II. LE PROJET DE LOI PORTANT RÉFORME DU CODE DE JUSTICE MILITAIRE : UNE NOUVELLE ADAPTATION DU DROIT PÉNAL MILITAIRE AU DROIT POSITIF
Malgré un champ d'application étroit, la
portée
du présent projet de loi dépasse l'objet qui lui avait
été imparti par l'article 229 de la loi du 4 janvier 1993. Il
vise, en effet, non seulement à
étendre aux justiciables du
droit pénal militaire les garanties désormais offertes, notamment
en matière de garde à vue et de détention provisoire,
aux justiciables du droit commun, mais aussi à poursuivre le
mouvement d'adaptation du droit pénal militaire au droit positif
,
dans la logique de la réforme de 1982.
De surcroît, le présent projet de loi, tout en
préservant les articles du code de justice militaire applicables en
temps de guerre
, tend à tirer les conséquences des
difficultés survenues du fait de l'
excessive complexité de
certaines règles de procédure au regard des contraintes d'une
armée désormais conçue pour la projection.
Tout en souscrivant à l'esprit général dans lequel
s'inscrit cette réforme, l'Assemblée nationale a souhaité
revenir sur des dispositions du projet de loi qu'elle a jugées
" paradoxales ", et qui reviennent, selon elle, à
" troubler la philosophie initiale "
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de ce texte, notamment à
l'extension des cas d'intervention du ministre de la défense.
A. LE TEXTE INITIAL DU PROJET DE LOI : UNE VOLONTÉ GÉNÉRALE DE SIMPLIFICATION ET D'HARMONISATION DU DROIT PÉNAL MILITAIRE
1. Un champ d'application limité
Le
présent projet de loi se caractérise par un champ d'application
relativement limité :
- ce projet ne concerne, en effet, que le
temps de paix
, et s'abstient
de modifier les dispositions du code de justice militaire valables pour le
temps de guerre, dont la présentation actuelle est héritée
de la loi du 21 juillet 1982 (voir infra, 3) ;
- la justice militaire vise une
population par nature
ciblée
: le code de justice militaire s'adresse, en temps de
paix, aux militaires de carrière et sous contrat, aux appelés du
contingent (jusqu'à la suspension de la conscription), à
certaines autres catégories définies par l'article 63
(personnes portées présentes sur le rôle d'équipage
d'un bâtiment de la marine ou le manifeste d'un aéronef
militaire), ainsi qu'aux personnels civils des forces armées, et aux
personnes à la charge des militaires, qui accompagnent le chef de
famille hors du territoire de la République. Si l'on se
réfère aux seuls effectifs militaires et aux personnels civils
" à la suite des armées " (sans tenir compte des
familles), la population potentiellement concernée n'est que de
440 206 personnes (dont, si l'on se réfère à la loi
de programmation 1996-2002, 83 023 civils et 357 183
militaires) ;
- en conséquence, l'
activité de la justice militaire
-qu'il s'agisse des chambres spécialisées des tribunaux de
droit commun ou des tribunaux aux armées
de Paris et de Baden-
paraît
relativement modeste
, si l'on se réfère aux
6 619 décisions de jugement rendues, dans ce domaine, en 1997 (166
pour le tribunal des forces armées siégeant à Paris, 75
pour le tribunal aux armées des Forces françaises stationnant en
Allemagne, et 5 702 pour les juridictions de droit commun).
Cette activité peut d'ailleurs être encore prochainement
réduite par la professionnalisation et, dans une moindre mesure, par la
dissolution des FFSA
, qui induira la
suppression du tribunal de
Baden.
Rappelons, à cet égard, que la dissolution des Forces
françaises stationnées en Allemagne est
prévue pour le
1
er
juillet 1999.
A cette date, les garnisons actuellement
occupées par ces forces auront été rendues, sauf celles de
Saarburg (garnison du 16
e
groupe de chasseurs, qui sera
rattachée à la brigade stationnée à Orléans)
et de Donaueschingen, où sera intégralement conservée la
Brigade franco-allemande.
Les effectifs stationnés en Allemagne passeront donc, avec la
dissolution des FFSA, de 14 180 en 1998
13(
*
)
à 3 685 après 1999
(3 368 militaires et 317 civils).