ARTICLE ADDITIONNEL APRES L'ARTICLE 60 ter (nouveau) - Limitation de la durée des dispositifs d'incitation fiscale dans les secteurs sauvegardés et les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager
Commentaire : le présent article additionnel propose de limiter à 12 ans la durée des dispositifs d'incitation fiscale applicables aux opérations de rénovation immobilière dans les secteurs sauvegardés et les zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager.
I. LE DROIT EXISTANT
A. UN DISPOSITIF TRÈS AVANTAGEUX
Certaines opérations de restauration immobilières donnent droit à l'imputation du déficit foncier, sans limitation, sur le revenu global. Limité aux travaux de restauration complète des immeubles dans certaines zones protégées (secteurs sauvegardés et zones de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager) et excluant les intérêts d'emprunt, ce dispositif, dit de la loi « Malraux », est soumis à certaines conditions :
- l'immeuble doit être affecté à l'habitation ;
- l'opération de rénovation doit être effectuée à l'initiative du propriétaire de l'immeuble ou d'une collectivité publique ;
- l'opération doit avoir lieu dans un secteur sauvegardé (au sens des articles L. 313-1 à L. 313-3 du code de l'urbanisme) ou, sous réserve que les travaux soient déclarés d'utilité publique, dans une zone de protection du patrimoine architectural, urbain et paysager (articles L. 642-1 à L.642-4 du code du patrimoine) ;
- le propriétaire doit prendre l'engagement de louer le logement nu à usage de résidence principale du locataire pendant une durée de six ans ;
- la location doit prendre effet dans les douze mois qui suivent la date d'achèvement des travaux de restauration ;
- si l'immeuble concerné appartient à une société non soumise à l'impôt sur les sociétés, les associés doivent prendre l'engagement de conserver leurs titres pendant six ans.
Au sein des dépenses résultant des opérations de restauration immobilière, certaines ouvrent droit à déduction dans le cadre du dispositif Malraux :
- d'une part l'ensemble des dépenses déductibles, selon les règles du droit commun fixées à l'article 31 du code général des impôts ;
- et, d'autre part, certaines dépenses limitativement énumérées par le paragraphe b ter du même article et qui comprennent les frais d'adhésion aux associations foncières urbaines de restauration, les travaux de démolition imposés par l'autorité qui délivre le permis de construire, les travaux de reconstitution de toiture ou de murs extérieurs, les travaux de transformation en logements et les travaux de réaffectation à l'habitation.
Selon les rares informations fournies par le gouvernement à votre rapporteur général, les dispositifs fiscaux « Malraux » concerneraient au total 4.000 à 5.000 logements pour une dépense fiscale estimée à 147 millions d'euros. Selon d'autres sources, 90 villes seraient dotées de 95 secteurs sauvegardés, totalisant 6 535 hectares et près d'un millier de ZPPAUP auraient été créées ou seraient en cours de création.
Parmi les heureux succès obtenus grâce au dispositif « Malraux », figurent le renouveau du quartier de la Balance, à Avignon, et la rénovation du vieux Lyon, aujourd'hui classé par l'Unesco au Patrimoine mondial de l'humanité.
B. DONT IL CONVIENT DE RENFORCER L'EFFICACITÉ
La pérennisation des avantages fiscaux « Malraux » dans les mêmes secteurs, dont certains ont été crées il y a près de quarante ans, a aujourd'hui un effet contraire à celui qui était recherché par ses initiateurs de 1962 qui entendaient protéger le « patrimoine urbain », c'est-à-dire des îlots entiers, dans les secteurs historiques des villes.
En effet, elle aboutit à concentrer des incitations fiscales fortes dans des secteurs où elles sont, en quelque sorte, mises en réserve, alors que des quartiers anciens dans d'autres centres-villes continuent de se dégrader.
Un meilleur « roulement » des incitations fiscales entre les secteurs sauvegardés et les ZPPAUP, une accélération des procédures de réhabilitation pourraient sans doute être obtenus en créant un état de nécessité, lié à la disparition de ces incitations, à l'issue d'un délai déterminé. Le dispositif « Malraux » trouverait alors une nouvelle vocation, consistant, au-delà de considérations esthétiques et patrimoniales, à favoriser l'éradication de l'habitat indigne et la mixité sociale dans les centres-villes anciens.
II. LE DISPOSITIF PROPOSÉ PAR VOTRE COMMISSION DES FINANCES
Le présent article additionnel a pour objet d' éviter de pérenniser inutilement le dispositif des avantages Malraux dans les mêmes secteurs sauvegardés et ZPPAUP et, en contrepartie, de favoriser l'accélération des travaux de réhabilitation et une meilleure répartition des aides fiscales sur les territoires qui en ont le plus besoin, notamment les centres-villes dégradés.
Il prévoit ainsi que les avantages fiscaux disparaissent au bout de douze années, ce qui correspond raisonnablement à la durée d'une opération de rénovation immobilière.
Ce délai serait comptabilisé à compter de la date de l'acte administratif créant le secteur sauvegardé ou la ZPPAUP, soit en application des articles
Pour les secteurs sauvegardés et les ZPPAUP qui auraient été créés, soit il y a plus de douze ans, soit durant l'année 1994, un dispositif de sortie "en douceur" est prévu par la prolongation des avantages fiscaux pendant une durée limitée fixée à quatre ans.
Décision de la commission : votre commission vous demande d'adopter cet article additionnel.
ARTICLE 61 - Plafonnement de certains avantages fiscaux concernant l'impôt sur le revenu
Commentaire : le présent article organise le plafonnement des avantages fiscaux qui sont la conséquence d'une situation choisie par le contribuable.
Dans la présentation gouvernementale de la réforme fiscale, le « droit à restitution des impositions en fonction des revenus » proposé à l'article 58 du présent projet de loi de finances pour 2006 a pour contrepartie le présent plafonnement de « niches fiscales ». Le ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat a précisé que « la liste [en] sera amendable notamment par les parlementaires ».
I. LA « MAUVAISE HERBE » FISCALE
Les divers avantages relatifs à l'impôt sont contraires à l'équité horizontale, ils renforcent l'opacité du système fiscal et in fine handicapent la France dans la concurrence fiscale . Leur nombre comme leur importance s'expliquent par l'existence de taux nominaux élevés, dont ils sont la contrepartie ordinaire.
A. DES AVANTAGES FOISONNANTS
La dépense fiscale est devenue un instrument d'incitation économique privilégié, aussi bien pour le gouvernement, à qui il permet de ne pas augmenter la dépense publique, les avantages fiscaux venant en diminution des recettes, que pour les parlementaires, dont l'initiative en la matière n'est pas bridée par les règles de recevabilité financière fixées à l'article 40 de la Constitution.
Le « bleu » « Evaluation des voies et moyens » ne recense pas moins de 527 dépenses fiscales, dont 184 concernent l'impôt sur le revenu. Naturellement, il ne saurait être ici question de montrer du doigt qui que ce soit, tant les gouvernements successifs ont uniformément participé au succès de la formule au cours de ces deux dernières décennies.
En septembre 2003, le Conseil des impôts a estimé dans son 21 ème rapport portant sur la fiscalité dérogatoire que les dépenses fiscales représentaient désormais environ 60 % du produit net de l'impôt sur le revenu, au lieu de 37 % en 1980.
Le gouvernement propose une classification des avantages fiscaux relatifs à l'impôt sur le revenu, qui aide à cerner les contours d'un phénomène devenu protéiforme.
Taxinomie gouvernementale des avantages fiscaux ayant trait à l'impôt sur le revenu Il serait possible de distinguer :
Il convient d'ajouter à la classification gouvernementale les dispositifs sui generis , tels que : - l'abattement en faveur des personnes âgées ou invalides de condition modeste prévu par l'article 157 bis du CGI, qui représente une moins value fiscale de 240 millions d'euros en 2005 ; - la réduction de la cotisation résultant du barème au profit des contribuables de DOM (art. 197-3) (30 % : Guadeloupe, Martinique, Réunion ; 40 % : Guyane), à laquelle correspond une dépense fiscale évaluée à 220 millions d'euros en 2004 ; - la décote , qui entraîne une dépense fiscale évaluée à 1,69 milliard d'euros en 2004. Il reste encore à préciser que l' exonération des sommes versées aux salariés au titre de la participation, qui n'est pas « classée » par le gouvernement (elle n'est pas davantage soumise au plafonnement), correspond à une dépense fiscale de 970 millions d'euros . NB : les références d'articles sont données dans le CGI . |
B. DES ÉVALUATIONS ENCORE ÉPARSES
Ainsi qu'il ressort du rapport précité du conseil des impôts, les dispositifs fiscaux concernés sont d'une efficacité incertaine, et l'on constate une « absence quasi générale d'évaluation des effets des mesures ». Considérer, comme il est parfois d'usage dans les ministères, que le coût d'une mesure, qui est mécaniquement proportionnel à son succès, est aussi un indicateur de son utilité socio-économique, constitue une vue un peu courte.
Certes, de véritables études d'impact sont généralement produites à l'occasion de la présentation au Parlement des différents projets, mais elles ne sont pas suivies dans le temps. Heureusement, certaines des « niches fiscales », parmi les plus récentes, ont une durée déterminée , conformément, d'ailleurs, à une proposition du rapport précité. Ce bornage revient à instaurer une période d'expérimentation, à l'issue de laquelle le gouvernement ne saurait proroger le dispositif concerné sans être en mesure de justifier d'un bilan favorable.
Quoi qu'il en soit, l'utilité première -quoique incidente- de ces dispositifs est de diminuer le niveau des prélèvements obligatoires et de rendre l'impôt moins progressif .
C'est bien cela qui rend notre système opaque et engendre une différence importante entre les taux nominaux, à partir desquels se situe, en première approche, la fiscalité sur le revenu française parmi les pays concurrents, et les taux moyens effectifs, dont dépend le rendement de l'impôt.
II. LA MESURE PROPOSÉE
La présente mesure figure au sein des articles non rattachés de seconde partie en raison du décalage d'un an, à 2007, du paiement de l'impôt afférent aux revenus de l'année 2006, ici concernés.
A. LE CHOIX DES AVANTAGES FISCAUX SOUMIS À PLAFONNEMENT
Le gouvernement propose le plafonnement des avantages fiscaux « qui sont la conséquence d'une situation choisie par le contribuable ». Sur les 184 dépenses fiscales rattachées à l'impôt sur le revenu, le plafonnement concernerait ainsi 19 d'entre elles .
A défaut d'une remise en cause générale, ce critère permet d'inscrire la mesure proposée dans le cadre d'une démarche guidée par l'équité .
Les dispositifs concernés sont, d'une part, les avantages fiscaux « à caractère économique afférents à un investissement du contribuable », et d'autre part, les avantages fiscaux « ayant pour contrepartie une prestation dont bénéficie le contribuable ».
1. Les avantages fiscaux « à caractère économique afférents à un investissement du contribuable »
Le gouvernement a compté 16 avantages fiscaux à caractère économique ayant trait à un investissement du contribuable. Les deux premiers énumérés ci-dessous sont transformés en réduction d'impôt afin de les inscrire dans le dispositif de plafonnement ( infra ) :
1. la déduction du revenu global des souscriptions d'actions de SOFICA (article 163 septdecies du CGI) ; pour les revenus de 2004, les 3.512 bénéficiaires de la mesure ont obtenu une réduction moyenne de 4.556 euros pour une dépense fiscale globale de 20 millions d'euros ;
2. la déduction du revenu global des pertes en capital subies par les créateurs d'entreprise (article 163 octodecies A du CGI) ; les 2.110 bénéficiaires de la mesure ont obtenu une réduction moyenne de 4.171 euros pour une dépense fiscale globale de 5 millions d'euros .
3. la réduction d'impôt pour investissements forestiers (article 199 decies H du CGI) ; les 1.600 bénéficiaires de la mesure ont obtenu une réduction moyenne de 1.875 euros pour une dépense fiscale globale de 3 millions d'euros ;
4. la réduction d'impôt pour souscriptions en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés , dite réduction d'impôt « Madelin » (article 199 terdecies -0 A du CGI) ; pour les revenus de 2004, les 76.026 bénéficiaires de la mesure ont obtenu une réduction moyenne de 1.697 euros pour une dépense fiscale globale de 129 millions d'euros ;
5. la réduction d'impôt pour souscriptions de parts de FCPI (fonds communs de placement dans l'innovation) (article 199 terdecies -0 A VI du CGI) ; les 59.511 bénéficiaires de la mesure ont obtenu une réduction moyenne de 1.781 euros pour une dépense fiscale globale de 106 millions d'euros ;
6. la réduction d'impôt pour souscriptions en numéraire de parts de FIP (fonds d'investissement de proximité) (article 199 terdecies - 0 A VI bis du CGI) ; les 11.414 bénéficiaires de la mesure ont obtenu une réduction moyenne de 1.752 euros pour une dépense fiscale globale de 20 millions d'euros ;
7. le crédit d'impôt pour revenus distribués (art. 200 septies du CGI) ; la dépense fiscale est estimée à 720 millions d'euros en 2006, alors qu'elle profiterait à 6 millions de contribuables ;
8. la déduction dégressive sur les revenus des logements loués à usage d'habitation principale ( amortissement « Robien » ) (article 31-I-1°-h et 31 bis du CGI) ; la dépense fiscale est évaluée à 20 millions d'euros en 2004 et à 75 millions d'euros en 2005 ;
9. la déduction au titre de l'amortissement « Robien-ZRR » et « Daubresse » réalisés à compter du 1 er janvier 2006 ;
10. l'imputation sans limitation des déficits « secteurs sauvegardés ou assimilés Malraux » pour les autorisations de travaux données à compter du 1 er janvier 2006 (la dépense fiscale est « non chiffrable » d'après le « bleu » des voie et moyens ; le dispositif profiterait à environ 5.000 personnes par an) (article 31-I-1°b ter du CGI) ;
11. la réduction d'impôt pour investissements locatifs dans le secteur touristique (article 199 decies E, EA, F et G du CGI) ; les 7.837 bénéficiaires de la mesure ont obtenu une réduction moyenne de 2.169 euros pour une dépense fiscale globale de 17 millions d'euros ;
12. le crédit d'impôt pour dépenses d' équipements de l'habitation principale en faveur du développement durable et des économies d'énergie (article 200 quater ) ; au titre des revenus de 2004, les 849.696 bénéficiaires de la mesure ont obtenu une réduction moyenne de 457 euros pour une dépense fiscale globale de 388 millions d'euros ;
13. le crédit d'impôt en faveur de l' acquisition de véhicules propres (article 200 quinquies du CGI) ; la dépense fiscale, qui profite à près de 6.000 contribuables, est évaluée à 10 millions d'euros en 2004 ;
14. le crédit d'impôt pour primes d'assurance contre les loyers impayés (article 200 nonies du CGI) ; cette mesure a été introduite par la loi relative au développement des services à la personne, et son coût est estimé à moins de 500.000 euros pour 2006 ;
15. 16. Les deux réductions d'impôt sur le revenu relatives aux investissements dans les départements d'outre-mer, qui donnent lieu à un plafonnement spécifique ( infra ) ; en 2005, la dépense fiscale correspondant à la réduction d'impôt au titre des investissements locatifs de l'article 199 undecies A du CGI, qui profite à environ 22.400 contribuables, est évaluée à 162 millions d'euros pour un avantage moyen de l'ordre de 7.250 euros, et celle correspondant à la réduction d'impôt au titre des investissements productifs de l'article 199 undecie B du CGI, qui profite à plus de 5.500 contribuables, est évaluée à 310 millions d'euros , pour un avantage moyen approchant 55.650 euros.
2. Les avantages fiscaux « ayant pour contrepartie une prestation dont bénéficie le contribuable »
Le gouvernement a compté au rang des avantages fiscaux ayant pour contrepartie une prestation dont bénéficie le contribuable :
1. la réduction d'impôt pour emploi d'un salarié à domicile (article 199 sexdecies du CGI) ; en 2004, les 1.829.921 bénéficiaires de la mesure ont obtenu une réduction moyenne de 1.020 euros pour une dépense fiscale globale de 1,87 milliard d'euros ;
2. le crédit d'impôt pour frais de garde des jeunes enfants (article 200 quater B du CGI) ; en 2004, les 1.017.013 bénéficiaires de la mesure ont obtenu une réduction moyenne de 251 euros pour une dépense fiscale globale de 255 millions d'euros ;
3. la réduction d'impôt au titre de la souscription de la déclaration de revenus par voie électronique associée au paiement de l'impôt correspondant par voie de prélèvement ou électronique (article 199 novodecies du CGI) ; la dépense fiscale est évaluée à 105 millions d'euros en 2006.
*
Le total des dépenses fiscales calculables correspondant aux avantages fiscaux plafonnés ressort à 4,2 milliards d'euros .
Il est à noter que le présent article énumère limitativement les réductions et crédits d'impôt qui ne sont pas soumis au plafonnement général. Il en résulte que, sauf disposition contraire, tout nouveau crédit d'impôt et toute nouvelle réduction d'impôt sont appelés à y être soumis .
B. UN DISPOSITIF DE PLAFONNEMENT DÉDOUBLÉ
Dans sa rédaction initiale, le I du présent article insère un article 200-00 A et un article 200-0 A instaurant respectivement un mécanisme de plafonnement général et un plafonnement spécifique pour l'investissement dans les départements d'outre-mer.
•
Le
plafonnement
général
s'applique à 17 des
dépenses fiscales retenues. Il est prévu à raison de
8.000 euros par foyer majoré de 750 euros par personne
à charge
et pour chaque membre du foyer fiscal âgé
de plus de 65 ans, ainsi que de
5.000 euros en présence
d'une personne handicapée.
Il s'agit donc s'une
« enveloppe » dans la limite de laquelle les contribuables
peuvent effectuer des arbitrages entre les différents dispositifs
plafonnés.
Le 5 de l'article 200-00 A précité prévoit les modalités de reprise d'un avantage qui a été plafonné. Les avantages liés à des engagements pluriannuels du contribuable donnent normalement lieu à reprise, parfois quelques années après leur perception, lorsque les engagements auxquels est soumis le contribuable ne sont pas respectés.
Il est équitablement proposé qu'un avantage repris le soit à proportion de ce qu'il représentait dans la somme des avantages plafonnés. Ainsi, la reprise serait égale au montant du plafond multiplié par le rapport entre l'avantage en question et la somme des avantages plafonnés.
•
Un plafonnement spécifique
est proposé, «
compte tenu de leur importance
économique
», pour
les deux réductions
d'impôt sur le revenu relatives aux investissements dans les
départements d'outre-mer
. Il s'applique indépendamment
du plafonnement général, avec lequel il n'interfère pas.
L'avantage serait limité soit à 8.000 euros (plus des majorations pour personnes à charges ou handicapées dans des conditions identiques à celles retenues pour le plafond général), soit à 15 % du revenu net imposable si ce montant est supérieur .
*
Aussi bien pour le plafonnement général que pour le plafonnement spécifique, l'éventuel excédent est ajouté à l'impôt dû ou vient en diminution de la restitution d'impôt à laquelle le contribuable aurait droit.
Ainsi qu'il résulte du IV du présent article, le plafond doit s'appliquer uniquement aux nouveaux investissements , dépenses et aides, intervenus à partir du 1 er janvier 2006 . Il ne s'appliquera donc pas aux opérations d'investissement déjà en cours .
Le tableau suivant indique l'avantage fiscal maximal procuré par contribuable pour chacun des dispositifs soumis au plafond ; les dispositifs susceptibles, à eux seuls, de procurer un avantage excédent le plafond font l'objet d'aménagements ( infra ) :
Avantage fiscal maximal théorique procuré par les dispositifs plafonnés
Avantages fiscaux à caractère économique afférents à un investissement du contribuable |
Avantage fiscal maximal théorique |
||
Célibataire sans enfant à charge |
Marié sans enfant à charge |
Marié avec deux enfants à charge |
|
Souscriptions d'actions de SOFICA
(art. 163
septdecies
).
|
18.000 € x 40 % (RI au taux de 40 %) |
18.000 € x 40 % (RI au taux de 40 %) |
18.000 € x 40 % (RI au taux de 40 %) |
Pertes en capital subies par les créateurs d'entreprise (art. 163 octodecies A). Transformé en réduction d'impôt |
30.000 € x 40 % (RI au taux de 40 %) |
60.000 € x 40 % (RI au taux de 40 %) |
60.000 € x 40 % (RI au taux de 40 %) |
Réduction d'impôt pour investissements forestiers (art. 199 decies H) |
5.700 € x 25 % |
11.400 € x 25 % |
11.400 € x 25 % |
Réduction d'impôt « Madelin » : réductions d'impôt pour souscriptions en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés (art. 199 terdecies -0 A) |
20.000 € x 25 % |
40.000 € x 25 % |
40.000 € x 25 % |
Réductions d'impôt pour souscriptions de parts de fonds communs de placement dans l'innovation (FCPI) (art. 199 terdecies -0 A VI) |
12.000 € x 25 % |
24.000 € x 25 % |
24.000 € x 25 % |
Réduction d'impôt pour souscriptions en numéraire de parts de fonds d'investissement de proximité (FIP) (art. 199 terdecies - 0 A VI bis) |
12.000 € x 25 % |
24.000 € x 25 % |
24.000 € x 25 % |
Crédit d'impôt pour revenus distribués (art. 200 septies ) |
115 € |
230 € |
230 € |
Déduction au titre de l' amortissement « Robien » réalisé à compter du 1 er janvier 2006 |
Non déterminable |
||
Déduction au titre des amortissements « Robien-ZRR » et « Daubresse » réalisés à compter du 1 er janvier 2006 |
Non déterminable |
||
Imputation sans limitation des déficits « Secteurs sauvegardés ou assimilés Malraux » pour les autorisations de travaux données avant le 1 er janvier 2006 |
Non déterminable |
||
Réductions d'impôt pour investissements locatifs dans le secteur touristique (art. 199 decies E, EA, F et G) |
3.125 € max (RI pluriannuelle) |
6.250 € max (RI pluriannuelle) |
6.250 € max (RI pluriannuelle) |
Crédit d'impôt pour dépenses d'équipement de l'habitation principale en faveur du développement durable et des économies d'énergie (art. 200 quater ) |
8.000 € x taux de 15 % à 50 % |
16.000 € x taux de 15 % à 50 % |
16.900 € x taux de 15 % à 50 % |
Crédit d'impôt en faveur de l' acquisition de véhicules propres (art. 200 quinquies ) |
2.000 € par véhicule acquis ou transformé ou 3.000 € si destruction concomitante (1) |
||
Crédit d'impôt pour primes d'assurance contre les loyers impayés (art. 200 nonies ) |
50 % de la prime |
||
Réduction d'impôt pour emploi d'un salarié à domicile (art.199 sexdecies ) |
12.000 € ou 20.000 € si handicapé
|
12 000 € ou 20.000 € si contribuable ou PAC
handicapé
|
15.000 € ou 20.000 € si contribuable ou PAC
handicapé
|
Crédit d'impôt pour frais de garde des jeunes enfants (art. 200 quater B) |
2.300 € par enfant à charge de moins de 6 ans en garde x 50 % (2) |
||
Réduction d'impôt au titre de la souscription de la déclaration de revenus par voie électronique associée au paiement de l'impôt correspondant par voie de prélèvement ou électronique (art. 199 novodecies) |
20 € forfaitaire |
||
Réduction d'impôt au titre des investissements outre-mer dans le secteur du logement et autres secteurs d'activité (art. 199 undecies A du CGI) |
Montant de l'investissement plafonné par m² de
surface habitable étalé sur 5 ou 10 ans
|
||
Réduction d'impôt au titre des investissements outre-mer dans le cadre d'une entreprise (art. 199 undecies B du CGI) |
Montant de l'investissement
|
RI : réduction d'impôt ; PAC : personne à charge ; les références d'articles sont données dans le CGI.
(1) Montants modifiés par l'article 65 du PLF pour 2006.
(2) Taux prévu par l'article 62 du PLF 2006.
(3) Pour la détermination de l'avantage fiscal retenu dans le cadre du plafonnement spécifique, il n'est pas tenu compte de la part de la réduction d'impôt qui fait l'objet d'une rétrocession (infra).
Source : réponse au questionnaire budgétaire
C. L'ADAPTATION AU PLAFONNEMENT DES AVANTAGES DIMINUANT LE REVENU IMPOSABLE ET DE LA RÉDUCTION D'IMPOT « MADELIN »
Les dispositifs diminuant le revenu imposable sont transformés ou retraités afin de les soumettre au plafond général de réductions d'impôt. Par ailleurs, le montant annuel de la réduction « Madelin » pouvant excéder celui du plafond, il est prévu d'étaler son imputation dans le temps.
1. La transformation en crédits d'impôt des déductions du revenu global des souscriptions d'actions de SOFICA et des pertes en capital subies par les créateurs d'entreprise
La déduction du revenu global des souscriptions d'actions de SOFICA de l'article 163 septdecies du CGI ainsi que la déduction du revenu global des pertes en capital subies par les créateurs d'entreprise de l'article 163 octodecies A du CGI sont transformées en réduction d'impôt afin de les inscrire dans le dispositif de plafonnement.
•
Les souscriptions au capital des
SOFICA
La déduction des souscriptions au capital des SOFICA s'effectue aujourd'hui dans la double limite de 25 % du revenu net global et de 18.000 euros.
Le A du II du présent article prévoit que la réduction d'impôt sera égale à 40 % des souscriptions, retenue dans la double limite, demeurant inchangée, de 25 % du revenu net global et de 18.000 euros.
En fixant le taux de réduction d'impôt au niveau du taux de la dernière tranche du barème (40 %), la transformation serait neutre pour les contribuables dont les revenus marginaux excèdent 65.559 euros, et plus avantageuse pour les contribuables imposés dans des tranches inférieures .
•
Les pertes en capital des créateurs
d'entreprise
La déduction des pertes en capital des créateurs d'entreprises s'effectue dans la limite d'un plafond annuel de 60.000 euros de souscriptions pour les personnes mariées soumises à imposition commune et à 30.000 euros pour les autres contribuables.
Le B du II du présent article prévoit que la réduction d'impôt sera égale à 40 % des souscriptions, retenue dans la limite, demeurant également inchangée, de 30.000 euros pour une personne seule et de 60.000 euros pour les personnes mariées soumises à imposition commune.
Tout comme pour les souscriptions au capital des SOFICA, en fixant le taux de réduction d'impôt au niveau du taux marginal du barème, la transformation serait neutre pour les contribuables dont les revenus sont soumis à la tranche au taux de 40 % , et plus avantageuse pour ceux des contribuables dont les revenus sont imposés à des taux inférieurs .
Afin que l'application du plafond général ne puisse aboutir à « stériliser » le dispositif, il est proposé que la fraction de réduction d'impôt qui l'excéderait puisse être reportée les trois années suivantes . Ainsi, en atteignant le plafond de 60.000 euros de souscription, la réduction d'impôt, qui ressort à 24.000 euros, pourrait être étalée sur quatre ans, soit 6.000 euros en moyenne sur la période, laissant encore une marge supplémentaire moyenne de 2.000 euros annuels d'avantages plafonnés.
2. Le retraitement des avantages diminuant le revenu imposable (dispositifs « Robien » et « Malraux »)
Les déductions d'amortissement des dispositifs « Robien » et l'imputation de déficits fonciers sur le revenu global du dispositif « Malraux » ne se prêtent pas non plus au mécanisme de plafonnement général, qui repose sur la prise en compte d'avantages fiscaux sous forme de réductions d'impôt.
a) L'économie des dispositifs concernés
Dans le régime de droit commun, le revenu foncier net soumis au barème de l'impôt sur le revenu résulte du solde des recettes déterminant le revenu foncier brut (loyers et fermages, revenus accessoires et dépenses mises conventionnellement à la charge du locataire) et des charges de propriété déductibles que sont notamment les frais de gestion, d'assurance et d'amortissement que le propriétaire peut déduire forfaitairement au taux de 14 % du montant des recettes brutes, les dépenses d'entretien, de réparation et d'amélioration, les intérêts des dettes contractées pour l'acquisition, la construction, la réparation, l'amélioration ou la conservation des propriétés, les frais réels de gérance et de rémunération de concierge, les primes d'assurance pour loyers impayés, les impôts et les provisions pour charges .
Par ailleurs, les déficits fonciers ne sont normalement imputés que sur les revenus fonciers des 10 années suivantes. Toutefois, les déficits fonciers résultant de dépenses autres que les intérêts d'emprunt s'imputent sur le revenu global dans la limite annuelle de 10.700 euros .
•
Les dispositifs
« Robien »
Les dispositifs « Robien » permettent de déduire des recettes brutes un amortissement différent de celui couvert par la déduction forfaitaire de 14 % :
- dispositif « Robien » de l'article 31-I-1°-h du CGI
La déduction forfaitaire est ramenée à 6 % , mais à la condition de respecter certains plafonds de loyer au mètre carré fixés par décret, il peut être déduit en complément 8 % de l'investissement les cinq premières années , puis 2,5 % de l'investissement les dix années suivantes .
- dispositif « Robien SCPI » de l'article 31 bis du CGI
Dans les mêmes conditions, les personnes physiques souscrivant en numéraire au capital d'une société civile de placement immobilier (SCPI), peuvent bénéficier des déductions complémentaires précédentes sur une assiette s'élevant à 95 % de leur souscription.
•
Le dispositif
« Malraux »
Le régime résultant de la « loi Malraux » bénéficie aux propriétaires d'immeubles bâtis dans certaines zones protégées qui effectuent, à leur initiative ou à celle d'une collectivité publique , des travaux en vue de la restauration complète de ces immeubles . Dans les 12 mois qui suivent l'achèvement des travaux, le bien restauré doit être mis en location à usage d'habitation principale pour une durée minimale de 6 ans.
Afin de prendre en compte les dépenses exposées dans le cadre des opérations de restauration immobilière, les dépenses déductibles comprennent , outre les charges déductibles de droit commun, les dépenses de démolition imposées par l'autorité délivrant le permis de construire, de reconstitution de toiture ou de murs extérieurs qu'impliquent ces démolitions, de réaffectation ou de transformation en logement ainsi que les frais d'adhésion aux associations foncières urbaines de restauration (AFU).
Les déficits fonciers résultant de la prise en compte de l'ensemble des dépenses déductibles autres que les intérêts d'emprunt s'imputent alors sur le revenu global sans limitation annuelle .
En pratique, les travaux sont judicieusement répartis sur deux (voire trois) années civiles afin de réduire d'autant les revenus des l'investisseurs, généralement soumis au taux marginal supérieur du barème de l'impôt sur le revenu. A l'issue de la période de location imposée, le bien est souvent conservé en location une dizaine d'années afin de bénéficier, à l'occasion d'une revente susceptible de coïncider avec les dernières annuités des emprunts liés au financement de l'opération, d'une exonération de plus-value.
b) Le retraitement proposé
Le III du nouvel article 200-00 A inséré par le A du I du présent article propose que l'avantage en impôt résulte du produit des déductions et déficits par le taux moyen d'imposition du contribuable avant imputation et réductions des crédits d'impôt.
Le taux moyen résulte du rapport entre l'impôt et le revenu imposable . L'impôt retenu au numérateur serait constitué de l'impôt dû, majoré des réductions et crédits d'impôt imputés avant plafonnement et du prélèvement libératoire de l'impôt sur le revenu portant sur les produits de placement à revenus fixes.
Le revenu retenu au dénominateur comprendrait les revenus catégoriels nets de frais professionnels soumis au barème, diminués :
- des déficits catégoriels reportables sur le revenu global des 6 années suivantes ;
- de la fraction de CSG sur les revenus du patrimoine déductibles du revenu imposable de l'année de son paiement ;
- des pensions alimentaires et avantages en nature consentis à des personnes de plus de 75 ans cohabitant avec le contribuable ;
- des sommes déduites du revenu global au titre de l'épargne retraite ;
puis augmentés :
- des revenus taxés à un taux proportionnel (plus-values immobilières ou de cessions de valeurs mobilières);
- des revenus soumis au prélèvement forfaitaire libératoire sur les produits de placement à revenu fixe.
Ce revenu de référence diffère de celui pris en compte dans le mécanisme de plafonnement global des impôts figurant à l'article 58 du présent projet de loi de finances, qui a, lui, pour objectif d'évaluer les facultés contributives d'un foyer.
Il est à noter que le taux moyen d'imposition appliqué aux déductions ou déficits concernés est inférieur à l'avantage réel retiré par les contribuables concernés, qui se rapproche de leurs taux marginaux d'imposition appliqués au montant des mêmes déductions ou déficits .
Le tableau suivant fait apparaître la différence entre taux marginaux et taux moyens d'imposition s'appliquant aux revenus soumis au barème, qui peuvent avoisiner 20 points :
Source : commission des finances
L'exemple d'un célibataire dont les revenus nets de frais professionnels s'élèvent à 70.000 euros et qui impute sur son revenu global 20.000 euros de déficit foncier « Malraux » peut être retenu.
Dans le barème 2006, son impôt se trouverait effectivement ramené de 16.310 euros à 9.865 euros, soit une réduction de cotisation de 6.445 euros. Son taux moyen d'imposition ressortant à 23,3 %, l'avantage pris en compte pour le plafonnement serait limité à 4.660 euros.
Une évaluation exacte du bénéfice que retire le contribuable des dispositifs « Robien » et « Malraux » résulterait d'une double liquidation de l'impôt sur le revenu, qui permettrait de le faire apparaître par différence, mais un tel procédé aurait singulièrement complexifié la gestion du plafonnement.
3. L'étalement sur deux ans de la réduction d'impôt « Madelin »
a) L'économie du dispositif
La réduction d'impôt pour souscriptions en numéraire au capital initial ou aux augmentations de capital de sociétés de l'article 199 terdecies -0A du CGI, dite réduction d'impôt « Madelin », est égale à 25 % des souscriptions au capital de sociétés non cotées, ces souscriptions étant retenues dans la limite annuelle de 20.000 euros pour un contribuable célibataire, divorcé ou veuf, et de 40.000 euros pour des contribuables mariés soumis à imposition commune.
Les souscriptions ouvrent droit à la réduction d'impôt au titre de l'année de souscription et au titre des trois années suivantes, chaque fois dans les limites annuelles précitées .
b) L'étalement proposé
La réduction d'impôt maximale peut ici atteindre 10.000 euros , montant supérieur à celui du plancher du plafonnement général , qui est égal à 8.000 euros.
Ainsi, afin que le plafonnement général n'aboutisse pas à « stériliser » la réduction d'impôt « Madelin », le 1° du E du III du présent article permet d'imputer la réduction d'impôt soumise à plafonnement sur l'impôt dû au titre de l'année suivante dans les limites annuelles précitées.
Le montant de la réduction d'impôt « Madelin » reportable l'année suivante serait donc égal à la différence entre la réduction d'impôt « Madelin » au titre de l'année N (compte tenu le cas échéant d'un report de réduction « Madelin ») et le montant du plafond général d'imposition.
Les deux exemples suivants permettent d'apprécier la portée du mécanisme d'étalement proposé :
Couple ayant souscrit l'année N au capital d'une PME pour un montant de 160.000 euros
(en euros)
N |
N+1 |
N+2 |
N+3 |
N+4 |
|
Versement « Madelin » (plafond) |
40.000 |
40.000 |
40.000 |
40.000 |
|
Montant de la réduction d'impôt |
10.000 |
10.000 |
10.000 |
10.000 |
|
Réduction d'impôt reportée |
2.000 |
4.000 |
6.000 |
8.000 |
|
Plafond global de réduction d'impôt |
8.000 |
8.000 |
8.000 |
8.000 |
8.000 |
R éduction d'impôt reportable |
2.000
|
4.000
|
6.000
|
8.000
|
0 |
Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.
Couple ayant souscrit l'année N au capital d'une PME pour un montant de 130.000 euros et qui bénéficie d'autres réductions d'impôt
(en euros)
N |
N+1 |
N+2 |
N+3 |
N+4 |
|
Versement « Madelin » |
40.000 |
40.000 |
40.000 |
10.000 |
|
Montant de la réduction d'impôt |
10.000 |
10.000 |
10.000 |
2.500 |
|
Autres Réductions d'impôt |
5.000 |
3.000 |
4.000 |
2.000 |
4.000 |
Réduction d'impôt reportée |
2.000 |
4.000 |
6.000 |
500 |
|
Plafond global de réduction d'impôt |
8.000 |
8.000 |
8.000 |
8.000 |
8.000 |
R éduction d'impôt reportable |
2.000
|
4.000
|
6.000
|
500
|
0 |
Source : Ministère de l'économie, des finances et de l'industrie.
D. LES AVANTAGES FISCAUX LIÉS À L'INVESTISSEMENT EN OUTRE-MER
1. Les dispositifs concernés
La loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l'outre-mer a considérablement fait évoluer le cadre législatif des dispositifs de défiscalisation outre-mer , avec pour objectif d'en stabiliser le cadre juridique .
Ainsi, les opérations de défiscalisation sont prévues pour s'appliquer durant 15 ans à compter de la promulgation de la loi, soit jusqu'au 31 décembre 2017.
Une défiscalisation d'intérêt économique depuis plus d'un demi-siècle
La défiscalisation outre-mer a été mise en place pour la première fois en 1952 et en 1986 par la « loi Pons » sous sa forme actuelle . Le régime a connu depuis cette date de nombreuses évolutions. Les dispositions de la « loi Pons » ont été successivement modifiées par la loi de finances pour 1992, la loi de finances rectificative pour 1993, la loi de finances pour 1994, la loi de finances pour 1996, la loi de finances pour 1998, la loi de finances pour 1998, la loi de finances pour 1999 et dernièrement par la « loi Paul » issue de l'article 19 de la loi de finances pour 2001 du 30 décembre 2000. L'objectif affiché est de stimuler l'offre. Pour ce faire, la défiscalisation abaisse le coût du capital et par conséquent le seuil de rentabilité des investissements. Dès lors, elle se substitue de facto à une politique de subvention publique . La défiscalisation en outre-mer intervient en complément d'autres dispositifs, ainsi que le soulignait un rapport de l'inspection générale des finances : « la défiscalisation est souvent considérée par les acteurs publics locaux comme l'un des outils, au milieu d'un éventail plus large, dont ils disposent pour promouvoir le développement des économies d'outre-mer ». Notre ancien collègue Alain Richard, alors député, rapporteur général du budget, soulignait que la défiscalisation « a tout de même un mérite inestimable », puisque « elle ne correspond pas à une logique d'assistance, mais, au contraire, stimule l'initiative et favorise les adaptations ». |
Les articles 199 undecies A et 199 undecies B du CGI exposent les modalités des réductions de l'impôt sur le revenu accordées au titre des investissements productifs et des investissements dans le logement .
a) La réduction d'impôt pour investissement dans le secteur du logement
En application de l'article 199 undecies A du CGI , les contribuables bénéficient d'une réduction d'impôt sur le revenu lorsqu'ils investissent en outre-mer dans le secteur du logement ou dans certains autres secteurs. Ils déduisent une fraction du prix de revient ou d'achat du logement, ou bien du prix des parts acquises dans les sociétés visées, qui constitue l' assiette de la réduction d'impôt .
L'avantage en impôt est étalé sur un certain nombre d'exercices. L'assiette est divisée par ce nombre d'exercices pour obtenir la base annuelle , à laquelle s'applique le taux de la réduction d'impôt afin d'en déterminer le montant. Ces règles d'amortissement et ces taux diffèrent selon le type d'investissement , ainsi que le tableau suivant rend compte :
L'article 199 undecies A du CGI dispose que la réduction d'impôt s'applique (assiettes) : |
Base et durée de la réduction |
Taux
de la
|
a) Au prix de revient de l'acquisition ou de la construction régulièrement autorisée par un permis de construire d'un immeuble neuf que le propriétaire prend l'engagement d'affecter dès l'achèvement ou l'acquisition si elle est postérieure à son habitation principale pendant une durée de cinq ans ; |
10 % pendant
|
25 % |
b) Au prix de revient de l'acquisition ou de la construction régulièrement autorisée par un permis de construire d'un immeuble neuf que le propriétaire prend l'engagement de louer nu dans les six mois de l'achèvement ou de l'acquisition si elle est postérieure pendant cinq ans au moins à des personnes, autres que son conjoint ou un membre de son foyer fiscal, qui en font leur habitation principale ; |
20 % pendant 5 ans |
40 % |
c) Au prix de souscription de parts ou actions de sociétés dont l'objet réel est exclusivement de construire des logements neufs qu'elles donnent en location nue pendant cinq ans au moins à compter de leur achèvement à des personnes, autres que les associés de la société, leur conjoint ou les membres de leur foyer fiscal, qui en font leur habitation principale. Ces sociétés doivent s'engager à achever les fondations des immeubles dans les deux ans qui suivent la clôture de chaque souscription annuelle. Les souscripteurs doivent s'engager à conserver les parts ou actions pendant cinq ans au moins à compter de la date d'achèvement des immeubles ; |
||
d) Aux souscriptions au capital de sociétés civiles régies par la loi n° 70-1300 du 31 décembre 1970 fixant le régime applicable aux sociétés civiles autorisées à faire publiquement appel à l'épargne, lorsque la société s'engage à affecter intégralement le produit de la souscription annuelle, dans les six mois qui suivent la clôture de celle-ci, à l'acquisition de logements neufs affectés pour 90 % au moins de leur superficie à usage d'habitation. Ces sociétés doivent s'engager à louer les logements nus pendant cinq ans au moins à compter de leur achèvement ou de leur acquisition si elle est postérieure à des locataires, autres que les associés de la société, leur conjoint ou les membres de leur foyer fiscal, qui en font leur habitation principale. Les souscripteurs doivent s'engager à conserver les parts pendant cinq ans au moins à compter de ces mêmes dates ; |
||
e) Au montant des travaux de réhabilitation réalisés par une entreprise, à l'exclusion de ceux qui constituent des charges déductibles des revenus fonciers en application de l'article 31, et portant sur des logements achevés depuis plus de quarante ans que le propriétaire prend l'engagement, pour une durée de cinq ans, soit d'affecter dès l'achèvement des travaux à son habitation principale, soit de louer nu dans les six mois qui suivent l'achèvement des travaux à des personnes qui en font leur habitation principale et autres que son conjoint ou un membre de son foyer fiscal. Un décret détermine les conditions d'application de ces dispositions, et notamment la nature des travaux de réhabilitation éligibles ; |
20 % pendant 5 ans |
25 % |
f) Aux souscriptions en numéraire au capital des sociétés de développement régional des départements, territoires ou collectivités visés au 1 ou de sociétés soumises à l'impôt sur les sociétés dans les conditions de droit commun effectuant dans les douze mois de la clôture de la souscription des investissements productifs neufs dans ces départements, territoires ou collectivités et dont l'activité réelle se situe dans les secteurs éligibles pour l'application des dispositions du I de l'article 199 undecies B. Lorsque la société affecte tout ou partie de la souscription à la construction d'immeubles destinés à l'exercice d'une activité située dans l'un de ces secteurs, elle doit s'engager à en achever les fondations dans les deux ans qui suivent la clôture de la souscription. La société doit s'engager à maintenir l'affectation des biens à l'activité dans les secteurs visés ci-dessus pendant les cinq ans qui suivent leur acquisition ou pendant leur durée normale d'utilisation si elle est inférieure ; |
20 % pendant 5 ans |
50 % |
g) Aux souscriptions en numéraire,
agréées par le ministre chargé du budget, au capital de
sociétés qui ont pour objet le financement par souscriptions en
numéraire au capital ou par prêts participatifs, selon des
modalités et limites fixées par décret, d'entreprises
exerçant leur activité exclusivement outre-mer dans un secteur
éligible défini au I de l'article 199 undecies B et qui
affectent ces prêts et souscriptions à l'acquisition et à
l'exploitation d'investissements productifs neufs. Ces sociétés
spécialisées ne bénéficient pas, pour la
détermination de leur propre résultat, des déductions
prévues à l'article 217 undecies.
|
||
h) Aux souscriptions en numéraire au capital d'une société mentionnée au II bis de l'article 217 undecies, sous réserve de l'obtention d'un agrément préalable du ministre chargé du budget délivré dans les conditions prévues au III du même article. Les souscripteurs de parts ou actions des sociétés mentionnées aux f, g et h doivent s'engager à les conserver pendant cinq ans à compter de la date de la souscription. |
Une majoration de 10 points du taux de la réduction s'applique lorsque l'investissement est effectué dans une zone urbaine sensible , et une majoration de 4 points s'applique pour les dépenses d'équipement de production d' énergies renouvelables .
Par ailleurs, l'assiette est plafonnée à 1.800 euros par mètre carré de surface habitable.
Ce dispositif a été conçu pour l'outre-mer en raison d'une situation très dégradée du logement due notamment à des conditions climatiques particulières qui entraînent une dégradation rapide des immeubles. La dégradation est particulièrement sensible à Mayotte, ou la quasi-totalité des logements sont insalubres selon les normes françaises.
Au titre de l'article 199 undecies A, le montant de la dépense fiscale s'élève à 140 millions d'euros en 2004 , 162 millions d'euros en 2005 et il est prévu 180 millions d'euros pour 2006 . Cette évolution s'explique par la montée en puissance des dispositifs de la loi de programme pour l'outre-mer précitée .
b) La réduction d'impôt pour investissement productif
Les particuliers qui réalisent outre-mer certains investissements productifs dans le cadre d'une entreprise relevant de l'impôt sur le revenu bénéficient également d'une réduction d'impôt, dont les conditions sont fixées à l' article 199 undecies B du CGI .
1. Le calcul de la réduction d'impôt
La réduction d'impôt sur le revenu est accordée pour tous les investissements productifs réalisés dans l'économie d'outre-mer, à l'exception de certains secteurs limitativement énumérés, dont notamment le commerce, la restauration, la recherche et le développement, l'éducation, la santé et l'action sociale.
Ce principe d'éligibilité a été introduit par la loi de programme pour l'outre-mer du 21 juillet 2003.
• Le montant de la réduction
d'impôt
s'élève à :
- 50 % du montant de l'investissement dans le cas général, ce taux étant porté à 60 % en Guyane, à Mayotte, à Saint-Pierre-et-Miquelon ou à Wallis-et-Futuna ;
- 70 % du montant des investissements dans le domaine de la navigation de plaisance ;
- 60 % du montant des travaux de rénovation et de réhabilitation d'hôtel dans les anciens territoires d'outre-mer, taux porté à 70 % dans les départements, cette majoration étant notamment destinée à permettre une amélioration des résidences hôtelières aux Antilles, qui souffrent particulièrement de la concurrence des îles voisines.
• Le montant de l'avantage fiscal ne
revient cependant pas en totalité au contribuable, car une fraction doit
en être rétrocédée à l'exploitant
local
.
Le taux de rétrocession
est
fixé par la loi à :
- 60 % de la réduction d'impôt dans le cas général ;
- 50 % pour les projets dont le montant par programme est inférieur à 300.000 euros, ce taux inférieur étant justifié par le caractère généralement plus « risqué » des petits projets.
Ainsi, plus le taux de rétrocession est élevé, et plus l'avantage fiscal bénéficie à l'exploitant local, sous forme de baisse du loyer ( infra ).
Si le montant de la réduction d'impôt excède l'impôt dû par les contribuables, l'excédent constitue une créance sur l'Etat d'égal montant. Cette créance est utilisée pour le paiement de l'impôt sur le revenu dû au titre des années suivantes jusqu'à la cinquième année inclusivement. La fraction non utilisée est remboursée à l'expiration de cette période dans la limite d'un montant d'investissement de 1 525 000 euros .
Le montant de dépenses fiscales s'élève, pour l'ensemble de l'article 199 undecies B, à 250 millions d'euros en 2004 , 310 millions d'euros en 2005 et il est prévu 400 millions d'euros pour 2006 . De même, cette évolution s'explique par la montée en puissance des dispositifs de la loi de programme pour l'outre-mer précitée.
2. La délivrance de l'agrément
Afin de contrôler les opérations les plus importantes, un agrément fiscal , délivré par le ministre en charge du budget, est nécessaire pour tout projet représentant un montant supérieur à un million d'euros, ou 300.000 euros pour ceux qui sont réalisés dans les secteurs dits « sensibles ».
La délivrance par l'administration fiscale de l'agrément suppose que certaines conditions, communes à la défiscalisation au titre de l'impôt sur le revenu et au titre de l'impôt sur les sociétés, soient remplies :
Les conditions de délivrance de l'agrément de l'article 217 undecies du CGI « L'agrément est délivré lorsque l'investissement : « a) présente un intérêt économique pour le département dans lequel il est réalisé ; il ne doit pas porter atteinte aux intérêts fondamentaux de la nation ou constituer une menace contre l'ordre public ou laisser présumer l'existence de blanchiment d'argent ; « b) poursuit comme l'un de ses buts principaux la création ou le maintien d'emplois dans ce département ; « c) s'intègre dans la politique d'aménagement du territoire, de l'environnement et de développement durable ; « d) garantit la protection des investisseurs et des tiers. « L'octroi de l'agrément est subordonné au respect par les bénéficiaires directs ou indirects de leurs obligations fiscales et sociales et à l'engagement pris par ces mêmes bénéficiaires que puissent être vérifiées sur place les modalités de réalisation et d'exploitation de l'investissement aidé ». |
Il convient de relever que seuls les investissements réalisés après agrément font l'objet de dossiers qui permettent d'établir des statistiques sur l'impact des investissements en outre-mer .
3. Les modalités de la reprise
La réduction d'impôt étant conditionnée à la réalisation d'un investissement, l'administration peut reprendre l'avantage fiscal . En effet, l'article 199 undecies B précise que « si, dans le délai de cinq ans de son acquisition ou de sa création ou pendant sa durée normale d'utilisation si elle est inférieure, l'investissement ayant ouvert droit à réduction d'impôt est cédé ou cesse d'être affecté à l'activité pour laquelle il a été acquis ou créé, ou si l'acquéreur cesse son activité, la réduction d'impôt pratiquée fait l'objet d'une reprise au titre de l'année au cours de laquelle cet événement est intervenu ».
Le risque d'un investissement en outre-mer se mesure donc à la probabilité pour le contribuable de se voir reprendre l'avantage fiscal , en totalité, ou bien de manière à tenir compte de la durée d'utilisation de l'investissement en application de l'article 1756 du CGI qui offre la possibilité au ministre en charge budget de moduler le niveau de la reprise.
4. Le montage de l'opération
Le cas de figure le plus fréquent est celui du montage fiscal dit « externalisé » , qui permet à un contribuable métropolitain d'investir en outre-mer sans participer à l'exploitation du bien.
Le mécanisme du montage externalisé est relativement complexe. En pratique, un opérateur ultramarin (l'entreprise exploitante) qui désire acquérir un bien s'adresse à un cabinet spécialisé (un « monteur ») qui se propose de le financer en échange d'une rémunération. Pour ce faire, il réunit des contribuables, la plupart du temps en métropole, qui investissent dans une société en nom collectif (SNC) créée pour l'occasion. Avec la trésorerie ainsi constituée, la SNC achète les biens pour l'opérateur local, et les lui loue pour une durée de cinq ans. Le contribuable investisseur doit conserver les parts pendant la même durée.
Dans cette configuration, l'avantage fiscal est réparti comme suit :
• les contribuables peuvent déduire de leur
cotisation d'impôt 50 % de leur investissement, sachant qu'ils
doivent par ailleurs rétribuer le monteur et rétrocéder
une part de la réduction d'impôt à l'opérateur
local ;
• le monteur est rémunéré par
une partie de l'avantage fiscal, fixée par le marché. Le
rôle du monteur est donc primordial : il est l'intermédiaire
entre capacités et besoins de financement. Sa rémunération
est proportionnellement plus faible pour les projets importants en raison de
l'existence de coûts fixes (frais de gestion de la SNC notamment) ;
• l'opérateur local se voit octroyer une
partie de l'avantage, le « taux de rétrocession »,
dont le minimum est fixé par la loi, sous forme d'une baisse du loyer de
son bien. A terme, il devient propriétaire du bien.
Le schéma suivant permet de synthétiser le mécanisme du montage fiscal externalisé :
Le fonctionnement d'un montage « externalisé » financé par une SNC contribuable de l'impôt sur le revenu dans le cadre de l'article 199 undecies B du code général des impôts
Paye 50 d'impôt en n + 1 |
|||||||
Le gain net pour l'investisseur est de 12 |
8 sont consacrés à la rémunération du monteur |
20 (40 %) restent acquis au contribuable-investisseur |
Un contribuable doit payer 100 d'impôt et peut en défiscaliser 50 % |
||||
|
Investit 50 à partir de sa trésorerie de l'année n dans une SNC gérée par un monteur |
||||||
|
Il s'adresse à un monteur qui s'engage à lui fournir la machine et à la financer, dans le cadre d'une SNC, à partir de : |
30 (60 %) de réduction d'impôt rétrocédés 70 d'emprunt |
|||||
|
La SNC loue la machine à l'opérateur pour un loyer de 70 qui lui permet de rembourser son emprunt |
||||||
Gain net du monteur = 3 |
2. Un plafonnement spécifique
Il est rappelé qu' à coté du plafonnement général , prévu à raison de 8.000 euros par foyer majoré de 750 euros par personne à charge et de 5.000 euros en présence d'une personne handicapé, le B du I du présent article envisage un plafonnement spécifique concernant les deux réductions d'impôt sur le revenu relatives aux investissements dans les départements d'outre-mer. Son montant peut être calculé de la même façon que pour le plafonnement général, ou représenter 15 % du revenu net imposable si ce montant est plus favorable au contribuable .
Il convient de souligner que le plafonnement des réductions d'impôt au titre de l'investissement outre-mer est indépendant du plafonnement général : un contribuable pourrait « saturer » le plafond de 8.000 euros, en investissant, par exemple, dans les PME ( supra ), et investir en outre-mer dans la limite des 15 % de son revenu net, ce qui lui permettrait d'augmenter sensiblement de son gain fiscal.
Il est précisé que, le cas échéant, la réduction d'impôt retenue pour le plafonnement ne comprend pas la part rétrocédée à l'exploitant local , ce qui aboutit à ne pas désavantager les contribuables concernés.
Un exemple chiffré d'investissement productif Un contribuable dont le revenu imposable est égal à 100.000 euros peut investir jusqu'à 60.000 euros en outre-mer avant d'être concerné par le plafond. En effet : - cet investissement lui donne la possibilité d'obtenir une réduction de son impôt de 50 % de son investissement, soit 30.000 euros ; - il doit rétrocéder une fraction de cette somme à l'exploitant local ; avec un taux de rétrocession de 50 %, ce qui est le cas des petits projets, la réduction retenue pour le plafond d'imposition est de 15.000 euros ; - ces 15.000 euros correspondent précisément au plafond de 15 % de son revenu. Au travers de cet exemple, il apparaît qu'un investissement doit représenter 60 % du revenu pour atteindre le plafond. Si le taux de rétrocession atteint 60 %, ce qui correspond aux cas les plus fréquents, un contribuable doit, pour « saturer » le plafond, investir 75.000 euros, représentant 75 % de son revenu. |
Ainsi, les modalités de calcul du plafond spécifique apparaissent très avantageuses par rapport à celles du plafond général et votre rapporteur général estime que le dispositif proposé n'entraînerait pas a priori de risque d'une diminution du volume des investissements en outre-mer . Au contraire, il peut être avancé que les plus gros contribuables, susceptibles d'atteindre facilement le plafond de 8.000 euros, seraient incités à investir en outre-mer, où le gain fiscal ne serait pas limité en valeur absolue.
* *
*
Outre les mesures de coordination prévues aux A, B, C, D, 2° et 3° du E, F, G, H, et I du III du présent article, le J de son III propose un « toilettage » de la définition du revenu fiscal de référence en conséquence, notamment, des modifications précédentes.
Ainsi, les références à la déduction au titre des souscriptions au capital de SOFICA et à la déduction des pertes en capital des créateurs d'entreprises sont supprimées en raison de leur transformation en réductions d'impôt, et il est également proposé de supprimer certaines références à des dispositions qui ne se trouvent plus applicables aujourd'hui.
Il est enfin proposé d'ajouter aux revenus pris en compte pour le calcul du revenu fiscal de référence les revenus des salariés « impatriés », exonérés en vertu de l'article 81 B du CGI ainsi que les cotisations ou primes facultatives versées à un PERP, à un régime d'entreprise obligatoire ou au régime « Préfon » déductibles du revenu global. Il a en effet paru équitable que ces revenus exonérés soient pris en compte dans le revenu fiscal de référence.
III. LES MODIFICATIONS APPORTÉES À L'ASSEMBLÉE NATIONALE
A. UN « DÉLAI DE RÉFLEXION » POUR LE PLAFONNEMENT DES AVANTAGES LIÉS AUX INVESTISSEMENTS DANS LES DOM
A l'initiative du gouvernement , et avec l'avis favorable de sa commission des finances, l'Assemblée nationale a adopté un amendement qui tend à supprimer le B du I du présent article, c'est-à-dire le dispositif spécifique de plafonnement des réductions d'impôt relatives à l'investissement en outre-mer , tout en excluant ces dernières du plafonnement général.
Cet amendement a été sous-amendé , avec l'accord du gouvernement et de la commission des finances, par certains de nos collègues députés d'outre-mer. Ce sous-amendement dispose que « les conditions dans lesquelles les investissements visés aux articles 199 undecies A et 199 undecies B du code général des impôts pourront être pris en compte dans le plafonnement prévu à l'article 200-00 A du même code, seront fixés après la transmission par le gouvernement à l'Assemblée nationale et au Sénat du rapport d'évaluation prévu à l'article 38 de la loi n° 2003-660 du 21 juillet 2003 de programme pour l'outre-mer. Ce rapport sera établi par une commission d'évaluation composée , dans des conditions définies par décret, notamment de parlementaires ».
Afin de justifier le retrait de cette disposition, et donc la suppression du plafonnement pour les investissements en outre-mer, le gouvernement a avancé deux arguments :
- l'engagement de l'Etat formulé lors de la discussion de la loi de programme pour 2003 , dont un des objectifs était bien de stabiliser le cadre juridique des investissements en outre-mer pour 15 ans ;
- l'article 38 de la loi de programme précitée introduit au Sénat à l'initiative de notre collègue Roland du Luart , rapporteur au fond, qui dispose qu' « à compter de 2006 , le gouvernement remet tous les trois ans au Parlement, avant le dépôt du projet de loi de finances pour l'année à venir, un rapport évaluant l'impact socio-économique des articles 199 undecies A, 199 undecies B, 199 undecies C, 217 undecies, 217 bis et 217 duodecies du code général des impôts » . Il convient de relever que le sous-amendement adopté par l'Assemblée nationale prévoit la participation de parlementaires au dispositif d'évaluation .
Lors de la présentation de son amendement de suppression, le ministre délégué au budget et à la réforme budgétaire, M. Jean-François Copé, a indiqué pour sa part que « l'« ultrapériphéricité » ainsi que les retards de développement justifient de ne pas appliquer le plafonnement tant que nous de disposons pas de l'évaluation prévue par la loi sur l'outre-mer, qui doit avoir lieu avant six mois. Faisons preuve de pragmatisme ».
B. UN PLAFONNEMENT PARTIEL DE LA LOI « MALRAUX »
A l'initiative de sa commission des finances, l'Assemblée nationale avait adopté, en première délibération, un amendement tendant exclure le dispositif fiscal issu de la loi Malraux du plafonnement général dont dispose le présent article.
D'après les auteurs de l'amendement, « ce système de plafonnement est susceptible de fragiliser les secteurs sauvegardés de nos villes et à condamner à terme les ZPPAUP, qui concernent à eux deux 600 villes . (...) Le bénéfice du dispositif actuel est réservé aux logements (..). Devant la raréfaction des terrains constructibles ou la nécessité d'éviter un étalement urbain, la majorité des villes est consciente de la nécessité de « redensifier » les centres villes et donc de restaurer, réhabiliter les centres anciens. La loi Malraux est un des outils essentiels à cet effet. Le plafonnement le condamne » .
Cet amendement n'avait pas reçu l'avis favorable du gouvernement, qui lui préférait un amendement présenté par notre collègue Hervé Mariton et soutenu, à titre personnel, par notre collègue député Gilles Carrez, rapporteur général de la commission des finances. Ce texte proposait simplement de ne pas tenir compte, pour la détermination de l'avantage fiscal « Malraux » soumis au plafonnement, du déficit provenant des charges spécifiques et des intérêts d'emprunt engagés pour la restauration complète de l'immeuble .
L'Assemblée nationale a adopté, en deuxième délibération, un amendement présenté par le gouvernement rejoignant le texte proposé par notre collègue Hervé Mariton.
C. UNE « FAMILIALISATION » PARTIELLE DU DISPOSITIF
Afin « d'accroître la prise en compte de la famille dans la politique fiscale du gouvernement », l'Assemblée nationale a adopté, à l'initiative de la commission des finances et avec l'assentiment du gouvernement un amendement tendant à rehausser de 750 euros à 1.000 euros la majoration par personne à charge initialement prévue pour le plafonnement général initial.
*
* *
L'Assemblée nationale a en outre adopté, à l'initiative de sa commission des finances et avec l'avis favorable du gouvernement, dix amendements de précision ou de nature strictement rédactionnelle.
IV. LA POSITION DE VOTRE COMMISSION DE FINANCES
Avant que votre rapporteur général ne formule un jugement général sur le dispositif proposé, il importe qu'il revienne sur les importantes modifications apportées par l'Assemblée nationale.
A. LE « DÉLAI DE RÉFLEXION » POUR LE PLAFONNEMENT OUTRE-MER
Votre rapporteur général estime qu'il convient d'étudier la question du plafonnement des avantages fiscaux en outre-mer avec le plus grand pragmatisme, suivant deux axes :
- du point de vue des départements et collectivités d'outre-mer , quelle est l'efficacité socio-économique du dispositif d'aide spécifique mis en place depuis 1992 rapportée à son coût ?
- du point de vue du contribuable , quel est le risque pour l'investisseur, risque qui justifie le rendement élevé associé à la défiscalisation ?
Il convient de souligner que cette réflexion, nécessaire, ne sous-estime pas les besoins spécifiques de l'outre-mer , caractérisée par un taux de chômage élevé et des difficultés dans le domaine du logement. Il ne s'agit pas de nier ces particularités, qui justifient des politiques publiques spécifiques, mais bien au contraire de mesurer leur efficacité afin, le cas échéant, de mieux affecter les crédits .
Sur ces deux points cependant, force est de constater que les données ne sont que très parcellaires et les évaluations presque inexistantes.
1. L'impact de la défiscalisation sur les économies ultramarines
En ce qui concerne l'efficacité du système , les données relatives à l'impact réel en termes d'emploi et de croissance des dispositifs d'aide en outre-mer sont limitées, et ne couvrent qu'une partie des investissements. Ainsi, seuls les investissements qui ont fait l'objet d'une demande d'agrément traitée par le bureau des agréments de la direction générale des impôts comportent des obligations en matière de création d'emploi .
Le rapport sur « les conditions de la mise en oeuvre de l'agrément prévu en faveur des investissements réalisés dans certains secteurs économiques des départements et territoires d'outre-mer », établi par la direction générale des impôts en application du III de l'article 120 de la loi de finances pour 1992, comporte cependant des indications relativement précises, mais qui ne concernent qu'une partie de la défiscalisation.
En 2004, il est ainsi indiqué que le coût budgétaire total de l'aide fiscale accordée, qui regroupe donc à la fois l'impôt sur le revenu et l'impôt sur les sociétés, mais uniquement pour les investissements les plus importants qui ont fait l'objet d'un agrément, s'élève à 470,99 millions d'euros . La défiscalisation au titre de l'impôt sur le revenu représente pour sa part environ 390 millions d'euros selon le fascicule des « voies et moyens ».
Le rapport précise que le nombre d'emplois directs que les promoteurs des projets agréés se sont engagés à créer en 2004 est de 1.897 , ce résultat n'englobe cependant pas les emplois qui ont pu être maintenus ou indirectement induits. On peut cependant voir que le coût moyen de chacun de ces emplois, et en tenant compte des biais méthodologiques, s'élève à environ 248.000 euros .
Le tableau suivant indique la répartition géographique des investissements agréés au titre de la défiscalisation à l'impôt sur le revenu pour 2004 , qui bénéficient donc d'un avantage fiscal compris entre 50 % et 70 %. Il ne tient pas compte des investissements réalisés au titre de l'impôt sur les sociétés.
Volume des investissements agréés en 2004
(en millions d'euros)
Nature de l'investissement |
Guadeloupe |
Guyane |
Martinique |
Réunion |
Polynésie |
Nouvelle-Calédonie |
SPM |
Mayotte |
Wallis et Futuna |
Investissement productif
|
79,5 |
26,9 |
82,9 |
109,2 |
142,9 |
60,0 |
6,6 |
6,0 |
11,3 |
Logement (1)
|
- |
- |
- |
- |
- |
18,8 |
- |
- |
- |
Total |
79,5 |
26,9 |
82,9 |
109,2 |
142,9 |
78,8 |
6,6 |
6,0 |
11,3 |
(1) les investissements réalisés au titre du logement font peu souvent l'objet d'une demande d'agrément, compte tenu de leurs montants.
Le total général s'établit à 544,1 millions d'euros . Il convient de relever que ce montant ne correspond pas à celui des « Voies et Moyens », qui chiffrent la dépense fiscale à 390 millions d'euros pour cette année 2004. Cette différence s'explique par deux facteurs :
- d'une part, ces 390 millions d'euros correspondent à une estimation de l'ensemble de la défiscalisation dont une partie n'est pas soumise à l'agrément ;
- d'autre part, un volume d'investissement agréé une année peut couvrir une défiscalisation étalée sur 5 ans au maximum .
On constate que les plus forts investissements sont constatés en Polynésie française, ce qui correspond à l'essor de l'industrie hôtelière de luxe dans cette collectivité. Les données postérieures ne sont pas disponibles.
Dans le cas des anciens territoires d'outre-mer, il faut relever que les possibilités de contrôle par l'administration sont plus réduites que pour les départements d'outre-mer , la Polynésie et la Nouvelle-Calédonie disposant de l'autonomie fiscale. L'article 42 de la loi de programme pour l'outre-mer précitée a cependant inséré un article L. 45 E au livre des procédures fiscales, qui dispose que « les agents mandatés par le directeur général des impôts peuvent contrôler sur le lieu d'exploitation le respect des conditions liées à la réalisation, l'affectation et la conservation des investissements productifs ayant ouvert un droit au bénéfice des dispositions des articles 199 undecies A, 199 undecies B, 217 undecies et 217 duodecies du code général des impôts et prévues aux mêmes articles ». Cependant, le contrôle reste délicat, et les agents mandatés, en plus de l'éloignement, ne sont pas en droit de disposer d'éléments aussi complets dans les entreprises que dans les départements.
2. Le risque supporté par les investisseurs
En ce qui concerne le risque pour le contribuable , il faut rappeler que, dans le domaine des investissements productifs, l'article 199 undecies B précise que l'avantage est repris si l'investissement cesse d'être affecté ou est cédé sans objectif de production. L'administration n'a pas été en mesure de fournir une estimation précise de ce risque . Il ressort cependant que depuis le 1 er janvier 2000, 16 procédures de retrait d'agrément ont été menées, que l'on peut comparer aux 422 réponses positive pour la seule année 2004 : il semble donc que le risque soit peu élevé, à s'en tenir à ce seul indicateur. En fait, pour porter un jugement plus complet, il faudrait connaître le devenir des projets économiques ainsi financés : selon les qualifications et l'honnêteté des gérants et des monteurs, nombre d'entre eux n'atteignent pas les objectifs de rentabilité envisagés, et leurs résultats effectifs viennent limiter la performance escomptée par les investisseurs. Dans certains cas, compte tenu de l'implication directe et personnelle de ces derniers dans les SNC, des pertes en capital peuvent être constatées, avec des conséquences contentieuses. Malheureusement, l'administration n'est pas en mesure de centraliser utilement de telles informations.
B. UNE PROPOSITION POUR RENFORCER L'EFFICACITÉ DE LA LOI « MALRAUX »
Votre rapporteur général ne considère pas que le dispositif voté par l'Assemblée nationale en seconde délibération soit satisfaisant.
En effet, en proposant de ne pas tenir compte du déficit provenant des charges spécifiques engagées pour la restauration complète de l'immeuble, le texte adopté par l'Assemblée nationale risque de compliquer excessivement le dispositif et de multiplier les contentieux dans la mesure où il sera difficile de déterminer la part exacte de ce qui relève, dans les dépenses de rénovation, des charges énumérées au b ter de l'article 31 du CGI au titre des contraintes d'un secteur sauvegardé.
En outre, selon les évaluations fournies à votre rapporteur général, les dépenses relevant du b ter de l'article 31 du CGI ne représenteraient qu'une part très limitée des dépenses liées aux opérations de réhabilitation , puisqu'elles seraient à l'origine, en termes de dépense fiscale, d'environ 26 millions d'euros sur un total de 147 millions d'euros.
Pour pallier ces difficultés, votre rapporteur général vous propose un amendement dont le double objet consiste :
- à retenir un système forfaitaire simple qui exclut une partie des dépenses globales liées aux travaux de rénovation, que ces dépenses relèvent ou non des dépenses spécifiques visées au b ter de l'article 31 CGI ;
- à établir une distinction entre les secteurs sauvegardés d'une part et les ZPPAUP d'autre part, les premiers bénéficiant d'un traitement plus favorable dans la mesure où la part des dépenses déplafonnées y serait des deux tiers au lieu de la moitié. Cette différence de traitement est justifiée par la volonté de compenser les contraintes et les exigences plus fortes imposées pour la création de secteurs sauvegardés par rapport aux ZPPAUP.
C'est ainsi que si les secteurs sauvegardés « peuvent être créés lorsqu'ils présentent un caractère historique, esthétique ou de nature à justifier la conservation, la restauration et la mise en valeur de tout ou partie d'un ensemble d'immeubles bâtis ou non », les ZPPAUP peuvent être plus simplement « instituées autour des monuments historiques et dans les quartiers, sites et espaces à protéger ou à mettre en valeur pour des motifs d'ordre esthétique, historique ou culturel ».
En outre, les secteurs sauvegardés sont créés après avis de la Commission nationale des secteurs sauvegardés alors que la création des ZPPAUP est soumise au seul avis de la commission régionale du patrimoine et des sites.
La souplesse de création des ZPPAUP, bien que compensée par la procédure obligatoire de déclaration d'utilité publique, trouve son illustration dans le nombre de procédures en cours ou abouties, près d'un millier selon les informations recueillies par votre rapporteur général, alors que les secteurs sauvegardés seraient moins d'une centaine.
C. UN DISPOSITIF COMPLEXE DONT LE RENDEMENT FISCAL ET L'ÉQUITÉ DEVRONT ÊTRE AMÉLIORÉS
1. L'équilibre du dispositif de plafonnement proposé
a) Un choix acceptable de dispositifs plafonnés de manière à préserver leur efficacité...
L'évaluation du bien fondé de la soumission -ou de l'exclusion- des différents avantages au plafond doit se faire en gardant à l'esprit que toute démarche d'exclusion supplémentaire compromet forcément le rendement fiscal du plafonnement et accroît les forces centrifuges qui ne manquent pas de se manifester.
Votre rapporteur général, à défaut d'une démarche globale de plafonnement, approuve le choix des avantages fiscaux « qui sont la conséquence d'une situation choisie par le contribuable ». Il lui semble, en effet, commandé par l'équité . Quelques observations peuvent être formulées au titre de certains des avantages ainsi plafonnés.
La soumission au plafond de la réduction d'impôt au titre de la souscription de la déclaration de revenus par voie électronique, censée correspondre à une stratégie « gagnant-gagnant » pourrait sembler contestable, mais l'administration fiscale, dont les effectifs ne s'adaptent que lentement à l'évolution des besoins, n'est probablement pas en mesure d'enregistrer des économies de personnel à la mesure du succès galopant de la télédéclaration d'impôt sur le revenu.
Si l'inclusion dans le plafond du crédit d'impôt pour revenus distribués aboutit à rendre plus sévère encore la réforme de l'avoir fiscal, déjà jugée trop défavorable aux contribuables par la commission des finances , les mesures de cohérence avec l'intégration de l'abattement de 20 % au barème figurant à l'article 60 du présent projet de loi de finances procurent un léger avantage à ces revenus.
Concernant les avantages fiscaux favorisant l'investissement dans les PME, la réduction « Madelin » (qui peut atteindre 10.000 euros par foyer fiscal) et la réduction pour pertes en capital subies par les créateurs d'entreprises (qui peut atteindre 24.000 euros par foyer fiscal), ainsi susceptibles de dépasser le plafond, ont été habilement aménagées ( supra ).
On ne saurait regretter le plafonnement de l'« amortissement Robien », qui favorise une tension sur les prix de l'immobilier neuf de nature à se diffuser à l'immobilier ancien, et doit être jugé inflationniste. Cela d'autant plus que, tout comme pour le dispositif « Malraux », le calcul de l'avantage en référence au taux d'imposition moyen aboutit à minimiser l'avantage fiscal réel au regard du plafond général.
Enfin, le calcul de ce plafond a été « calé » sur celui de la réduction d'impôt pour garde d'enfant à domicile afin d'en préserver, en toute hypothèse, l'efficacité, tout en ménageant un « volant » minimal de 2.000 euros d'avantages supplémentaires soumis au plafond général. L'augmentation des majorations votées à l'Assemblée nationale engendre une marge encore plus importante et diminue d'autant le risque d'un arbitrage fiscal qui se ferait en défaveur des emplois familiaux.
Bien sûr, votre rapporteur général approuve que les « versements sans contrepartie », c'est-à-dire essentiellement les dons aux associations et fondations, soient exclus du plafonnement.
b) ... au détriment du rendement fiscal
La difficulté de calibrer un dispositif de plafonnement provient de ce que certains avantages fiscaux destinés à favoriser l'investissement procurent une économie fiscale importante à un nombre relativement restreint de contribuables .
Dès lors, soit le plafond est suffisamment élevé pour que ces avantages fiscaux demeurent incitatifs pour la plupart des investisseurs, mais avec une dépense fiscale faiblement contenue, soit le plafond est suffisamment faible pour diminuer substantiellement la dépense, mais le risque est alors important d'une « stérilisation » des plus gros avantages fiscaux.
Avec seulement 6.900 contribuables qui se trouveraient « plafonnés » en application du présent article pour un gain fiscal de l'ordre de 50 millions d'euros soit 0,1 % du produit de l'impôt sur le revenu et moins de 1,2 % des dépenses fiscales plafonnées, le schéma proposé par le gouvernement paraît tomber dans le premier écueil, notamment au profit de l'investissement dans les DOM en raison d'un plafonnement spécifique proportionnel au revenu. Du reste, sa suppression « provisoire » à l'Assemblée nationale entraînerait une perte fiscale mineure.
Néanmoins, l'évaluation ne concerne que 2007, et le gain fiscal est appelé à augmenter par la suite en raison de la montée en charge progressive des dispositifs d'investissements plafonnés , seules les opérations postérieures au 1 er janvier 2006 étant concernées. Cette accélération attendue n'aurait cependant pu faire l'objet d'aucun chiffrage.
2. De possibles effets pervers
a) Les risques de substitution
Il est nécessaire de faire en sorte que les avantages situés hors plafond ne soient que faiblement substituables aux avantages plafonnés , sans quoi les décisions résultant de comportements d'optimisation fiscale pourraient évoluer au détriment de certains secteurs.
S'il est exact que les avantages liés aux investissements constituent un ensemble identifiable, il n'en demeure pas moins que certains contribuables pourraient arbitrer en défaveur de l'investissement au profit, par exemple, d'un plan d'épargne populaire, qui est un dispositif non plafonné, ou, « provisoirement », de l'investissement outre-mer. Même s'il était maintenu, le plafonnement spécifique à l'outre-mer, comparativement avantageux, ne manquerait pas d'entraîner un redéploiement des investissements à visées fiscales des secteurs soumis au plafonnement de droit commun vers les DOM...
D'ailleurs, c'est bien ce type de risque qui a conduit le gouvernement à ne pas plafonner les dispositifs visant à encourager les « versements sans contrepartie ».
Les solutions alternatives : plafonds distincts ou plafond unique ? Il était possible d'envisager d'autres mécanismes : -(1) confondre le plafonnement outre-mer avec le plafond unique : le plafonnement général, qui comprendrait l'outre-mer, n'excèderait donc pas 8.000 euros (+ majorations) ; toutefois, il serait porté à 15 % du revenu si ce montant excède les 8.000 euros, mais le supplément de plafond ainsi obtenu ne pourrait profiter qu'à l'outre mer ; -(2) inclure dans le plafond spécifique d'autres avantages fiscaux liés à l'investissement (réduction Madelin, réductions pour souscription de parts de FCPI et de FIP...) ; -(3) une combinaison de (1) et (2) ; -(4) en rester à un plafond fixe unique de 8.000 euros + majorations, et affecter les avantages fiscaux, notamment les plus « coûteux » par contribuable, d'un coefficient compris entre 0 et 1, fixé en fonction décroissante de leur utilité économique. Par exemple, l'avantage outre-mer pourrait être retenu pour 25 % de son montant à l'intérieur du plafond de 8.000 euros. Les différents avantages fiscaux s'imputeraient sur le plafond dans l'ordre croissant des coefficients qui leur seraient associés, afin d'optimiser l'avantage procuré par le plafond au contribuable ; -(5) enfin une dernière piste pourrait consister à plafonner les niches en pourcentage de l'impôt avant réductions, ce qui relèverait de la notion de « plancher fiscal », à caractère citoyen, par symétrie avec le plafonnement général de impôts figurant à l'article 58 du présent projet de loi de finances (infra). |
b) Une « familialisation » sans « conjugalisation »
La « familialisation » du plafond ne s'impose pas : dans l'impôt sur le revenu, la prise en compte des personnes à charge se fait normalement au travers du quotient familial, et rien ne justifierait de démultiplier à l'excès ce mécanisme au moyen d'un plafonnement à géométrie variable.
Dans le dispositif initial, la majoration de 750 euros par personne constitue cependant un élément de « familialisation » justifiable , dans la mesure où elle tend simplement à prendre en compte les nombreuses familles bénéficiant de la réduction d'impôt pour l'emploi d'une personne à domicile. L' augmentation de 250 euros de cette majoration, décidée par l'Assemblée nationale, n'appelle pas de commentaire particulier au vu de sa relative modicité ; on comprendrait mal pourquoi le fait d'avoir des personnes à charge devrait renforcer significativement le potentiel de défiscalisation.
En revanche, le système proposé, en attribuant le plafond par foyer fiscal et non par contribuable, aboutit à favoriser les célibataires au détriment des couples avec, lors d'un mariage ou de la souscription d'un PACS, un plafond fortement diminué, passant de 16.000 euros (+ majorations) à 8.000 euros (+ les mêmes majorations). Cette asymétrie est d'autant plus frappante que la majorité des avantages fiscaux concernés, lorsqu'ils sont limités, prennent en compte le nombre de contribuables en différenciant l'avantage maximal procuré aux célibataires et aux couples. Certes, une stricte « conjugalisation » du plafonnement serait coûteuse car elle impliquerait un doublement du plafond pour tous les couples -sauf à fixer un plafond par contribuable d'un montant beaucoup plus faible, ce qui aboutirait alors à une « stérilisation » partielle de la plupart des avantages fiscaux concernés.
3. Réflexion en faveur de l'instauration d'un plancher d'imposition
Au cours de sa réflexion sur les modalités techniques du plafond (cf. encadré supra ), votre commission des finances a envisagé de doubler le dispositif proposé par un plafond supplémentaire portant sur l'ensemble des avantages fiscaux.
Il s'agirait de rapporter l'économie d'impôt procurée par ces avantages fiscaux à l'impôt qui serait dû en leur absence , et de plafonner cet avantage à une certaine fraction de cet impôt .
Un tel mécanisme aurait un sens pour les contribuables les plus aisés , car il pourrait sembler excessif , compte tenu, d'une part, de l'amélioration du barème, et, d'autre part, de la mise en place du « bouclier fiscal », que ces derniers puissent parvenir à une diminution drastique de leur impôt sur le revenu, quelle que soit la nature des avantages fiscaux sollicités .
Cependant, en retenant, à titre d'illustration, une fraction de 50 %, il apparaît que ce dispositif aboutirait à une injustice : il frapperait plus fortement les classes moyennes, pour lesquelles le plafond ainsi défini serait assez vite atteint, bien que représentant en valeur absolue des montants beaucoup plus faibles que ceux déduits par des contribuables aisés qui n'atteindraient pas, pour autant, ce seuil de 50 %. Par ailleurs, une telle solution aboutirait à remettre en cause l'ensemble des crédits d'impôt, puisque la fraction de la cotisation d'impôt restant due constituerait un plancher d'imposition, au minimum égal à zéro et empêchant donc toute restitution.
En revanche, ce mécanisme retrouverait une cohérence s'il ne portait que sur les revenus excédant un certain montant. Ainsi, notre collègue Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances de l'Assemblée nationale, a déposé un amendement tendant à plafonner les avantages fiscaux à 50 % du montant de l'impôt sur le revenu « dû à raison des revenus excédant le seuil de la dernière tranche du barème ».
Cette solution, qui revient à doubler le « plafonnement des impôts » mis en place par l'article 58 du présent projet de loi de finances, d'un « plancher d'imposition » évoluant avec l'importance du revenu imposable, aurait le mérite de conforter le principe général de plafonnement des niches fiscales.
Notre collègue Pierre Méhaignerie, président de la commission des finances, a retiré son amendement en séance plénière après avoir obtenu l'engagement « solennel et formel » de M. Jean-François Copé, ministre délégué au budget et à la réforme de l'Etat, de « créer un groupe de travail » sur la « formule juridiquement la plus opportune ». Mis en place « avant la fin de l'année 2005 » et composé « des membres des commissions des finances des deux assemblées », ce groupe est appelé à rendre ses conclusions « début 2006 ».
Le « cas particulier » de l'outre-mer ne doit pas échapper à cette logique d'efficacité et de justice . Votre rapporteur général estime à ce propos, compte tenu des données en sa possession, que les avantages fiscaux consentis n'ont pas fait la preuve de leur efficacité , alors même que le coût en termes de dépenses fiscales est important. Il serait plus logique de remplacer ces dispositions par des crédits budgétaires clairement identifiés, contrôlables, et qui dont on pourrait mesurer la réelle utilité .
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* *
Au total, le dispositif ici proposé traduit une recherche d'équité méritoire, mais il aboutit inévitablement à des complexités et à des insatisfactions .
Surtout, il serait à craindre que la nouvelle logique imprimée par le plafonnement des avantages fiscaux ne soit pas celle d'une réduction de leur nombre, mais celle d'une prolifération sous contrôle de la dépense fiscale .
Le présent projet de loi finances n'apporte-t-il pas déjà, ainsi, son lot d'« améliorations », avec la création d'un crédit d'impôt pour favoriser la mobilité des chômeurs de longue durée ou des salariés perdant leur emploi à la suite d'un plan social (article 7), le renforcement des avantages liés à l'acquisition d'un véhicule propre (article 66) ou les dépenses d'équipement de l'habitation principale dès lors qu'elles amélioreraient la « performance énergétique » des logements (article 67) ? Et cela sans compter les multiples niches créées dans les lois sectorielles, qui ne cessent de proliférer, ainsi qu'on a pu le constater récemment avec le projet de loi portant Engagement national pour le logement.
Si le gouvernement n'adoptait pas pour objectif final une remise en cause générale des différentes « niches fiscales », la présente tentative d'une diminution de la dépense fiscale pourrait bien tourner court, sous l'effet conjugué des lobbys et des experts en stratégie fiscale.
Au total, il ne resterait alors de la réforme qu'une nouvelle complexification de la fiscalité du revenu, étant entendu que la simplification du barème de l'article 59 du présent projet de loi tient aussi de la présentation. Déjà pour 2007, le gain fiscal résultant du plafonnement proposé, évalué par Bercy à 50 millions d'euros dans sa configuration initiale, paraît ténu et en tout cas sans commune mesure avec le coût de la réforme du barème...
Le dernier rapport du Conseil d'analyse économique, intitulé « Croissance équitable et concurrence fiscale », préconise une suppression intégrale des « niches » dans le cadre d'une baisse générale du barème de l'IR assorti d'un renforcement de la CSG, pour un niveau de prélèvement obligatoire globalement inchangé...
La réforme proposée par le gouvernement, en ne faisant qu'« écorner » les avantages fiscaux tout en bonifiant le barème au prix d'une diminution du rendement de l'impôt sur le revenu, doit être parachevée pour constituer une démarche pleinement cohérente.
Elle est cependant acceptable comme première transition vers un retrait de tous les avantages, à l'exception du quotient familial. Un plan de suppression progressive des régimes préférentiels, y compris ceux concernant l'outre-mer, devrait être mis en place pour chacun d'eux, dans la plus grande transparence.
Dans l'immédiat, la seule rectification s'imposant concerne le dispositif « Malraux », en raison de son utilité particulière au regard de la situation des centres-villes dégradés .
Décision de la commission : votre commission vous propose d'adopter cet article ainsi modifié.