N° 194

SÉNAT

SESSION ORDINAIRE DE 2004-2005

Annexe au procès-verbal de la séance du 16 février 2005

RAPPORT

FAIT

au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi autorisant l'approbation de l' avenant entre le Gouvernement de la République française et le Gouvernement du Royaume des Pays-Bas tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l' évasion fiscale en matière d' impôts sur le revenu et sur la fortune ,

Par M. Adrien GOUTEYRON,

Sénateur.

(1) Cette commission est composée de : M. Jean Arthuis, président ; MM. Claude Belot, Marc Massion, Denis Badré, Thierry Foucaud, Aymeri de Montesquiou, Yann Gaillard, Jean-Pierre Masseret, Joël Bourdin, vice-présidents ; MM. Philippe Adnot, Michel Moreigne, François Trucy, secrétaires ; M. Philippe Marini, rapporteur général ; MM.  Bernard Angels, Bertrand Auban, Jacques Baudot, Mme Marie-France Beaufils, MM. Roger Besse, Maurice Blin, Mme Nicole Bricq, MM.Auguste Cazalet, Michel Charasse, Yvon Collin, Philippe Dallier, Serge Dassault, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Jean-Claude Frécon, Yves Fréville, Paul Girod, Adrien Gouteyron, Claude Haut, Jean-Jacques Jegou, Roger Karoutchi, Alain Lambert, Gérard Longuet, Roland du Luart, François Marc, Michel Mercier, Gérard Miquel, Henri de Raincourt, Michel Sergent, Henri Torre, Bernard Vera.

Voir le numéro :

Sénat : 156 (2004-2005)

Traités et conventions.

AVANT-PROPOS

Mesdames, Messieurs,

Le présent projet de loi soumis à votre examen a pour objet d'autoriser l'approbation de l'avenant à la convention du 16 mars 1973 entre le gouvernement de la République française et le gouvernement du Royaume des Pays-Bas tendant à éviter les doubles impositions et à prévenir l'évasion fiscale en matière d'impôt sur le revenu et sur la fortune, signé le 7 avril 2004.

Cet avenant résulte de la demande du gouvernement néerlandais, formulée à l'occasion des négociations sur la fusion entre les deux compagnies aériennes nationales Air France et KLM, tendant à obtenir la garantie que les opérations de restructuration auxquelles donnerait lieu la constitution d'un groupe combiné ne remettraient pas en cause le droit d'imposer les résultats actuels et futures de KLM, même si l'entreprise venait à être absorbée par Air France.

L'avenant est limité à ce point précis.

I. LA SITUATION INTÉRIEURE DU ROYAUME DES PAYS-BAS ET LES RELATIONS BILATÉRALES AVEC LA FRANCE

Membre fondateur de la Communauté européenne, au coeur de l'Union européenne et de la zone euro, le Royaume des Pays-Bas constitue un partenaire privilégié de la France . Entre les deux pays, compte-tenu de leur proximité géographique, politique et économique, les échanges sont quotidiens

Les Pays-Bas comptent 15,7 millions d'habitants, pour une superficie de 41.864 km².

A. LA SITUATION POLITIQUE ET ÉCONOMIQUE,

1. La situation politique

Un gouvernement de centre droit, alliant les chrétiens démocrates, les libéraux et le parti réformateur, est au pouvoir depuis le 27 mai 2003. Dirigé par Jan Peter Balkenende, ce cabinet axe sa politique sur une stricte rigueur budgétaire et une approche libérale de l'économie, faisant en outre de la sécurité et de la cohésion sociale ses priorités, dans un contexte intérieur difficile après l'assassinat, le 2 novembre 2004, du réalisateur Théo Van Gogh.

Après deux années de difficultés politiques, la priorité est en effet au retour de la stabilité. L'année 2002 a constitué le début d'une période de troubles politiques peu habituels aux Pays-Bas, traditionnellement connus pour leur goût de la stabilité et du consensus. A des problèmes internes à la coalition gouvernementale (suscités notamment par la mise en accusation des autorités néerlandaises dans la tragédie de Srebrenièa 1 ( * ) ), s'est ajoutée une défiance croissance des électeurs envers le « modèle polder » qui s'est traduite par l'apparition sur la scène politique du charismatique responsable populiste, Pim Fortuyn. Son assassinat a suscité un trouble considérable.

Le malaise populaire s'est traduit par un score inattendu aux élections législatives du 15 mai 2002 de la Liste Pim Fortuyn. Ce parti de droite populiste a fait son entrée au gouvernement en juillet 2002, en compagnie du parti chrétien démocrate CDA et du parti libéral VVD, autour d'un programme centré essentiellement sur les questions de sécurité, d'immigration et d'intégration. Les divisions internes à la LPF ont fragilisé ce cabinet qui, trois mois après sa constitution, a annoncé sa démission, en octobre 2002.

Des élections anticipées ont été organisées à la deuxième Chambre, le 22 janvier 2003, qui ont vu la victoire du CDA et du PvdA (sociaux-démocrates). Une nouvelle coalition gouvernementale a été constituée, de centre droit CDA/VVD, avec l'appui du D66 (centre gauche), le 27 mai 2003, toujours sous la direction de M. Jan Peter Balkenende. Cette coalition, qui avait suscité des inquiétudes quant à sa solidité, perdure néanmoins. Malgré quelques tensions épisodiques avec le petit parti D66, la solidarité gouvernementale a pleinement joué, notamment dans la période de présidence néerlandaise de l'Union européenne, qui a contribué au maintien de « l'union sacrée » derrière le Premier Ministre. Entre mai 2003 et l'automne 2004, face à une opposition quasi inexistante et des partenaires sociaux peu actifs, le Premier Ministre Balkenende a ainsi gagné la réputation d'un chef discret et compétent.

La stabilité politique reste néanmoins toujours sous la menace de troubles nouveaux, comme en témoignent les manifestations, organisées fin septembre et début octobre 2004 contre la politique sociale du gouvernement 2 ( * ) , ou encore les grèves des transports qui ont paralysé, mi-octobre 2004, l'ensemble des centres urbains. Surtout, l'assassinat du réalisateur Theo Van Gogh par un musulman fondamentaliste, à la double nationalité néerlandaise et marocaine, a constitué un nouveau choc pour la classe politique et l'opinion publique. Des actes de violence très inhabituels aux Pays-Bas ont été perpétrés contre des mosquées et des écoles confessionnelles islamiques, durant tout le mois de novembre 2004.

Sur le plan partisan, la tentation du populisme reste fortement présente : le député Geert Wilders, qui a créé, à lui seul, un groupe parlementaire après avoir quitté le parti libéral VVD, a choisi cette dernière voie : « ses sujets de prédilection » étant la lutte contre l'islamisme radical et contre la société multiculturelle telle qu'elle existe aux Pays-Bas, il semble, selon les derniers sondages, en mesure de reconstituer la base électorale de Pim Fortuyn (pour obtenir une vingtaine de sièges à la deuxième Chambre). Il est, de plus, un « fervent opposant » de la Constitution européenne et de l'adhésion de la Turquie à l'Union.

2. La situation économique

L'économie des Pays-Bas est, comme les celle des autres pays de la zone euro, affectée par le ralentissement mondial. En 2000, la croissance s'était élevée à 4,2 %, soit la sixième année consécutive de croissance supérieure à 3 %, avant de subir un net ralentissement en 2001 (1,1 %) et en 2002 (0,3 %), sous l'effet de la dégradation de la conjoncture internationale. La croissance néerlandaise avait été tirée, entre 1997 et 2000, par l'ensemble de l'économie, soutenue par le dynamisme des échanges extérieurs et la reprise de l'investissement privé, ainsi que par l'augmentation de la demande intérieure. La situation compétitive des Pays-Bas s'est progressivement dégradée entre 1997 et 2003 et le pays est entré en récession au dernier trimestre 2002 : la croissance de 2003 s'est chiffrée à - 0,9 % du PIB selon la Commission européenne).

Néanmoins, les prévisions de croissance de 1,25 % pour l'année 2004 semblent se vérifier, mais aucune amélioration sensible n'est prévue pour 2005 .

Malgré un programme de rigueur budgétaire, les finances publiques continuent à se détériorer, conduisant pour 2004 à une situation de déficit public excessif, au sens des critères du pacte de stabilité et de croissance (déficit courant estimé à 3,5 % en 2003). La loi de finances pour 2005 affiche toutefois un objectif de déficit budgétaire inférieur à 3 % du PIB.

En ce qui concerne le taux d'inflation, après plusieurs années où celui-ci a été supérieur à la moyenne européenne (5,1 % en 2001, 3,9 % en 2002), la tendance est à un rapprochement avec la moyenne européenne.

Le taux d'occupation de la population en âge de travailler (de l'ordre de 50 %) reste le plus faible parmi les pays industrialisés. En effet, si le taux de chômage officiel avait très fortement diminué depuis 1994 (passant de 9,3 % de la population active à 2,2 % en 2001, 3,1 % en 2002, mais à nouveau 5,5 % en 2003), les statistiques ne correspondent pas à la réalité économique : un système d'incapacité au travail (WAO) extrêmement généreux, mais onéreux pour les finances publiques, permet « d'extraire » du marché du travail, et donc des statistiques du chômage, plus de 900.000 personnes (soit plus de 13 % de la population active). Dès son investiture, le gouvernement Balkenende II a entrepris de réformer ce dispositif de prise en charge de l'invalidité WAO.

* 1 Cette mise en accusation, par le NIOD (organisme néerlandais d'étude et de prospective), a entraîné la démission du gouvernement Kok le 16 avril 2002.

* 2 En particulier contre la réforme des préretraites ; elles ont réuni plusieurs centaines de milliers de personnes dans les principales villes du pays.

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