III. UN IMPACT IMPORTANT SUR LE FINANCEMENT PUBLIC DE L'AVIATION CIVILE
A. L'IMPACT NÉGATIF SUR LES RECETTES...
La
diminution de la croissance du trafic aérien entraîne
mécaniquement une diminution des recettes du budget annexe de l'aviation
civile. En effet, la taxe d'aviation civile est assise sur le nombre de
passagers et le volume de fret transportés, et les redevances
(redevances de route et redevance pour services terminaux de la circulation
aérienne), sur les mouvements d'avions.
Ces dernières seraient particulièrement affectées par le
ralentissement du trafic. En effet, l'obligation de réduction des
coûts pour les compagnies aériennes conduit à limiter le
nombre de vols, afin d'accroître le taux de remplissage des appareils.
Le gouvernement, comme Air France, considère que le trafic
aérien devrait retrouver une croissance de 5 à 6 % par an
dès que les perturbations liées aux attentats du 11 septembre
seront passées. Toute la question est de savoir combien de temps risque
de durer la période actuelle.
B. POURRAIT REMETTRE EN CAUSE LES MODALITÉS DE FINANCEMENT ET LES DÉPENSES DU BUDGET ANNEXE DE L'AVIATION CIVILE
1. L'impact sur le budget annexe de l'aviation civile
a) Pour l'année 2002
Le
financement des mesures de sûreté et la diminution des
prévisions de trafic pour 2002 conduisent à
déséquilibrer totalement le projet de budget annexe de l'aviation
civile, tel qu'il figure dans le projet de loi de finances initiale
. Le
gouvernement a donc déposé des amendements au présent
projet de loi de finances :
- pour financer les mesures de sûreté, un relèvement des
plafonds de la taxe d'aéroport, ainsi qu'un relèvement des taux
de la taxe d'aviation civile et une modification de la répartition de
son produit sont proposés ;
- pour compenser la perte de recettes liée aux prévisions de
trafic inférieures à celles figurant dans le projet de loi de
finances initiale et la diminution de la quotité de la taxe d'aviation
civile affectée au BAAC, le plafond d'emprunt du budget annexe sera
augmenté de 12,2 millions d'euros (80 millions de francs).
Les mesures de sûreté destinées à être
pérennes seront financées, pour l'essentiel, par la taxe
d'aéroport et par le FIATA, alimenté par la taxe d'aviation
civile, tandis que l'Etat assume la charge des dépenses
immédiates et non reconduites les années ultérieures.
b) A compter de l'année 2003
Le
gouvernement considère que la crise que subit actuellement le transport
aérien n'est que conjoncturelle, et que le trafic devrait reprendre
dès l'année 2003 sur la base d'une croissance comparable à
celle des dernières années, soit proche de 5 à 6 %.
On rappellera que le protocole d'accord de la DGAC conclu le 7
décembre 2000 a prévu le recrutement de 1.339 emplois en
trois ans. Ce protocole était fondé sur une progression annuelle
moyenne du trafic aérien de 5,8 % au cours de la période.
D'après les informations recueillies par votre rapporteur
spécial, le gouvernement n'envisage pas de remettre en cause les
recrutements prévus par le protocole d'accord de la DGAC du 7
décembre 2000 : compte tenu notamment des délais de
formation des personnels, les besoins en matière de contrôleurs
aériens notamment, doivent être anticipés plusieurs
années à l'avance. Or, le gouvernement ne souhaite pas
connaître un déficit en personnel au moment de la reprise de la
croissance du trafic.
Votre rapporteur spécial reconnaît qu'il convient de ne pas de
tirer des conclusions hâtives de la situation actuelle, au risque
d'hypothéquer l'avenir
. Il souligne cependant que si le trafic
aérien devait retrouver une pente de croissance sensiblement
inférieure à celle constatée au cours des dernières
années, des ajustements seraient indispensables afin d'assurer
l'équilibre du budget annexe : en effet, les recettes du budget
seraient affectées par le ralentissement du trafic aérien, tandis
que les coûts fixes, notamment en matière de personnel, seraient
en augmentation. Dans une telle hypothèse, les recrutements
prévus par le protocole d'accord seraient vraisemblablement nettement
supérieurs aux besoins réels. Il conviendrait alors de ne pas
reporter une charge excessive sur les compagnies aériennes.
2. L'effet pro-cyclique des ressources affectées au budget annexe de l'aviation civile
Les
relations entre les compagnies aériennes et le budget annexe de
l'aviation civile contribuent à accroître les effets des cycles
économiques. En effet,
le montant des redevances aériennes est
calculé à partir des prévisions de trafic aérien,
de manière à couvrir les charges correspondant au service fourni
par la direction générale de l'aviation civile
. Ainsi,
lorsque le trafic ralentit, le montant des redevances augmente. Dès
lors, ce sont les compagnies aériennes qui supportent un coût
supplémentaire qui vient s'ajouter à la moindre recette induite
par le ralentissement du trafic.
Dans la période actuelle,
l'augmentation des mesure de
sûreté décidées par le gouvernement entraîne
une croissance des charges de la direction générale de l'aviation
civile, et donc, une hausse des redevances pour les compagnies
aériennes. Aussi, les compagnies aériennes supportent des
coûts supplémentaires précisément dans une
période où leur
santé financière est
particulièrement fragilisée par le ralentissement du trafic.
Afin de faire face à l'augmentation des coûts, les compagnies
aériennes reporteront la charge en les imputant sur le prix des billets
d'avion, ce qu'elles ont déjà commencé à faire
depuis le 11 septembre. Cette augmentation du prix des billets pourrait, en
retour, contribuer à ralentir le développement du trafic
aérien, pour la part liée à la diminution
régulière du prix des vols.
Pour l'année 2002, les redevances initialement envisagées
étaient stables, après une diminution entre 1995 et 2001. En
effet, la croissance des dépenses était comparable aux
prévisions d'évolution du trafic aérien. Compte tenu de la
révision à la baisse des prévisions de trafic, le niveau
des redevances devra augmenter. D'après les prévisions
réalisées par l'organisme européen
« Eurocontrol », le trafic devrait progresser de
2,6 %. Afin de percevoir un revenu inchangé, la redevance de route
devrait augmenter de 11 % . Quant à la RSTCA, elle devrait
être affectée moins durement par la diminution du trafic, et sa
hausse devrait être limitée à 5 % environ.
A la hausse du niveau des redevances finançant le budget annexe de
l'aviation civile s'ajoutera la hausse des redevances aéroportuaires
.
La compétitivité des compagnies aériennes et des
aéroports français ne devrait cependant pas être trop
durement affectée
par la hausse des redevances, puisque le niveau de
celles-ci demeure relativement faible en comparaison de nos principaux voisins
européens. Cependant, cet effet pro-cyclique milite en faveur de
l'adoption d'un système de lissage sur plusieurs années du calcul
des redevances, en vigueur en Grande-Bretagne.
Les compagnies aériennes européennes ont émis le souhait
de geler le niveau des redevances au cours de l'année 2002, afin de ne
pas peser trop lourdement sur leur trésorerie. Plusieurs gouvernements
européens ont accepté l'idée d'un gel sur trois mois, mais
d'autres pays ont refusé d'accorder une avance de trésorerie aux
compagnies aériennes, considérant que le libre jeu de la
concurrence devait s'exercer.
Votre rapporteur spécial souligne que, en tout état de cause,
les coûts liés au renforcement de la sécurité
dans les aéroports et les avions vont peser de manière importante
sur les comptes d'exploitation des compagnies aériennes mondiales
pendant plusieurs années.