B. UNE SITUATION INTENABLE
1. Des règles peu claires, des blocages récurrents
Les lacunes des dispositions du code civil révélées au fil du temps ont entraîné un développement surabondant et parfois anarchique de la jurisprudence , qui a contribué à accroître la complexité du droit des successions.
Les situations aberrantes sont aujourd'hui légions : indivisions impuissantes en l'absence d'unanimité entraînant la dépréciation des biens, sous-utilisation de l'acceptation sous bénéfice d'inventaire, qui devrait pourtant être la procédure la plus utilisée car la plus protectrice des héritiers*, partages durant des années par la seule faute d'héritiers « taisants ».
Ont été dénombrées en 2003 : 9.214 demandes en partage ou contestations relatives au partage, 16.188 demandes relatives au partage, à l'indivision et aux successions, pour seulement 417 demandes en annulation, en réduction* d'une libéralité ou d'une clause d'une libéralité. Le total des demandes relatives aux libéralités s'est élevé à 1.115.
2. Un droit inadapté aux réalités actuelles
? Chaque année, environ 530.000 décès sont dénombrés et 360.000 successions déclarées .
En 2000, plus d'un million de personnes ont hérité , dont 160.000 conjoints et 725.000 enfants.
Informations concernant les héritiers - Année 2000 7 ( * )
(en euros)
Lien de parenté |
Nombre d'héritiers |
Héritage moyen |
Conjoint |
160.627 |
25.910 |
Enfants |
725.460 |
33.679 |
Petits-enfants |
14.545 |
41.441 |
Frères et soeurs |
44.601 |
36.037 |
Parents jusqu'au 4 ème degré* inclus |
122.905 |
25.098 |
Personnes non parentes |
47.653 |
45.393 |
Non renseignées |
189 |
23.205 |
Ensemble |
1.115.980 |
32.309 |
(Source : DGI - bureau M2)
Le montant moyen transmis est proche de 100.000 euros . La moitié des patrimoines transmis ne dépasse pas 50.000 euros, mais 10 % d'entre eux excèdent 550.000 euros. L' héritage moyen pour les conjoints est d'environ 26.000 euros , contre près de 34.000 euros pour les enfants .
Structure des successions
selon le niveau d'actif
brut de succession en 2000
Nombre |
Liquidités
|
Valeurs mobilières
|
Autres biens meubles
|
Immobilier
|
Exploitations agricoles
|
Passif de succession
|
|
Moins de 26.526 € |
81.300 |
70,0 |
5,2 |
4,50 |
19,5 |
0,8 |
11,7 |
De 26.526 à 53.052 € |
75.487 |
49,0 |
5,40 |
4,30 |
39,8 |
0,5 |
4,8 |
De 53.052 à 99.396 € |
89.850 |
36,9 |
7,70 |
4,00 |
50,4 |
0,9 |
3,8 |
Supérieur à 99.396 € |
114.120 |
23,1 |
26,10 |
5,90 |
43,7 |
1,1 |
4,5 |
Ensemble |
360.757 |
28,5 |
21,20 |
5,50 |
43,8 |
1,0 |
4,7 |
(Source : DGI - bureau MZ)
Sur ces successions déclarées, 31.039 ont fait l'objet de donations antérieures.
Par ailleurs, on a compté 510.910 donations en 2000 , dont la moitié a pris la forme de dons manuels. Leur montant moyen était de 61.533 euros .
Les 94.048 donations-partages ont bénéficié à 258.272 donataires* pour un montant moyen de 57.418 euros par donataire, tandis que les 139.150 donations simples ont été attribuées à 179.497 donataires pour un montant moyen de 52.799 euros.
(en euros)
Nombre de donations |
Montant moyen d'une donation |
|
Donations-partages |
94.048 |
157.683 |
Donations simples |
139.150 |
68.108 |
Dons manuels |
273.390 |
25.589 |
Non renseignées |
4.322 |
31.477 |
Ensemble |
510.910 |
61.533 |
(Source : DGI - bureau M2)
(en euros)
Nombre de donataires |
Montant moyen par donataire |
|
Donations-partages |
258.272 |
57.418 |
Donations simples |
179.497 |
52.799 |
Dons manuels |
273.805 |
25.551 |
Non renseignées |
5.212 |
26.113 |
Ensemble |
716.786 |
43.860 |
(Source : DGI - bureau M2)
Tarif applicable aux droits de mutation à titre gratuit
(en %)
Ligne directe |
Entre époux |
Entre frères et soeurs |
Entre partenaires d'un PACS |
Parents jusqu'au 4 e degré |
Parents au-delà du 4 e degré et personnes non-parentes |
|
Moins de 7.600 euros |
5 % |
5 % |
35 % |
40 % |
55 % |
60 % |
Entre 7.600 et 11.400 euros |
10 % |
10 % |
||||
Entre 11.400 et 15.000 euros |
15 % |
|||||
Entre 15.000 et 23.000 euros |
20 % |
15 % |
50 % |
|||
Entre 23.000 et 30.000 euros |
45 % |
|||||
Entre 30.000 et 520.000 euros |
20 % |
|||||
Entre 520.000 et 850.000 euros |
30 % |
30 % |
||||
Entre 850.000 et 1.700.000 euros |
35 % |
35 % |
||||
Au-delà de 1.700.000 euros |
40 % |
40 % |
Source : articles 777 et 777 bis du code général des impôts
Les abattements sur successions
(en euros)
Epoux |
76.000 |
Partenaires à un PACS |
57.000 |
Enfants |
50.000 |
Frères et soeurs |
5.000 |
Frères et soeurs ayant plus de 50 ans et partageant le même domicile depuis plus de 5 ans |
57.000 |
Handicapés physiques |
50.000 |
Parents éloignés ou non-parents |
1.500 |
Source : articles 779 et 788 du code général des impôts
En matière de succession, il convient d'ajouter à ces abattements spécifiques l'abattement global de 50.000 euros institué par l'article 14 de la loi n° 2004-1484 du 30 décembre 2004, partagé, aux termes de l'article 775 ter du code général des impôts, entre les enfants et le conjoint survivant.
Les abattements sur donations en fonction du donataire
(en euros)
Epoux |
76.000 |
Partenaires à un PACS |
57.000 |
Enfants |
50.000 |
Handicapés physiques |
50.000 |
Petits-enfants |
30.000 |
Neveux et nièces, frères et soeurs, arrière-petits enfants |
5.000 |
Source : articles 779 et 790 B du code général des impôts
Les abattements sur donations en fonction de l'âge du donateur
(en %)
Age du donateur |
Donations en pleine-propriété |
Donations en nue-propriété ou avec réserve du droit d'usage et d'habitation |
Donations en usufruit |
Moins de 70 ans |
50 % |
35 % |
50 % |
Plus de 70 ans et moins de 80 ans |
30 % |
10 % |
30 % |
A partir de 80 ans |
0 % |
0 % |
0 % |
Source : article 790 du code général des impôts
? La réforme du droit des successions est confrontée à plusieurs défis.
Tout d'abord, l' allongement de la durée de la vie -l'âge moyen au décès étant de 76 ans pour les hommes et de 83 ans pour les femmes- fait que les héritiers sont de plus en plus âgés : 46 ans en moyenne pour les enfants et 52 ans tous héritiers confondus. Les successions ne remplissent donc plus leur rôle traditionnel d'établissement dans la vie .
Ensuite, près de 7.000 entreprises disparaissent à la suite du décès de l'entrepreneur. Or, dans les dix ans à venir, 450.000 entreprises devront être transmises.
Enfin, le mouvement de contractualisation du droit de la famille impose de permettre plus de souplesse pour organiser sa succession ou effectuer des libéralités, notamment afin de mieux prendre en compte des situations particulières comme la présence d'un enfant handicapé , qui concerne 800.000 familles, ou la recomposition de la famille .
* 7 Ces statistiques -les plus récentes qu'il a été possible d'obtenir- proviennent d'une étude réalisée à partir d'un échantillon représentatif de 10.390 actes.