EXAMEN EN COMMISSION
Après la présentation par M. Jean Bizet,
rapporteur
pour avis, des crédits consacrés à l'environnement dans le
projet de loi de finances pour 1999, un large débat s'est
instauré.
M. Jean-Pierre Raffarin, président, est intervenu pour souligner les
graves menaces pesant sur les agences de l'eau du fait de l'instauration de la
TGAP, qui remet en cause leur gestion décentralisée
organisée en partenariat avec les collectivités locales et les
acteurs économiques.
M. Marcel-Pierre Cleach, après s'être déclaré
d'accord avec les conclusions du rapporteur pour avis et avoir
dénoncé le défaut de transparence dans le mode de
fonctionnement des associations -dont les actions menées localement
entraînent parfois des retards lourds de conséquences sur les
projets d'infrastructures-, s'est également vivement opposé
à l'instauration d'un fonds de concours supplémentaire à
la charge des agences de l'eau pour participer au financement de la police de
l'eau.
Il a dénoncé le risque de recentralisation du mode de gestion des
crédits de l'environnement induit par l'instauration de la TGAP, et a
regretté que les ressources affectées jusqu'alors à la
protection de l'environnement aillent désormais alimenter le budget de
l'Etat.
M. Gérard Cornu a dénoncé les effets pervers qu'aurait la
TGAP sur le dispositif des agences de l'eau, alors même qu'une bonne
gestion de cette ressource supposait plus de décentralisation, comme en
témoignaient les expériences positives menées par l'Agence
Seine-Normandie sur la protection de la nappe phréatique de la Beauce.
Il a jugé qu'en matière d'environnement, il fallait soutenir
l'action des élus locaux et leur donner les moyens financiers de faire
face aux obligations très lourdes résultant de la mise en oeuvre
des directives communautaires. Evoquant le problème de l'épandage
des boues résiduaires des stations d'épuration, qui reste une
solution moins coûteuse que l'incinération, mais à laquelle
les industries agro-alimentaires sont désormais très hostiles, il
a souhaité que le ministère de l'environnement engage des actions
de concertation entre les différentes parties prenantes pour
définir une solution acceptable par tous et supportable pour les
finances locales.
M. Jean Huchon
s'est déclaré préoccupé par
l'état d'esprit de certains défenseurs de l'environnement, qu'ils
soient au ministère ou dans les associations, qui refusaient de
travailler dans un esprit de concertation avec les élus locaux et les
acteurs du développement économique local, notamment en ce qui
concerne la désignation et la gestion des zones Natura 2000. Il
s'est déclaré très opposé à l'instauration
de la TGAP, qui remet en cause un processus de gestion
décentralisée de l'environnement.
M. Pierre André
a jugé que le projet de budget du
ministère de l'environnement ne résolvait pas deux
problèmes essentiels pour les collectivités locales, à
savoir la gestion des ordures ménagères et l'assainissement, qui
représentent des investissements très lourds, notamment pour les
communes rurales. Il a fait valoir que les mesures fiscales favorisant le tri
sélectif ne réglaient rien et qu'une véritable politique
des déchets devait définir ce qu'on entendait par
" déchet ultime ", redonner sa place à
l'incinération et résoudre le problème des boues
résiduaires des stations d'épuration. Il a enfin fait remarquer
qu'en 2002, le coût de mise en décharge contrôlée
serait quasiment équivalent à celui du traitement par
incinération.
Mme Anne Heinis a déclaré partager l'ensemble des opinions
émises contre le budget de l'environnement et s'est
étonnée de ce que l'on choisisse de renforcer les contrôles
avant même d'avoir donné aux responsables politiques et
économiques les moyens financiers nécessaires pour mettre en
oeuvre les obligations résultant des directives européennes en
matière d'eau, d'assainissement et de traitement des ordures
ménagères. Elle a considéré que le principe de
déconnexion entre la taxe et la réparation des atteintes à
l'environnement qui fondait la TGAP était très critiquable et
qu'en définitive cela permettrait à l'Etat de
récupérer les fonds gérés par les agences de l'eau.
S'agissant du rôle des associations, elle a jugé que certaines se
livraient à une politique systématique de désinformation,
largement relayée par les médias, ce qui était
profondément traumatisant, tant pour l'opinion publique que pour les
élus locaux, soucieux de l'intérêt général.
M. Gérard Le Cam a considéré que le budget de
l'environnement comportait des avancées positives mais s'est
déclaré très hostile à l'instauration de la TGAP,
qui portait atteinte à l'autonomie des agences. Il a condamné les
pratiques de certaines associations de protection de l'environnement qui, sur
des fonds publics, achetaient des plans d'eau ou des forêts pour les
soustraire ultérieurement à la pratique de la pêche et de
la chasse. Il a déclaré qu'en conséquence, le groupe
communiste, républicain et citoyen s'abstiendrait sur le vote de ce
budget.
M. Jean-Pierre Raffarin, président, est alors intervenu pour
déplorer qu'en certaines occasions on puisse avoir le sentiment d'une
confusion entre les objectifs défendus par les services du
ministère de l'environnement et ceux défendus par les
associations de protection de l'environnement, ce qui nuisait à la
crédibilité de ce ministère, qui en toute occasion devait
défendre l'intérêt général.
M. Rodolphe Désiré a fait part de ses hésitations sur le
contenu du budget de l'environnement, mais il a jugé qu'en
matière de développement économique local, l'action
systématique, tant des associations que parfois des administrations
locales au nom d'une doctrine écologique intransigeante, empêchait
dans certains cas la réalisation de tout projet, que ce soit dans le
secteur du tourisme ou en matière agricole. Il a évoqué
l'impossibilité d'installer en Martinique une usine de fabrication de
produits pour le bétail, ce qui freinait le développement de
l'élevage. Il a déclaré en conséquence s'abstenir
sur le vote du budget de l'environnement.
En réponse aux différents orateurs, M. Jean Bizet, rapporteur
pour avis, a salué l'unanimité des opinions émises et
souligné qu'en définitive la TGAP constituait une variable
d'ajustement pour permettre à l'Etat d'équilibrer son budget. Il
a rappelé que selon les chiffres transmis, la future écotaxe sur
le carbone et l'énergie pouvait rapporter entre 15 et 25 milliards
de francs.
Il a appelé l'attention sur le fait que dans le nouveau dispositif, les
subventions versées par l'Etat pour protéger l'environnement
seraient soumises à la règle du plafonnement communautaire. Il
s'est inquiété de l'accroissement du nombre de fonctionnaires du
ministère de l'environnement décidé pour 1999, alors
même que la France occupe déjà le deuxième rang
mondial s'agissant du poids de la fonction publique. En ce qui concerne le
traitement des ordures ménagères par incinération, il a
indiqué que le ministre de l'aménagement du territoire et de
l'environnement avait fixé la norme d'émission de dioxyne
à 0,1 nanogramme/m3 de fumée, mais il a jugé que le
discrédit jeté sur cette filière favorisait a contrario
des multinationales qui, grâce à la maîtrise de surfaces
foncières importantes, allaient pouvoir développer les centres
d'enfouissement technique.
Il a soutenu personnellement que la solution de l'incinération
était la moins mauvaise possible, en faisant valoir que le tri
sélectif ou le compostage ne pouvaient concerner qu'une infime part des
ordures ménagères. Il a suggéré que soit
organisée dans le cadre de la commission une journée d'auditions
sur le traitement des déchets, étant donné l'enjeu que
cela représente pour les collectivités locales. Après
avoir émis des doutes sur la réalité économique du
deuxième dividende, M. Jean Bizet, rapporteur pour avis, a jugé
que " trop de taxe écologique allait tuer la protection de
l'environnement ".
M. Jean-Pierre Raffarin, président, a fait valoir que la notion de
" double-dividende " lui paraissait peu pertinente, puisque
l'obtention du premier dividende -dissuader les pollueurs- empêchait
l'obtention du second, à savoir affecter les surplus de fiscalité
écologique à la baisse des prélèvements sociaux sur
le travail.
La commission, sur les propositions de son rapporteur pour avis, a alors
émis -les commissaires des groupes communiste républicain et
citoyen et socialiste s'abstenant-
un avis défavorable à
l'adoption des crédits de l'environnement inscrits dans le projet de loi
de finances pour 1999
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