B. L'ANALYSE DU PROJET DE BUDGET POUR 2000 : L'AIDE AU DÉVELOPPEMENT SACRIFIÉE
Les
changements de nomenclature liés à la mise en place d'un budget
unique ne permettent pas toujours de suivre aisément l'évolution
en 2000 des dotations budgétaires de l'ancien secrétariat
à la coopération.
Aussi votre rapporteur a-t-il choisi pour sa part de retracer la part
réservée dans le projet de budget pour 2000 aux crédits
dévolus à l'aide au développement qui étaient
inscrits en 1998 au budget du secrétariat d'Etat à la
coopération et, le cas échéant, au ministère des
affaires étrangères (dont la responsabilité apparaissait
naturellement plus limitée dans ce domaine, même si le Quai
d'Orsay conduisait certaines actions en faveur du
développement).
Catégories de dépenses |
LFI 99 |
LFI 2000 |
Evolution
en MF
|
Concours financiers (41-43) |
265 |
160 |
- 40 |
Assistance technique (42-12-art.10) |
1 224 |
1042 |
- 15 |
Coopération technique (bourses, formation, appui aux organismes concourant à la coopération au développement, appui local aux projets de coopération, fonds de coopération régionaux) |
661 |
669 |
-
|
Appui aux initiatives privées décentralisées (42-13) |
219 |
219 |
- |
Coopération militaire et de défense (42-29) |
780 |
754 |
- 3,3 |
Aide alimentaire (42-26) |
105 |
95 |
- 9,5 |
Action extérieure et aide au développement (68-80) |
17 |
17 |
- |
- Fonds
d'aide et de coopération (68-91)
|
(2 303)
|
(1 300)
|
- 43
|
TOTAL |
5 069 |
4 850 |
- 4,3 |
L'évolution des crédits dément ainsi les ambitions affichées. L'effort d'économie demandé au ministère des affaires étrangères porte principalement sur l'un des deux piliers de notre politique de coopération : l'assistance technique.
1. Une présence humaine amoindrie
a) Une disparition programmée de l'assistance technique civile ?
.
La remise en cause de la spécificité de la
coopération française
L'aide publique française depuis les indépendances s'est
singularisée par la priorité accordée à la
présence d'assistants techniques. A l'inverse, les autres bailleurs de
fonds et, en particulier, les institutions financières internationales
privilégient un mode d'action fondé sur des missions temporaires
d' " experts " chargés dévaluer les besoins et les
réponses adaptées à la situation du pays concerné.
A l'expérience, les avantages du modèle de coopération
français sont avérés : une excellente connaissance du
terrain, une capacité d'expertise reconnue par nos partenaires, une
certaine sagesse qui a prémuni la France contre les excès de
dogmatisme manifestés par les organisations internationales. Ainsi la
France, tout en appuyant les réformes souhaitées par le FMI, a
plaidé pour une application différenciée des
" recettes " libérales. Les institutions de Bretton-Wood et la
Banque mondiale se sont finalement ralliées aux positions
françaises en accordant une plus grande importance aux
considérations d'ordre social
dans leurs projets de
développement. En outre, l'action des coopérants ouvrait souvent
la voie à l'implantation d'entreprises françaises. Elle
constituait par ailleurs l'un des meilleurs vecteurs de la
francophonie.
Ainsi, à maints égards, la coopération française
répondait aux attentes de nos partenaires
Certes, la part de l'assistance technique vouée à la formation
devrait se réduire car elle avait précisément pour
vocation de favoriser l'émergence de cadres à même de
prendre la relève. La baisse de la coopération dite " de
substitution " a ainsi légitimement été
amorcée au début des années 90. Toutefois, le
mouvement
a touché également les coopérants chargés
d'encadrer l'aide-projet
: l'argument de réforme invoqué
a bientôt servi de prétexte à une réduction
flagrante des moyens financiers.
Ainsi le nombre de coopérants est passé de 7348 (2 423
techniciens et 4 925 enseignants) en 1989 à 2 151 (1 027
techniciens et 1 124 enseignants) en 1999, soit une baisse de 70 % en dix
ans !
Cette évolution se poursuivra en 2000 avec la suppression de
40 postes en année pleine.
Or le gouvernement avait déjà reconnu l'an passé que nous
avions atteint la cote d'alerte en dessous de laquelle on ne pouvait descendre
sans compromettre l'efficacité de notre action.
Les crédits de l'assistance technique se réduisent de
15
%
. Seule une partie de cette baisse (90 millions de francs) recouvre un
redéploiement de crédits interne au budget du
département : elle permet en effet d'abonder le chapitre 42-11
consacré à la coopération culturelle et scientifique.
Par ailleurs, le ministère a décidé de modifier la
présentation budgétaire de l'assistance technique : il ne
comptabilisera plus le nombre d'emplois d'assistant et retiendra les seuls
crédits de rémunération au motif de garantir une plus
grande souplesse d'utilisation. Le nouveau dispositif permettra
d'
atténuer l'effet optique des prochaines diminutions d'emploi
.
Ne confirme-t-il pas dès lors
la baisse programmée de notre
assistance technique
?
Cette évolution traduirait un
changement substantiel
de notre
coopération et un
alignement sur les modes d'intervention des autres
bailleurs de fonds
sans toutefois que cette orientation ait
été clairement annoncée par le Gouvernement et sans que le
Parlement ait été consulté.
La réduction des effectifs de l'assistance technique n'apparaît
pas seulement difficilement admissible au regard de la préservation du
modèle français d'aide au développement. Elle paraît
incohérente
par rapport à l'extension de la zone de
solidarité prioritaire. Notre pays a ainsi renoncé à se
doter de moyens supplémentaires dans les nouveaux pays de la zone si on
excepte la création de
quatre emplois seulement
(deux postes de
conseiller de coopération et d'action culturelle en Ouganda et en
Tanzanie, un poste d'attaché de coopération
décentralisée au Viêt-nam et la réactivation du
poste de directeur-adjoint du centre culturel d'Alger).
Les effets de la baisse des effectifs risquent d'être encore
amplifiés par la réduction progressive des coopérants du
service national.
L'assistance technique compte en effet un effectif de
150 coopérants
du service national (CSN) dans les pays de l'ex-champ
; ces emplois
représentent un coût budgétaire annuel de
19 millions de
francs
. Le remplacement des CSN par des professionnels civils
présenterait un coût prohibitif pour le budget. Dans cette
perspective, il faut prévoir une rémunération suffisamment
intéressante pour susciter un volant de candidatures à même
de permettre, en qualité et en quantité, un recrutement
satisfaisant. L'évolution des moyens financiers laisse planer sur ce
chapitre les plus graves préoccupations.
.
Le difficile règlement des questions statutaires
-
La question des rémunérations
Deux réglementations s'appliquent aux personnels de coopération
technique selon leur affectation géographique : un décret de
1992 pour les coopérants des pays de l'ancien champ, un décret de
1967 pour ceux qui exercent leurs fonctions dans un autre pays du monde
(environ 500 agents).
La fusion des administrations des affaires étrangères et de la
coopération impose une unification des statuts des personnels. Deux
mesures ont été adoptées en 1999 pour réduire la
disparité entre les deux statuts et permettre, en particulier,
certaines améliorations au régime de 1992
. Ainsi, une
mesure nouvelle de 16,9 millions de francs au budget de 1999 avait permis de
réévaluer les majorations familiales
au niveau
appliqué par le régime de 1967. Par ailleurs,
l'évolution des rémunérations
visées au
titre du décret de 1992 a été alignée sur le
mécanisme change-prix du décret de 1967 afin de garantir aux
agents affectés dans un même pays une évolution identique
de leurs émoluments en utilisant les mêmes données et en
adoptant la même périodicité trimestrielle.
Toutefois, un important travail réglementaire reste à accomplir
pour unifier le régime de tous les assistants techniques quel que soit
leur pays d'affectation.
Il faut espérer sur ce sujet une plus grande
célérité que dans le règlement du problème
des personnels contractuels.
-
Le règlement longtemps attendu des personnels
contractuels.
Le principe de la titularisation des contractuels de l'assistance technique
avait été posé par la loi n° 84-16 du 11 janvier 1984
(dite loi " Le Pors ") mais n'avait reçu qu'une application
limitée. La situation de quelque deux cents ayants droit parvenus depuis
plusieurs années au terme de leur mission, laissés sans
affectation et rémunérés par le ministère des
affaires étrangères et l'ancien secrétariat d'Etat
à la coopération, apparaissait particulièrement choquante.
Les décrets fixant les conditions exceptionnelles d'intégration
de ces agents non titulaires devraient enfin être prochainement
publiés au journal officiel. Le dispositif s'articulera autour des
quatre mesures suivantes :
- la répartition des agents par corps et par ministère en
fonction de leur expérience professionnelle et de leurs
diplômes ;
- la mise à disposition des ministères d'accueil des agents
concernés dans l'attente des transferts de crédits du
ministère des affaires étrangères vers les administrations
d'affectation ;
- la mise en réserve par les ministères d'accueil des postes
nécessaires au réemploi des agents ;
- à compter de la date de publication des décrets, les ayants
droit à la titularisation dans un corps de catégorie A de la
fonction publique de l'Etat bénéficieront d'un délai
d'option d'un an pour faire acte de candidature auprès de leur
ministère d'affectation, ce délai étant ramené
à six mois pour les agents de catégorie B et C. Les
intéressés disposeront ensuite d'un délai d'option d'une
égale durée pour accepte la proposition, unique, de
titularisation formulée par l'administration avec indication du niveau
de reclassement.
b) La coopération militaire : la priorité africaine érodée
.
La réduction des effectifs en Afrique
Le nombre des assistants militaires dans les pays de l'ex-champ se
réduira, en 2000, de 366 à 344. La déflation de 22 postes
doit être mise en parallèle avec la création de 19 postes
dans les pays placés traditionnellement sous la responsabilité du
Quai d'Orsay.
Evolution des effectifs d'assistants militaires permanents réalisés par pays
PAYS ex-CHAMP |
du 31/12/98 |
au 31/12/99 |
au 21/12/00 |
ANGOLA |
2 |
2 |
3 |
BENIN |
21 |
19 |
16 |
BURKINA FASO |
15 |
15 |
14 |
CAMBODGE |
12 |
12 |
10 |
CAMEROUN |
43 |
39 |
34 |
CENTRAFRIQUE |
31 |
18 |
16 |
COMORES |
11 |
4 |
3 |
CONGO |
3 |
4 |
6 |
COTE D'IVOIRE |
39 |
36 |
30 |
DJIBOUTI |
32 |
27 |
24 |
ETHIOPIE |
1 |
1 |
1 |
GABON |
36 |
30 |
23 |
GUINEE CKY |
22 |
20 |
18 |
GUINEE EQ |
4 |
4 |
4 |
ILE MAURICE |
1 |
1 |
0 |
MADAGASCAR |
21 |
21 |
21 |
MALAWI |
1 |
1 |
1 |
MALI |
19 |
17 |
17 |
MAURITANIE |
39 |
1 |
10 |
NIGER |
39 |
9 |
16 |
SENEGAL |
30 |
28 |
26 |
TCHAD |
39 |
35 |
31 |
TOGO |
27 |
22 |
20 |
TOTAL ex-CHAMP |
488 - 122 366 - 22 344 |
Entre
1998 et 2000, le nombre des coopérants militaires aura ainsi
été réduit de 144 postes -soit une réduction de
30 % en trois ans. Cette évolution s'explique en partie par la
suspension de notre coopération dans certains pays africains à la
suite de coups d'Etat militaires (au Niger et aux Comores) ou à la
demande des autorités du pays concerné (en Mauritanie,
après l'arrestation en France d'un officier mauritanien).
Cependant, quand les liens sont rétablis, la présence
française retrouve rarement son niveau antérieur (ainsi au Niger,
après le creux de 1999, l'effectif prévu en 2000
s'élève à 16 militaires contre 39 en 1998). Cette
érosion témoigne bien de l'orientation profonde du mouvement vers
une baisse globale des effectifs de coopérants militaires.
Cette évolution appellera une double observation de la part de votre
rapporteur :
- d'une part, les effectifs de l'assistance militaire technique se
réduisent de façon générale et ne répondent
plus aux besoins liés au renforcement de l'Etat de droit dans nombre de
pays où la démocratie apparaît encore fragile ;
- d'autre part, les arbitrages budgétaires conduisent d'ores et
déjà à un
affaiblissement de notre présence en
Afrique
; le risque d'une banalisation progressive du continent
africain, contenue dans le projet de réforme de la coopération,
se concrétise ici de façon manifeste.
.
La formation : une progression modeste au seul
bénéfice des pays hors champ
La progression modeste (+ 3,75 %) des dotations prévues pour la
formation bénéficie aux seuls pays extérieurs au champ
traditionnel de la coopération, conformément à la
directive de transférer les crédits vers les pays de l'Est. Or,
les pays africains continuent d'exprimer des besoins tout à fait
légitimes, s'agissant notamment de la formation aux méthodes de
maintien de l'ordre dans un Etat de droit.
La réforme de notre outil de défense et la réduction
concomitante des effectifs militaires français a pour effet direct de
réduire le nombre de places offertes aux stagiaires étrangers
dans les écoles militaires françaises, alors même que les
besoins en formation de nos partenaires tendent à augmenter en raison
d'une professionnalisation accrue des personnels militaires.
Dans ce contexte, la coopération française a décidé
de soutenir la création d'
écoles nationales à vocation
régionale
en Afrique. Dix écoles fonctionnent
déjà sur le continent : au Sénégal (2), au
Mali (2), en Côte d'Ivoire (4), au Togo (1) et au Bénin (1). En
2000, quatre nouvelles écoles ouvriront :
- le centre de perfectionnement de la gendarmerie mobile de Ouakam
(Sénégal),
- le centre de perfectionnement au maintien de l'ordre de Awae (Cameroun),
- une école de pilotage à Garoua (Cameroun),
- l'école militaire technique à Ouagadougou (Burkina Faso).
En 2000, la direction de la coopération militaire et de défense
du ministère des affaires étrangères prévoit de
former 270 stagiaires africains supplémentaires dans les écoles
africaines à vocation régionale. La croissance des crédits
nécessaires à la formation en Afrique devrait être
compensée par les économies réévaluées
grâce à la diminution des stages effectués en France.
2. L'aide économique : une banalisation de la place impartie à l'Afrique
a) Les concours financiers : une contraction confirmée
Les
concours financiers, rappelons-le, participent au soutien des programmes
d'ajustement structurel mis en oeuvre par les pays bénéficiaires,
pour équilibrer leurs finances publiques. En contrepartie d'un soutien
de la communauté des bailleurs de fonds à l'équilibre de
leurs budgets et de leurs balances de paiements courants, les pays sous
ajustement structurel s'engagent à respecter les objectifs inclus dans
le document cadre de la politique économique élaborée par
les autorités nationales avec l'aide des services du FMI et de la Banque
mondiale et actualisée, sur une période glissante de trois ans.
Les financements d'ajustement structurel prennent deux formes :
- les dons en faveur de l'ajustement structurel pour les pays les moins
avancés ;
- les prêts pour les pays à revenu intermédiaire consentis
par l'Agence française de développement au nom et au risque de
l'Etat, à partir de ressources procurées par emprunts sur le
marché financier et bonifiées par l'article 20 du chapitre 41-43.
La forte régression des concours financiers s'explique par le
succès relatif des plans d'ajustement structurels en particulier en
Afrique de l'Ouest et l'importance, en conséquence des crédits
non consommés sur ces lignes budgétaires. Mais elle trouve aussi
son origine dans la volonté française de privilégier le
versement de l'aide dans un cadre multilatéral (FMI ou Banque mondiale).
Cette évolution appelle deux remarques :
- en premier lieu, l'évaluation des crédits pour 2000
paraît
très
limitative
au regard des besoins compte
tenu de la fragilité de la situation financière de certains pays,
- ensuite, la priorité accordée aux financements
multilatéraux risque de réduire la marge d'appréciation de
la France et sa capacité à faire mieux reconnaître les
besoins de nos partenaires africains.
L'aide budgétaire d'urgence, en principe destinée au financement
d'opérations exceptionnelles, a connu une
extension significative de
son champ d'utilisation
. Ainsi, les contributions au financement des forces
de maintien de la paix (ECOMOG, MISAB) émargent depuis peu aux dotations
prévues pour l'aide budgétaire d'urgence.
En outre, l'aide budgétaire désormais inscrite au budget du
ministère des affaires étrangères n'est pas
dédiée à la zone de solidarité prioritaire en
particulier. En 1999, le chapitre 41-43, article 10, a ainsi pu être
mobilisé pour deux opérations relatives à des
pays
extérieurs à la zone de solidarité prioritaire
;
- 0,6 MF pour l'envoi d'observateurs aux élections législatives
en Indonésie dans le cadre d'un processus international de soutien sous
l'égide du Programme des Nations Unies pour le développement
(PNUD) ;
- 45 MF à la Macédoine pour l'aider à financer un
surcroît de dépenses à caractère social
générées par le conflit du Kosovo.
b) L'aide-projet : une progression sans commune mesure avec l'extension de la zone de solidarité prioritaire
Le
projet de budget pour 2000 se caractérise d'abord par un
transfert
des ressources
du Fonds spécial de développement à
l'agence française de développement et, d'autre part, par une
stagnation
des crédits.
.
Un transfert de ressources du Fonds d'aide et de
coopération à l'Agence française de
développement
Les autorisations de programme inscrites au Fonds d'aide et de
coopération rebaptisé Fonds de solidarité prioritaire
(FSP) se réduiront en 2000 de 43 %, tandis que les crédits
de paiement baissent de 46 %. Toutefois, les crédits correspondants
sont transférés au chapitre 68-93 (nouvellement
créé pour mieux identifier les ressources mises en oeuvre par
l'Agence française de développement et précédemment
inscrites dans le cadre d'un article au sein d'un chapitre).
Ce transfert est inscrit dans la logique même de la réforme dans
la mesure où l'AFD
prend désormais en charge les projets
relatifs aux infrastructures sociales
(éducation et santé).
En outre, ce transfert de ressources tire aussi peut-être les
conséquences de la plus grande efficacité de l'AFD dans la mise
en oeuvre de l'aide au développement.
Toutefois, ce transfert n'est pas indifférent au regard des
procédures de contrôle parlementaire. Certes les parlementaires
sont représentés au sein du comité directeur du FAC et du
Conseil de surveillance de l'AFD. Cependant, la première de ces
instances se prononce sur tous les projets qui lui sont soumis tandis que la
seconde n'approuve que les projets supérieurs à 10 millions
d'euros. Il paraît donc très souhaitable que les
crédits
transférés du FAC à l'AFD continuent de faire l'objet d'un
contrôle parlementaire
.
.
L'aide-projet : cible privilégiée de la
régulation budgétaire
La dotation dévolue aux projets de développement (FSP et AFD
confondus) progressent de 5,3 % alors même que la définition
de la zone de solidarité prioritaire a élargi à 23
nouveaux pays le bénéfice des moyens mis en oeuvre jusqu'à
présent dans les 37 pays du " champ ".
Par ailleurs, en 1999, les crédits ouverts au FSP ont de nouveau servi
de
variable d'ajustement aux mesures d'économie
décidées
par Bercy. Les autorisations de programme ont
été réduites de 15,3 % et les crédits de paiement,
diminués de 7,3 %. Ces annulations ont permis de dégager des
ressources pour l'aide humanitaire pour le Kosovo. L'engagement de la France
dans les Balkans a ainsi pesé sur l'aide accordée aux pays en
développement.
La régulation budgétaire est souvent justifiée par la
sous-consommation des crédits observée chaque année. Votre
rapporteur l'avait déjà souligné l'an passé :
il existe souvent en effet un
décalage entre l'instruction d'un
dossier au sein du Comité directeur du FAC et sa réalisation
effective
.
Les procédures de décision apparaissent excessivement
lourdes.
Souvent, la France promet son aide -à Cuba par exemple- et
l'engagement ne se concrétise que plusieurs années
après, au risque de perdre beaucoup de son intérêt. La
crédibilité de notre pays souffre de ces retards
répétés
.
Une plus
grande déconcentration des crédits
permettant
précisément de raccourcir les délais d'intervention
constitue sans doute une des voies nécessaires de la réforme.
En 1999, le montant total des enveloppes destinées aux crédits
déconcentrés s'est élevé à 82,5 millions de
francs. Le comité directeur ne s'étant réuni moins souvent
en 1999 que dans les années passées en raison de la mise en place
de la réforme, plusieurs décisions programmées doivent
encore obtenir l'approbation du Comité directeur (21,5 millions de
francs) voire même l'accord préalable du comité d'examen
(42 millions de francs).
.
La coopération décentralisée : une
priorité politique sans réels moyens financiers
Les crédits dévolus à la coopération
décentralisée passent de 39,9 millions de francs à 37,7
millions de francs. Cette nouvelle baisse dément la priorité
affichée par le Gouvernement, lors des rencontres nationales de la
coopération décentralisée, au cours desquelles cette forme
de coopération avait été reconnue comme un
" volet important de l'action internationale de la France ".
Le bilan de la coopération décentralisée en 1999
témoigne d'une forte concentration des projets sur quelques zones comme
l'Afrique ou certains pays tels que la Roumanie, la Pologne, la Hongrie et le
Vietnam.
L'intervention de l'Etat dans le cadre de
cofinancements
vise trois
objectifs principaux :
- permettre le " bouclage " d'opérations utiles, techniquement
bien étudiées mais dotées d'un financement
insuffisant ;
- manifester l'intérêt des pouvoirs publics pour une
opération ainsi " labellisée " susceptible
d'accroître la crédibilité d'une action aux yeux du
partenaire étranger ;
- inciter d'autres collectivités à s'engager dans de nouvelles
opérations dont la mise en oeuvre est souhaitée dans le cadre des
évolutions stratégiques décidées.
Par ailleurs, le renforcement institutionnel, la formation supérieure
d'étudiants et chercheurs et l'appui aux partenariats d'entreprises
constituent la priorité affirmée du ministère des affaires
étrangères dans le cadre des
contrats de plan
Etat-région
pour la période 2000-2006 avec, sur 7 ans, un
montant prévu de cofinancement de 95 millions de francs
. Un
dispositif institutionnel a par ailleurs été mis en place
à la faveur de la réforme sous la forme d'une mission pour la
coopération intergouvernementale au sein de la DGCID). Cette mission
dispose d'un bureau plus particulièrement chargé de la liaison
avec les collectivités locales françaises, leurs associations et
leurs partenaires en France et à l'étranger. Le cadre est
posé. Cependant les moyens financiers mis en oeuvre permettent-ils de
répondre aux ambitions affichées ? L'évolution du
budget pour 2000 ne paraît pas de ce point de vue de bon augure.