire. Le droit des fonctionnaires à travailler à temps complet serait désormais satisfait par l'occupation, soit d'un poste à temps complet dans le corps de recrutement ou de détachement comme aujourd'hui, mais avec plusieurs lieux d'affectation, soit de plusieurs postes à temps non complet relevant de corps différents mais appartenant à une même administration, soit de plusieurs postes à temps non complet relevant de corps différents appartenant à des administrations différentes .

« La rémunération de chaque emploi serait proratisée à hauteur du temps de travail. Le régime de retraite serait celui attaché aux emplois occupés. La quotité de temps de chaque emploi serait modulable, le cas échéant selon une fourchette prédéfinie. La question d'un plafonnement du nombre d'emplois cumulables est également posée .

« La création des emplois à temps non complet pourrait être laissée à la libre appréciation de l'administration, avec un mécanisme d'encadrement le cas échéant . »

Votre commission vous propose d'adopter l'article 17 bis sans modification .

* 34 Décret n° 2003-22 du 6 janvier 2003 relatif aux cumuls d'activité et de rémunérations des agents mentionnés à l'alinéa 2 de l'article 25 de la loi n° 83-634 du 13 juillet 1983 modifiée portant droits et obligations des fonctionnaires.

* 35 Conseil d'Etat - 30 janvier 1995 - Conesa.

* 36 Article 8 de l'ordonnance n° 58-1270 du 22 décembre 1958 portant loi organique relative au statut de la magistrature.

* 37 Conseil d'Etat - 21 juin 1957 - Oulès.

* 38 Article 35 de la loi n° 72-1662 du 13 juillet 1972 portant statut général des militaires.

* 39 Décret n°88-145 du 15 février 1988 pris pour l'application de l'article 136 de la loi du 26 janvier 1984 modifiée portant dispositions statutaires relatives à la fonction publique territoriale et relatif aux agents non titulaires de la fonction publique territoriale.

* 40 Conseil d'Etat - 20 juin 1987 - Lelièvre.

* 41 Conseil d'Etat - 26 mars 1993 - Pampaloni.

* 42 Conseil d'Etat - 22 mai 1996 - Decousu.

* 43 Conseil d'Etat - avis du 9 février 1949 - n° 245963. Conseil d'Etat - 15 décembre 2000 - ministre de l'éducation nationale c/ Guichard.

* 44 TA de Poitiers - 12 juin 1963 - Bénard.

* 45 Conseil d'Etat - 22 octobre 1999 - Soc. Arrow.

* 46 Conseil d'Etat - avis du 17 février 1954.

* 47 La notion d'oeuvres de l'esprit recouvre notamment les écrits littéraires, artistiques et scientifiques, les conférences, les oeuvres dramatiques, musicales, chorégraphiques, cinématographiques, les dessins, les peintures, les oeuvres d'architecture, les sculptures, les gravures, les photographies, les oeuvres des arts appliqués, les logiciels, les créations des industries saisonnières de l'habillement et de la parure, ainsi que les traductions, adaptations, transformations ou arrangements de telles oeuvres.

* 48 Décret n° 81-420 du 27 avril 1981, pris en application de l'article 14 de la loi n° 77-2 du 3 janvier 1977 sur l'architecture.

* 49 Articles L. 6154-1 et suivants du code de la santé publique.

* 50 Ces agents, en application de l'article L. 123-1 du code de la sécurité sociale, à l'exception des agents de direction et des agents comptables, sont soumis à des conditions de travail « fixées par conventions collectives de travail et, en ce qui concerne d'une part le régime général, d'autre part le régime social des indépendants, par convention collective nationale ». Les articles L. 123-2 et L. 123-2-1 du même code prévoient que les conditions de travail des agents de direction, de l'agent comptable et des praticiens conseils font l'objet de conventions collectives spéciales qui ne deviennent applicables qu'après avoir reçu l'agrément de l'autorité compétente de l'État

* 51 Conseil d'Etat - 29 décembre 1943 - Lebègue.

* 52 A titre d'exemple, l'article 45 de la loi n° 95-95 du 1er février 1995 de modernisation de l'agriculture prévoit qu'« un décret en Conseil d'État fixe les conditions dans lesquelles une personne exerçant à titre principal une activité professionnelle non salariée agricole peut occuper à titre accessoire un emploi à temps non complet dans une collectivité locale », dans le but de compléter le revenu des petits exploitants agricoles.

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