2. " Un coup de dés jamais n'abolira le hasard "11 ( * )
En tout état de cause, n'y aurait-il pas quelque orgueil de la part du législateur - fût-il organique - à vouloir abolir le hasard ?
Le texte soumis à la délibération du Sénat n'est pas susceptible d'atteindre les objectifs affichés par le Gouvernement et les auteurs des propositions de loi organique. En effet, pour faire en sorte que la situation prévue en 2002 ne puisse plus se reproduire, il serait nécessaire que tous les présidents de la République achèvent désormais leurs mandats et que le droit de dissolution ne soit plus utilisé.
Le tableau suivant retrace la durée des mandats de l'ensemble des présidents de la République depuis les débuts de la III e République.
Les Présidents de la République depuis 1873
Présidents de la République |
Dates d'exercice des fonctions |
Mac-Mahon |
1873-1879 |
Jules Grévy |
1879-1886
|
Sadi Carnot |
1887-1894 |
Casimir-Perier |
1894-1895 |
Félix Faure |
1895-1899 |
Emile Loubet |
1899-1906 |
Armand Fallières |
1906-1913 |
Raymond Poincaré |
1913-1920 |
Paul Deschanel |
1920 |
Alexandre Millerand |
1920-1924 |
Gaston Doumergue |
1924-1931 |
Paul Doumer |
1931-1932 |
Albert Lebrun |
1932-1939 1939-1940 |
Vincent Auriol |
1946-1953 |
René Coty |
1953-1958 |
Charles de Gaulle |
1958-1965
|
Georges Pompidou |
1969-1974 |
Valéry Giscard d'Estaing |
1974-1981 |
François Mitterrand |
1981-1988
|
Douze des dix-neuf présidents de la République n'ont pas achevé le premier ou le second mandat qui leur avait été confié. Dix présidents ont vu leur mandat interrompu au cours des cinq premières années de celui-ci : Jules Grévy en 1887, Casimir-Perier en 1895, Félix Faure en 1899, Paul Deschanel en 1920, Alexandre Millerand en 1924, Paul Doumer en 1932, Albert Lebrun en 1940, René Coty en 1958, Charles de Gaulle en 1969 et Georges Pompidou en 1974.
Rien ne permet d'affirmer qu'à l'avenir, la date de l'élection présidentielle ne sera plus modifiée par l'interruption du mandat d'un Président de la République.
Quant au droit de dissolution, il s'agit d'une prérogative fondamentale du Président de la République, qui ne pourrait être remise en cause que par une révision constitutionnelle dont les implications sur nos institutions seraient considérables.
En pratique, pour enraciner de manière définitive un calendrier électoral, il serait nécessaire à la fois de supprimer le droit de dissolution et de créer un vice-président susceptible d'achever le mandat du Président en cas d'interruption de ce mandat.
* 11 " Un coup de dés jamais quand bien même lancé dans des circonstances éternelles du fond d'un naufrage... " (Stéphane Mallarmé).