EXAMEN DES ARTICLES
Article premier
Définition des biens
pouvant
faire l'objet de ventes volontaires
de meubles aux enchères
publiques
I.
Commentaire du texte du projet de loi
Cet article définit les biens sur lesquels portent les ventes
volontaires de meubles aux enchères publiques.
Dans le souci de protéger le commerce de détail, l'article
premier de la loi du 25 juin 1841 portant réglementation des ventes aux
enchères publiques prohibait
" les ventes au détail
volontaires de marchandises neuves
" et considérait comme bien
d'occasion "
tout bien qui à un stade quelconque de la
production ou de la distribution, est entré en la possession d'un
consommateur par tout acte à titre onéreux ou à titre
gratuit
".
L'article premier reprend la définition de 1841 en la précisant
sur deux points.
En premier lieu, il complète la définition du bien d'occasion
pour indiquer que le bien doit être entré en la possession d'une
personne pour son usage propre, ce qui exclut explicitement l'achat à
seule fin de revente.
Par ailleurs, il prévoit que par exception au principe selon lequel
elles ne peuvent porter que sur des biens d'occasion, les ventes volontaires de
meubles aux enchères publiques peuvent porter sur des biens neufs issus
directement de la production du vendeur si ce dernier n'est pas
commerçant ni artisan. Cette précision permet, ce qui, en
l'absence de disposition législative expresse, était jusqu'ici
possible à savoir, les ventes volontaires aux enchères publiques
de vins ou de chevaux ou encore les ventes d'ateliers d'artistes. En cela, le
projet de loi ne fait que confirmer une jurisprudence bien établie.
On rappellera, par ailleurs, que la jurisprudence a pu, dans certains cas,
donner une interprétation extensive de la notion de biens d'occasion,
considérant ainsi que pouvaient être réalisées des
ventes volontaires aux enchères de meubles sortant de l'atelier du
fabriquant et refusés par celui qui en avait fait la commande.
Le projet de loi a pour seul objet de réglementer les ventes volontaires
de meubles aux enchères publiques. Son article 52 précise que la
législation en vigueur n'est pas modifiée pour trois
catégories spécifiques de ventes aux enchères publiques.
Les ventes aux enchères publiques de marchandises en gros continueront
à être réalisées par des courtiers de marchandises
assermentés. De même, les ventes publiques de meubles appartenant
à l'État ou effectuées en la forme domaniale ainsi que
celles relevant du code des douanes demeureront régies par les
dispositions législatives et réglementaires en vigueur.
II. Position de votre commission
Votre commission a adopté à cet article
un amendement
qui,
outre une amélioration rédactionnelle, a pour objet de
préciser que les ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques ne peuvent porter que sur des biens vendus au détail. La
référence à la possibilité de procéder
à des ventes par lot -acceptée couramment dans la pratique- n'est
pas indispensable dans la mesure où elle pourrait introduire une
ambiguïté par rapport à la définition habituelle de
la vente en gros.
Article 2
Réalisation des ventes
volontaires
de meubles aux enchères publiques
I.
Commentaire du texte du projet de loi
Le projet de loi vise à assurer un équilibre entre la
liberté nécessaire au développement de
sociétés de ventes compétitives et la volonté de
conserver un encadrement législatif des ventes aux enchères
publiques, notamment dans le souci de protéger les consommateurs. Ainsi,
s'il prévoit que les ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques seront désormais réalisées par des
sociétés de ventes, il précise néanmoins que
"
l'activité de ces sociétés est
réglementée
".
• L'article 2 prévoit que les ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques sont effectuées par des
sociétés à forme commerciale
régies par la
loi n° 66-537 du 24 juillet 1966 sur les sociétés
commerciales.
Jusqu'à présent, les commissaires-priseurs pouvaient exercer leur
activité soit individuellement, soit dans le cadre de
sociétés civiles professionnelles, soit, depuis 1992, dans le
cadre de sociétés d'exercice libéral.
Les sociétés civiles professionnelles prévues par la loi
n° 66-879 du 29 novembre 1966 relative aux sociétés civiles
professionnelles ont été étendues aux
commissaires-priseurs par le décret n° 69-763 du
24 juillet 1969. Deux types de sociétés civiles
professionnelles étaient possibles : d'une part, la
société titulaire d'un office de commissaire-priseur et, d'autre
part, la société de commissaires-priseurs. Dans la
première, les associés exercent leur profession en commun alors
que dans la seconde, la société n'est pas titulaire d'un office
et chacun des associés exerce ses fonctions dans l'office dont il est
lui-même titulaire. Ces sociétés ne peuvent être
constituées qu'entre commissaires-priseurs exerçant dans un
même département.
Répondant à la nécessité d'adapter les conditions
d'exercice des professions libérales aux nouvelles conditions de la
concurrence économique, la loi n° 90-1258 du 31 décembre
1990 relative à l'exercice sous forme de sociétés des
professions libérales soumises à un statut législatif ou
réglementaire ou dont le titre est réglementé a
contribué à assouplir les règles d'exercice en
société de la profession de commissaire-priseur. Elle a ouvert,
sous certaines conditions la possibilité aux commissaires-priseurs de
constituer des sociétés d'exercice libéral de
commissaires-priseurs à forme commerciale régies par la loi du
24 juillet 1966 sur les sociétés commerciales
(sociétés anonymes, sociétés en commandite par
actions, sociétés à responsabilité limitée).
Par rapport aux formes de sociétés ouvertes par la loi de 1966,
la société d'exercice libéral présentait l'avantage
de rendre possible l'ouverture du capital à des associés autres
que les professionnels concernés. Néanmoins, dans le cas des
commissaires-priseurs, cette possibilité est demeurée
limitée puisque l'article 5 de la loi de 1990 a réservé la
détention de la majorité des droits sociaux de ces
sociétés aux professionnels exerçant en leur sein et a
énuméré de manière limitative les autres personnes
physiques ou morales pouvant détenir le complément du capital. En
pratique, cette disposition aboutit à limiter la participation aux
sociétés d'exercice libéral de commissaires-priseurs aux
seules personnes exerçant l'activité de commissaire-priseur,
à celles l'ayant exercée ou aux ayants droit de celles-ci.
Ces dispositions législatives ne permettaient donc guère dans les
faits aux commissaires-priseurs de constituer des sociétés
faisant largement appel à des capitaux extérieurs et susceptibles
de leur conférer une dimension commerciale et financière
suffisante.
Le projet de loi permet sur ce point une
évolution
nécessaire.
On soulignera qu'il ne pose aucune règle concernant le montant des fonds
propres ou encore la forme sociale de la société. Ainsi, ces
sociétés pourront être aussi bien des
sociétés unipersonnelles que des sociétés
cotées en bourse.
Néanmoins, il découle de l'article 3 que les
sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques seront des
sociétés à forme commerciale mais
à objet civil
.
Le projet de loi prévoit néanmoins
une exception au principe
selon lequel les ventes volontaires de meubles aux enchères publiques
sont faites par des sociétés commerciales
.
L'article 2 réserve, en effet, la possibilité aux
huissiers de
justice
et aux
notaires
de continuer à réaliser des
ventes volontaires de meubles aux enchères publiques selon les
règles qui les régissent sans pour autant constituer des
sociétés commerciales. D'après les chiffres
communiqués à votre rapporteur, les ventes
réalisées par les huissiers et les notaires ne
représentent qu'entre 2 à 3 % des ventes volontaires. Mais
il ne s'agit là que d'une moyenne, les chiffres variant sensiblement
selon les départements. Si l'activité de vente aux
enchères publiques est et demeurera accessoire pour les notaires, il
n'est pas exclu qu'elle prenne pour les huissiers, de plus en plus actifs en ce
domaine, une relative importance, susceptible sur certains segments de
marché comme les ventes de voitures de concurrencer celle des
sociétés commerciales. Néanmoins, ce risque semble minime,
voire inexistant, dans le domaine du marché de l'art.
• S'il ouvre aux sociétés commerciales les ventes
volontaires de meubles aux enchères publiques, l'article 2 du projet de
loi, reprenant le principe affirmé par l'article premier de la loi du
25 juin 1841 selon lequel "
nul ne peut faire des enchères
publiques un procédé habituel de l'exercice de son
commerce
", précise que "
l'activité de ces
sociétés est
réglementée
".
Position de la commission
Votre commission a adopté cet article sans modification.
Article additionnel après l'article
2
Application des dispositions du projet de loi
aux ventes
organisées à distance par voie électronique
Force
est, aujourd'hui, de constater que depuis la loi du 27 ventôse
an IX, les conditions dans lesquelles sont portées les
enchères ont profondément évolué, notamment au
cours des dernières années sous l'effet des progrès
accomplis par les moyens de communication.
Jusqu'à une date récente, les moyens utilisés pour porter
les enchères ont pu évoluer sans pour autant modifier les
conditions de conclusion de la vente. Le développement d'Internet est
aujourd'hui susceptible d'introduire une mutation sans précédent.
Il est, en effet, désormais possible de réaliser aujourd'hui des
ventes aux enchères entièrement électroniques. De telles
ventes aux enchères sont désormais couramment organisées,
notamment pour les véhicules automobiles d'occasion. Il s'agit dans la
plupart des cas non pas de ventes publiques, dans la mesure où leur
accès est en général réservé à
certaines catégories d'acheteurs (concessionnaires automobiles) mais de
ventes privées, qui n'entrent pas dans le champ d'application de ce
projet de loi. Mais, se développent également des services de
ventes aux enchères en ligne qui proposent aux acheteurs les biens les
plus divers sans exiger que ceux qui y participent remplissent une quelconque
condition. Ces ventes doivent donc être considérées comme
publiques.
Les ventes aux enchères publiques entièrement
réalisées sur Internet présentent l'avantage de pouvoir
mettre en concurrence des acheteurs répartis sur l'ensemble de la
planète au moindre coût. L'impératif consiste en ce domaine
à
assurer aux consommateurs une protection égale
à
celle d'une vente organisée selon les modalités traditionnelles.
La proposition de directive du Parlement européen et du Conseil relative
à certains aspects juridiques du commerce électronique dans le
marché intérieur transmise au Parlement dans le cadre de
l'article 88-4 de la Constitution (n° E 1210) comporte des
dispositions susceptibles d'intéresser les futures
sociétés de ventes volontaires.
L'article 9 précise en ce qui concerne le traitement par voie
électronique des contrats, que "
les États membres
veillent à ce que leur législation rende possibles les contrats
par voie électronique
". A cette fin, les
"
États membres s'assurent, notamment, que le régime
juridique applicable au processus contractuel n'empêche pas l'utilisation
effective des contrats par voie électronique ni ne conduise à
priver d'effet et de validité juridiques de tels contrats pour le motif
qu'ils sont passés par voie électronique
". La
proposition de directive prévoit plusieurs types de contrats pour
lesquels cette règle pourrait être écartée et
parmi lesquels ne figurent pas les ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques. Par ailleurs, fort opportunément, afin de
remédier à l'importante insécurité juridique qui
résulte en ce domaine de jurisprudences et de législations
nationales divergentes, elle précise que les prestataires de ces
services de la société de l'information doivent être soumis
uniquement au régime juridique de l'Etat membre dans lequel ils sont
établis (article 3).
Votre commission a considéré que de tels principes étaient
de nature à renforcer la sécurité juridique.
Les obstacles à la conclusion de contrats électroniques
liés essentiellement en droit français au régime de la
preuve écrite posé par l'article 1341 du code civil
n'existent pas en matière de ventes aux enchères publiques. Pour
celles-ci, la vente est parfaite et le prix dû dès le
prononcé de l'adjudication. Il n'existe pas en effet d'acte écrit
matérialisant l'accord entre le vendeur et l'acheteur. Par ailleurs,
aucune disposition du projet de loi n'impose au commissaire-priseur des
modalités spécifiques de désignation du dernier
enchérisseur. La seule difficulté réside dans la
vérification de la capacité juridique de l'auteur du message qui
n'est guère différente de celle que rencontrent quotidiennement
les commissaires-priseurs face aux enchérisseurs présents dans
une salle ou en cas d'enchères téléphoniques, cas
désormais fréquent dans les ventes aux enchères
prestigieuses attirant un public international. Certes, les services
d'enchères en ligne qui existent aujourd'hui ne concernent que des
objets de valeur modeste qui ne nécessitent guère d'exposition
préalable. Le problème se pose en des termes sensiblement
différents pour les oeuvres d'art d'une certaine valeur. Il est possible
d'envisager qu'il sera loisible à la société de ventes
d'organiser une exposition, soit virtuelle soit dans un lieu physique. Par
ailleurs, il sera souhaitable que les mesures de publicité soient
renforcées dans le cas de ventes électroniques.
Compte tenu des modalités de réalisation de la vente, il n'y a
donc guère d'hésitations à considérer que les
ventes aux enchères publiques peuvent se dérouler par voie
électronique ; les sociétés de ventes volontaires qui
opteront pour ce procédé devront respecter les mêmes
règles que celles en vigueur pour les ventes se déroulant dans
une salle des ventes. Votre rapporteur a souhaité éviter que
soient organisées par des prestataires de services établis en
France de fausses ventes privées électroniques susceptibles de
concurrencer l'activité des sociétés de vente et
échappant à la réglementation protectrice des droits des
consommateurs régissant les ventes publiques (garanties, description des
objets, etc.) mais également permettre aux sociétés de
ventes d'organiser de telles ventes.
Pour ces raisons, votre commission a adopté un
article
additionnel
précisant que les dispositions du projet s'appliquent
aux prestataires de services qui organisent des ventes volontaires de meubles
aux enchères publiques par voie électronique.
Article 3
Objet des sociétés de
ventes volontaires
I.
Commentaire du texte du projet de loi
Si les conditions d'exercice de la profession de commissaire-priseur sont
profondément modifiées dans la mesure où ces derniers
n'ont plus le monopole des ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques, qui sont désormais effectuées par des
sociétés à forme commerciale, l'objet même de ces
dernières ne diffère pas de la définition donnée
par l'article premier de l'ordonnance du 1
er
novembre 1945 de la
profession de commissaire-priseur : "
Le commissaire-priseur est
l'officier ministériel chargé de procéder, (...), à
l'estimation et à la vente publique aux enchères des meubles et
effets mobiliers corporels
. "
En effet, l'article 3 du projet de loi limite l'objet des
sociétés de ventes à l'estimation de biens mobiliers et,
selon une rédaction un peu restrictive, à la réalisation
de la vente aux enchères dans les conditions fixées par la loi.
Conformément au principe énoncé dans la loi de 1841
affirmant que "
nul ne peut faire des enchères publiques un
procédé habituel de son commerce
", ces ventes demeurent
donc soumises à un encadrement juridique très strict
destiné d'une part à garantir la transparence et la
sécurité des opérations et, d'autre part, à
éviter qu'elles ne deviennent un procédé commercial comme
un autre.
L'article 3 précise que les sociétés de ventes volontaires
agissent en qualité de mandataires du vendeur et n'ont donc pas d'objet
commercial. On rappellera que les commissaires-priseurs aux termes du second
alinéa de l'article premier de l'ordonnance de 1945 ne pouvaient
"
se livrer à aucun commerce (en leur) nom, pour le compte
d'autrui ou sous le nom d'autrui, ni servir directement ou indirectement
d'intermédiaire pour des ventes amiables
. "
L'article 3 du projet de loi s'inspire de cette rédaction pour interdire
aux sociétés de vente l'achat ou la vente pour leur propre compte
de biens proposés à la vente aux enchères publiques. Si le
projet de loi n'interdit pas explicitement aux sociétés de vente
de servir d'intermédiaire dans une vente amiable, la définition
de leur objet doit être interprétée comme le leur
interdisant.
Le projet de loi précise que cette interdiction s'applique
également aux dirigeants, associés et salariés de la
société. Cependant, l'article 3 prévoit la
possibilité pour les dirigeants, les associés ou les
salariés de la société, à titre exceptionnel, de
vendre par l'intermédiaire de la société des biens leur
appartenant sous réserve d'une mesure d'information consistant en une
mention dans la publicité. Cette disposition est justifiée par le
souci que les intéressés ne soient pas contraints, pour
réaliser de telles opérations, de se tourner vers des
sociétés concurrentes.
II. Position de votre commission
Votre commission a adopté à cet article
un amendement
qui
supprime la possibilité ouverte à titre exceptionnel aux
dirigeants, salariés ou associés des sociétés de
ventes de vendre par leur intermédiaire des biens leur appartenant en
propre. Cette exception pourrait en effet, être source de dérives
susceptibles de porter atteinte au principe légitime posé
à cet article.
Article 4
Agrément des
sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques
I.
Commentaire du texte du projet de loi
Traduisant la volonté de maintenir un encadrement juridique des ventes
aux enchères publiques, l'article 4 du projet de loi prévoit
pour les sociétés de ventes volontaires un
régime
d'agrément
.
Seules pourront exercer les sociétés agréées par le
conseil des ventes volontaires de meubles aux enchères publiques dont
les compétences et la composition sont définies par les articles
16 à 20 du projet de loi.
Afin d'obtenir l'agrément, les sociétés doivent
présenter des garanties suffisantes, notamment en ce qui concerne leur
organisation, leurs moyens techniques et financiers, l'honorabilité et
l'expérience de leurs dirigeants ainsi que les dispositions propres
à assurer la sécurité des opérations.
Hormis l'absence de conditions concernant la composition et le montant du
capital des sociétés de ventes, cette rédaction est
calquée sur celle de l'article 4 de la loi n° 88-70 du 22 janvier
1988 sur les bourses de valeur qui prévoit l'agrément des
sociétés de bourse par le conseil des bourses de valeurs.
II. Position de votre commission
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Article 5
Obligations des
sociétés de
ventes volontaires
de meubles aux enchères publiques
I.
Commentaire du texte du projet de loi
Cet article assigne aux sociétés de vente trois obligations qui
constituent autant de garanties pour leurs clients.
• En premier lieu, et il s'agit là de la principale innovation
introduite par cet article, les sociétés de ventes, quelle que
soit leur forme, devront désigner un commissaire aux comptes et un
commissaire aux comptes suppléant. On rappellera qu'en règle
générale, la désignation d'un commissaire aux comptes
n'est obligatoire que pour les sociétés qui font appel public
à l'épargne ainsi que pour celles qui atteignent une certaine
dimension économique, c'est-à-dire celles pour lesquelles
à la clôture de l'exercice, un des trois seuils suivants est
dépassé : dix millions pour le total du bilan, vingt
millions pour le chiffre d'affaires hors taxe, cinquante salariés.
Cette obligation, destinée à assurer un contrôle du
fonctionnement de la société, ne pourra que
bénéficier aux clients pour lesquels elle constituera une
garantie.
• Par ailleurs, les sociétés de ventes seront tenues de
contracter une assurance couvrant leur responsabilité professionnelle.
Cette obligation qui s'appliquait aux commissaires-priseurs exerçant
à titre individuel était également prévue pour les
commissaires-priseurs exerçant dans des sociétés
d'exercice libéral par l'article 43 du décret n° 92-1449 du
30 décembre 1992 précité pris pour l'application à
la profession de commissaire-priseur de la loi du 31 décembre 1990 et
pour les commissaires-priseurs exerçant dans le cadre de
sociétés civiles professionnelles, par l'article 54 du
décret n° 69-763 du 24 juillet 1969 précité pris
pour l'application de la loi du 29 novembre 1966 relative aux
sociétés civiles professionnelles.
Jusqu'à présent, les commissaires-priseurs
bénéficiaient d'un mécanisme de garantie mutuelle de leur
responsabilité professionnelle organisé au sein des
compagnies : la bourse commune de compagnie prévue à
l'article 11 de l'ordonnance du 2 novembre 1945. La bourse commune garantissait
la responsabilité professionnelle de tous les membres de la compagnie,
" sans pouvoir opposer aux créanciers le bénéfice
de discussion et sur la seule justification de l'exigibilité de la
créance et de la défaillance du commissaire-priseur
".
Elle était financée par des contributions des
commissaires-priseurs proportionnelles aux produits de leur charges. Compte
tenu de la nouvelle organisation des ventes volontaires de meubles aux
enchères publiques désormais confiées à des
société de ventes, le maintien d'un tel système, qui a
déjà montré ses limites dans le cadre actuel, est exclu.
• Enfin, la société doit justifier de l'existence dans un
établissement de crédit d'un compte destiné exclusivement
à recueillir les fonds détenus pour le compte d'autrui ainsi que
d'une assurance ou d'un cautionnement garantissant la présentation des
fonds.
II. Position de votre commission
Votre commission a adopté cet article sans modification.
Article 6
Information du conseil des ventes
volontaires de meubles aux enchères publiques
I.
Commentaire du texte du projet de loi
Cet article précise les conditions dans lesquelles les
sociétés de vente informent le conseil des ventes volontaires de
meubles aux enchères publiques des modalités d'organisation des
ventes.
Les sociétés de vente doivent fournir toutes précisions
utiles sur les locaux où ont lieu de manière habituelle les
expositions et les ventes qu'ils organisent. Cependant, les ventes pourront
être organisées et se dérouler en d'autres lieux, à
condition que le conseil en ait été informé
préalablement.
Bien que le projet de loi abandonne le principe de la compétence
territoriale des commissaires-priseurs posé par l'article 3 de
l'ordonnance du 26 juin 1816
8(
*
)
,
cet article consacre la pratique actuelle qui veut que les ventes aux
enchères se tiennent toujours dans les mêmes lieux, à
savoir les hôtels des ventes.
Le projet de loi impose donc aux sociétés deux obligations :
d'une part, les sociétés de vente devront informer le conseil des
ventes des lieux où se tiennent les ventes, d'autre part celles-ci
devront habituellement tenir leurs ventes dans des locaux qui seront toujours
les mêmes sous réserve du choix d'un autre lieu dont le conseil
devra être informé.
II. Position de votre commission
Votre commission a adopté
un amendement
qui, outre une
simplification de la rédaction proposée par le projet de loi,
tend à prévoir une information du conseil de ventes en cas de
ventes aux enchères se déroulant par voie électronique.
Article 7
Obligations pour les
sociétés de ventes volontaires
de meubles aux enchères
publiques
d'avoir en leur sein un commissaire-priseur
I.
Commentaire du texte du projet de loi
Bien que le projet de loi prévoit la disparition des offices de
commissaires-priseurs et l'ouverture du marché des ventes publiques
à des sociétés de ventes, le gouvernement ne propose pas
pour autant de remettre en cause
le rôle des commissaires-priseurs
en matière de réalisation des ventes volontaires aux
enchères publiques.
En effet, l'article 7 pose l'obligation pour les sociétés de
ventes de compter au moins une personne remplissant les conditions pour exercer
l'activité de commissaire-priseur parmi leurs dirigeants, leurs
associés ou leurs salariés.
Cette obligation trouve son fondement dans l'article 8 qui précise
que seule celle-ci est habilitée à diriger la vente et à
procéder à l'adjudication.
Sur ce point, la discussion était permise. L'article 2 du projet de loi
confiant l'organisation et la réalisation des ventes aux enchères
publiques à des sociétés de vente, il aurait pu être
envisagé de suivre l'exemple britannique. On rappellera qu'en
Grande-Bretagne aucune qualification spéciale n'est exigée pour
exercer le métier d'
auctioneer
. Néanmoins, compte tenu des
conséquences juridiques importantes qu'entraîne l'acte
d'adjudication, il a été considéré qu'il
requérait un savoir-faire particulier et que, dans le souci d'assurer la
sécurité juridique des ventes, ces dernières devaient
être confiées à ceux qui ont acquis une compétence
spécifique en la matière. Sur ce point, la législation
française se rapprochera du droit allemand qui impose au
veirsteigerer,
équivalent du commissaire-priseur, d'être
agréé par l'administration et de justifier de connaissances
spécifiques.
Les conditions d'accès à la profession de commissaire-priseur
sont précisées par le décret n° 73-541 du 19 juin
1973. Ce dernier a été modifié par le décret
n° 90-1210 du 21 décembre 1990 relatif aux conditions
d'accès à certains offices publics et ministériels afin de
transposer la directive du Conseil 89-48 CEE du 21 décembre 1988
relative à un système général de reconnaissance des
diplômes d'enseignement supérieur qui sanctionnent des formations
professionnelles d'une durée minimale de 3 ans. La condition de
nationalité française n'est, depuis cette date, plus
exigée pour l'accès à cette profession. L'article 5-1 du
décret de 1973 précise les conditions que doivent remplir les
ressortissants de l'Union européenne pour avoir accès à la
profession de commissaire-priseur. Ce décret devra être
profondément remanié une fois le projet de loi
définitivement adopté, notamment en ce qui concerne les
modalités d'accès à la qualification professionnelle et de
nomination des commissaires-priseurs.
II. Position de votre commission
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Article 8
Modalités de
l'adjudication
I.
Commentaire du texte du projet de loi
Cet article précise sur plusieurs points les modalités de
l'adjudication.
• Comme nous l'avons souligné plus haut, les personnes
remplissant les conditions pour exercer l'activité de
commissaire-priseur demeurent seules compétentes pour procéder
aux opérations d'adjudication qu'imposent les ventes volontaires de
meubles aux enchères publiques. Ce monopole recouvre la direction de la
vente, la désignation du dernier enchérisseur comme
adjudicataire, la rédaction du procès-verbal de la vente et,
éventuellement, le retrait d'un objet de la vente.
• Reprenant l'obligation posée par l'article 13 de l'ordonnance du
26 juin 1816 et précisée par l'article 11 du décret
n° 85-382 du 29 mars 1985, le projet de loi prévoit que le
commissaire-priseur doit rédiger un procès-verbal.
Jusqu'ici, la jurisprudence a considéré que le
procès-verbal du commissaire-priseur était un acte authentique
dont les énonciations relatives aux faits que le commissaire-priseur a
lui-même accomplis ou qui se sont passés en sa présence
dans l'exercice de sa profession font foi jusqu'à inscription de faux
(Paris, 16 mars 1981). Cela ne sera plus le cas dans la mesure où les
commissaires-priseurs perdent leur qualité d'officiers publics. En
effet, l'acte authentique est défini par l'article 1317 du code civil
comme "
celui qui a été reçu par officiers publics
ayant le droit d'instrumenter dans le lieu où l'acte a été
rédigé, et avec les solennités requises
".
Le projet de loi précise que le procès verbal mentionne les nom
et adresse déclarés par l'adjudicataire, l'identité du
vendeur, la désignation de l'objet ainsi que son prix constaté
publiquement.
• Par ailleurs, afin d'aligner les conditions de concurrence des
sociétés de ventes françaises sur leurs homologues
étrangers, l'article 8 ouvre une possibilité à laquelle
peuvent recourir les maisons de ventes anglo-saxonnes et jusque-là
prohibée en France en vertu du deuxième alinéa de
l'article 1
er
de l'ordonnance de 1945 qui interdisait aux
commissaires-priseurs de se livrer à tout commerce comme de servir
d'intermédiaire à des ventes amiables.
Le projet de loi prévoit que dans les huit jours suivant la vente, le
vendeur pourra vendre de gré à gré, les biens
déclarés non adjugés à l'issue des enchères.
Deux conditions sont posées par l'article 8. La transaction ne sera
précédée d'aucune exposition ni publicité. Par
ailleurs, la vente ne pourra être faite à un prix inférieur
à l'enchère atteinte lors du retrait de la vente. Le projet de
loi précise que la transaction fait l'objet d'un acte annexé au
procès-verbal de la vente aux enchères.
L'article 8 permet en pratique que quelques jours après la vente, le
bien soit vendu à un prix au moins égal au montant de la
dernière enchère à un acquéreur qui peut ne pas
être le dernier enchérisseur. Dans cette hypothèse, ce
dernier se trouve en quelque sorte floué, un autre acquéreur
pouvant acheter à sa place et au prix qu'il était lui-même
prêt à payer.
Votre commission n'a pas souhaité remettre en cause le principe de ces
ventes de gré à gré, à l'issue d'une vente aux
enchères. En effet, ces ventes, parfois réalisées
aujourd'hui en France en toute illégalité, sont couramment
pratiquées par les maisons de ventes anglo-saxonnes. Pour les vendeurs,
elles présentent l'avantage de " donner une seconde chance "
à un bien qui, non adjugé, ne pourrait être à
nouveau mis aux enchères publiques avant quelques années. Priver
les sociétés de ventes françaises de cette
possibilité serait susceptible de les handicaper face à la
concurrence des maisons de ventes internationales.
Cette transaction n'en est pas pour autant un acte de commerce. Dans la mesure
où elle fait l'objet d'un acte annexé au procès-verbal de
la vente, elle suit le même régime que les ventes aux
enchères, notamment en ce qui concerne le régime de
responsabilité et le droit de préemption que peut exercer l'Etat
en vertu de l'article 87 de la loi du 31 décembre 1921 portant
fixation du budget général. Si ce n'était pas le cas,
cette vente pourrait constituer un obstacle à l'exercice par l'Etat de
son droit de préemption. En effet, aux termes de l'article 37 de la loi
du 31 décembre 1921 portant fixation du budget général de
l'exercice 1922 "
la déclaration faite par le ministre des
beaux-arts qu'il entend éventuellement user de son droit de
préemption sera formulée , à l'issue de la
vente
(...) ". Or, par définition, s'il n'y a pas
d'adjudicataire, il ne pourra y avoir décision de se subroger. Il
importe donc de considérer que celui qui achète à l'issue
de la vente est adjudicataire du bien, à charge pour l'Etat, s'il est
intéressé par le bien en cause de s'enquérir auprès
de la société de ventes d'une éventuelle vente de
gré à gré.
II. Position de votre commission
Votre commission a adopté à cet article
deux
amendements
.
• Le premier pour des considérations d'ordre pratique porte
à quinze jours la période pendant laquelle le vendeur peut vendre
de gré à gré son bien par l'intermédiaire de la
société de ventes.
• Le second amendement a pour objet de mieux encadrer la
possibilité de " vente après la vente " ouverte par le
troisième alinéa de cet article, qui doit concilier deux
impératifs contradictoires, d'une part, l'intérêt du
vendeur, et donc indirectement celui de la société de vente, et,
d'autre part, la protection du dernier enchérisseur.
Dans le souci de garantir les droits de ce dernier, votre commission a
souhaité préciser qu'en cas de " vente après la
vente ", la société de ventes devrait, s'il était
connu, l'informer.
Par ailleurs, il prévoit qu'en cas de retrait pour absence
d'enchères, le bien pourra également faire l'objet d'une vente de
gré à gré. Dans ce cas, le bien ne pourra être vendu
à un prix inférieur au montant de la mise à prix.
Article 9
Tenue d'un registre et d'un
répertoire par les sociétés de ventes volontaires aux
enchères publiques
I.
Commentaire du texte du projet de loi
L'article 9 précise que s'appliquent aux sociétés de
ventes volontaires les prescriptions des articles 321-7 et 321-8 du code
pénal destinées à prévenir le recel.
L'article 321-7 du code pénal dispose qu'"
est puni de six mois
d'emprisonnement et de 200 000 F d'amende le fait, par une personne dont
l'activité professionnelle comporte la vente d'objets mobiliers
usagés ou acquis à des personnes autres que celles qui les
fabriquent ou en font le commerce, d'omettre, y compris par négligence,
de tenir jour par jour, dans des conditions prévues par décret en
Conseil d'Etat, un registre contenant une description des objets acquis ou
détenus en vue de la vente ou de l'échange et permettant
l'identification de ces objets ainsi que celle des personnes qui les ont vendus
ou apportés à l'échange
" et qu'"
est
puni des mêmes peines le fait, par une personne, à l'exception des
officiers publics ou ministériels, qui organise, dans un lieu public ou
ouvert au public, une manifestation en vue de la vente ou de l'échange
d'objets visés à l'alinéa précédent,
d'omettre, y compris par négligence, de tenir jour par jour, dans des
conditions prévues par décret en Conseil d'Etat, un registre
permettant l'identification des vendeurs. Lorsque l'activité
professionnelle définie au premier alinéa est exercée par
une personne morale, ou que l'organisateur de la manifestation prévue au
deuxième alinéa est une personne morale, l'obligation de tenir le
registre incombe aux dirigeants de cette personne morale
".
L'article 321-8 punit de la même peine le fait d'y porter des mentions
inexactes.
En outre, reprenant une obligation prévue par l'article 13 de
l'ordonnance du 26 juin 1816, l'article 9 précise que les
sociétés de ventes tiendront un répertoire sur lequel
elles inscriront leurs procès-verbaux.
II. Position de la commission
Votre commission vous propose d'adopter cet article sans modification.
Article 10
Formalités de
publicité
pour les ventes volontaires
de meubles aux enchères publiques
I.
Commentaire du texte du projet de loi
Jusqu'à présent, la loi était peu formaliste en ce qui
concerne les modalités d'organisation des ventes volontaires de meubles
aux enchères publiques et reconnaissait aux parties et aux
commissaires-priseurs une assez grande latitude en ce domaine notamment dans le
cadre du mandat confié par le vendeur au commissaire-priseur.
L'article 10 dans le souci d'assurer une meilleure information des
consommateurs limite la liberté contractuelle des parties sur deux
points, d'une part, la publicité à laquelle doit donner lieu une
vente aux enchères publiques et, d'autre part, le prix de réserve.
• Jusqu'à présent, la loi ne fixait pas pour les ventes
volontaires de formalités spécifiques de
publicité
.
Ces dernières étaient définies par les parties, la
jurisprudence considérant qu'une publicité insuffisante ou
réalisée dans de mauvaises conditions pouvait engager la
responsabilité du commissaire-priseur ou du moins pouvait permettre
à l'acheteur de la mettre en oeuvre plus facilement.
L'article 10 précise que chaque vente donne lieu à une
publicité qualifiée, selon une formule quelque peu
imprécise, d'"
appropriée
" ; les mentions
devant y figurer seront fixées par décret.
• En outre, l'article 10 définit le
prix de réserve
et son montant. Consacrant une pratique usuelle, le projet définit le
prix de réserve comme le prix arrêté par le vendeur
en-dessous duquel le bien n'est pas adjugé. Cependant, le projet de loi
précise que ce prix ne pourra être supérieur à
l'estimation du bien ou à l'estimation la plus basse si celle-ci
consiste en une fourchette de prix, figurant dans la publicité ou
annoncée publiquement par le commissaire-priseur. Cette disposition
permet d'éviter de priver d'effet les estimations qui, si le montant du
prix de réserve leur est supérieur, n'ont alors plus guère
de signification. Elle est inspirée par le
souci louable d'assurer la
transparence des opérations de vente.
II. Position de la commission
Votre commission a adopté à cet article
deux
amendements
.
• Le premier allège la rédaction des deux premiers
alinéas.
• Le deuxième est d'ordre rédactionnel.
Article 11
Possibilité pour les
sociétés de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques de garantir un prix d'adjudication minimal
I.
Commentaire du texte du projet de loi
Ouvrant aux sociétés de ventes françaises la
possibilité de recourir à une pratique en usage dans les pays
anglo-saxons, l'article 12 prévoit qu'elles pourront garantir un
prix
minimal d'adjudication
au vendeur. Cette faculté atténue pour
le vendeur le caractère aléatoire de ce procédé de
vente et constitue de ce fait pour les sociétés de ventes un
argument commercial. Comme le prix de réserve, il s'agit d'une
restriction à la fixation du prix par le libre jeu de l'offre et de la
demande, susceptible d'attirer la clientèle. Dans le souci
d'éviter qu'il ne fausse le jeu des enchères et puisse frustrer
de son acquisition la personne ayant enchéri à un prix
supérieur à l'estimation portée à la connaissance
du public mais inférieur au prix garanti, le projet de loi
précise à juste titre qu'il ne peut être supérieur
à cette estimation.
L'article 11 prévoit
selon un mécanisme d'une grande
complexité
que le bien sera adjugé au prix garanti, non pas
à la société de ventes, mais à un organisme
d'assurance ou à un établissement de crédit avec lequel
cette dernière aura contracté afin d'éviter de faire
exception à la règle imposée aux sociétés de
vente par l'article 3 du projet de loi prohibant l'achat pour la revente. Par
ailleurs, pour éviter les garanties trop complaisantes, le projet de loi
dispose que la société de ventes ne peut détenir aucune
participation dans l'établissement ou l'organisme avec lequel elle
contracte.
Votre rapporteur s'est interrogé sur la pertinence du choix
opéré par le projet de loi qui consiste à concevoir cette
possibilité commerciale dans le cadre du respect du principe
d'interdiction de l'achat pour la revente. En effet, on ne voit pas très
bien dans quelle mesure des organismes d'assurance ou des établissements
bancaires pourraient être intéressés par de tels contrats.
Il semblerait au demeurant que ceux contactés jusqu'ici par les
professionnels n'aient pas fait montre d'un grand empressement. En effet, les
objets ainsi acquis seront soit vendus par les établissements
concernés de gré à gré, négoce qui ne
correspond guère à leur vocation, ou bien conservés, ces
biens constituant à l'évidence un actif peu liquide dont la
valeur est susceptible de connaître des aléas au gré des
fluctuations du marché.
En outre, il convient de souligner que, lorsqu'elles recourent à une
telle pratique, les sociétés anglo-saxonnes contractent avec les
établissements de crédit de leur groupe, ce qui dans la
rédaction actuelle du projet de loi continuera à être
possible dans la mesure où les filiales françaises des maisons
anglo-saxonnes n'ont pas de participation dans les établissements
bancaires de leur groupe.
La solution retenue par le projet de loi ne semble guère offrir aux
sociétés de ventes françaises un avantage commercial qui
puisse être considéré comme comparable à celui dont
bénéficient les maisons de ventes internationales.
Néanmoins, elle répond à une attente de la profession et
votre commission n'a pas souhaité en remettre en cause le principe.
II. Position de la commission
Compte tenu de ces observations, votre commission a adopté
deux
amendements
destinés à simplifier le dispositif
proposé.
• Le premier amendement améliore la rédaction du premier
alinéa qui pose le principe de la possibilité ouverte aux
sociétés de ventes de garantir un minimal d'adjudication.
• Le second simplifie les conditions dans lesquelles cette faculté
est mise en oeuvre, en supprimant l'obligation de passer un contrat avec un
établissement de crédit ou un organisme d'assurance. Si le prix
garanti n'est pas atteint lors de la vente, la société de ventes
sera déclarée adjudicataire du bien. Celle-ci pourra, par
exception aux dispositions de l'article 3, la revendre aux enchères. Il
importe dans la pratique que, dans cette hypothèse, la
société soit déclarée publiquement adjudicataire du
bien afin que, s'il en manifeste la volonté, l'Etat puisse exercer son
droit de préemption et s'y subroger.
Article 12
Avance sur le prix
d'adjudication
I.
Commentaire du texte du projet de loi
L'article 12 prévoit la possibilité pour une
société de ventes volontaires de meubles aux enchères
publiques de consentir au vendeur une avance sur le prix d'adjudication.
Cette disposition, comme celles figurant aux articles 8 et 11 du projet de loi
prévoyant respectivement la " vente après la vente " et
la garantie d'un prix d'adjudication minimal, répond au souci du
gouvernement de permettre aux sociétés de ventes
françaises des pratiques comparables à celles de leurs
concurrents anglo-saxons.
En ce qui concerne les avances sur le prix d'adjudication, il importe de
souligner que les sociétés de ventes telles Sotheby's ou
Christie's ne les consentent qu'avec la plus extrême parcimonie, de
telles facilités n'étant dans les faits que très rarement
accordées.
Le projet de loi soumet cette faculté au respect de
deux
conditions
.
Les avances ne pourront porter que sur
40 % au plus de l'estimation
du bien. Cette limitation a pour objet de mettre les sociétés de
ventes à l'abri de la tentation consistant à accorder, afin
d'attirer les vendeurs, des avances trop hasardeuses. Cette précision
peut néanmoins surprendre. Il serait en effet envisageable, s'agissant
d'une facilité commerciale qui vraisemblablement ne sera accordée
qu'aux clients les plus fidèles ou pour les ventes les plus
prestigieuses, que le montant de ces avances soient arrêté entre
le vendeur et la société de ventes.
Il est pour le moins paradoxal que cet argument commercial soit accordé
au marché français et que dans le même temps la
portée en soit limitée. La justification de cette limitation est
d'autant plus mince que
le remboursement de l'avance doit être garanti
par un organisme d'assurance ou un établissement de crédit
.
Ainsi, s'il s'avérait que certaines sociétés de ventes
consentent de manière hasardeuse les avances, le coût des
opérations de garantie s'élèverait jusqu'à devenir
dissuasif.
A l'instar de ce que prévoit l'article 11 en matière de garantie
de prix d'adjudication, l'article 12 précise que la
société de ventes ne devra pas détenir des participations
dans l'établissement ou l'organisme qui accorde sa garantie.
II. Position de votre commission
Votre commission a adopté
deux
amendements
.
Dans le souci de simplifier le dispositif et de responsabiliser les
sociétés de vente, ces amendements suppriment les deux conditions
posées par le projet de loi à l'octroi d'avances.
• Le premier supprime la limitation du montant de l'avance qui sera
fixé librement par la société de ventes.
• Le second supprime l'obligation de garantir cette avance auprès
d'un organisme d'assurance ou d'un établissement de crédit.
Article 13
Paiement des biens vendus aux
enchères publiques
I.
Commentaire du texte du projet de loi
Cet article précise sur quatre points le régime du paiement des
biens vendus aux enchères publiques.
• En premier lieu, l'article 13 dispose que la société de
ventes est responsable à l'égard du vendeur et de l'acheteur du
paiement et de la délivrance des biens dont elle a effectué la
vente, toute clause qui vise à écarter ou à limiter sa
responsabilité étant réputée non écrite.
En ce qui concerne la responsabilité du paiement du prix, le projet de
loi confirme la jurisprudence qui avait étendu aux ventes volontaires un
principe affirmé par la loi pour les ventes judiciaires (Cass. Civ. I,
27 janvier 1981). L'article 53 de la loi n° 91-650 du 9 juillet 1991
portant réforme des procédures civiles d'exécution,
à l'instar de l'article 625 de l'ancien code de procédure civile,
précise que
" l'agent habilité par la loi à
procéder à la vente (...) est responsable de la
représentation du prix ".
En ce qui concerne la responsabilité de la délivrance des biens
adjugés, la jurisprudence a considéré, en effet, que
l'obligation de délivrance des marchandises vendues incombe
personnellement au commissaire-priseur qui a procédé à la
vente (Trib. Civ. Seine 21 novembre 1877). Bien que n'étant pas le
vendeur, cette solution apparaît logique dans la mesure où dans la
plupart des cas, l'acheteur ne connaît pas le vendeur véritable
des biens.
• Consacrant également un principe traditionnel en matière
de ventes aux enchères publiques, le deuxième alinéa
précise que les biens adjugés sont payés comptant.
Cependant, il prévoit une exception à ce principe en ouvrant la
possibilité à la société de ventes de
délivrer les biens dès lors que toute garantie lui est
donnée sur la solvabilité de l'acquéreur. Cette
faculté qui permet en pratique aux sociétés de ventes
d'offrir aux acquéreurs des facilités de paiement n'était
jusqu'ici pas interdite aux commissaires-priseurs. Ces derniers pouvaient en
effet consentir des facilités de paiement qui engageaient leur
responsabilité.
• Le troisième alinéa prévoit le cas où
l'adjudicataire ne paie pas le bien adjugé. Retenant la solution
traditionnellement appliquée, le projet de loi précise que le
bien est remis en vente à la folle enchère de l'adjudicataire
défaillant bien que dans la pratique cette disposition ne s'avère
guère favorable aux vendeurs.
• Enfin le quatrième alinéa précise que les fonds
détenus pour le compte du vendeur doivent être versés
à celui-ci au plus tard deux mois à compter de la vente.
II. Position de la commission
Votre commission a adopté à cet article
un
amendement
qui
modifie la rédaction du deuxième alinéa
afin de préciser que le bien pourra être délivré
dès lors que toute garantie a été donnée à
la société de ventes non pas sur la solvabilité de
l'acquéreur mais sur le paiement du prix. En effet, un acquéreur
peut être solvable sans pour autant vouloir acquitter le prix du bien
dont il a été déclaré adjudicataire.