B. LA PROPOSITION DE LOI ORGANIQUE SOUMISE AU SÉNAT : REPOUSSER LA DATE D'EXPIRATION DES POUVOIRS DE L'ASSEMBLÉE NATIONALE

1. Le texte issu des travaux de l'Assemblée nationale

Le 19 décembre dernier, l'Assemblée nationale a examiné six propositions de loi organique :

- trois d'entre elles proposaient de modifier le code électoral pour reporter du premier mardi d'avril au 15 juin la date d'expiration des pouvoirs de l'Assemblée nationale :

. la proposition de loi organique (n° 2741) de M. Raymond Barre ;

. la proposition de loi organique (n° 2757) de M. Gérard Gouzes ;

. la proposition de loi organique (n° 2773) de M. Jean-Marc Ayrault et les membres du groupe socialiste et apparentés ;

- trois autres propositions avaient un objet légèrement différent :

. la proposition de loi organique (n° 2602) de M. Georges Sarre et plusieurs de ses collègues tendait à reporter du premier mardi d'avril au quatrième mardi de juin la date d'expiration des pouvoirs de l'Assemblée nationale ;

. la proposition de loi organique (n° 2665) de M. Bernard Charles et plusieurs de ses collègues tendait à assurer l'organisation aux mêmes dates des élections législatives et de l'élection présidentielle ;

. enfin, la proposition de loi organique (n° 2756) de M. Hervé de Charrette tendait à prévoir que, lorsque les élections législatives devaient être organisées dans les six mois précédant une élection présidentielle, elles étaient organisées dans les quarante-cinq jours suivant l'élection du Président de la République ; cette proposition était la seule qui n'impliquait pas de modification de la date d'expiration des pouvoirs de l'Assemblée nationale.

A l'issue de ses travaux, l'Assemblée nationale a adopté une proposition de loi organique, dont l' article premier modifie l'article L.O. 121 du code électoral pour reporter du premier mardi d'avril au troisième mardi de juin la date d'expiration des pouvoirs de l'Assemblée nationale . L' article 2 prévoit l'application de cette modification à l'Assemblée nationale élue en 1997.

Si ce texte était adopté, en 2002, les élections législatives seraient organisées après l'élection présidentielle et non avant comme il résulterait des échéances normales.

2. Trois motifs invoqués

Le texte soumis au Sénat est issu de six propositions de loi organique soumises en même temps à l'Assemblée nationale. Il n'a donc été examiné ni par le Conseil d'Etat ni par le Conseil des ministres. Les exposés des motifs de ces propositions, parfois singulièrement brefs, sont tous différents, de sorte que leur seule lecture ne permet guère de connaître la motivation précise du changement proposé.

Au cours des débats à l'Assemblée nationale, trois motifs ont été avancés pour justifier l'inversion de l'ordre des consultations électorales :

- tout d'abord, le Premier ministre comme le ministre de l'Intérieur et le rapporteur de la commission des lois se sont référés à l'" esprit " ou à la " logique " des institutions de la V e République , qui impliqueraient que le Président de la République soit élu avant les députés ;

- par ailleurs, M. Daniel Vaillant, ministre de l'Intérieur, a fait état de difficultés que le calendrier électoral actuel pourrait provoquer dans l'organisation de la présentation par les citoyens habilités des candidats à l'élection présidentielle . Ce motif ne figure pourtant dans aucun des exposés des motifs des propositions de loi examinées par l'Assemblée nationale ;

- enfin, M. le Premier ministre a avancé un dernier argument :

" Dans toute compétition régulière, les candidats sont placés à égalité sur la ligne de départ. Ce ne serait pas le cas si le calendrier actuel était maintenu (...) Dans cette hypothèse, en effet, les candidats à l'élection présidentielle seraient en règle générale candidats aux élections législatives ou, en tout état de cause, engagés dans la campagne nationale de leur formation politique (...) Pour tous les candidats à l'élection présidentielle sauf un, qu'ils soient de gauche ou de droite, le dilemme sera le suivant : ou bien affaiblir leur campagne législative parce qu'ils auraient déjà annoncé leur candidature à l'élection présidentielle (...) ou bien retarder leur candidature à la présidence jusqu'au terme des élections législatives, ce qui les placerait en situation d'inégalité manifeste face au président sortant, si celui-ci décidait d'être à nouveau candidat ".

Intervenant au nom de la commission des Lois du Sénat, votre rapporteur ne saurait commenter que les arguments de droit avancés pour justifier la modification de l'ordre des consultations électorales.

Il observe néanmoins qu'aucune de ces tentatives de motivation ne limite l'objet réel du texte à une question qui ne concernerait " que " l'élection d'une chambre.

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