N° 87
SÉNAT
SESSION ORDINAIRE DE 2001-2002
Annexe au procès verbal de la séance du 22 novembre 2001
RAPPORT GÉNÉRAL
FAIT
au nom de la commission des Finances, du contrôle budgétaire et des comptes économiques de la Nation (1) sur le projet de loi de finances pour 2002 , ADOPTÉ PAR L'ASSEMBLÉE NATIONALE,
Par M.
Philippe MARINI,
Sénateur,
Rapporteur général.
TOME III
LES MOYENS DES SERVICES ET LES DISPOSITIONS SPÉCIALES
(Deuxième partie de la loi de finances)
ANNEXE N° 8
CULTURE ET COMMUNICATION
Rapporteur spécial
: M. Yann GAILLARD
(1) Cette commission est composée de : MM. Alain Lambert, président ; Jacques Oudin, Gérard Miquel, Claude Belot, Roland du Luart, Mme Marie-Claude Beaudeau, M. Aymeri de Montesquiou, vice-présidents ; MM. Yann Gaillard, Marc Massion, Michel Sergent, François Trucy, secrétaires ; Philippe Marini, rapporteur général ; Philippe Adnot, Bernard Angels, Bertrand Auban, Denis Badré, Jacques Baudot, Roger Besse, Maurice Blin, Joël Bourdin, Gérard Braun, Auguste Cazalet, Michel Charasse, Jacques Chaumont, Jean Clouet, Yvon Collin, Jean-Pierre Demerliat, Eric Doligé, Thierry Foucaud, Yves Fréville, Adrien Gouteyron, Hubert Haenel, Claude Haut, Alain Joyandet, Jean-Philippe Lachenaud, Claude Lise, Paul Loridant, François Marc, Michel Mercier, Michel Moreigne, Joseph Ostermann, Jacques Pelletier, René Trégouët.
Voir
les numéros
:
Assemblée nationale
(
11
ème
législ.) :
3262
,
3320
à
3325
et T.A.
721
Sénat
:
86
(2001-2002)
Lois de finances. |
PRINCIPALES OBSERVATIONS
Votre rapporteur spécial estime que l'augmentation du budget de la culture dont le présent gouvernement avait fait une de ses priorités, ne peut tenir lieu de politique . Il voudrait, en cette année de fin de législature, manifester quelques réserves sur la façon dont a été atteint cet objectif.
A. 1 % ET APRÈS ?
Enfin, la France consacre 1 % du budget de l'État à la culture ; c'est un beau résultat. Mais pour quoi faire ? Conscient du caractère provocateur de la question, votre rapporteur spécial y voit, non la remise en cause de l'utilité de faire plus et surtout mieux pour la culture, mais la nécessité de connaître aussi précisément que possible ce qui est fait sur le terrain et de s'efforcer d'évaluer les résultats obtenus.
1. Une transparence des coûts toujours à l'état de promesse
En
matière culturelle comme dans d'autres domaines, pour prendre la bonne
décision, il faut savoir « combien ça
coûte » et c'est pour cette raison que votre rapporteur
spécial insiste sur l'importance de la compatibilité analytique
et la mesure des performances.
Nul doute que la nouvelle loi organique qui prévoit pour 2006 la
définition de missions associées à des indicateurs de
résultats - qui fait déjà l'objet de réflexion au
sein du ministère de la Culture -, devrait accélérer le
mouvement vers la prise en compte de la nécessité de
gérer, même l'action culturelle.
Malgré certaines avancées, les progrès sont lents dans la
mise en place les instruments de gestion indispensables à
l'efficacité de l'action administrative comme au contrôle de
l'emploi des fonds publics par le Parlement.
La mise en place des outils de
comptabilité analytique
reste
laborieuse : si la Comédie française reste exemplaire
à cet égard, on est en retard dans d'autres établissements
comme le Louvre ou la Bibliothèque nationale de France. Des outils
comptables, plus ou moins sophistiqués, existent mais ils sont
inégalement performants. Ainsi, la Réunion des musées
nationaux a un logiciel comptable JADE auquel devrait se substituer en 2002 un
nouveau système comptable plus adapté.
Votre rapporteur spécial signale qu'il n'est pas parvenu à
obtenir, pour l'instant, de la Réunion des musées Nationaux un
tableau de bord sommaire des résultats de chacune des expositions
qu'elle organise - précisant le coût prévisionnel, le
nombre de visiteurs et les recettes attendues pour les comparer aux
réalisations. Il reviendra dans son rapport écrit sur la
situation d'un organisme qui doit faire face à des difficultés
structurelles, et sur l'organisation et le statut duquel il s'interroge.
En revanche, les dépenses de personnel commencent à être
prises en compte et vous trouverez dans le rapport écrit un tableau
donnant la valorisation des rémunérations des personnels de
l'État affectés aux établissements publics
rattachés au ministère de la culture.
On peut signaler que celui-ci va mettre en place un
observatoire du
spectacle vivant
, ce qui est une façon de répondre aux
observations de la Cour des comptes qui avait fait remarquer que
«
l'administration ne dispose ni d'une synthèse des comptes
des compagnies, ni des données nécessaires pour en suivre
régulièrement la programmation et la
fréquentation
», citant parmi les données
intéressantes le nombre de spectateurs payants par
représentations.
Par ailleurs, la poursuite du processus de déconcentration
1(
*
)
n'est pas favorable à
l'exercice du contrôle parlementaire, ni même d'ailleurs à
la connaissance par l'administration de l'action du ministère. Le
logiciel informatique, « Quadrille», dont la mise en place est
en phase de test, devrait être opérationnel en 2002 : ainsi
saura-t-on enfin en temps réel ce que font les DRAC des crédits
déconcentrés, pas plus qu'on n'est en mesure d'avoir une vision
consolidée au niveau national de ce que tel ou tel prestataire peut
obtenir comme contrats ou comme subventions.
2. Le rééquilibrage Paris province contrecoup du préfinancement des grands travaux parisiens
Contrairement à l'année dernière, les
dotations
budgétaires consacrées aux équipements culturels locaux,
excèdent à nouveau celles consacrées aux grands
équipements culturels parisiens.
En fait, la décrue des crédits affectés au musée
des arts premiers permet au deux plateaux de la balance de s'équilibrer,
même si l'on ne trouve pas du tout le même type d'équipement
de part et d'autres : d'un côté, on trouve de grands
équipements lourds, de l'autre, des équipements de
proximité, manifestement divers, comme en témoigne l'appellation
«
Lieux de diffusion de musique et de danse, aménagements de
lieux de théâtre et de spectacles, publics ou privés,
orgues d'églises
», poste qui, avec 27,5 M€,
pèse plus lourd que la dernière tranche du musée des arts
premiers. Peu nombreuses sont les opérations qui, telles le centre d'art
contemporain des abattoirs de Toulouse aujourd'hui achevé, ou le futur
Musée des civilisations de l'Europe et de la
Méditerranéenne de Marseille, sont comparables aux projets
parisiens.
3. L'impossibilité de dépenser les crédits d'investissement : une fatalité dont on s'accommode
Si la
tempête
de décembre 1999
a constitué le
révélateur du mauvais entretien de nos monuments historiques,
elle l'est aussi de nos carences administratives
.
L'État éprouve les plus grandes difficultés à
consommer les 242 MF de crédits sur le chapitre 56-20 et
195 MF sur le chapitre 66-20 ouverts par le collectif budgétaire du
13 juillet 2000 en autorisations de programme comme en crédits de
paiement. Or, en dépit des besoins résultant d'un état
sanitaire alarmant selon la Cour des comptes, l'État continue de
s'accommoder d'une situation où
l'administration du patrimoine
n'arrive pas à absorber plus d'un certain quantum de crédits
.
S'agissant des autorisations de programme, le tableau, qui figurera dans le
rapport écrit, retrace, région par région, le montant des
reliquats non encore affectés à la fin de l'exercice 2000, sur
chacune des lignes budgétaires d'investissement consacrées
à la restauration du patrimoine.
L'administration fait état d'un ensemble de facteurs qui tiennent
à la succession des étapes techniques, scientifiques et
administratives, de nature à expliquer cette fatalité des
reliquats
2(
*
)
. Certes, si l'on
neutralise l'incidence des crédits tempête de la loi de finances
rectificative
3(
*
)
sur les
reliquats d'autorisations de programme non affectés, on constate que le
montant de ces reliquats au 31 décembre 2000 est tout à fait
comparable à celui constaté les années
précédentes.
Par ailleurs, s'agissant des crédits du chapitre 66-20, une autre raison
conjoncturelle doit être avancée pour expliquer l'augmentation du
montant des reliquats constatés. Les nouvelles règles
posées par le décret du 16 décembre 1999 relatif aux
subventions d'investissement de l'État, et l'arrêté du 30
mai 2000 ont en effet entraîné en 2000 un accroissement sensible
des délais de constitution des dossiers. Votre rapporteur spécial
note avec intérêt qu'
un
groupe de travail associant ses
services centraux et les services régionaux vient d'être
constitué afin d'analyser les causes de retard de la consommation des
crédits
et de proposer des solutions susceptibles d'améliorer
nettement la situation actuelle.
On n'est guère étonné de constater que les accents
triomphalistes des tableaux du dossier de presse retraçant les
crédits inscrits en loi de finances, sont contredits par les
réalités budgétaires des lois de règlement. Ainsi
voit-on qu'
en
termes de budgets exécutés, on est, en
2000
,
à 500 millions en dessous des dépenses effectives de
l'exercice 1997
.
On ne s'étonnera guère de ce que
en termes de budgets
exécutés
, on soit en
1999 et 2000
, selon les calculs
des services de la commission effectués en liaison avec la direction du
budget loin du compte puisque l'on se situe pour ces deux années - hors
corrections de périmètres, mais elles sont peu importantes -
au niveau de 0,96 % contre les quelque 0,967 % et 0,980 %
affichés dans les projets de loi de finances
. Dans ces conditions,
on risque d'être encore loin de compte en 2001.
En revanche, en ce qui concerne les
dépenses ordinaires
, les
dotations
ont augmenté de plus d'un milliard de francs passant de
10,337 milliards de francs en 1997 à 11,368 milliards de francs
en 2000
. Compte tenu des dotations prévues par les projets de loi
de finances pour 2000et 2001, on a toutes les raisons de penser que ce
gonflement des dépenses de fonctionnement de l'État n'est pas
achevé.
B. DES LIBERTÉS INAVOUÉES AVEC L'AUTORISATION BUDGÉTAIRE
Plutôt que d'annuler les crédits ouvertement, plutôt que d'accepter les amendements d'ajustement des crédits comme ceux proposés par la commission des finances du Sénat, au risque alors de faire apparaître une moindre croissance, voire une diminution des dotations budgétaires, il est plus commode de recourir à l'autocensure budgétaire, voire à la « mobilisation » de moyens qui peut s'analyser comme des redéploiements de moyens, sinon occ ultes, du moins mal explicités et ce alors même que les redéploiements affichés sont particulièrement faibles 4( * ) .
1. Le contrat de gestion : l'institutionnalisation d'un nouveau mode de régulation budgétaire clandestine
Un
premier contrat de gestion avait été conclu au printemps 1999
entre les ministères des finances et de la culture afin d'assurer le
respect d'un objectif de progression de 1 % des dépenses en volume.
La Cour des comptes observe dans son rapport sur l'exécution de la loi
de finances pour 1999 : «
une telle mesure de
régulation, moins directement visible qu'une pure et simple annulation
de crédits, conduit de facto à accroître la tendance
à la sous-consommation déjà accentuée sur les
chapitres d'investissement, à rendre en partie artificielle la
définition des prévisions budgétaires, et à
détériorer les relations de l'État avec ses partenaires,
notamment en ce qui concerne la restauration du patrimoine
monumental... »
Le « contrat de gestion » 2000 n'a été conclu
que tardivement. Les engagements pris par le ministère de la Culture
pour contribuer à l'exercice se sont traduits par :
- un montant de reports prévisible fixé à 165 M€
(1080 MF), ce montant ayant été calibré par
référence au pourcentage moyen de reports observé de
1995-96 à 1999-2000 ;
- une mise en réserve de crédits, au-delà du montant de
reports prévisibles, à hauteur de 23 M€ (150 MF)
de crédits de paiement, dont 19 M€ (125 MF) de
crédits de paiement sur le chapitre 56-20 et 4 M€ (25 MF)
de crédits sur le chapitre 36-60.
Ces crédits devaient être reportés sur l'exercice 2001,
à l'exception de 1,2 M€ (7,8 MF) de crédits du
chapitre 36-60, qui ont permis - d'une part de financer les besoins de
fonctionnement du secrétariat d'État au patrimoine et à la
décentralisation culturelle pour l'année 2000 [0,27 M€
(1,8 MF)] et, d'autre part, de compléter les crédits
indemnitaires [0,9 M€ (6 MF)].
Amorcé plus tôt dans l'année, le
contrat de gestion
2001
comporte les engagements suivants :
- un
montant de reports prévisible fixé à 259 M€
(1700 MF),
dont on remarque qu'il est
supérieur de quelque
100M€
(700 MF)
au montant prévu par le
précédent contrat de gestion
;
- une mise en réserve de crédits, au-delà du montant de
reports prévisible, à hauteur de 93 M€ (610 MF) de
crédits de paiement, elle aussi très supérieure à
celle de l'exercice 2000 : 7,6 M€ (50 MF) de crédits de
paiement sur le chapitre 36-60, 22,9 M€ (15 MF) sur le titre IV,
48,8 M€ (320 MF) sur le chapitre 56-20, 16,8 M€
(110 MF) sur le chapitre 56-91 et 17,5 M€ (115 MF) sur le
titre VI.
On note que sur le montant de crédits mis en réserve, 7,6 M€
(50 MF) feront l'objet d'une annulation en collectif de fin
d'année
5(
*
)
.
En fait,
ces informations fournies par le ministère de la Culture
témoignent de l'imbrication de la procédure des contrats de
gestion avec celle, plus traditionnelle, des annulations de crédits,
dont elle n'est dans certains cas que l'anticipation inavouée
.
La procédure classique par voie réglementaire ou
législative avait le mérite de la clarté. Les
méthodes de régulation budgétaire contractualisées
ont l'inconvénient de brouiller le jeu.
A peine le budget est-il
voté, que l'on s'empresse de prévoir des reports de
crédits, sans tenir compte du vote du Parlement
, au risque
d'augmenter encore des reports déjà importants pour les raisons
techniques et administratives mentionnées plus haut.
Ces reports sont plus ou moins « indolores », selon la
nature des crédits concernés. Mais on peut s'interroger sur le
sens de la procédure budgétaire où l'on vote des
crédits dont on sait pertinemment qu'ils ne pourront être
engagés dans l'année et qu'ils feront l'objet d'un accord interne
à l'exécutif pour être reportés sur les exercices
suivants.
2. Les crédits de paiement du patrimoine comme variable d'ajustement
Mais,
à ces pratiques, d'autant plus pernicieuses qu'elles sont insidieuses -
de ce point de vue, les décrets d'annulation ne sont que la partie
émergée de l'iceberg -, s'ajoute et c'est largement
inédit, des
libertés avec les règles d'ouverture des
crédits de paiement d'investissement
.
La meilleure utilisation des crédits de paiement disponibles dont il est
fait état dans le dossier de presse de façon trop triomphaliste,
a attiré l'attention de votre rapporteur spécial peu enclin
à croire que l'on pouvait dégager des « moyens
nouveaux » sensiblement supérieurs aux « mesures
nouvelles », bref qu'il existait des fonds dormants dans lesquels il
suffirait de puiser. Il s'agit, ni plus ni moins, que d'une
nouvelle forme
de régulation budgétaire,
même si elle s'avance
derrière le masque de la rationalité et de la mobilisation de
tous les moyens disponibles.
Au départ, on a une situation paradoxale et dont on comprend qu'elle
puisse engendrer des frustrations, voire des démangeaisons :
l'accumulation de crédits de paiement inutilisés notamment aux
titres V et VI par suite de raisons structurelles déjà
évoquées, s'agissant des dépenses de restaurations des
monuments historiques, mais, également, en raison de la volonté,
largement délibérée selon votre rapporteur spécial,
de lancer des opérations par anticipation ou, du moins, trop tôt
eu égard à l'état d'avancement technique et politique du
dossier. Des opérations comme celles de l'aménagement de
l'immeuble des « Bons enfants » ou la remise en état
du grand Palais ont été financées en
quasi-totalité, alors même qu'elles n'entrent que maintenant dans
leur phase active.
Or, la
clé de consommation actuelle servant à traduire
automatiquement en crédits de paiement les autorisations de
programme
, qui est de - 25/30/30/15 -, concerne une période de temps
trop brève et aboutit à l'accumulation de
crédits de
paiement
services votés « CPSV » inutilisables
dans l'immédiat. D'où l'idée née au sein du
ministère de la culture, de mobiliser une partie de ces crédits
de paiement « dormants » pour financer des actions de
nature à satisfaire des besoins immédiats...
En fait, le ministère de la culture a obtenu la possibilité de
réutiliser une fraction des « CPSV » en stock pour
financer ses priorités. Au delà de la prétendue
rationalité d'une telle attitude, il y a les réalités
budgétaires
: les « moyens nouveaux » ainsi
dégagés ont été pris sur les crédits de
paiement d'opérations qui restent programmées, et dont,
a
priori
, on n'a pas de raisons de penser que leurs besoins ont
été surévalués. Tôt ou tard, les
crédits ainsi rééchelonnés devront être
inscrits
.
En fait,
le ministère aurait ainsi
« mobilisé » 238,84 MF sur le chapitre 56-20
patrimoine monumental pour lequel la capacité d'absorption des
crédits est structurellement limitée, et 140 MF sur le
chapitre 66-91 « Autres équipements »,
qui
aurait été doté de façon excessive par suite des
tensions sur les crédits de paiement notamment au niveau des Directions
régionales des affaires culturelles.
Certes, chercher à dégonfler les reliquats de crédits sur
les titres V et VI
6(
*
)
, n'est
pas un objectif illégitime, mais faut-il le faire, au moins pour partie,
par le moyen d'un changement de la clé de conversion des autorisations
de programme en crédits de paiement ? En fait, on revient sur des
décisions d'ouvertures déjà prises, alors qu'on aurait pu
se contenter d'étaler la traduction en crédits de paiement de
nouvelles autorisations de programme mais cela n'aurait pas eu le même
impact.
Car, l'affaire se double, selon votre rapporteur spécial, de ce qui
pourrait bien s'analyser comme un
redéploiement de crédits
occulte.
Même si les règles de l'ordonnance organique
empêchent les mouvements de crédits entre titres par voie
administrative, tout se passe comme si l'on avait réservé les
moyens nouveaux, « l'argent frais », aux titres III et IV
et financé une partie des besoins liés aux nouvelles
autorisations de programme, par ces redéploiements.
On peut en effet défendre le point de vue selon lequel les quelque
379 millions de francs de crédits de paiement ainsi
dégagés, ont permis d'éviter que les besoins nés
des nouvelles autorisations de programme, ne viennent absorber une part trop
importante des moyens nouveaux alloués au ministère de la
culture, libérant de ce fait des crédits supplémentaires
pour l'emploi et le spectacle vivant.
C'est d'ailleurs bien ce qu'indique le dossier de presse,
«
Au-delà des mesures nouvelles obtenues (58,69
M€, soit 385,68 millions de francs) affectées principalement
au titre IV et aux subventions aux établissements publics, le
ministère de la Culture a obtenu la possibilité de
redéployer près de 380 millions de francs de crédits
de paiement non mobilisés qui permettent de financer la progression des
dépenses de personnel, le fonctionnement et les dépenses
d'investissement. »
C. EMPLOI : UNE SITUATION DIFFICILE À MAÎTRISER
Le
projet de budget pour 2002 crée de nombreux emplois. Même s'il ne
s'agit dans la plupart des cas que de régularisations, on ne peut que
craindre que cette augmentation du nombre des emplois ne finisse par
accroître, indépendamment des effets de la réduction du
temps de travail, les charges de l'État.
Toute la question est de savoir si ces évolutions sont
véritablement maîtrisées et si l'effort qui est
demandé au budget de l'État, ne devra pas être sinon
amplifié du moins prolongé.
1. La poursuite de la résorption de l'emploi précaire
Il faut
rappeler qu'il a été décidé, en 1994, de stabiliser
les agents en fonction au 1er juillet de cette année, qui
comptaient plus de dix mois d'ancienneté et qui exerçaient des
fonctions correspondant à un besoin permanent
7(
*
)
.
Parallèlement, le ministère engageait une politique de
résorption de ces catégories d'agents, par le biais, dès
1995, des dispositions transitoires inscrites dans le nouveau statut des
personnels techniques d'accueil, de surveillance et de magasinage, puis,
à partir de 1998, par l'application à certains corps du
ministère de la culture, des dispositions de la loi du
16 décembre 1996 sur l'emploi dans la fonction publique.
Le bilan de ces plans de résorption, au 31 décembre 2000
(échéance de la loi relative à la résorption de
l'emploi précaire) et à effectifs 2000 constants, est le
suivant :
|
Nombre
d'agents dits «vacataires»
|
Nombre d'agents stabilisés |
% de stabilisations |
Nombre d'emplois créés |
Nombre d'emplois transformés |
Nombre de stabilisations sur emplois vacants |
Agents techniques accueil surveillance et magasinage |
649 |
607 |
93,5 % |
171 |
278 |
158 |
Filières administrative et technique |
455 |
228 |
50,1% |
57 |
0 |
171 |
Solde fin 2000 à emplois constants |
1104 |
835 |
75,6% |
228 |
278 |
329 |
Sous la
pression des grèves qui sont intervenues à la fin de
l'année 1998 mais surtout au printemps 1999, le ministère de la
culture a été amené à mettre en place un plan de
résorption de l'emploi précaire.
A cette fin, le ministère de la culture a obtenu, au budget 2000, la
création d'une première tranche d'emplois, à hauteur de
263, dont 206 d'agents techniques d'accueil, de surveillance et de
magasinage et 57 d'agents administratifs. Par ailleurs, 15 emplois
d'agents contractuels ont également pu être créés au
budget des établissements publics administratifs du musée du
Louvre et du musée et du domaine national de Versailles. Ces
créations augmentées des emplois vacants, ont permis de
titulariser, dès la fin du premier semestre 2000, 269 agents dans la
filière surveillance et 70 dans la filière administrative.
Pour 2001, le ministère a pu poursuivre cette politique de
créations d'emplois : 300 emplois ont ainsi été
créés, dont 110 grâce au transfert d'emplois contractuels
du budget de l'État vers celui des établissements publics.
Dès que les textes d'application de la loi du 3 janvier 2001 relative
notamment à la résorption de l'emploi précaire seront
publiés, ce sont 757 agents qui devraient pouvoir se présenter
aux concours ouverts grâce aux emplois créés au budget de
2001.
En 2002, le ministère de la culture a demandé l'inscription
dans le projet de loi de finances de 235 créations d'emplois
par
transformation de crédits, afin de permettre la stabilisation des agents
recrutés à titre précaire notamment dans les grands
établissements publics
8(
*
)
.
Le nombre correspondant à cette dernière catégorie, qui
était estimé à 1100 environ en 1996 comme indiqué
dans le tableau ci-dessus, a tendance à varier - il était
évalué à 1203 personnes fin 1999, et 1270 fin 2000-, ce
qui laisse supposer que
la suppression des emplois précaires est un
travail de Sisyphe, puisqu'il semble bien qu'il faille continuellement
régulariser de nouveaux « vacataires
permanents »
.
Le ministère indique qu'afin de prévenir la reconstitution d'un
stock d'emplois précaires, il faut que le ministère dispose
d'emplois de titulaires en nombre suffisant pour permettre le fonctionnement de
ses équipements culturels, et que c'est la raison pour laquelle le PLF
2002 prévoit la création nette de 115 emplois. Dont acte.
Mais
il faudrait
surtout
qu'on applique effectivement les multiples
circulaires interdisant la satisfaction de besoins permanents par des
vacataires
. Or de ce point de vue, la volonté de rigueur
affichée n'a, semble-t-il, que peu d'effets.
2. L'onde de choc des 35 heures
Le
ministère de la culture applique, en matière d'aménagement
et de réduction du temps de travail, les principes définis par le
Gouvernement dans le décret du 25 août 2000, qui
prévoit des horaires annuels de 1 600 heures. Il s'agit d'une
base sur laquelle les services peuvent prévoir ou combiner des
réductions de la durée hebdomadaire ou des attributions de jours
de « RTT ».
La mise en oeuvre de ce principe a été l'occasion
d'établir un état des lieux dans l'ensemble des services, ainsi
que des établissements publics
9(
*
)
dépendant du
ministère.
Il en ressort que
la durée actuelle du travail est, dans le cas
général, de 1 724 heures par an,
compte tenu de
l'attribution, au-delà des 25 jours de congés légaux,
d'une semaine supplémentaire de repos, dite «
semaine
Malraux
» et de deux jours « ministre »
à prendre à Noël et à Pâques.
C'est la prise en compte de ces avantages particuliers et la crainte de leur
banalisation qui explique la multiplication des mouvements de grève qui
touchent certains services du ministère de la culture ou de ses
établissements publics et, notamment, les grands musées du Louvre
pour lesquels les journées de grève et des journées
d'ouverture tardive pour cause d'assemblée
générale
10(
*
)
sont importants
11(
*
)
.
Votre rapporteur spécial note que les agents de surveillance ou
d'accueil des grands musées et, plus encore, les agents de
sûreté ou de surveillance de nuit, ont des horaires sensiblement
moins importants, compte tenu des sujétions en principe attachées
à leurs fonctions
12(
*
)
.
D. DES GRANDES OPÉRATIONS QUI AVANCENT ENFIN
L'année dernière votre rapporteur spécial avait fait porter ses observations sur la programmation financière des grands équipements - pourquoi inscrire des crédits dont on sait qu'ils ne pourront être engagés et qu'ils devront être reportés ? Sans que cela affecte le sens de ces observations, il semble que des progrès soient constatés sur de nombreux projets dont un nombre important devraient enfin entrer dans leur phase opérationnelle.
1. La remise en état du Grand Palais
Après la fermeture de la grande nef du Grand Palais en
novembre 1993, des études importantes ont été entreprises
pour dresser un bilan précis sur l'état du Grand Palais.
A partir de ces études, les dépenses nécessaires à
la confortation et à la restauration du Grand Palais sont
estimées à 119,45 M€ (783,5MF), soit
129,95 M€ (852,37 MF) après actualisation
consécutive à la hausse du coût de la construction. Le
montant de la première phase est de 60,98 M€
( 400 MF ), soit 65,97 M€ ( 432,7 MF )
après actualisation. Le montant de la deuxième phase est de
58,47 M€ ( 383,5 MF ), soit 63,98 M€ ( 419,67 MF)
après actualisation.
Les dotations inscrites en loi de finances 2001 étaient de
6,1 M€ (40 MF) en autorisations de programme et au PLF 2002
de 8,26 M€ (54,15 MF) en autorisations de programme. Les
montants inscrits en autorisations de programme au titre de la première
phase hors actualisation ont été entièrement
versés. Les montants inscrits au titre du PLF 2002 correspondent
pour 6,73 M€ (44,15 MF) à l'actualisation de l'enveloppe
et les 1,53 M€ ( 10 MF ) à l'amorce de la
deuxième phase. Les travaux ont commencé à
l'été 2001 et devraient s'achever en 2005.
On remarquera que, enfin, à la suite de plusieurs rapports
demandés par le ministère de la culture et de la communication,
un groupe de travail sera chargé, à partir de septembre 2001, de
faire des propositions sur le mode de gestion du futur Grand Palais et de son
usage, sachant que l'essentiel des activités sera consacré
à des salons, expositions ou événements à dominante
culturelle.
2. La création de l'Institut national d'histoire de l'art
L'Institut national d'histoire de l'art- INHA-,
créé
par le décret n°2001-621 du 12 juillet 2001, prend la forme d'un
établissement public à caractère scientifique, culturel et
professionnel, placé sous la tutelle conjointe des ministres
chargés de l'enseignement supérieur, de la recherche et de la
culture.
L'installation de cet institut implique des travaux sur les deux sites de
Vivienne et de Richelieu. Pour le site de Vivienne, les travaux ont
débuté en mai 2001 dans le cadre d'une convention de mandat
signée en juin 1999 entre l'Établissement public de
maîtrise d'ouvrage des travaux culturels et l'État. Dès la
fin du 2ème semestre 2002, le bâtiment devrait pouvoir accueillir
un certain nombre de services, dont l'Ecole nationale du patrimoine. Les
travaux du site Richelieu sont prévus entre 2002 et 2006 sur la base
d'une programmation détaillée en cours de validation.
En 2001, 23 agents sont mis à disposition de l'association puis de
l'établissement public -13 par le Ministère de l'éducation
nationale et de la recherche, 10 par le Ministère de la culture-, qui
seront progressivement intégrés sur les postes affectés
à l'établissement. En 2002, l'établissement
bénéficie de la création de 3 emplois - inscrite au budget
du Ministère de l'éducation nationale mais financée
à parité - assis sur son budget propre. En plus de ces emplois,
14 emplois de titulaires sont créés au
bénéfice de l'INHA sur le budget des deux Ministères (7
sur chacun des deux).
La subvention prévue dans le cadre du projet de loi de finances pour
2002, est de 3,44 M€ (22,6 MF) répartie à
parité entre les deux ministères, inscrite pour le
ministère de la culture et de la communication dans le nouvel article 16
du chapitre 36-60 à hauteur de 1,42 M€ (9,3 MF) et
0,30 M€ (2 MF) sur le chapitre 66-98.
3. Le Musée des arts premiers
Après que, en décembre 1998,
l'établissement
public du musée du quai Branly
13(
*
)
se fut substitué à
l'association de préfiguration créée à la suite de
l'initiative du président de la République, un concours
international a été lancé en janvier 1999 avec une
enveloppe de travaux fixée à 167,69 M€
(1,1 milliard de francs) partagée entre les deux ministères
de tutelle, ministère chargé de la culture et ministère
chargé de l'enseignement supérieur et de la recherche.
Le jury a retenu, choix confirmé par le gouvernement, le projet de Jean
Nouvel et du paysagiste Gilles Clément. Le musée du quai Branly
ouvrira ses portes en 2004
En 2000, l'établissement public du musée du quai Branly a
signé le contrat de maîtrise d'oeuvre avec le lauréat de ce
concours. Le 13 avril 2000, le Pavillon des sessions a été ouvert
au public et, après cette ouverture, la politique d'acquisition des
oeuvres a été poursuivie. L'effectif global de
l'établissement public du musée du quai Branly était de 24
personnes en 1999, de 28 personnes en 2000 et de 43 en 2001. Il est
prévu de le porter à 60 en 2002.
Une réflexion approfondie sur le statut juridique du futur musée
et ses modalités de fonctionnement a par ailleurs été
engagée, tout comme sur l'avenir du
Musée des arts d'Afrique
et d'Océanie
, qui doit être fermé au public à la
fin 2002. A ce sujet, il a été précisé à
votre rapporteur spécial que l'aquarium tropical de Porte Dorée,
très fréquenté, restera ouvert au public. En ce qui
concerne le bâtiment classé monument historique, une étude
architecturale est en cours. Aucune affectation muséale n'ayant
été retenue pour ces bâtiments pour des raisons
essentiellement financières, il est prévu d'engager des contacts
avec des repreneurs éventuels, si possible sur la base d'un projet
à caractère culturel. Votre rapporteur spécial a
été informé, sachant par ailleurs que la Mairie de Paris
est propriétaire du terrain, de ce que des contacts avaient
été pris notamment avec le Muséum d'histoire naturelle.
4. Le regroupement des services centraux du ministère
En 1998,
votre commission des finances avait, à l'initiative de son rapporteur
général, proposé dans le cadre de son budget alternatif un
amendement tendant à diminuer les autorisations de programme du montant
relatives à l'aménagement de l'immeuble dit des « Bons
enfants », affecté anciennement au ministère des
finances, destiné à accueillir la quasi totalité des
services du ministère de la culture.
Cette initiative apparaît rétrospectivement raisonnable dans la
mesure où, trois ans après, les travaux sont seulement sur le
point de commencer après que certaines étapes essentielles ont pu
être franchies :
- le marché de maîtrise d'oeuvre a été
notifié le 10 novembre 1999 à l'équipe d'architectes
Francis Soler/Frédéric Druot, lauréate du concours
organisé par le ministère de la culture et de la communication en
1995 ;
- le permis de construire pour la réalisation des travaux a
été délivré au ministère de la culture par
arrêté du préfet de la région d'Ile de France, le
27 décembre 2000 ;
- la consultation des entreprises a été lancée le 27 juin
2001, et selon le calendrier prévisionnel, les travaux débuteront
en décembre 2001 pour être achevés au quatrième
trimestre 2003.
Exceptés la direction des archives de France, qui doit rester
implantée à l'hôtel de Rohan-Soubise, rue des Francs
Bourgeois, et le Département de l'organisation et des systèmes
d'informations, qui demeurera installé au Fort Saint-Cyr à
Saint-Quentin en Yvelines, l'ensemble des services centraux, actuellement
disséminés sur 16 sites à Paris, seront regroupés
en un seul pôle constitué par l'immeuble dit des « Bons
Enfants » qui accueillera un millier d'agents, soit environ les 2/3
du personnel, le Palais Royal et l'immeuble du 6 rue des Pyramides,
situés à proximité immédiate.
Le coût global prévisionnel, comprenant le coût des
études et des travaux (TTC et frais annexes), s'élève
à 56,10 M€ (368 MF) valeur de novembre 1998, y compris
l'aménagement de la cuisine et du restaurant collectif mais hors
mobilier et déménagement.
Sur le plan du financement, les montants des autorisations de programme
ouvertes pour cette opération jusqu'à la loi de finances 2001
s'élèvent à 55,05 M€ (361,15 MF). Le projet
de loi de finances pour 2002 comporte une ouverture de 9,63 M€
(63,2 MF) dont 8,41 M€ (55,2 MF) au titre de
l'actualisation, soit un total 64,68 M€ à comparer aux quelque
6,49 M€ (42,6 MF) engagés au 1er juillet 2001.
5. Les autres opérations confiées à l'EPMOTC
L'établissement public de maîtrise d'ouvrage des travaux culturels, EPMOTC, créé par décret le 19 mai 1998 est un établissement public à caractère administratif placé sous la tutelle du ministère de la culture et de la communication, qui gère au nom de l'État un ensemble d'opérations d'études ou de réalisations représentant un volume d'investissement de l'ordre de 0,58 M€ (3,8 MdsF) . Le tableau ci-après fait le point des divers chantiers en cours.