IV. LE CONTRÔLE DE L'ÉTABLISSEMENT PUBLIC D'AMÉNAGEMENT ET DE RESTRUCTURATION DES ESPACES COMMERCIAUX ET ARTISANAUX (EPARECA)
Notre collègue Auguste Cazalet, rapporteur spécial du budget des petites et moyennes entreprises, du commerce et de l'artisanat, et votre rapporteur spécial, ont réalisé au cours de l'année 2002 un contrôle de l'établissement public d'aménagement et de restructuration du commerce et de l'artisanat (EPARECA).
Cet établissement a été instauré par la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville.
L'EPARECA a pour objet de favoriser l'aménagement et la restructuration des espaces commerciaux et artisanaux dans l'ensemble des quartiers prioritaires des contrats de ville 2000-2006 (depuis la loi n° 2000-1208 du 13 décembre 2000 relative à la solidarité et au renouvellement urbains) 20 ( * ) . Concrètement, cela recouvre les zones urbaines sensibles (dont font partie les zones franches urbaines et les zones de redynamisation urbaine) et les zones couvertes par des contrats de ville (en particulier les grands projets de ville et les opérations de renouvellement urbain).
A cette fin, il assure, après accord des conseils municipaux des communes ou des organes délibérants des établissements de coopération intercommunale ou syndicats mixtes concernés, la maîtrise d'ouvrage d'actions et d'opérations tendant à la création, l'extension, la transformation ou la reconversion de surfaces commerciales et artisanales situées dans ces zones. Il peut passer convention avec les communes, établissements publics ou syndicats mixtes concernés.
L'EPARECA peut accomplir tous actes de disposition et d'administration nécessaires à la réalisation de son objet.
- Il peut notamment acquérir les fonds commerciaux ou artisanaux ainsi que les immeubles ou droits réels immobiliers nécessaires aux opérations correspondant à son objet.
- Il peut ensuite céder les immeubles ou les fonds acquis , ou en confier la gestion à un ou plusieurs locataires gérants.
Il dispose de certaines prérogatives de puissance publique. En particulier, il peut mettre en oeuvre des expropriations pour acquérir les immeubles ou droits réels immobiliers nécessaires aux opérations correspondant à son objet.
Il est administré par un conseil d'administration composé en nombre égal de représentants de l'Etat, d'une part, d'un membre du Sénat, d'un membre de l'Assemblée nationale, de représentants des collectivités territoriales, des professions commerciales et artisanales et du secteur associatif, de personnalités qualifiées, d'autre part. Ce conseil d'administration est présidé par notre collègue député Laurent Cathala, maire de Créteil.
Le 15 février 2002, l'EPARECA employait 15 personnes. Le personnel dirigeant comporte un directeur général, un expert commercial, une directrice administrative et financière, un directeur de la gestion et de l'animation des centres et quatre directeurs de programmes. Le reste du personnel est composé d'une chargée d'études commerciales et de six assistantes et secrétaires.
Selon la loi n° 96-987 du 14 novembre 1996 relative à la mise en oeuvre du pacte de relance pour la ville, l'EPARECA peut recevoir des dotations financières prélevées sur l'excédent du produit de la taxe d'aide au commerce et à l'artisanat (TACA). Un seul prélèvement a été effectué jusqu'à aujourd'hui, celui du 31 décembre 1995 fixé à 130 millions de francs. Les prélèvements effectués sur les excédents ultérieurs seront fixés par décret sur la base du montant du prélèvement initial.
A. LE COMMERCE DANS LES BANLIEUES
Selon le Crédoc (centre de recherche pour l'étude et l'observation des conditions de vie) 21 ( * ) , seuls les deux tiers des zones urbaines sensibles disposent d'un équipement commercial 22 ( * ) , la plupart des centres créés lors de la construction des quartiers d'habitat social ayant vu leur activité décliner, voire disparaître. En outre, la plupart des zones concernées n'ont pas de supermarché.
1. Une demande qui a décliné depuis les années 1970
Créés pour la plupart dans les années soixante et soixante-dix, les centres commerciaux des zones urbaines sensibles se sont généralement révélés surdimensionnés.
a) Le faible niveau de vie des résidents, un facteur qui ne semble pas essentiel
Le faible niveau de vie des résidents ne semble pas constituer une explication essentielle.
Certes, selon le CREDOC, les dépenses des ménages vivant en HLM sont inférieures de 30 % au budget de consommation des autres foyers résidant en milieu urbain 23 ( * ) .
Il convient cependant de souligner que ce phénomène concerne peu les dépenses de santé (- 17 %), le logement (- 13 %) et, surtout, les dépenses alimentaires (- 11 %). Les commerces que l'on souhaite implanter dans des zones urbaines sensibles étant essentiellement des commerces d'alimentation - en particulier, c'est un magasin alimentaire, supérette ou supermarché, qui est chargé de jouer le rôle de « locomotive » du centre -, le niveau de vie modeste des personnes vivant dans ces zones ne peut, en lui-même, que jouer un faible rôle dans la désertion de celles-ci par les commerces.
b) Un fréquent problème d'enclavement
La principale cause du surdimensionnement des centres commerciaux des quartiers défavorisés semble être leur enclavement. Ce dernier peut provenir d'un enclavement du quartier dans son ensemble, mais aussi d'une mauvaise conception du centre commercial 24 ( * ) ou d'une évolution du quartier autre que celle qui avait été prévue.
c) Une volonté de fuir le quartier
Il convient en outre de mentionner le fait que, bien souvent, les habitants des zones urbaines sensibles souhaitent s'évader de leur quartier (les habitants des quartiers voisins ne souhaitant a fortiori pas s'y rendre pour réaliser leurs achats).
En effet, comme l'indique le CREDOC dans le document précité, « la vie dans les quartiers de banlieue est marquée par une double tendance, celle du repli, la « cité » étant vécue comme un monde à part, et celle de l'évasion, la vraie vie se passant ailleurs ».
Il en découle que les habitants peuvent, d'une part, souhaiter avoir sur place plus d'offre commerciale et de services et, d'autre part, préférer fréquenter des zones commerciales plus attractives éloignées de leur quartier.
* 20 A l'origine, la compétence de l'EPARECA était limitée aux seules zones urbaines sensibles.
* 21 Bruno MARESCA, Laurent POUQUET, « Le commerce dans les cités - Un potentiel qui requiert du volontarisme et de l'innovation », Consommation et modes de vie, n° 144, 30 juin 2000.
* 22 Une étude plus ancienne de la DGCCRF (Direction Générale de la Consommation et de la répression des Fraudes) portant sur les structures commerciales de 1157 quartiers défavorisés dans 75 départements relevait en 1994 que 56 % de ces quartiers étaient sans commerce.
* 23 La poursuite de l'accession à la propriété a occasionné le départ des familles les plus aisées sans qu'elles soient remplacées par les mêmes catégories sociales.
* 24 Les urbanistes des années soixante et soixante-dix ont fréquemment conçu les centres commerciaux autour de l'idée que les clients viendraient y réaliser leurs achats à pied.