2. Un écart de performance qui se jouera pour l'essentiel dans la dernière année de législature ...

Tout se joue dans la dernière année de la législature : en faisant abstraction des années 2002 et 2007, l'écart entre les deux législatures serait « seulement » de 1,1 %. A ce stade, même si, dans un cas, la dépense est mesurée en exécution et, dans l'autre, en prévision, la dernière année de la législature paraît marquée par des tendances opposées. En 2002, la volonté du gouvernement de l'époque de « laisser jouer les stabilisateurs automatiques » s'est traduite par une grave dérive des crédits. 2007 devrait à l'inverse marquer une accentuation de l'effort de maîtrise de la dépense.

a) Le gouvernement dispose d'outils adaptés pour tenir sa norme de dépense en 2007

Le gouvernement a mis en oeuvre des outils que le gouvernement précédent n'avait pas créés pour tenir sa norme de dépense.

En particulier, l'exposé général du projet de loi de finances pour 2007 souligne que, comme cela avait été le cas en 2006, une mise en réserve de précaution , conformément aux termes de l'article 51 de la LOLF, sera réalisée en début d'année prochaine. Sur chaque programme seront mis en réserve 0,15 % des crédits de paiement et autorisations d'engagement ouverts sur le titre 2 (dépenses de personnel) et 5 % sur les autres titres 15 ( * ) . Au total, la mise en réserve des crédits s'établira à 5,6 milliards d'euros .

Par ailleurs, le volume des reports a été considérablement réduit . Depuis 1992, jamais le niveau des reports ne s'était établi à un niveau aussi bas. Entre 2005 et 2006, le volume des reports a été divisé par deux.

Compte tenu des dispositions de l'article 15 de la LOLF qui prévoient que les crédits de paiement disponibles en fin d'année ne peuvent être reportés que dans la limite de 3 % des crédits initiaux, et que la dérogation demandée à l'article 39 du présent projet de loi de finances pour 2007 concerne un volume de crédits limités (équipement des forces, programmes informatiques Copernic et Chorus, investissements pour les collectivités territoriales), le volume des reports de 2006 vers 2007 devrait être relativement marginal.

Evolution des reports de crédits

(en millions d'euros)

Source : loi de règlement pour 2005

Dans ces conditions, la norme de dépense 2007 apparaît à la fois bien plus vertueuse et bien plus crédible que celle proposée par le gouvernement dans le projet de loi de finances pour 2002.

b) Le projet de loi de finances pour 2002 affichait une norme de dépense ni vertueuse, ni crédible

La loi de finances initiale pour 2002 fixait une norme de progression des dépenses de l'Etat de 0,5 % en volume. Dans son rapport sur le projet de loi de finances initiale pour 2002, qualifié de « grande illusion », votre rapporteur général notait que les dépenses de 2001 évoluaient dans un sens clairement défavorable et que l'objectif de progression des dépenses ne pouvait donc être tenu qu'au prix d'importants reports sur 2002. Il écrivait ainsi : « il convient de s'interroger sur la crédibilité de cette norme de progression des dépenses. Elle avait, en effet, été initialement prévue à 0,3 % : l'arbitrage du Premier ministre semble tirer les conséquences de l'extrême difficulté du gouvernement à maîtriser l'évolution des dépenses, tant dans le passé que dans l'exercice en cours. Du reste, le gouvernement n'a jamais respecté, par le passé, la norme de progression des dépenses qu'il s'était fixée [...] ».

Dès lors, l'audit commandé par le nouveau gouvernement, en juin 2002, réalisé par MM. Jacques Bonnet et Philippe Nasse, évaluait le dérapage brut de l'ensemble - tous budgets confondus - de la dépense pour 2002 à un montant compris entre 10,3 et 10,8 milliards d'euros. En déduisant 3,4 milliards d'euros d'économies réalisables, il faisait apparaître un dérapage net compris entre 6,9 et 7,4 milliards d'euros dont 5 milliards d'euros au titre du seul budget général.

L'audit attribuait ce dérapage à plusieurs causes.

La première tenait à la croissance plus lente que prévu en loi de finances initiale . Celle-ci a eu un effet en dépenses, en créant des difficultés sociales, notamment en matière d'emploi. L'audit notait un surcroît de dépenses affectant non seulement les organismes sociaux, mais aussi l'Etat. Il montrait par ailleurs que les dépenses d'aide à l'emploi, à l'emploi des jeunes notamment, à la charge de l'Etat étaient plus élevées que prévu.

La deuxième raison s'expliquait par la montée en charge des dispositifs sociaux nouveaux , comme la couverture maladie universelle (CMU), dont le coût n'apparaissait que peu à peu dans son ampleur réelle. L'audit constatait également que les coûts induits par le passage aux 35 heures excédaient eux aussi la prévision, « l'ensemble de ces circonstances provoquant une pesée diffuse sur les dépenses de l'Etat » .

La troisième raison s'expliquait par un phénomène propre à l'exécution budgétaire, celui des reports . L'audit soulignait que les années récentes avaient vu s'accumuler une masse importante de crédits reportés qui atteignait, fin 2001, près d'un point de PIB. Selon l'audit, tout indiquait que, après que son gonflement ait facilité l'exécution des années antérieures, ce surplomb avait commencé à dégrader l'exécution 2002.

Dès lors, la loi de finances rectificative pour 2002 16 ( * ) ouvrait 4,96 milliards d'euros de crédits supplémentaires, correspondant :

- d'une part, aux engagements antérieurs à la loi de finances initiale pour 2002 non payés, l'Etat devant rembourser aux organismes sociaux certaines dépenses dont ils avaient fait l'avance (RMI, allocation adulte handicapé...) et devant également régler des arriérés de loyer de la gendarmerie nationale ;

- d'autre part, aux dépenses sous-évaluées en loi de finances initiale pour 2002 : sans ouverture de crédits, l'Etat n'aurait pas été en mesure d'honorer ses engagements de l'année en cours. Ainsi plus d'un milliard d'euros manquait à ce titre dans le domaine social.

Les 4,96 milliards d'euros de crédits ouverts au budget général se répartissaient comme suit :

Ouvertures de crédits en loi de finances rectificative du 6 août 2002

(en millions d'euros)

Dettes des années précédentes non financées

1.808

Insuffisances de crédits en loi de finances initiale pour 2002 afin de couvrir des besoins avérés

2.497

Accroissement de la charge de la dette

657

Total

4.962

Source : loi de finances rectificative du 6 août 2002

D'après l'examen réalisé par votre rapporteur général, il apparaît que les trois dysfonctionnements à l'origine du dérapage de la dépense en exécution, par rapport à la prévision de la loi de finances initiale, au cours de l'année 2002, ne paraissent pas se reproduire au regard des informations produites par le projet de loi de finances initiale pour 2007 .

* 15 Il faut noter des effets pervers non encore résolus s'agissant de la mise en oeuvre de la réserve de précaution qui s'applique tout naturellement aux opérateurs. Le taux de mise en réserve est de 5 % sur la subvention pour charges de service public allouée par l'Etat, alors que certains opérateurs, comme l'agence pour l'enseignement français à l'étranger (AEFE), dans le domaine de la culture, n'ont pour l'essentiel que des charges de personnel, pour lesquels une mise en réserve de 0,15 % serait plus appropriée.

* 16 Loi n° 2002-1050 du 6 août 2002.

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