III. L'ACCUEIL DES ÉTRANGERS EN FRANCE

A. LES SERVICES DES VISAS

1. Les dispositions relatives au paiement des demandes de visas

Le nombre de visas délivrés a diminué de 1,85 % depuis 1998, la demande de visas connaissant au cours de la même période une progression de 0,42 %. Le graphique ci-après montre l'évolution des demandes et des délivrances de visas au cours de cette période.

Nombre de visas demandés et de visas délivrés depuis 1998

Source : ministère des affaires étrangères

Ce taux d'évolution recouvre toutefois d'importantes variations selon le type de visas délivrés. Le tableau ci-après montre ainsi une très forte progression des visas de long séjour, et parmi ceux-ci, des visas d'étude.

Evolution des visas délivrés entre 1998 et 2003 selon le type de visas

Type de visas (*)

1998

2003

2003 / 1998 (%)

Court séjour

1.816.918

1.750.616

- 3,64 %

Long séjour

85.415

133.791

+ 56,6 %

Dont étudiants

28.953

69.568

+ 140,2 %

Total

1.902.333

1.884.407

- 0,94 %

(*) ces chiffres ne tiennent pas compte des visas officiels, des visas pour les Dom et les collectivités territoriales d'outre-mer ou pour les pays tiers représentés.

Source : ministère des affaires étrangères

L'instauration du paiement des frais de dossiers au moment du dépôt de la demande de visa, sur la base de la décision du Conseil européen du 20 décembre 2001, a été effective à compter du 1 er janvier 2003. Elle a nécessité un effort important, en matière de formation des agents, d'information du public et des autorités locales, d'adaptations des conditions d'accueil du public et de mise à la disposition des services d'outils informatiques nouveaux pour éditer les quittances. Il convient de souligner que cette modification a été mise en oeuvre sans personnel supplémentaire , alors que la perception des droits en début de procédure augmente les délais de traitement d'un peu moins de deux minutes par demande, selon le ministère des affaires étrangères.

Le premier impact de la réforme s'est traduit, dans certains pays, par une dégradation de l'image de la France (la presse a publié, dans certains pays, des articles très critiques sur cette nouvelle pratique qui consiste à ne procéder à aucun remboursement en cas de refus de visa).

Toutefois, la mise en oeuvre de cette procédure a permis d' assainir la demande en éliminant une partie des redondances (s'agissant, par exemple, de l'Algérie) et les demandes « fantaisistes », vouées par avance à l'échec. Les résultats pour l'année 2003 laissent apparaître un effet différencié selon le niveau de vie du pays : forte baisse (de l'ordre de 15 à 20 %) dans les pays en voie de développement, diminution quasi nulle, voire poursuite de la progression de la demande, dans les pays à revenus intermédiaires ou élevés.

On notera que, compte tenu de l'instauration du paiement a priori pour les demandes de visas et de la diminution de ces demandes qui s'en est suivi, le taux de refus des visas est passé d'environ 30 % à 20 %.

Il convient de rappeler que le Conseil de l'Union européenne du 13 juin 2003 a institué un tarif unique de 35 euros pour les frais de dossier visa, quelle que soit la durée du visa demandé. L'application de cette mesure par la France dès le 1 er octobre 2003 a abouti à une recette supplémentaire de 17,4 millions d'euros au titre de l'année 2003.

Le ministère de l'économie, des finances et de l'industrie s'était engagé à affecter 4 millions d'euros aux crédits de fonctionnement du ministère des affaires étrangères si la recette afférente aux frais de dossier pour les demandes de visas dépassait de 10 millions d'euros le montant de la recette de l'année 2002. La recette pour l'année 2003 s'élevant à 72,4 millions d'euros, 4 millions d'euros ont donc abondé le budget du ministère des affaires étrangères en 2004.

Ces crédits ont été rendus disponibles le 28 juin 2004 et ont été prioritairement affectés au financement des projets de la Direction des Français de l'Etranger et des Etrangers en France, comme le montre le tableau suivant :

Répartition des 4 millions d'euros de crédits supplémentaires liés aux frais de visa au titre de l'année 2004

(en euros)

Opérations

Montants

Renforcement des moyens de recrutement local visas Chine et des vacations Etat Civil à Londres

190.000

Financement de l'audit qualité du réseau consulaire

50.402

Financement de l'audit de la Commission de Recours des Réfugiés (1 ère tranche)

40.000

Financement de la seconde tranche de l'audit Commission de Recours des Réfugiés (suite à l'annulation des crédits Fonds de Réforme de l'Etat)

43.000

Financement de l'opération de résorption des stocks au Centre de traitement des passeports sécurisés

71.200

Réabondement du réseau d'agences consulaires

50.000

Renforcement des capacités de traitement carte nationale d'identité sécurisée

40.000

Financement de l'opération de modernisation des documents d'état civil

30.000

Financement des prestations d'interprétariat à la frontière (dernier semestre 2004)

30.000

Tranche exceptionnelle des travaux d'aménagement prioritaires au profit des Postes consulaires (accueil des usagers et mise aux normes des locaux)

300.000

Modernisation des stations de travail informatiques des Postes consulaires prioritaires

340.030

Développement de projets informatiques Etat Civil

1.430.000

Adaptation du réseau mondial visas aux nouvelles exigences biométriques

445.000

Source : ministère des affaires étrangères

Le solde non affecté au 1 er septembre 2004, soit 0,94 millions d'euros sur les 4 millions d'euros de provision pour frais de dossier visas, a été gardé en réserve par le ministère des affaires étrangères afin, notamment, des couvrir des imprévus budgétaires.

Pour l'année 2005, la lettre plafond du 29 juillet 2004 portant sur le budget du ministère des affaires étrangères pour 2005, prévoit qu'un « crédit de 4 millions d'euros sera mobilisable à raison de 35 % du supplément de recettes de droit de timbre sur les visas qui sera éventuellement constaté en 2004 par rapport à 2003 ».

Ainsi, au premier euro de recette supplémentaire 2004 sur 2003, une ristourne de 35 % dudit euro sera accordée, sous un plafond maximum de 4 millions d'euros (11,5 millions d'euros de recettes supplémentaires sont donc nécessaires pour atteindre le plafond de 4 millions d'euros). Le mécanisme, par rapport à l'année précédente, offre la garantie d'une augmentation de la dotation en cas de recette supplémentaire même très inférieure.

Le ministère des affaires étrangères considère toutefois qu'« en matière de circulation des personnes et d'immigration, il n'est pas prudent de parler d' « intéressement » . Il souhaite donc le rétablissement d'un fonds de concours pour les recettes liées aux visas - comme c'était le cas jusqu'en 2001.

2. Une insuffisance persistante des moyens humains

Votre rapporteur spécial déplore la persistance d'un manque de personnel pour assurer la délivrance des visas, carence existant depuis déjà plusieurs années 23 ( * ) .

Dans son compte-rendu de gestion budgétaire pour l'année 2003, le ministère des affaires étrangères indique que « le redéploiement des effectifs des zones excédentaires ou à faible risque vers les zones déficitaires ou à risque élevé doit permettre d'arriver à un nombre satisfaisant de dossiers par agent, estimé à 2.500 par an dans les zones à risque migratoire élevé.

« Toutefois, dans la zone à risque migratoire élevé, qui représente 60 % des demandes de visas enregistrées en 2003 et où sont concentrés 63,69 % des agents, le ratio par an et par agent reste supérieur de 13,15 % à celui attendu : il est en effet de 3.394,79 dossiers instruits par agent (442,7 emplois dans la zone) alors que le maximum devrait se situer à 3.000 .

« L'année 2003 s'est caractérisée par le passage, au premier janvier, au paiement des frais de dossier en début de procédure et n'est comparable à aucune autre année. Cette nouveauté a assaini la demande qui a enregistré une baisse de 17,62 % par rapport à 2002 (pour mémoire, environ 3 millions de dossiers avaient été traités cette année-là). En revanche, les procédures comptables habituellement appliquées aux seuls visas délivrés ont sérieusement augmenté puisque 483.687 opérations comptables ont été enregistrées pour des visas refusés » 24 ( * ) .

3. Un suivi et un contrôle insuffisants des délivrances de visas à l'étranger

Par ailleurs, il est regrettable que le suivi des demandes et de la délivrance des visas ne soit pas davantage effectué au sein de l'administration centrale du ministère des affaires étrangères. En effet, le ministère des affaires étrangères n'exerce pas de contrôle régulier, au niveau de l'administration centrale, du nombre de visas délivrés à l'étranger : les statistiques relatives à la délivrance des visas dans les services consulaires ne remontent à l'administration centrale qu'une fois l'année écoulée, ce qui rend difficile, et en tout cas, tardif, les possibilités de déceler des variations importantes (nombre total de visas et nombre de visas gratuits délivrés) qui s'expliquent parfois, malheureusement, par des malversations locales.

Il semblerait pourtant particulièrement utile de suivre régulièrement (par exemple, sur une base mensuelle) les demandes et les délivrances de visas, en opérant des distinction en fonction de la catégorie des visas et de l'origine des demandeurs :

- d'une part, cela permettrait à l'administration centrale de « tirer la sonnette d'alarme » en cas de constat de variations anormales dans la délivrance des visas, et de vérifier ce à quoi ces variations correspondent ;

- d'autre part, cela permettrait de suivre de manière plus précise l'origine géographique des populations demandeuses et de mutualiser cette information entre les postes, ce qui permettrait de mieux comprendre la logique des flux migratoires, s'agissant notamment des pays de transit des demandeurs de visas pour l'Union européenne ;

- enfin, mais ce dernier point n'implique pas nécessairement un suivi mensualisé de la délivrance des visas, il serait utile que les statistiques relatives à la délivrance des visas soient croisés avec d'autres statistiques, afin de mieux évaluer le devenir des demandeurs de visas. Ainsi, par nationalité, pourraient être suivis le devenir des demandeurs de visas d'étude, ce qui permettrait une meilleure évaluation des effectifs et des flux d'étudiants étrangers, mais également le nombre de demandeurs de visas qui, une fois sur le territoire national, déposent une demande d'asile.

* 23 On rappellera à cet égard que, à l'automne 1999, notre ancien collègue député Yves Tavernier avait publié un rapport d'information intitulé « Les services des visas, parents pauvres du ministère des affaires étrangères », rapport d'information n° 1803 (XI ème législature).

* 24 Compte rendu de gestion budgétaire du ministère des affaires étrangères pour l'année 2003, page 12.

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