IV. LE DÉVELOPPEMENT DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE EST CONTRARIÉ PAR DES PROJETS DE RÉFORME EN ATTENTE
A. LE DÉVELOPPEMENT DE LA FORMATION PROFESSIONNELLE EST ENRAYÉ
1. Les formations en alternance
Les
crédits relatifs à la formation professionnelle dans le budget du
ministère de l'emploi pour 1999 s'inscrivaient déjà dans
le cadre de la continuité. La seule évolution sensible
résidait alors dans un " recentrage " des aides publiques
à l'alternance.
Un décret du 12 octobre 1999 avait restreint le champ des
bénéficiaires de l'aide forfaitaire à l'embauche au
contrat de qualification aux jeunes les moins qualifiés, alors que
l'article 80 du projet de loi de finances pour 1999 opérait la
même modification pour les contrats d'apprentissage.
Aujourd'hui et compte tenu de ces dispositions " malthusiennes ", on
observe un léger tassement des crédits consacrés à
la formation professionnelle.
Ces crédits s'élèvent à 30,6 milliards de
francs dont 26 milliards de francs pour l'agrégat
" participation de l'Etat à la formation professionnelle "
soit une baisse de 1,6 %.
|
LFI 1999 |
PLF 2000 |
Evolution en % |
FORMATION PROFESSIONNELLE |
26.420,05 |
25.990,26 |
- 1,6 % |
A - Formations en alternance |
12.552,01 |
12.244,60 |
- 2,4 % |
Primes apprentissage |
4.664,61 |
4.113,83 |
- 11,8 % |
Exonérations contrats d'apprentissage |
4.587,80 |
4.721,17 |
2,9 % |
Primes de qualification jeunes |
343,00 |
233,00 |
- 32,1 % |
Exonérations contrats de qualification adultes |
2.607,92 |
2.660,00 |
2,0 % |
Primes qualification adultes |
100,00 |
120,00 |
20,0 % |
Exonération qualification adultes |
248,68 |
396,60 |
59,5 % |
B - Actions de formation à la charge de l'Etat |
5.995,10 |
5.825,67 |
- 2,8 % |
a. Dépenses de fonctionnement de la formation professionnelle |
|
|
|
Politique contractuelle |
335,13 |
335,00 |
0,0 % |
CPER |
405,41 |
397,00 |
- 2,1 % |
Autres dispositifs |
593,96 |
507,32 |
- 14,6 % |
b. Dépenses de rémunérations de la formation professionnelle |
|
|
|
Programme national de formation professionnelle |
923,54 |
926,00 |
0,3 % |
Jeunes Etat |
13,25 |
13,25 |
0,0 % |
Stagiaires AFPA |
900,00 |
1.000,00 |
11,1 % |
AFR |
2.715,57 |
2.541,47 |
- 6,4 % |
c. Dépenses d'investissement de la formation professionnelle |
108,24 |
105,63 |
- 2,4 % |
C - Dotation globale de décentralisation |
7.872,94 |
7.919,99 |
0,6 % |
(en millions de francs)
L'impression de stagnation domine lorsque l'on observe
l'évolution de ces crédits depuis quelques années.
Selon les résultats provisoires du compte économique de la
formation professionnelle qui retrace les interventions de tous les acteurs, la
dépense totale pour la formation professionnelle s'élève
à près de 140 milliards de francs, soit une progression de
0,6 % par rapport à 1996.
La stabilisation de l'effort entrepris s'opère à un niveau
relativement bas
puisque le niveau record de 1993 n'est pas
égalé et que l'engagement de formation reste inférieur de
0,21 point à celui constaté en 1993, retombant à
1,72 % du produit intérieur brut.
Ces données appellent deux remarques sur l'évolution des
crédits : ils sont certes suffisants pour assurer la reconduction
des actions de formation engagées les années
précédentes. Toutefois, ils sont loin d'atteindre le niveau qui
permettrait de considérer que le développement de la formation
professionnelle constitue une priorité du Gouvernement au même
titre que les emplois-jeunes ou les 35 heures.
Cette critique serait incomplète si l'on oubliait de préciser
qu'une nouvelle fois la discussion du budget de la formation professionnelle
intervenait dans un contexte de " réforme annoncée "
qui gèle pour ainsi dire les initiatives et explique que ce budget se
cantonne dans des actions de reconduction.
Concernant le détail des crédits, on observe que le total des
crédits consacrés à l'alternance s'élève
à 12,2 milliards de francs soit une baisse de 2,4 %
consécutive au " recentrage " des primes sur les bas niveaux
de qualification opéré par la loi de finances pour 1999.
Les primes relatives aux contrats d'apprentissage baissent de près de
12 % et celles relatives aux contrats de qualification de 32 %. Le
montant total de ces diminutions de crédits s'élève
à 660 millions de francs.
L'idée de recentrage supposerait que ces crédits sont
réalloués sur des dispositifs prioritaires. Or, cela n'est que
partiellement le cas puisque si l'on observe une hausse de 20 % des primes
relatives aux contrats de qualification et une hausse de 60 % du montant
des exonérations de cotisations sociales de ces mêmes contrats,
ces augmentations ne portent que sur 170 millions de francs. On peut dans ces
conditions considérer que sous le vocable de recentrage s'opère
en fait une économie budgétaire de près de
500 millions de francs au détriment des formations en alternance.
Ce sentiment est confirmé par l'analyse des flux d'entrée dans
les contrats en alternance.
Entrées dans les dispositifs de formation 1999-2000
|
Effectifs prévus LFI 1999 |
Effectifs constatés au 31/08/1999 |
Effectifs prévus PLF 2000 |
Stages de formation |
|
|
|
SIFE collectifs |
120.000 |
70.014 |
110.000 |
SIFE individuels |
25.000 |
18.549 |
25.000 |
SAE |
30.000 |
14.588 |
20.000 |
Sous-total |
175.000 |
103.151 |
155.000 |
Contrats de travail aidés |
|
|
|
CIE |
180.000 |
103.788 |
155.000 |
CES métropole |
425.000 |
269.635 |
360.000 |
CEC |
60.000 |
34.177 |
60.000 |
Sous-total |
665.000 |
407.600 |
575.000 |
Contrats en alternance |
|
|
|
Contrats d'apprentissage |
230.000 |
74.133 |
220.000 |
Contrats de qualification |
130.000 |
58.442 |
125.000 |
Contrats de qualification adultes |
10.000 |
1.416 |
15.000 |
Sous-total |
370.000 |
133.991 |
360.000 |
Aides à la reconversion et à l'adaptation |
|
|
|
Conventions de conversion |
100.000 |
53.864 |
80.000 |
Allocations spéciales FNE |
18.000 |
6.843 |
19.000 |
Préretraites progressives |
18.000 |
11.779 |
12.600 |
Sous-total |
136.000 |
72.486 |
111.600 |
Chômage partiel (en millions d'heures) |
30.00 |
17.50 |
17.50 |
Source : Secrétariat d'Etat aux droits des
femmes et
à la formation professionnelle.
Le nombre des contrats d'apprentissage baisse de 4,3 % à 220.000 et
celui des contrats de qualification de 3,8 % à 125.000. Compte tenu
de l'augmentation du nombre de contrats de qualification adultes, on observe
globalement une baisse de 2,7 % du nombre des contrats en alternance qui
devrait être ramené à 360.000 en 2000.
On ne peut que regretter cette situation qui contraste avec l'état
actuel du marché du travail. Selon le baromètre mensuel La
Tribune-Crédit Lyonnais du mois de novembre
15(
*
)
, près des deux tiers
(64 %) de l'échantillon de patrons de PME interrogés
affirment rencontrer des difficultés pour embaucher les
spécialistes qu'ils recherchent. Ceci est particulièrement
préoccupant dans les secteurs des transports, du BTP, de la vente ou de
l'industrie. Les entreprises de la métallurgie recherchent
4.700 personnes d'ici l'été et s'inquiètent de ne
pouvoir trouver la main-d'oeuvre correspondante.
Votre commission a le sentiment que la formation professionnelle peut jouer un
rôle fondamental dans la réforme nécessaire du
fonctionnement du marché du travail et constituer la réponse
adéquate à ce problème de pénurie de main d'oeuvre.
Alors que le Gouvernement annonce la discussion prochaine de dispositions
législatives courant 2000 et d'un véritable projet de loi en
2001, elle souhaite insister sur le fait qu'une des raisons principales qui
expliquent le niveau élevé du taux de chômage
français réside dans le déficit de formation,
c'est-à-dire l'inemployabilité.
A cet égard, elle doute que ces salariés sans qualification
puissent trouver un emploi grâce aux 35 heures.
Une politique d'allégement de cotisations sociales est sans aucun doute
utile pour ces demandeurs d'emploi, mais chacun a bien conscience que la voie
de la réinsertion passe par la qualification, ceci en particulier pour
les plus jeunes de ces demandeurs d'emploi.
2. Les actions de formation à la charge de l'Etat
Les
crédits consacrés aux actions de formation à la charge de
l'Etat baissent de 2,8 % à 5,8 milliards de francs. Ils se
répartissent entre le financement des dépenses de fonctionnement,
de rémunération et d'investissement de la formation
professionnelle.
Concernant les dépenses de fonctionnement, on observe une stagnation
à 335 millions de francs des crédits de la politique
contractuelle (contrats d'études prospectives et engagements de
développement de la formation).
Les crédits consacrés aux contrats de plan Etats-régions
baissent de 2 %, ils devraient s'établir à 100 millions
de francs en 2000 au titre des dépenses d'investissement de la formation
professionnelle.
Au titre des dépenses de rémunération de la formation
professionnelle, les crédits affectés au programme national de
formation professionnelle sont stabilisés à 926 millions.
Ces crédits concernent la rémunération des stagiaires
suivant des formations financées par l'Etat.
On constate une baisse de près de 7 % des crédits
consacrés au financement de l'allocation formation reclassement (AFR).
Ces crédits qui devraient atteindre 2,5 milliards sont
destinés à rémunérer les demandeurs d'emploi
entrant en formation.
Par ailleurs, la loi quinquennale du 20 décembre 1993 a
engagé un mouvement important de décentralisation des actions
qualifiantes. Depuis le 1
er
janvier 1999, l'ensemble des
actions pré-qualifiantes a été en conséquence
décentralisé au profit des régions. L'Etat participe au
financement de ces actions décentralisées au moyen de dotations
qui évoluent conformément au taux de la dotation globale de
décentralisation.
En outre, l'ensemble des crédits relatifs à la dotation de
décentralisation concernant la formation professionnelle et
l'apprentissage rassemblés au chapitre 43-06 augmentent de 0,6 %
pour atteindre presque 8 milliards de francs en 2000.