TITRE V
TRANSFERTS DE SERVICES
ET GARANTIES
INDIVIDUELLES DES AGENTS
Le titre V du projet de loi relatif aux responsabilités locales organise les transferts de services ou parties de services devant accompagner l'exercice des compétences transférées de l'Etat aux collectivités territoriales et à leurs groupements.
130.000 agents de l'Etat devraient être dans un premier temps mis à disposition puis transférés aux collectivités territoriales ou groupements désormais chargés de la compétence transférée.
Les fonctionnaires disposeront d'un délai de deux ans à compter de la publication du décret en Conseil d'Etat fixant la partition définitive des services pour choisir d'intégrer un cadre d'emploi de la fonction publique territoriale ou de conserver leur statut antérieur .
Les modifications apportées au cours de l'examen du texte en première lecture par le Sénat puis par l'Assemblée nationale ont permis, sans remettre en cause le dispositif proposé, de l'améliorer et de le compléter .
Quatre articles ont d'ores et déjà été adoptés conformes par les deux assemblées, 9 articles restent en navette, dont deux nouveaux insérés par l'Assemblée nationale.
CHAPITRE PREMIER
MISE À
DISPOSITION ET TRANSFERT
DES SERVICES ET DES AGENTS
Article 77
Transferts des services ou parties de services participant
à
l'exercice des compétences transférées aux
collectivités territoriales
ou à leurs groupements
Cet article tend à déterminer les conditions dans lesquelles devraient être transférés les services ou parties de services participant à l'exercice des compétences transférées en vertu du présent projet de loi.
Le présent dispositif devrait également s'appliquer pour le transfert des services mis à disposition des collectivités territoriales pour l'exercice des compétences transférées dans le domaine des ports, des canaux et des routes départementales en application de la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements les régions et l'Etat et de la loi n° 92-1255 du 2 décembre 1992 relative à la mise à disposition des départements des services déconcentrés du ministère de l'équipement et à la prise en charge des dépenses de ces services, les parcs de l'équipement étant toutefois exclus des transferts.
Les services ou parties de services concernés devraient être, dans un premier temps, mis à disposition, puis, dans un second temps, transférés aux collectivités territoriales ou aux groupements de collectivités territoriales bénéficiaires des compétences.
Une ou plusieurs conventions conclues entre le représentant de l'Etat et le chef de l'exécutif de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales bénéficiaire de la nouvelle compétence devraient déterminer la liste des services ou parties de services mis à disposition . Ces conventions devraient être prises à compter de la publication du décret approuvant la convention type.
Toutefois, certains transferts pouvant être décidés postérieurement à la publication de ce décret, le Sénat a adopté en première lecture un amendement de votre commission ayant reçu un avis favorable du Gouvernement, tendant à prévoir que dans ce cas, le délai de trois mois ne courrait qu'à compter de la date du transfert de compétence.
Si aucune convention n'était conclue au terme de ce délai, la liste des services ou parties de services mis à disposition serait établie par un arrêté conjoint du ministre chargé des collectivités territoriales et du ministre intéressé par le transfert.
Pendant leur mise à disposition, les services ou parties de services seraient placés sous l'autorité du chef de l'exécutif de la collectivité territoriale ou du groupement de collectivités territoriales concerné.
Ensuite, ces services ou parties de services seraient transférés. Des décrets en Conseil d'Etat en fixeraient la partition définitive. Les fonctionnaires exerçant leurs fonctions dans un service ou une partie de services transféré disposeraient alors d'un droit d'option leur permettant de choisir entre l'intégration dans un cadre d'emploi de la fonction publique territoriale et le maintien de leur statut antérieur avec une mise en position de détachement illimité auprès de la collectivité territoriale ou le groupement bénéficiaire de la compétence 59 ( * ) .
Lors de la première lecture , outre l'adoption de l'amendement mentionné ci-dessus et de deux amendements rédactionnels présentés par la commission des Lois, le Sénat a sensiblement complété le dispositif proposé .
Tout d'abord, il a adopté un amendement présenté par la commission des Lois et ayant reçu un avis favorable du Gouvernement après rectification en séance, tendant à prévoir que seraient transférées aux collectivités territoriales ou à leurs groupements les emplois pourvus au 31 décembre 2004, sous réserve que leur nombre global ne soit pas inférieur à celui constaté le 31 décembre 2002.
Cet amendement visait à rassurer les collectivités territoriales et leurs groupements qui craignaient qu'avant le transfert de compétences les services de l'Etat faisant l'objet d'un transfert ne soient réorganisés et vidés d'une partie de leurs personnels.
Il prévoyait initialement que seraient pris en compte les effectifs des services transférés au 31 décembre 2002. Toutefois, au regard des explications du ministre, votre rapporteur a décidé de rectifier son amendement afin de tenir compte du fait que les collectivités territoriales pourraient se trouver lésées par une date de référence trop lointaine.
Toujours à l'initiative de la commission des Lois et avec l'accord du Gouvernement, la Haute Assemblée a décidé de créer pour quatre ans une commission nationale de conciliation qui serait chargée d'examiner les litiges portant sur les conventions de mise à disposition.
L'amendement adopté par le Sénat prévoyait que cette commission serait présidée par un conseiller d'Etat et composée en nombre égal de représentants de chaque catégorie de collectivités territoriales et de leurs groupements. Placée auprès du ministre chargé des collectivités territoriales, elle émettrait un avis motivé dans un délai d'un mois à compter de la saisine.
En outre, l'arrêté ministériel qui établirait la liste des services ou parties de services mis à disposition lorsque aucune convention n'aurait été signée dans le délai imparti ne pourrait être pris qu'après un avis motivé de cette commission.
Le Sénat a également adopté un amendement présenté par MM. Gérard Longuet, Josselin de Rohan et les membres du groupe de l'Union pour un mouvement populaire, apparentés et rattachés, accepté par la commission ainsi que par le Gouvernement sous réserve de deux modifications rédactionnelles, et ayant pour objet de prévoir :
- une compensation financière pour les fractions d'emplois qui ne peuvent être transférées aux collectivités territoriales ;
- le transfert des agents non titulaires de droit privé exerçant leurs fonctions dans des services ou parties de services transférés, dès lors que leurs emplois correspondent à la satisfaction d'un besoin permanent pour l'exercice de la compétence transférée. Leurs contrats devraient dès lors être repris par la collectivité territoriale ou le groupement de collectivités territoriales bénéficiaire de cette nouvelle compétence.
Le Sénat a enfin adopté un amendement, avec un avis favorable du Gouvernement, tendant à préciser que le dispositif du présent article s'appliquerait également lorsque des groupements de collectivités territoriales seraient les bénéficiaires de ces transferts de services ou de parties de services.
L'Assemblée nationale a adopté un amendement de réécriture de l'article proposé par sa commission des Lois et avec l'accord du Gouvernement, après avoir été modifié par deux sous-amendements respectivement défendus par M. Carrez et le Gouvernement lui-même.
Cet amendement tendait à :
- clarifier le dispositif en proposant une nouvelle rédaction de l'article ;
- déplacer à l'article 81 la disposition rajoutée par le Sénat selon laquelle les contractuels de droit privé sont également transférés aux collectivités territoriales ou à leurs groupements ;
- préciser que la compensation financière ne serait envisageable qu'après détermination d'un nombre entier d'emplois à temps plein, pour les fractions d'emplois ne pouvant être transférés ;
- prévoir que dans l'attente de la signature des conventions de mise à disposition, le chef de l'exécutif local donnerait ses instructions aux chefs des services à compter de la date des transferts de compétences ;
- remplacer le 31 décembre 2004 par le 31 décembre de l'année précédent le transfert comme date de référence pour déterminer les effectifs des services transférés, le nombre obtenu devant toujours ne pas être inférieur à celui constaté au 31 décembre 2002. Il s'agit ainsi de tenir compte du fait que les transferts de compétences pourraient s'échelonner dans le temps ;
- supprimer les dispositions issues du Sénat relative à la création et aux compétences de la commission nationale de conciliation, l'Assemblée nationale estimant qu'un texte réglementaire suffirait. Cette dernière a par conséquent uniquement conservé, au paragraphe IV, le principe selon lequel l'arrêté ministériel établissant la liste des services ou parties de services mis à disposition à défaut de convention passée dans le délai imparti, ne pourrait être pris qu'après consultation d'une commission consultative de conciliation. Celle-ci ne serait en revanche pas compétente pour émettre un avis sur tous les litiges liés aux conventions de mise à disposition.
Cet amendement a été complété par le sous-amendement de M. Gilles Carrez, accepté par la commission des Lois ainsi que par le Gouvernement, qui prévoit la présentation par le Gouvernement d'un bilan relatif à l'évolution entre 2002 et 2004 des emplois de l'Etat concernés par les transferts de compétences à la commission consultative sur l'évaluation des charges, ainsi que par le sous-amendement du Gouvernement, ayant reçu un avis favorable de la commission des Lois, tendant à prévoir que des décrets de partition de services devront également être pris pour le transfert des personnels devant être effectués suite aux transferts de compétences prévus par la loi n° 2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité 60 ( * ) .
Dans son rapport fait au nom de la commission des Affaires sociales pour la deuxième lecture du projet de loi portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité 61 ( * ) , notre excellent collègue, M. Bernard Seillier annonçait en effet que la situation des personnels de l'Etat chargés de la gestion du revenu minimum d'insertion serait « définitivement arrêtée en fonction des dispositions du projet de loi relatif aux responsabilités locales. » L'amendement adopté par l'Assemblée nationale répond à cette exigence en prévoyant l'application du dispositif du titre V pour ces agents.
L'article 42 de la loi précitée du 18 décembre 2003 prévoit que ces agents sont, à compter du 1 er janvier 2004, provisoirement mis à la disposition des départements. Placés sous l'autorité fonctionnelle du président du conseil général, ils restent toutefois membres de leurs corps d'origine et rémunérés par leur administration d'origine.
Il est également prévu, aux articles 80 et 81 du présent projet de loi 62 ( * ) qu'une fois les décrets de partition des services ou parties de services adoptés, les fonctionnaires exerçant leurs fonctions dans ces services ou parties de services participant à la gestion du revenu minimum d'insertion pourraient opter entre leur intégration dans la fonction publique territoriale ou le maintien de leur statut antérieur et que les agents non titulaires de l'Etat verraient leurs contrats repris par la collectivité territoriale ou le groupement bénéficiaire de cette nouvelle compétence.
Votre commission vous propose d'adopter un amendement visant à étendre le champ d'application du présent article aux transferts de services résultant des transferts de compétences dans le domaine des ports, des voies navigables et des routes départementales, en vertu de la loi n° 83-663 du 22 juillet complétant la loi n° 83-8 du 7 janvier 1983 relative à la répartition de compétences entre les communes, les départements, les régions et l'Etat. Cela permettrait le transfert définitif des services de l'équipement déjà mis à la disposition des collectivités territoriales du fait des transferts de compétences prévus par cette loi.
Votre commission vous propose également de reprendre en partie le texte adopté en première lecture par le Sénat, s'agissant de la commission nationale de conciliation. Il semble en effet souhaitable, d'une part, de préciser que cette commission rendra un avis motivé avant l'adoption de tout arrêté ministériel établissant la liste des services ou parties de services mis à disposition, et, d'autre part, de prévoir qu'elle sera composée d'un nombre égal de représentants de l'Etat et de représentants de chaque catégorie de collectivités territoriales et de leurs groupements.
Votre commission vous propose enfin un amendement tendant à corriger une erreur de référence au V de cet article. Contrairement à ce qui est actuellement prévu, il est nécessaire de maintenir l'application du II de cet article, relatif aux transferts des services, pour les services participant à l'exercice des compétences transférées en vertu de la loi du 2 décembre 1992 précitée. En revanche, il convient bien de les exclure des dispositions prévoyant la mise à disposition transitoire au III et IV de cet article, dans la mesure où ces services sont déjà mis à la disposition des départements.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 77 ainsi modifié .
Article 78
Mises à disposition des personnels de l'Etat
Cet article prévoit que les agents de l'Etat et ses établissements publics affectés à des services ou parties de services mis à disposition des collectivités territoriales ou des groupements de collectivités territoriales sont, de plein droit et à titre individuel, mis à la disposition du chef de l'organe délibérant de ces collectivités territoriales ou groupements de collectivités territoriales.
Pendant cette période de mise à disposition, les fonctionnaires demeurent membres de leur corps d'origine.
La mise à disposition s'achève lorsque le fonctionnaire exerce son droit d'option prévu à l'article 80 du projet de loi et lui permettant de choisir entre l'intégration dans un cadre d'emploi de la fonction publique territoriale et le maintien de son statut antérieur en tant que fonctionnaire de l'Etat.
Le Sénat a adopté en première lecture un amendement de précision présenté par votre commission.
L'assemblée nationale a pour sa part adopté un amendement, présenté par la commission des Lois et avec l'assentiment du Gouvernement, tendant à prévoir que cette mise à disposition individuelle des personnels concernerait tous les agents de l'Etat et de ses établissements publics, que les services ou parties de services dans lesquels ils sont affectés soient partiellement ou entièrement mis à la disposition d'une collectivité territoriale ou d'un groupement de collectivités territoriales. Cela permet d'élargir le champ de la mise à disposition individuelle des personnels.
Votre commission vous propose d'adopter l'article 78 sans modification.
* 59 Voir le commentaire de l'article 80 du présent article du projet de loi.
* 60 Article 42 de la loi n° 2003-1200 du 18 décembre 2003 portant décentralisation en matière de revenu minimum d'insertion et créant un revenu minimum d'activité :
« Les agents de l'Etat dont les fonctions correspondent à l'exercice des compétences en matière de revenu minimum d'insertion, transférées au département par le présent titre, sont mis à disposition du département, à compter de la date d'entrée en vigueur de la présente loi, et placés pour l'exercice de ces compétences sous l'autorité du président du conseil général.
« Le nombre des agents concernés est établi par le représentant de l'Etat dans le département après avis du président du conseil général, par référence aux emplois pourvus au 31 décembre 2003, sous réserve que leur nombre ne soit pas inférieur à celui constaté au 31 décembre 2002. »
* 61 Rapport n° 96 (2003-2004) de M. Bernard Seillier fait au nom de la commission des Affaires sociales.
* 62 Voir le commentaire de ces deux articles du présent projet de loi.