B. LE PROJET DE TAXATION INTERNATIONALE
L'idée d'une taxation internationale est ancienne et a été initiée dans les années 70 par James Tobin, qui s'en est ensuite détourné. Perçue d'abord comme un outil de raréfaction de la spéculation sur les abondantes transactions quotidiennes de change, sa conception a ensuite davantage évolué vers un apport financier potentiel pour combler l'écart préoccupant entre les objectifs de développement du millénaire et les ressources mobilisées pour les atteindre . L'idée de créer une taxe internationale participe de la mondialisation des enjeux (débats sur les biens publics mondiaux, les risques environnementaux...) comme de l'aspiration à une taxe idéale, reposant sur un taux faible et une assiette très large, susceptible de contribuer par l'impôt à une sorte de nouvelle conscience planétaire.
Le débat a été renouvelé par la création, le 7 novembre 2003, d'un groupe de travail sur les nouvelles contributions financières internationales, présidé par M. Jean-Pierre Landau et destiné à étudier, sans se focaliser sur les seuls marchés financiers, la faisabilité technique d'une telle taxe. Remis en septembre 2004, le rapport souligne que le dispositif d'aide au développement manque actuellement d'une ressource stable de long terme , qui serait nécessaire notamment pour les dépenses récurrentes liées aux services sociaux (santé, éducation, etc.). Le rapport étudie un certain nombre de taxes possibles ( taxes sur les transactions financières, sur les ventes d'armes, sur le transport aérien ou maritime , etc .) du point de vue de leur pertinence technique, et de leurs avantages et inconvénients. La question de l'universalité de l'adoption d'une taxe de ce type est également abordée, en lien avec les risques de distorsions de concurrence.
Ce sujet a été débattu lors du sommet des chefs d'Etat organisé à l'initiative du Président du Brésil Luiz Inacio Lula da Silva, à New York le 20 septembre 2004, puis lors des réunions du Comité monétaire et financier international et du Comité du développement à Washington le 2 octobre. Faute d'un soutien explicite de la communauté internationale et en particulier des Etats-Unis , dont l'accueil à une telle taxe oscille entre indifférence polie et hostilité, il est cependant à craindre que le rapport de ce groupe de travail, en dépit de son approche volontairement technique, ne constitue autre chose qu'une référence de qualité et n'aboutisse pas à des propositions concrètes 24 ( * ) .
* 24 Votre rapporteur spécial relève toutefois que la législation fiscale française, sur ce sujet, a fait preuve d'une faculté d'anticipation peu commune puisqu'elle a déjà prévu l'insertion d'un dispositif de taxation internationale des transactions en devises ! L'article 88 de la loi de finances pour 2002, codifié sous l'article 235 ter ZD du code général des impôts, a néanmoins prévu que ce dispositif n'entre en vigueur que lorsque l'ensemble des Etats membres de l'Union européenne aura adopté une taxe similaire. L'application d'un tel mécanisme de régulation sur le seul territoire national aboutirait en effet à pénaliser l'activité financière du pays et serait finalement dépourvue de tout effet véritable, compte tenu du caractère volatil des activités concernées.