II. PANORAMA DES DOCUMENTS D'URBANISME
Le droit de l'urbanisme français repose sur deux piliers. Le premier est constitué par l'ensemble des dispositions de portée générale contenues dans le code de l'urbanisme. Le second est composé des divers schémas destinés à mettre en oeuvre sur l'ensemble du territoire les dispositions précitées, compte tenu des caractéristiques locales. Tel est, en particulier, l'objet des directives territoriales d'aménagement (DTA), des schémas directeurs et des plans d'occupation des sols (POS).
A. LES DOCUMENTS DE PLANIFICATION
1. La trop longue gestation des DTA
La
catégorie juridique des directives territoriales d'aménagement a
été créée par l'article 4 de la loi n° 95-115
d'orientation pour l'aménagement et le développement du
territoire. Ces directives, approuvées par décret en Conseil
d'Etat après avoir été élaborées par les
services déconcentrés de l'Etat sont destinées
à :
- déterminer, sur certaines parties du territoire, les orientations
fondamentales de l'Etat en matière d'aménagement et
d'équilibre entre le développement, la protection et la mise en
valeur du territoire ;
- fixer les principaux objectifs en matière de localisation des
grandes infrastructures de transport, de grands équipements et de
préservation des espaces naturels, des sites et des paysages.
La préparation des DTA s'effectue en deux temps, sous la direction d'un
" préfet coordonnateur ". Après une
phase
d'études préalables
, ce préfet est chargé
d'établir un rapport qui :
- précise les enjeux d'aménagement et de
développement spécifique du territoire ;
- dégage les orientations et les objectifs sur lesquels l'Etat
devra se prononcer ;
- statue sur le périmètre pertinent.
Au cours d'une phase d'élaboration, les services
déconcentrés de l'Etat prépareront, en association avec
les collectivités locales, un projet qui sera approuvé par
décret en Conseil d'Etat.
Selon les informations communiquées à votre rapporteur pour
avis, l'état d'avancement des projets de DTA est très
inégal.
La DTA relative aux
bassins miniers nord lorrains
va faire l'objet des
premières études préalables.
Si les études préalables concernant les six autres sites
(Alpes-Maritimes, aire métropolitaine marseillaise, estuaires de la
Loire et de la Seine, Alpes du Nord et aire urbaine lyonnaise)
sont
validées, on constate cependant que seules les DTA relatives aux
Alpes-Maritimes et à l'aire métropolitaine marseillaise ont,
selon les informations communiquées à votre rapporteur pour avis
"
progressé de manière significative
".
En ce qui concerne les deux estuaires, les mandats permettant d'engager la
procédure d'élaboration ont été récemment
adressés aux préfets coordonnateurs, tandis que les mandats
relatifs aux Alpes du Nord et à l'aire urbaine lyonnaise sont encore en
préparation.
Votre Commission des Affaires économiques souhaiterait vivement
connaître les délais dans lesquels seront publiées les
directives territoriales d'aménagement. En effet, leur contenu
conditionnera le développement des régions en cause et
l'existence même des documents d'urbanisme qui occupent une place
inférieure dans la hiérarchie des normes (schémas
directeurs, plans d'occupation des sols).
En outre, face à la constitution des agglomérations -qui jouiront
d'importantes compétences en matière d'urbanisme- il est
essentiel que l'Etat affirme une position claire sur tous les sujets qui
relèvent de sa compétence.
2. Un nombre toujours insuffisant de schémas directeurs
Les
schémas directeurs sont destinés à fixer les orientations
fondamentales de l'aménagement des territoires auxquels ils
s'appliquent, compte tenu de l'équilibre qu'il convient de
préserver entre l'extension urbaine, l'exercice des activités
agricoles et industrielles et la préservation de la qualité de
l'air, des sites et des paysages.
Au
1
er
juillet 1999, 219 schémas directeurs sont
approuvés
dont 73 sont en voie de modification, 69 en vigueur
après révision. En outre, 36 schémas nouveaux sont en
cours d'élaboration.
Les schémas directeurs n'ont pas connu la généralisation
qui aurait été souhaitable. Leur nombre, qui s'élevait
à 177 en 1983, n'a augmenté que d'à peine 25 % en
seize ans !
La surface qu'ils couvrent, 78.700 kilomètres carrés, ne
représente que 12 % du territoire national et ne concerne que
6.200 communes pour une population de 23,5 millions d'habitants (soit
40 % de la population française).
3. Une instabilité chronique des POS
Depuis
le 1
er
avril 1984, les permis de construire sont
délivrés par le maire au nom de la commune dans les communes
dotées d'un plan d'occupation des sols approuvé depuis au moins
six mois. Dans les autres communes, les permis de construire sont
délivrés par le maire au nom de l'Etat.
Au 1
er
juillet 1999, 15.330 communes étaient
couvertes par un POS
, ce qui correspond à une population totale de
52 millions de personnes. On observe cependant que
34,3 % des POS
approuvés sont en révision
.
Votre Commission des Affaires économiques se déclare
particulièrement préoccupée par l'instabilité des
documents de planification décentralisée. Elle souhaiterait
savoir si le projet de loi préparé par le Gouvernement portant
sur l'urbanisme, l'habitat et les déplacements annoncé par le
Premier ministre le 23 juin 1999 contiendra des dispositions de nature à
réduire l'ampleur de ce phénomène.
Elle observe, en outre, que
le nombre de cartes communales est encore trop
limité
puisque seulement
2.288 de ces documents
de
planification " souple "
sont en cours de validité
et
que 588 sont en préparation.
Il est souhaitable de favoriser l'utilisation des cartes communales qui
constituent une alternative au plan d'occupation des sols. Votre Commission des
Affaires économiques souhaiterait connaître les mesures que le
Gouvernement entend prendre à cette fin.
4. Une nécessité : mieux prendre en compte les problèmes des espaces périurbains
Votre
Commission des affaires économiques a, depuis deux ans,
préconisé une meilleure prise en compte des espaces
périurbains dans les documents d'urbanisme
2(
*
)
. Ces zones où résident
9 millions de Français sont encore trop souvent
considérées comme un " espace jetable " voué
à l'urbanisation. Or, les abords des villes ne doivent pas constituer la
" réserve foncière " des agglomérations.
Une véritable politique de développement durable suppose que les
documents d'urbanisme y jouissent d'une réelle pérennité.
Tel n'est malheureusement pas le cas puisque l'instabilité des plans
d'occupation des sols y est particulièrement forte. Faute d'instruments
de gestion intercommunale des sols, une " concurrence
foncière " s'y fait le plus souvent sentir. Certes, les
dispositions récemment adoptées relatives aux compétences
des " agglomérations " permettront de limiter partiellement
l'ampleur de ce problème. Beaucoup reste cependant à faire.
La Commission des affaires économiques souhaite qu'à
l'occasion de la discussion du projet de loi relatif aux transports, au
logement et à l'urbanisme, le Gouvernement propose des solutions
innovantes aux problèmes spécifiques posés par les espaces
périurbains.