C. LES DISPOSITIONS SOUMISES À L'EXAMEN DU SÉNAT

Les dispositions du texte adopté le 14 octobre à l'Assemblée nationale et transmis au Sénat peuvent être formellement classées en deux catégories :

- les dispositions législatives modifiant ou complétant le code du travail ;

- celles complétant la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 telle qu'elle résulte de sa dernière modification par la loi n° 2003-708 du 1 er août 2003.

1. Les dispositions législatives modifiant ou complétant le code du travail

• La rémunération du droit à l'image dans les sports collectifs (article 1 er )

Sous la double impulsion de la forte progression des produits de la commercialisation des droits TV et du choix délibéré des clubs de diversifier leurs recettes pour les élargir aux ressources du sponsoring et à la vente des produits dérivés des marques, la pratique consistant à valoriser l'image de certains sportifs professionnels s'est développée dans des conditions très imparfaites et parfois abusives.

En tout état de cause, cette pratique ne bénéficie à l'heure actuelle qu'à certains joueurs, les plus médiatiques, et à titre individuel.

Afin d'élargir les catégories de joueurs susceptibles de profiter des retombées financières de l'exploitation de l'image véhiculée par l'équipe au sein de laquelle ils évoluent dans la pratique des sports dits collectifs, il est proposé de reconnaître aux sportifs professionnels un droit collectif, lorsqu'ils se trouvent dans une situation comparable à celle des artistes-interprètes, c'est-à-dire qu'ils se « donnent à voir », non seulement à l'occasion de la rencontre à laquelle ils participent, mais aussi grâce à l'exploitation commerciale de leur prestation.

Une première partie de leur rémunération, en dessous d'un seuil conventionnel fixé, serait donc constituée d'un salaire, assujetti aux cotisations du régime général de sécurité sociale (les artistes du spectacle et les mannequins bénéficiant cependant de taux de cotisation fixés à 70 % de celles du régime général).

L'autre partie de la rémunération serait constituée, conformément aux articles L. 762-2 et L. 763-2 du code du travail, sous forme de redevances.

Ces redevances, versées en application du contrat qui lie le professionnel à son employeur, ne seraient pas prises en compte pour le calcul des cotisations de sécurité sociale du régime général, mais seraient soumises à la contribution sociale généralisée (CSG) et à la contribution au remboursement de la dette sociale (CRDS).

Au cours des auditions auxquelles votre rapporteur a pu procéder, il est apparu qu'une ambiguïté rédactionnelle permettait aux entraîneurs des équipes sportives de se considérer comme légitimement bénéficiaires du présent dispositif.

Or, telle n'était pas, semble-t-il, l'intention des différents groupes de travail qui ont réfléchi au sujet, ni des auteurs de la proposition de loi.

Afin de lever cette ambiguïté rédactionnelle, votre rapporteur proposera par conséquent au Sénat d'adopter un amendement tendant à clarifier cette question.

• La sécurisation de la situation de travail des sportifs sélectionnés en équipes de France (article 2)

Dans le secteur professionnel, les sportifs, appelés en sélection et mis à la disposition de l'Equipe de France pour participer aux compétitions internationales, sont par ailleurs salariés des clubs avec lesquels ils participent aux compétitions nationales, leur contrat de travail n'étant pas, selon la pratique actuelle, suspendu pendant la période de sélection.

Cette situation entraîne un risque de qualification en prêt de main d'oeuvre illicite (article L. 125-3 du code du travail), et fragilise, par ailleurs, la situation du sportif, dans la mesure où la Caisse nationale d'assurance maladie (CNAM) a systématiquement remis en cause la couverture accident au motif que le lien de subordination sur le joueur n'était plus exercé par le club employeur pendant la période de mise à disposition.

Afin de sécuriser de manière définitive la situation de travail spécifique du sportif sélectionné en Equipe de France et surtout de lui assurer une protection sociale optimale en lui garantissant l'accès au régime d'accident du travail, il est proposé de préciser dans le code du travail que ce joueur est, d'une part, dans une situation dérogatoire ne tombant pas sous le coup de l'interdiction du prêt de main d'oeuvre à but lucratif et, d'autre part, qu'il conserve sa qualité de salarié de l'association sportive pendant cette période.

• La suppression du versement de 1 % sur les contrats de travail à durée déterminée (article 3)

Il ressort de la pratique sportive que l'argumentation de la précarité et de l'incitation à conclure des contrats à durée déterminée (CDI), qui a motivé l'instauration du prélèvement de 1 % sur les CDD, ne saurait valoir pour le sport professionnel (joueurs professionnels -pro et stagiaires- et entraîneurs).

En effet, l'article L. 122-1-1 du code du travail autorise la qualification de contrats d'usage pour certains CDD pour les emplois « pour lesquels, dans certains secteurs d'activité, défini par décret (...), il est d'usage constant de ne pas recourir au contrat à durée indéterminée en raison de la nature de l'activité exercée et du caractère par nature temporaire de ces emplois » .

Or, l'article D. 121-1 du code du travail classe le sport professionnel parmi cette catégorie d'activité.

Les contrats à durée déterminée correspondent aujourd'hui à une exigence des organismes fédéraux : ainsi, si un club n'embauche pas un joueur sous CDD, comme il est prévu dans la charte du football, le contrat ne sera pas homologué par la Ligue.

En conséquence, les clubs professionnels sont justifiés à bénéficier de l'exonération du prélèvement de « 1 % CDD », ce que propose le présent article.

2. Les dispositions visant à compléter la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984

• L'assouplissement de l'interdiction de multipropriété des sociétés sportives (article 4)

L'article 15-1 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives, tel qu'il a été modifié par la loi n° 99-1124 du 28 décembre 1999, dispose qu' « il est interdit à toute personne privée, directement ou indirectement, d'être porteur de titres donnant accès au capital ou conférant un droit de vote dans plus d'une société constituée conformément aux dispositions du premier alinéa de l'article 11 et dont l'objet social porte sur une même discipline sportive. Toute cession opérée en violation de ces dispositions est nulle ».

Si le principe d'une interdiction reste considéré comme une mesure indispensable pour préserver l'équité d'une compétition et empêcher des manoeuvres éventuelles pouvant influencer le comportement d'une équipe lors d'une compétition, en revanche, le champ de l'interdiction « absolue » de la multipropriété ne paraît plus adapté aux réalités économiques auxquelles sont confrontées lesdites sociétés sportives.

Aussi, et sans mettre en péril l'équité sportive, une multipropriété limitée est acceptable.

C'est la raison pour laquelle il est proposé de modifier l'alinéa premier de l'article 15-1 afin d'autoriser un actionnaire unique à détenir des titres de plusieurs sociétés sportives relevant d'une même discipline, mais en lui interdisant d'en avoir le contrôle économique, au sens de l'article L. 233-16 du code de commerce.

• La participation des sociétés sportives au fonctionnement des fédérations sportives (article 5)

L'article 16 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 relative à l'organisation et à la promotion des activités physiques et sportives définit la composition des fédérations sportives.

Tel que modifié par la loi n° 2003-708 du 1 er août 2003, cet article précise que les fédérations sportives réunissent des associations sportives et qu'elles peuvent aussi rassembler des personnes physiques auxquelles elles délivrent des licences, des organismes à but lucratif dont l'objet est la pratique d'une ou plusieurs de leurs disciplines et qu'elles autorisent à délivrer des licences et des organismes qui, sans avoir pour objet la pratique d'une ou plusieurs de leurs disciplines, contribuent au développement d'une ou plusieurs de celles-ci.

Les « organismes à but lucratif » peuvent donc être membres associés, les modalités de leur participation étant fixées par les statuts de la fédération.

La réintégration des sociétés parmi la liste des membres susceptibles d'être représentés au sein des structures fédératives s'inscrit dans ce mouvement, initié sous l'impulsion du ministre de la jeunesse, des sports et de la vie associative, tendant à permettre l'association la plus large au sein des fédérations de tous les acteurs impliqués dans la vie d'une discipline sportive.

Cette réintégration va dans le sens du renforcement du lien entre le secteur amateur (associations sportives - article 16) et le secteur professionnel (sociétés sportives commerciales spécifiques - article 11), qui est la marque de l'organisation du sport en France.

Ce faisant, la proposition de loi ne fait que rétablir le droit desdites sociétés, tel qu'il avait déjà été accordé par l'article 16 de la loi n° 84-610 du 16 juillet 1984 précitée dans sa version antérieure à l'intervention de la loi n° 2000-627 du 6 juillet 2000.

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