3. Une transparence encore à parfaire

Les allègements de dette sont largement soustraits au contrôle parlementaire. Leur incidence budgétaire est en effet réduite puisque la grande majorité des annulations (près de 85 % en 2005, d'après les données prévisionnelles) sont portées sur les découverts du Trésor et de la Coface. Les prévisions d'allègements sont également très aléatoires et ne peuvent guère être affinées, car elles dépendent largement des facteurs exogènes que constituent les conditions de mise en oeuvre de l'initiative PPTE, en particulier l'atteinte du point d'achèvement (qui fait l'objet de retards de la part de certains débiteurs importants de la France, tels que le Cameroun ou la Côte d'Ivoire) et la réunion préalable du Club de Paris. Les prévisions du projet de loi de finances pour 2004 portaient ainsi sur 2.056 millions d'euros, mais la prévision d'exécution à fin septembre 2004 (1.517 millions d'euros) révélait un écart de plus de 25 %. Une telle marge d'incertitude sur une part aussi déterminante de notre APD fragilise l'atteinte de nos objectifs. Le CICID du 20 juillet 2004 a toutefois annoncé que des mesures de correction seraient prises le cas échéant.

Votre rapporteur spécial, et nombre d'observateurs extérieurs, ont longtemps souligné ou relèvent encore la complexité et l'opacité des mécanismes d'allègements. Si de réels efforts d'information et de pédagogie ont été amorcés l'année dernière, notamment à la demande de votre rapporteur spécial, et poursuivis cette année (notamment dans le « jaune » budgétaire), la situation actuelle n'est pas encore totalement satisfaisante . C'est non seulement au stade des questionnaires budgétaires, mais surtout dans les documents publics, que les détails des allègements passés et futurs, par pays bénéficiaires, par échéances et par canaux de comptabilisation, devrait être communiqué.

4. La difficulté de tenir les engagements d'accroissement de l'APD

Enfin, le fait que la hausse de l'APD française repose aujourd'hui principalement sur ces allègements peut susciter quelques inquiétudes sur notre capacité à atteindre l'objectif de 0,7 % du PIB en 2012 . D'après les données du « jaune », l'APD française totale hors allègements de dettes devrait en effet diminuer de 1,2 % en 2005 par rapport au périmètre équivalent de 2004 , alors qu'elle pourrait augmenter de 15,9 % cette année. Le principe d'additionnalité , qui a été réaffirmé lors de la conférence de Monterrey en 2002 et implique que les allègements de dette ne soient pas effectués au détriment de l'aide « classique », n'est donc pas respecté.

Evolution des allègements de dette et de l'APD

(en millions d'euros)

 

2003

2004 (données provisoires)

2005

APD totale

6.420

6.821

7.501

Allègements de dette

1.842

1.517

2.258

APD bilatérale

4.419

4.441

5.158

Part des allègements dans l'APD totale

28,7 %

22,2 %

30,1 %

APD totale hors allègements

4.578

5.304

5.243

APD bilatérale hors allègements

2.577

2.924

2.900

Evolution de l'APD totale hors allègements

N.D.

15,9 %

-1,1 %

Source : « jaune » annexé au PLF 2005

Le volume des allègements de dettes est actuellement corrélé à l'augmentation du nombre de pays ayant atteint le point d'achèvement ou en passe de l'atteindre, et ne devrait donc pas diminuer avant 2006, compte tenu notamment du report de la « sunset clause » (clause d'extinction de l'initiative PPTE), afin de tenir compte de la situation intérieure troublée de plusieurs pays potentiellement éligibles (sans pour autant que le dispositif, qui a été conçu dès le départ comme ciblé et temporaire, devienne une facilité permanente de financement). Mais dans un contexte budgétaire durablement contraint, le relais pourra-t-il être pris par les instruments traditionnels de l'aide , ne serait-ce que pour maintenir le montant de l'APD, alors même que nos objectifs d'APD rapportée au PIB imposent une croissance progressive ? Votre rapporteur spécial ne demande qu'à le croire, mais nourrit quelques doutes à cet égard.

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